Chapitre 20
Alors que John parle encore Quidditch avec ses amis en se disputant à grands renforts d'insultes sur la joueuse la plus sexy des Harpies, je tressaute sur mes bottines en cuir brun tout en pressant les gens à l'intérieur de venir nous ouvrir en frappant sans relâche contre la porte. Et au bout de quelques minutes d'impatience, la porte s'ouvre enfin sur mon bienfaiteur et soulagée de pouvoir m'échapper à la conversation ennuyante qui s'étirait sur le perron, je saute au cou de David pour lui montrer toute l'étendue de ma gratitude.
« Eh bien, moi aussi ça me fait plaisir de te voir, KitKat ! Mais tu t'es fait désirée ! Tout le monde était arrivé sauf toi !
-Demande-lui ! m'exaspéré-je en désignant John. Il a fallu qu'on boive un verre chez chacun de ses potes !
-Ouah, excuse, bébé, si mes potes ont le sens de l'hospitalité !
-Ah bah, vous êtes exactement où il faut ! leur annonce David, vous pouvez aller vous servir en ce que vous voulez !
-Merci, gros. »
Après un baiser rapide, John s'en va avec ses potes et s'enfonce dans la foule à la recherche d'une autre série de boissons alcoolisées.
« Je te débarrasse ? me propose David, tu vas crever de chaud avec ton manteau !
-Ah oui, merci, Davidou ! Où sont Freddy et Chris ?
-Oh, là-bas, t'inquiète, je les ai gardé près de moi rien que pour toi !
-Même Freddy, c'était rien que pour moi ?
-Bon... ok, non, mais ça te profite à toi aussi ! »
Je rigole et finis de me défaire de ma doudoune pour la lui tendre, et il l'expédie d'un coup de baguette où je-ne-sais-où dans son immense maison. Ah si, on avait une telle maison, je suis sûre qu'on pourrait tous avoir notre propre chambre ! Mais ce serait bien moins marrant que de partager ma chambre avec Lucy et Cindy !
Je suis David à travers la foule animée du salon, et en profite pour arranger mon long collier contre mon pull en laine beige et épousseter ma petite jupe rouge des quelques flocons de neige qui y sont restés accrochés et commençaient déjà à fondre. Mon sourire s'élargit à mesure qu'on se rapproche de Chris et Freddy qui discutent tranquillement dans un coin de la pièce.
« Oh, Cath ! me repère Fred, T'es enfin arrivée !
-Ouiii ! répondis-je, en les embrassant tous les deux sur la joue, on peut faire la fête à fond, maintenant !
-Oh, on t'a pas attendu, ironise Chris avec son air cynique, comme tu vois, on est à deux doigts d'un strip-tease sur la table-basse.
-Oh mais vous gênez pas ! les invite David, faisant rougir Freddy.
-Au fait, Cath, élude-t-elle le sujet, Henry te cherchait tout à l'heure.
-Ah oui ? rétorqué-je, en faisant la moue, bah il peut continuer à chercher...
-Y'a un truc bizarre entre vous, remarque Chris.
-Y'a rien du tout entre nous ! asséné-je sans une seconde de pause.
-Pas la peine de taper dans le dramatique, dit-il en levant les yeux au plafond, c'est juste qu'un jour, vous êtes amis, le suivant, tu l'envoies promener... C'est pas vrai, Fred ?
-Quoi ? Non, pas du tout ! réfuté-je, D'ailleurs, je sais même pas pourquoi il voudrait me parler !
-Ok, si tu le dis... »
Je croise le regard de Freddy et je vois bien que ça ne prend pas. Je ne sais même pas pourquoi je mens, ce sont mes meilleurs amis, et j'ai confiance en David, ils ne me jugeraient pas... trop. Et ils n'iraient pas le répéter, mais Henry et moi, c'est... spécial. Je ne peux pas en parler comme je parle de John. Parfois, quand j'attends des lettres qui n'arrivent pas et que je cherche son regard quand il évite le mien, je me dis même que c'est peut-être trop spécial.
oOoOoO
J'attrapais un gobelet de bière-au-beurre généreusement corsé au rhum lorsqu'une mains se pose sur moi dans le creux de mon dos, et, parmi toute l'odeur de nourritures et de boisson du buffet, je reconnais aussitôt le parfum qui tombe sur moi en une pluie olfactive bien familière. Alors, je me retourne sur Henry, mes lèvres en une ligne ferme et mes sourcils haussés, dessinant les contours amers de mes reproches. Il a l'audace d'arborer l'un de ses sourires de tombeurs.
« Qu'est-ce qu'ya, Henry ? Tu veux quelque chose ?
-Cath..., fait-il en ravalant son sourire, ok, je sais que tu m'en veux sûrement mais... viens, on va parler. »
Il m'attrape la main mais, se rappelant sans doute de tous les autres autour de nous, il remonte ses doigts autour de mon poignet. Je gonfle mes lèvres d'irritation, ma main encore chaude de son contact, et je bois mon verre en le suivant, remarquant que son dos est particulièrement mis en valeur par son t-shirt et que son jeans se charge à merveille du reste. Il emprunte les escaliers, me guidant le long des marches et ensuite, nous parcourons un couloir plein de belles photos. Je lâche sa main et m'arrête devant la photo mouvante de David, version miniature, qui montre joyeusement ses cadeaux de Noël à l'objectif. Oh, il est trop chou ! Il faut que Fred voit ça !
« C'est bon, cette chambre est vide, m'informe Henry près d'une porte grande ouverte, viens !
-T'étais moins pressé de me parler, l'autre jour ! remarqué-je en entrant dans la chambre.
-Arrête, c'est pas ça du tout ! » rétorque-t-il.
Il ferme la porte et je furète dans la pièce, me demandant à qui appartient cette chambre. Elle est bien trop propre et impeccablement rangée, sans la moindre touche de personnalité, pour que ce soit celle de David ! Ça doit être une chambre d'amis... en tout cas, le lit est immense !
« Ton frère était avec moi, tout le long, qu'est-ce que tu voulais que je fasse ? me demande Henry.
-Tu pouvais m'envoyer des lettres ! Venir à la maison ! Tu connais mon adresse, hein !
-Cath, ton frère l'aurait...
-Et qu'est-ce que ça peut faire ?! m'énervé-je en me retournant vers lui subitement, Qu'est-ce que ça peut faire si Jamie découvre qu'on est... qu'on est... »
Mais j'ai beau chercher, je n'arrive pas à trouver la fin de cette phrase. Qu'on est quoi ? Amis, pas amis, am... amants ? Non, ça paraît tellement bizarre. Je ne peux même pas prononcer sérieusement ce mot. Il soupire en me regardant et je le fixe, l'implorant presque des yeux d'éclaircir les choses, d'achever ma phrase. Il s'avance vers moi et me sourit avec tendresse.
« Tu vois, me dit-il, c'est pas si simple. James me TUERAIT s'il l'apprenait. Mais je voulais vraiment, vraiment te voir, promis.
-Moi aussi, répondé-je doucement, et je... je ne voudrais pas qu'il te tue... alors, d'accord. »
Il rigole et ses mains attrapent franchement les miennes, les entourant de cette chaleur si douce, et je souris en levant les yeux sur lui, maintenant qu'il est tout proche de moi. Nos doigts s'entrelacent et, dans un murmure amusé, il me demande s'il est pardonné. Je n'ai qu'à demander l'avis de toute cette volée d'abeilles qui virevoltent dans la ruche, retapissant mon ventre de leur miel brûlant, et je me dis qu'elles ont raison d'être si légères et heureuses, oui, finalement, ce qui compte c'est qu'on soit ensemble, maintenant !
Je libère mes mains et attrape son visage pour baisser sa bouche vers moi, et je l'embrasse avec toute mon euphorie, tout mon bonheur et toute la vibration chaude qui font gonfler, gonfler mon cœur. Il a bientôt ses doigts dans mes cheveux et mes mains glissent le long de sa gorge, puis se posent sur son t-shirt. Je sens la peau de son torse à travers, mais ce n'est pas assez, alors, tandis qu'on continue de s'embrasser, je passe mes mains sous son t-shirt pour toucher son dos ; sa peau est douce et ferme, et je soupire contre ses lèvres. Mais il s'est figé. J'ouvre les yeux pour tomber dans les siens, grands et alertes, marron et verts, et si, si alertes.
Je prononçais à peine son prénom qu'il retirait déjà d'un geste agile son t-shirt et mes yeux tombent sur ses tablettes de chocolat finement sculptées. Ni trop accentuées, ni trop imposantes, et je me mordille la lèvre en le regardant avec malice, tandis que mes doigts dansent contre sa peau comme s'il s'agissait d'un piano.
« Là, tu es vraiment pardonné ! » lui promets-je.
Avec un petit rire rauque, sa bouche se retrouve sur la mienne dans la seconde et l'une de ses mains chatouille ma nuque. Puis, sans que je n'ai même eu conscience de bouger, mes mollets se cognent contre le rebord du lit et je tombe en arrière, rebondissant sur le matelas en riant. Henry suit le mouvement sans difficulté alors qu'il se met à embrasser mon cou, et je ferme les yeux avec délectation, en enroulant mes jambes autour de sa taille. Et Merlin, j'ai tellement, tellement chaud... alors, j'enlève mon pull, l'envoyant au hasard et il me sourit d'une telle façon que je ne sais même plus où je suis. Il soulève un peu mon top, se baisse pour embrasser mon nombril et oh, il revient pour m'embrasser et attraper ma lèvre entre ses dents. Sa main est contre mes côtes et il doit sentir comme mon cœur cogne et cogne. Mais son souffle est court, alors, on est quitte.
Je pousse contre son épaule et le fais rouler sur le dos avant de l'embrasser plus encore. Puis, un bruit subit me fait me redresser et je me retourne vers la porte qui est grande ouverte sur...
« John !
-Putain ! PUTAIN ! rugit-il avant de partir. Je le savais, putain !
-John ! Attends ! »
Je bondis du lit -de Henry- et cours à la suite de John. Mon cœur bat si fort, mais désormais c'est douloureux. L'appréhension fait crisser tous mes nerfs. Je prends cependant une seconde pour me retourner vers Henry qui est toujours sur le lit, dressé sur ses coudes et toujours torse-nu, et sa coiffure pleine de gel complètement ruinée. Mais son visage est si dépité, là je comprends vraiment que non, c'est pas si simple. Nous deux, tout ça, là, ça a tout d'une erreur mais j'en avais envie, j'en ai envie, et je n'ai pas envie que ce soit une erreur. C'est fracassant, ces envies-là. Elles font bien des dégâts mais je m'en fiche, elles existent bien pour une raison.
Mais je referme la porte, quand même, en sortant de la chambre. John est tout au bout du couloir et je marche vers lui. Il me tourne le dos, se tient contre le mur du fond avec ses deux mains et je vois bien qu'il tremble de colère. Et ça y est, je tremble avec lui de nervosité, de tristesse aussi. Il est... important pour moi... il l'est aussi. Mais c'est différent, et je ne peux pas... je ne peux pas changer ça.
« Depuis combien de temps tu couches avec lui ?
-Je ne couche pas avec lui ! m'exclamé-je avec incrédulité.
-Oh, fais pas la meuf ! explose-t-il en faisant volte-face vers moi, c'était quoi ça ?!
-Ok... on... parfois, on... s'embrasse parfois, c'est vrai mais... c'est juste... !
-Y'a pas de « juste », Cath ! Y'a pas de « parfois » ! T'es ma copine, t'as pas à aller emballer un mec dés que j'ai le dos tourné, merde ! Ca te ferait quoi si je faisais la même chose avec d'autres filles ?
-Je... sais pas, répondé-je, si ça te fait plaisir, alors...
-Tu te fous de moi ? Putain de bordel... »
Il a une main sur la bouche, et m'observe comme si j'étais une alien. Et c'est sans doute ce que je suis, parce que je ne sais même pas ce que je ressens moi-même, alors essayer d'imaginer ce que lui peut ressentir... je n'ai même pas l'impression d'avoir fait quelque chose de mal ! J'étais heureuse, j'étais bien, j'étais vivante et libre, et pourquoi ne comprend-il pas ? Que je me fiche de ses règles ? Qu'il y a plus important. Que s'il veut embrasser une autre fille, alors il devrait pouvoir le faire. Si c'est ce qui le rend heureux, si ça lui fait gonfler le cœur comme un ballon de baudruche, si ça l'expédie au-dessus des nuages, si ça le fait rire et sourire pour un rien, alors Merlin, pourquoi ce serait si mal ? Pourquoi c'est si mal ?
Ses yeux suivent quelque chose derrière moi, acérés et empoisonnés, et je regarde par-dessus mon épaule. De nouveau complètement habillé, Henry est sorti de la chambre et nous regarde avant de s'en aller par les escaliers.
« Je m'en doutais depuis un bon moment, fait alors John et je me retourne à nouveau vers lui, mais je comprends pas, pourquoi t'es sorti avec moi alors que c'est lui que tu veux ?
-Parce que tu m'aimes, avoué-je.
-Ah ouais, et pas lui, c'est ça ? Donc en gros, tu sors avec moi parce que je t'aime et tu sors avec lui parce que tu l'aimes ?
-Non ! m'écrié-je, non ! Je l'aime pas ! Enfin... non! C'est juste, j'en avais envie, avec lui c'est différent !
-Ouais, j'vois le genre, t'inquiète pas. Et t'as voulu les deux. Sympa comme plan.
-Oui... peut-être, peut-être que c'est ce que j'ai voulu mais... John, je suis vraiment désolée, vraiment, assuré-je en m'avançant vers lui, je ne voulais pas te faire de la peine, tu... je voulais essayer avec toi et...
-Essayer avec lui aussi. »
Avec Henry, j'essaye pas quoique ce soit. Mais je ne dis rien et je le regarde à travers les larmes qui s'amoncellent dans mes yeux.
« Je me suis dit que peut-être t'étais... le bon, et que je ne le savais juste pas encore, et après, il y a eu Henry, et je me rends compte maintenant que c'était pas juste pour toi, mais...
-Tu peux pas tout avoir, Cath. Soit c'est lui, soit c'est moi, maintenant tu te décides. »
Il passe à côté de moi et ça pourrait être un courant d'air pour tout le froid que ça me fait. Je m'adosse contre le mur, me laisse glisser contre en le regardant s'éloigner et disparaître de la même façon que Henry, et je ne sais pas si c'est juste mon cœur qui me fait mal, ou les larmes, ou les tremblements, mais j'ai l'impression d'avoir trop eu et d'avoir trop perdu.
De beaucoup trop ressentir, et de toutes les mauvaises façons.
oOoOoO
Quand je redescends les escaliers, la fête est plus bruyante et les gens dansent sur leur chemin pour remplir à nouveau leurs verres. Le brouhaha et l'activité joyeuse chassent un peu mes idées noires, et je les observe un instant. C'est le nouvel an, et cette nouvelle est bonne. Tout a changé en à peine quelques instants, alors tout peut encore changer ; tout peut toujours changer, et oui, c'est une sacrée bonne nouvelle.
Près de la grande fenêtre qui donne sur la nuit noire, incroyable contraste avec la luminosité chaleureuse de la grande pièce, John écoute parler ses potes mais ses lèvres ne s'ouvrent que pour avaler le contenu de son verre. Je me passe la langue sur ma lèvre inférieure, me demandant s'il faut que je le rejoigne pour m'excuser une nouvelle fois, même si j'ignore bien ce que je pourrais bien lui dire pour effacer ce que j'ai fait. J'ai bien vu dans ses yeux, tout à l'heure, quand il est parti que c'était impossible, peut-être bien qu'il accepterait de sortir encore avec moi mais ça ne voudrait pas dire qu'il m'aurait pardonnée pour autant.
Puis, mes yeux tombent sur Henry qui a toujours ses cheveux dans tous les sens et qui participe activement à la conversation avec Dylan, mon frère, et d'autres garçons, d'autres filles. Personne ne pourrait deviner qu'il s'est passé quoique ce soit pour gâcher sa soirée et je me demande ce qu'il peut bien en penser de tout ça, si lui aussi a un tourbillon qui voyage de son cœur à son cerveau, pour finir par tout remuer tout au fond de ses tripes, parce que moi, je l'ai, et même s'il s'est calmé, je ne sais pas comment faire pour l'éteindre complètement. Des dizaines de pourquoi et des centaines de comment faire ? se chargent de le faire tourner éternellement. Mais il est doué pour les secrets, je l'ai bien remarqué, et il est doué pour tous les cacher en souriant et blaguant, et c'est effrayant, et pas d'une manière agréable.
Je croise alors le regard de Fred qui était assise avec David et son groupe d'amis dans un canapé, et j'esquisse un sourire qui se brise presque instantanément face à son air inquiet. Elle se lève du canapé, après s'être penchée vers son copain pour très certainement l'informer qu'elle vient me voir et revient, et je finis de descendre les escaliers alors qu'elle traverse le salon. On se rencontre à la dernière marche des escaliers, et aussitôt, elle me demande ce qui ne va pas. Je la regarde avec tristesse et ses yeux s'emplissent d'interrogations silencieuses.
"On peut aller discuter dans la cuisine, je crois qu'il n'y a personne, propose-t-elle.
-Je me suis disputée avec John, lâché-je alors qu'elle me guide vers la cuisine, et je crois même que c'est fini, maintenant.
-Vous deux ?"
Je hoche la tête et elle fronce les sourcils avant d'entrer dans la cuisine, et je l'y suis, après quoi, elle entre-baille un peu la porte de sorte à atténuer les échos de la fête qui nous reviennent. Mais ça me fait du bien, c'est toujours un rappel agréable que, même si c'est l'apocalypse dans ma tête, le monde ne s'est pas arrêté.
"A quel propos vous êtes-vous disputés ?
-A propos de quelque chose que je ne t'ai pas dit, que j'ai dit à personne, expliqué-je en m'asseyant sur un tabouret près de l'îlot central de la cuisine, parce que c'était censé rester secret.
-Secret ? s'interroge ma meilleure amie, Quelle sorte de secret ?
-Et bien..., cherché-je mes mots avec une grimace, le genre de secret qu'on partage avec une autre personne... qu'on embrasse.. beaucoup... et bien mieux que son copain ?"
Je regarde la réalisation se loger dans les yeux de Fred qui ouvre en grand la bouche d'hébétude, et elle vient s'asseoir avec empressement à côté de moi avant de s'écrier :
"Henry ?!
-Oui..., avoué-je en forçant un sourire, je sais, c'est bizarre ! Mais c'est arrivé au bal ! John était tellement NUL ! Et tout le monde s'amusait tellement et un moment, j'étais toute seule et déprimée, et d'un coup, Henry est arrivé et je l'ai embrassé... et après, ça a recommencé... pas mal de fois, et c'était génial alors... ça paraissait un bon type de secret. Mais maintenant, je me dis que si je ne t'en ai pas parlé, c'était sûrement que je me doutais que c'était mal.
-Je ne sais pas si c'est mal, me répond Fred sur un ton rassurant, mais même si ça l'est, tu peux m'en parler, tu peux me parler de tout, je ne te jugerais pas.
-Je sais, Fred, parce que t'es la meilleure amie possible ! assuré-je en posant mes mains sur ses genoux avec un sourire, mais... c'est tellement... indéfinissable, voilà, c'est indéfinissable. En fait, c'est ni bien, ni mal, c'est autre chose encore !
-Comment ça ? Essaye de m'expliquer, m'invite Fred avec complicité.
-D'accord ! rié-je en tournant mes yeux autour de nous, sur tout le mobilier de la cuisine, quand je suis avec John, je sais ce qui se passe, tout est clair. On va quelque part, il m'embrasse quand il faut et il voit mes parents, je vois ses amis, et tout le monde sait ce qui se passe. Mais avec Henry, quand on se voit, personne n'est là, et c'est toujours différent à chaque fois. C'est comme un rêve !
-Si tu veux mon avis, je pense que tu préfères le rêve..."
Je souris avec un acquiescement. Oui, c'est ce que je préfère.
"Donc, John vous a surpris ce soir ? devine-t-elle.
-Oui, à l'étage mais il a dit qu'il s'en doutait depuis longtemps, relaté-je en baissant les yeux, il a aussi dit que je voulais tout. Et c'est vrai, c'est exactement ce que je veux. Avec John, c'est tout de même une belle histoire, on est un vrai couple comme dans les films et on suit les étapes correctement, et avec Henry... c'est mieux mais c'est secret, une fois qu'on n'est plus physiquement ensemble, tout disparaît, et c'est vraiment comme si c'était juste un rêve.
-Alors qu'avec John, tout est tangible, comprend Fred, Mais tu ne l'aimes pas.
-Non, mais peut-être plus tard.
-Et Henry ? Tu l'aimes, non ?"
Sans rien dire, je la fixe comme si je pouvais chercher la réponse dans ses yeux. Fred, elle serait dans ma tête, dans mon cœur, elle saurait tout comprendre et j'ai envie qu'elle vienne faire le ménage. Juste un instant, pour que je puisse voir plus clair et enfin, prendre la bonne décision.
"Tu n'as pas besoin de répondre, ne t'en fais pas, Cath, me rassure-t-elle.
-Je ne sais pas quoi faire maintenant, Fred, c'est comme choisir entre la réalité et le droit de rêver. Comment on peut faire un choix pareil ?
-Mais Henry est réel aussi."
Oui mais pas nous deux.
