Chapitre 12

Le retour au bunker se fit dans un silence étrange un malaise diffus ponctué de mots convenus d'une banalité totale et sans rapport avec ce qui s'était passé, comme pour en amoindrir la portée, sinon la nier. Les frères Winchester n'eurent cependant pas l'impression que l'autre souhaitait enterrer l'événement, comme Sam, surtout, aurait pu s'y attendre après les positions que Dean avaient revendiquées, et même si l'aîné de la fratrie les avait partiellement reconsidérées avant que la violence du désir ait de nouveau raison de leur volonté. Ils rentrèrent à bon port un peu moins d'une heure plus tard et se souhaitèrent vaguement une bonne nuit d'un air emprunté avant de se séparer, sans aucune allusion à ce qui était arrivé.

Avant de dormir, et après la chasse qu'ils avaient menée, Dean eut besoin d'aller prendre une douche, là où Sam se contenta, de façon un peu surprenante, d'une toilette devant le lavabo de sa chambre. Le premier-né des Winchester compta une fois de plus sur le jet d'eau pour lui éclaircir les idées et refroidir un peu ses ardeurs, mais il s'aperçut bien vite qu'il n'atteindrait pas son but. Revenir là où tout avait vraiment débuté, sous cette douche où ils avaient franchi une ligne définitive, ne fut en effet sans doute pas la meilleure idée pour se détacher des élans qu'il désirait désespérément juguler, et Dean se retrouva rapidement assailli par l'ardent souvenir du corps de son frère qu'il avait si délicieusement possédé, au mépris de toutes les convenances et de tous les codes moraux. Il eut beau faire varier le débit de l'eau ou modifier sa température, ni le bruit de son écoulement ou celui de sa chute sur son crâne, ni la chaleur excessive ou le froid difficilement supportable, ne furent à même de détourner ses sens des muscles de Sam dont l'image persistait devant ses yeux, ni de son odeur qui revenait emplir ses narines, ni de la douceur de sa peau qui lui picotait de nouveau les doigts. Comme si Sam était physiquement présent, le sexe de Dean se dressait effrontément, aussi dur et chaud qu'au moment où il l'avait pénétré, et le plus âgé des deux frères en frissonnait intensément, ravagé - en dépit de sa pleine conscience de fauter de façon impardonnable - par le désir que leur incartade dans l'Impala sur le parking du bar avait attisé encore davantage.

Ce sentiment qui l'enflammait, il aurait voulu l'éprouver pour une femme, de celles qui l'avaient toujours attiré, sexy, aux formes provocantes, pas effarouchées, même un brin dominatrices. Mais ce qu'il avait ressenti avec Sam, le plaisir contre-nature qu'il avait pris avec lui, ici voici deux jours comme dans la voiture une heure plus tôt, il ne l'avait ressenti entre aucunes autres mains ni aucuns seins, aucune bouche, aucun sexe ni entre aucunes autres fesses. En regardant son pénis formidablement tendu et frémissant, il revit les doigts de son frère serrés autour, et sa fièvre grimpa d'un cran supplémentaire. Malgré toutes ses tentatives pour y résister, de plus en plus lasses tant elles lui apparaissaient vaines, il sentait l'envie de réitérer leur folie le mordre toujours plus, et en songeant au plaisir inattendu que Sam avait pris ici-même, lorsqu'il l'avait pénétré plus passionnément qu'il l'avait jamais fait avec quiconque, Dean finit par être gagné d'un irrépressible désir de luxure qui lui fit se poser des questions qui ne lui avaient jamais traversé l'esprit. Lui-même était-il capable d'exulter comme l'avait fait son frère ? Alors qu'il avait toujours jugé cette partie de son corps comme exclue du chemin vers la jouissance, il regarda le flacon de gel douche, posé sur le porte-savon et, en repensant avec honte à la façon dont il en avait usé sur le corps de Sam, il eut pourtant soudain l'intense curiosité de découvrir s'il pouvait, à l'image de son cadet, accéder de près ou de loin à ce plaisir improbable et perturbant qu'il lui avait donné. Il prit ainsi le flacon dans sa main gauche, en souleva le bouchon, chargea les doigts de sa main droite d'une bonne dose du liquide à la vague senteur de vanille, puis avec une certaine fébrilité il alla l'étaler au bas de son dos, glissant la main entre ses fesses pour faire bientôt mousser abondamment toute cette zone d'ordinaire invisible. Tout à sa tâche, il posa la bouteille et, en se concentrant sur le cœur de ce que dissimulaient ses fessiers toniques, ruisselants d'eau chaude, Dean en vint à aborder avec prudence les contours de son anus, qu'il explora méthodiquement. D'un doigt calme, il massa doucement les bords de l'orifice, à plusieurs reprises, puis en tapota la mire jusqu'à la sentir assouplie, plus réactive à la pression. Avec une pointe de perplexité, il s'aventura à laisser une phalange s'y glisser, sans s'étonner de ne pas rencontrer de difficulté en raison de la lubrification du savon, et tandis qu'il se pencha légèrement en avant sans même s'en rendre compte, il plongea son doigt plus profondément, jusqu'à sentir nettement la contraction de son sphincter qui lui interdit d'aller plus avant. Il ressortit en sentant son anus protester quelque peu et se redressa, comme s'il reprenait ses esprits après un moment de divagation. Il n'avait pris aucun plaisir particulier à son geste, mais l'expérience ne lui apparut sans doute pas assez concluante ou inédite car il décida de la renouveler. En soufflant l'eau qui lui dégoulinait sur le visage depuis ses cheveux trempés, il s'empara à nouveau du gel douche et s'en badigeonna les doigts avant de les ramener entre ses fesses, qu'il tendit en cambrant les reins pour faciliter l'accès à son anus. Il caressa la zone, étalant le fluide tout en en couvrant généreusement son orifice, et enfonça lentement son majeur, avec cette fois une opiniâtreté suffisante pour y faire disparaître ses deux premières phalanges malgré la résistance qu'il s'opposa à lui-même, ses entrailles exprimant leur indignation en se resserrant autour de l'intrus autant qu'elles en furent capables.

Il ne perçut rien de particulier, sinon un sentiment d'inconfort le long du bras et celui d'avoir entre les fesses quelque chose qui n'avait clairement rien à y faire. Sa perplexité fut d'autant plus forte qu'il repensa aux gémissements provocants de Sam pendant la sodomie, et resta carrément incrédule en songeant que la calibre de ce qu'il lui avait alors imposé était bien supérieur à celui du doigt qu'il venait lui-même de s'insérer. Têtu, il n'en resta pas là et chercha à s'enfoncer encore un peu avant de commencer à lentement aller et venir dans son anus, qui par réflexe se contracta plus encore en cherchant à se débarrasser de l'importun. Dean sentit les picotements le long de son périnée, la texture souple, presque moelleuse, de ses parois intérieures, puis dépité et se sentant ridicule il cessa brutalement, terminant à la hâte de se doucher avant d'aller dormir.

Du moins essaya-t-il, car le sommeil s'obstina longtemps à le fuir, son cerveau faisant le choix de ressasser ce qui s'était passé dans l'Impala plutôt que de se mettre en veille.

La nuit ne fut pas meilleure pour Sam, qui débarqua dans la cuisine après dix heures le lendemain. Dean, levé bien avant lui au mépris de leur rythme habituel, l'avait tout de suite soupçonné de chercher à l'éviter, ce dont il fut convaincu lorsqu'il le vit arriver déjà coiffé et habillé, et non pas en pyjama des poches sous les yeux. Même s'il n'en avait pas l'air, Sam n'avait pourtant dormi que trois ou quatre heures en toute fin de nuit, et était sorti de son lit il y avait moins d'une demi-heure, le temps d'aller prendre une douche fraîche pour tenter d'aborder la nouvelle journée dans des conditions acceptables. Lorsqu'il entra dans la pièce où planait une odeur de café chaud, il y vit son frère, assis à la table devant un journal, et tous deux se captèrent immédiatement d'un air fugace. Il fallait vite choisir le ton à donner à leur inévitable échange et, malgré un pincement un l'estomac, Sam suivit les seuls vœux que Dean avait clairement exprimés en évitant d'aborder le sujet qui occupait leurs pensées.
- Salut, dit-il en allant vers la cafetière. Les nouvelles sont bonnes ?

Il s'était efforcé de paraître le plus naturel et détendu possible mais estima qu'il avait fait tout le contraire. Dean ne le jugea pas si durement, et lui emboîta le pas en répondant au bout d'un instant, l'air blasé :

- À ton avis ? Je sais même pas pourquoi je lis ce torchon...

Sam voyait au moins deux ou trois raisons pour lesquelles son frère pouvait avoir intérêt à le faire mais, dos tourné occupé à remplir une tasse, il n'en mentionna aucune.
- Peut-être pour la page des sports ? finit-il par dire tout de même en se retournant peu après, s'obligeant à prendre un ton serein mais se cachant aussitôt derrière sa tasse. Il n'y avait pas un match avec les Cubs, l'autre jour ?

- Les... Cubs ? questionna Dean d'un haussement de sourcils, en lui adressant le même regard que si le sujet l'avait réellement intéressé. Quand ça ?

- J'sais plus trop, marmonna l'autre Winchester en trempant plus profondément ses lèvres dans le breuvage noir qui fumait légèrement, sa main libre ancrée au bord de la desserte contre laquelle il se tenait. Un mois...?

Dean n'avait pas véritablement envie de rire, mais il dut se retenir d'afficher un sourire trop visible, face à la mine déconfite de son frère qui n'avait pas la moindre idée de ce dont il était en train de parler. L'aîné hocha la tête et, comme si ce qu'il avait entendu faisait sens, il répondit :

- Nan. Pas vu.

Puis il replongea le nez dans son journal. Sam inclina la tête à son tour, cherchant à ajouter quelque chose à même de rendre son propos un peu plus crédible, faute d'avoir d'abord pris soin d'éviter de balancer la première chose qui lui était passée par la tête, et pour tromper son embarras il avala son café d'une traite avant de poser bruyamment sa tasse et demander :

- Je... Je vais sortir faire une ou deux courses, je rapporte le déjeuner. Tu... as envie d'un truc en particulier ? Burger ?

Dean redressa le menton comme en réaction à un parfum alléchant.
- Ouais, fit-il d'un air plutôt enthousiaste. Bonne idée. Oh, et tu peux rajouter...

- Oignons frits et tarte en dessert, termina Sam. Comme d'habitude.

- Voila, se satisfit Dean. À toi la salade, à moi le reste.

Jusqu'au bout, il fit semblant de n'avoir rien d'autre en tête que cet échange futile sur le repas de midi, et jusqu'au bout il s'attendit à ce que Sam ne puisse s'empêcher d'aborder le sujet de ce qu'ils avaient fait hier soir. Mais le cadet de la fratrie ne s'attarda pas plus, et sur un bref salut de tête il prit congé, réitérant son intention d'aller faire quelques emplettes. Alors, de nouveau seul, Dean abandonna sa mine un peu désinvolte et eut un soupir lourd, presque libérateur, témoin de son véritable état d'esprit et du trouble que la proximité de Sam continuait de provoquer.

Pendant ce temps, Castiel demeurait aux abonnés absents. Malgré trois appels, un message vocal et un texto, Dean n'avait pas réussi à entrer en contact avec l'ange et, consultant une énième fois son téléphone sur la table de la cuisine, commençait à se poser des questions. Il y avait trois jours qu'ils ne s'étaient plus parlé ; le chasseur n'éprouvait qu'une vague inquiétude pour son ami à qui il faisait toute confiance, mais il aurait préféré l'entendre de vive voix lui confirmer qu'il allait bien, pour ne pas ajouter à ses tracas déjà nombreux et peut-être même apprendre de sa bouche que son enquête sur les Érotes progressait enfin.

Le simple fait de penser à la Triade raviva instantanément la colère de Dean. Il lui imputait toujours la pleine et entière responsabilité de ce qui leur arrivait à son frère et lui, et n'avait pas abandonné l'idée de se venger d'elle, voire de lui arracher le moyen de contrer la malédiction, en dépit de tout le mal que Sam pouvait penser de cette façon d'analyser les choses. Dean évitait volontairement d'en faire état pour ne pas ajouter à l'embarras qui régissait leur vie, mais il avait en tête à chaque seconde chacun des gestes et des actes qu'il avait commis à l'encontre de son frère. Il se souvenait, comme s'il le revivait chaque fois, comment cela avait commencé, à Gloucester, lorsque la vision fugace du corps de Sam sous la douche lui avait inexplicablement échauffé les sens, jusqu'à ressentir une excitation telle qu'il lui avait fallu se masturber pour faire redescendre un peu la pression. Il ne se rappelait que trop bien l'ampleur qu'avait pris le phénomène, combien de fois il s'était caressé en pensant à Sam des plus honteuses façons, et à cet instant, dans la salle de bains, où tout avait définitivement basculé. Il se revoyait caresser les fesses de son frère, avide d'y planter son sexe dur et dressé, sentait toujours la chaleur et la douceur de son anus au bout de chacun des doigts qui y avaient trempé en étalant copieusement le savon, et le souvenir du plaisir insoupçonné qu'il avait pris ensuite le mettait chaque fois dans un sévère état de fièvre. Il avait cru que cet acte inqualifiable l'aurait guéri, dans la douleur, de son attirance anormale pour la chair de sa chair, mais malgré la torture des heures qui avaient suivi et les difficultés immenses qu'il avait eues à surmonter l'épreuve pour s'autoriser enfin à regarder à nouveau Sam en face, c'était encore arrivé. Hier au soir. Il rougissait d'une honte absolue chaque fois qu'il repensait à la nature profondément amorale de ses actes, en éprouvait un sentiment de révolte puissant, mais il lui semblait aussi - de plus en plus - développer une sorte d'acceptation à leur égard, comme si ce qui se passait devenait moins intolérable.

Dean se leva de sa chaise, l'air las et pensif. Il savait qu'il aurait dû en principe rejeter avec force cette espèce d'idée malsaine que les rapports anormaux qu'il entretenait avec son frère n'étaient plus aussi graves qu'au premier jour, mais il se sentait comme engourdi, d'une certaine façon indifférent à leur portée tant que ses liens avec Sam perduraient. Il s'imagina que l'approche plus pragmatique de son cadet l'aidait finalement peut-être à mieux supporter ce bouleversement intérieur ; après tout, Sam lui avait prouvé qu'il ne lui vouait aucune rancune, et qu'il était même prêt à faire face à ces sentiments nouveaux sans chercher à les nier. Nonobstant, l'aîné des Winchester ne perdait pas de vue que, s'il avait réservé à ses avances un accueil des plus favorables, Sam n'avait jamais été à l'initiative, hormis pendant ces quelques secondes d'égarement dans l'Impala sur le chemin du retour au bunker, après leur départ de Gloucester.

Non, pour Dean, il était bien celui qui avait, par deux fois, créé les conditions pour permettre que les lois du sang soient transgressées, et s'il avait encore craint l'Enfer, sans doute se serait-il demandé plus anxieusement s'il y avait toujours sa place.

Mais en attendant, d'autres pensées lui chatouillaient l'esprit, surtout depuis qu'il avait revu Sam. En voyant celui-ci entrer dans la pièce, tout à l'heure, le désir s'était manifesté sans délai en écho aux moments sulfureux qu'ils avaient partagés la veille, et l'envie coupable de réitérer l'expérience avait fait un retour lancinant. Dean accepta de se rendre à l'évidence : il était las de lutter si violemment et si vainement contre les pulsions qui lui incendiaient les veines. Il n'avait pas plus envie d'y céder, mais les sentiments extrêmes qui avaient découlé des moments de faiblesse qu'il avait lui-même initiés tendaient à prendre de plus en plus le pas sur le remords. Au fond de lui, il ne regrettait pas plus que Sam leurs écarts, il lui fallait bien l'admettre. Ou plutôt, ne les regrettait-il plus, en tout cas pas de la façon dont il aurait pensé normal de le faire. Tandis qu'il erra dans le couloir qui conduisait à sa chambre, il sentit revenir la douceur et la dureté du sexe de son frère dans sa main, comme il sentit à nouveau la chaleur de son sperme lui engluer les doigts. Ce qu'ils avaient fait hier soir, le plaisir réciproque qu'ils s'étaient donné, avait scellé un moment d'extrême intimité et d'intense complicité, différent de celui où, sous la douche, avait surtout parlé le côté animal, et Dean avait aujourd'hui l'impression qu'il était plus proche de Sam. Il plongea une main dans sa poche pour redresser son sexe tendu comprimé par le tissu de son jean, et s'étonna encore par réflexe de ne pas éprouver que de l'effroi pour ce qui s'était produit sur le parking du bar. Il ressentit alors un manque, à se retrouver seul dans le bunker, vide et silencieux. Même sans rien lui dire, sans rien faire, Dean aurait voulu sentir la présence de son frère toute proche, et ce fut peut-être pour cela que, sans même vraiment s'en rendre compte, il se retrouva à pousser la porte de la chambre de Sam.

En ouvrant le vantail sur l'espace qu'occupait ce dernier, l'aîné de la fratrie ne fut pas étonné d'y trouver ordre et méthode, comme à l'accoutumée, même si les circonstances actuelles l'avaient fait s'attendre à moins de rigueur, au regard du véritable bazar qui régnait dans sa propre chambre. Le lit de Sam était fait au carré, sa brosse à dents bien rangée sur le bord du lavabo, et chaque livre, parmi les nombreux ouvrages que comptait la pièce, semblait occuper une place adéquate sur les quelques étagères pendues aux murs gris. Dean, avec l'excitation d'un l'enfant pénétrant dans un lieu interdit, fit un pas en avant en affichant une moue admirative pour l'excellente tenue des lieux et chercha déjà quelle farce il pourrait bien faire à son frère. Il visa les lampes pyramidales disposées symétriquement sur les tables de chevet, de part et d'autre du lit bien centré au milieu du mur de droite, le seul à être pavé de briques brunes, et leva les yeux au ciel en constatant que même l'orientation du fil électrique de chaque lampe était la même.

- Plus ça va et plus il devient maniaque, se navra-t-il à voix haute.

Dean entra davantage dans la pièce et jeta un œil dédaigneux à la brosse à dents, sur sa gauche, en songeant qu'il avait déjà fait le coup de la frotter au creux de son aisselle. Il approcha alors du téléviseur, face au lit, sous lequel étaient soigneusement alignés une bonne dizaine de films, et fut aussitôt tenté d'ouvrir chaque boîtier pour mélanger tous les disques. Mais, comme il se pencha sur la niche pour commencer son affaire, histoire de tromper l'ennui, un tas de linge oublié sous le lavabo attira son regard ; pas assez pour le détourner de sa blague, d'abord, puis très vite les vêtements captèrent toute son attention. Intrigué, Dean retourna vers l'entrée de la chambre, de plus en plus concentré sur les habits laissés là, soigneusement roulés en boule, certes, mais n'en dénotant pas moins avec la discipline ambiante, et tandis qu'il s'accroupit au-dessus du linge, cherchant déjà ce qu'il allait bien pouvoir en faire pour faire enrager son frère, il reconnut soudain les vêtements que Sam portait la veille, ceux-là mêmes où il avait transpiré pendant leur lutte contre les vampires et dans lesquels il avait joui hier soir.

Le cerveau de Dean parut se figer un moment, et ses yeux se fixèrent à la boule de tissu sans plus s'en détourner. Ses envies de farces puériles s'évanouirent en un instant et les intenses fourmillements qui lui harcelaient les tripes depuis des jours firent un retour en force, alors qu'il déplia tout doucement le jean de son frère sur le sol, osant à peine écouter son brusque désir d'en dégager la ceinture et la braguette. Avec un trouble certain, une sorte d'étourdissement, il déplia la toile du pantalon et, quand il y vit les taches de semence séchée, il se rappela plus fort encore l'imposant pénis de Sam dans sa main, ainsi que son sperme chaud qui, soudain, s'était mis à jaillir avant de lui engluer les doigts. Son propre sexe se remit à durcir, sa gorge se nouant d'un désir viscéral ; Dean remarqua alors le tissu noir fourré à l'intérieur du jean, et en reconnaissant déjà de quoi il s'agissait, il tendit des doigts fébriles pour en sortir le boxer que Sam avait porté la veille. Il souleva le sous-vêtement à hauteur d'yeux en le tenant par l'extrémité de l'index et du majeur, bras presque tendu, et le regard vitreux il imagina ce qui l'avait rempli, le pénis charnu de son frère, ainsi que les bourses rasées de celui-ci qu'il n'avait jusqu'ici pu palper de la façon dont son esprit déréglé l'aurait voulu. De façon aussi soudaine qu'inexplicable, il éprouva à l'endroit du morceau de tissu une féroce attraction, l'envie de s'en approcher pour se rapprocher de Sam, pour retrouver un peu de lui, qui n'était pas là. Dean eut bien conscience de la bizarrerie de son geste, mais il fut incapable de se retenir de ramener le boxer vers lui, et en venant lentement le placer sous son nez il en respira l'odeur, laissant le parfum des parties les plus odorantes du corps de son frère s'infiltrer par ses narines.

Dès lors, son érection atteignit des sommets insoupçonnés. Dean sentit son pénis se rigidifier à tel point que ses testicules, durs comme des œufs, se mirent à lui faire mal, et il fut vite contraint de cesser d'inspirer les effluves qui avaient imprégné le sous-vêtement de son frère pour ouvrir son jean et libérer son phallus. Le sexe à l'air, dur et droit comme une barre de fer, il se remit aussitôt à emplir ses poumons des senteurs poivrées et musquées que Sam avait sécrétées, puis il se leva à toute vitesse et commença à frotter son pénis avec le boxer de son frère, comme s'il avait décidé d'éjaculer dedans. L'excitation la plus extrême déformait ses traits, mais malgré sa respiration haletante et le plaisir indéniable qu'il prenait à exprimer de nouveau ses pulsions déviantes, il s'arrêta bientôt, versant sur son entrejambe échauffé, et sur l'étoffe froissée, un regard confus. Un désir nouveau le gagna, celui de retrouver plus nettement encore cette sensation de proximité avec Sam dont il éprouvait l'insigne besoin, alors il ôta ses chaussures, alla s'asseoir au pied du lit où il retira son jean, avant de se débarrasser également de son caleçon et, en restant un moment à demi-nu à contempler avec délice son érection titanesque, il enfila ensuite le boxer de Sam, frémissant de le sentir l'envelopper et mouler ses parties comme il avait moulé celles de son frère avant lui. Son bien-être fut total et, en poussant un soupir de pure extase, il se caressa longtemps à travers le tissu, avec la sensation de caresser Sam lui-même, comme il avait pris tant de plaisir à le faire la veille.

Lorsque Dean se réveilla, plus de deux heures s'étaient écoulées. Il rouvrit les yeux en sursaut, sur son lit, à peu près rhabillé, même si sa ceinture comme sa braguette étaient ouvertes et qu'il n'était pas chaussé. Confus, il redressa la tête pour constater qu'il portait toujours le boxer de Sam et que son propre caleçon était enfoui dans une poche. Avec la sensation d'une vague migraine hésitant à s'installer sous son crâne, Dean réalisa qu'il n'avait pas rêvé et que, même s'il ne s'en souvenait pas réellement, il avait abandonné la chambre de Sam à un certain moment pour rejoindre la sienne. Ses boots étaient couchées au pied de son lit, et à en juger par l'état de ses chaussettes, il n'avait pas dû prendre la peine de se chausser en revenant ici.

Il ne comprit pas comment il avait pu s'endormir alors même que ses sens s'étaient si furieusement enflammés. Il vérifia s'il n'avait pas joui en se caressant, mais il ne trouva aucune trace de sperme, ni dans le boxer ni ailleurs, et en conclut qu'après s'être allongé, il avait tout bonnement piqué un somme, peut-être apaisé par l'exquise sensation de s'être en quelque sorte uni à Sam au travers de cette intimité forcée et indirecte qu'il avait provoquée. Il se sentit à nouveau gagné par une espèce d'euphorie en posant les mains sur son sexe, couvert par ce même boxer qu'avait porté Sam toute la journée d'hier, mais alors que son pénis se remit à durcir, il prit tout à coup conscience de l'heure qu'il était désormais et fut aussitôt saisi d'un élan de panique en songeant que son frère ne tarderait plus à rentrer. Très peu envieux de devoir avouer à quoi il avait passé son temps en l'absence de ce dernier, Dean s'obligea à se ressaisir, à chasser de son esprit les élans irrationnels qui y avaient élu domicile, et s'empressa alors de retirer le sous-vêtement qui ne lui appartenait pas pour repasser son propre caleçon. Il se rhabiller ensuite totalement, se chaussa, et en faisant une boule du bout d'étoffe noire qui avait enveloppé tour à tour les organes génitaux de Sam puis les siens, l'aîné de la famille quitta sa chambre pour rejoindre celle du cadet, avec l'intention de remettre à sa place l'objet du délit et d'enfouir dans un recoin de sa tête ce qu'il en avait fait.

Il sortit dans le couloir, et tendit l'oreille en quête d'un bruit quelconque qui lui aurait révélé que Sam était déjà de retour. Hormis les sons habituels, et auxquels il ne prêtait plus attention, qui survenaient de façon ponctuelle au rythme des hoquets dont étaient affectés les vieux systèmes électriques et la tuyauterie du bunker, Dean ne perçut pas la moindre trace de présence à part la sienne et se hâta de redescendre le corridor jusqu'à la porte de son frère. Il avait honte de lui d'agir de la sorte, en catimini, à chercher à camoufler sa faute parce qu'il avait été trop faible pour résister aux instincts étrangers qui l'avaient investi, mais il avait encore sa fierté et assumer qu'il n'avait pas pu résister à l'envie de renifler et porter les sous-vêtements de son frère était incompatible avec ça. Il serra le boxer dans la main, prit le tournant du couloir sans ralentir et jeta sa main libre sur la poignée de la porte de la chambre de Sam, qu'il ouvrit doucement, pour alors rester planté là, comme un piquet, pétrifié par la scène à laquelle il fut inopinément confronté.

Sam était rentré et était étendu sur son lit, nu des chevilles jusqu'à la taille. Les cuisses écartées, une jambe pliée contre son torse et l'autre barrant le matelas, son pénis se dressait outrageusement vers le plafond, et ses testicules, lisses et enflés comme deux abricots juteux, luisaient à la faveur de leur moiteur. Les yeux plissés, sourcils froncés, il gémissait à la fois de plaisir et d'effort, ses deux mains entre les jambes, mais ce n'était pas son sexe qu'il manipulait. Les yeux exorbités et son pénis durcissant de nouveau comme la pierre, Dean vit son frère occupé à s'introduire un godemichet dans l'anus, sous la forme d'un phallus de silicone couleur chair enduit de lubrifiant qu'il faisait lentement aller et venir sur plusieurs centimètres, quand d'un soupir vaporeux, il l'entendit pousser dans un grognement concupiscent :

- Oh putain, c'est bon... Baise-moi, Dean, oh vas-y, je suis ta pute...

Ses mots crus, tranchants comme une hache, ébranlèrent Dean qui eut un sursaut involontaire, et ses semelles crissant sur le sol il trahit alors immanquablement sa présence. Sam, alerté, rouvrit aussitôt les yeux, et en voyant son frère qui le scrutait d'un regard sidéré il leva la tête en s'écriant, aussi effaré qu'incrédule :

- D...Dean ?! Que...

Il se redressa si vivement qu'il en expulsa le sextoy comme un étron, et en dépit des circonstances, Dean ne put faire autrement que remarquer combien les dimensions de l'objet, tout englué d'un fluide translucide entre les cuisses nues de son cadet, lui étaient familières.

- Je... balbutia-t-il en bougeant une jambe dans un sens et le reste du corps dans l'autre. Je...

- Putain, mais... Dégage ! hurla Sam en rabattant à la hâte un coin de couverture sur lui, dans une tentative bien futile de préserver un peu de dignité. Qui t'a dit d'entrer, bordel, fous-moi le camp !

Ébaubi, Dean obtempéra docilement, se demandant machinalement ce qu'il devait faire du boxer dans sa main, le lâcher, ou l'emporter. Comme par automatisme, il choisit de l'enfoncer dans sa poche et chercha la poignée de la porte en tournant sur lui-même, semblant croire qu'il était possible que, d'un seul coup, elle se fût déplacée sur le mur. Il finit par mettre la main dessus, à tâtons, et l'air assommé il réussit tant bien que mal à refermer derrière lui, non sans se coincer d'abord le pied dans l'embrasure.

Là, seul dans le couloir, à l'abri de l'image hautement perturbante de Sam s'enfonçant par l'anus un gode dont les dimensions valaient bien celles de son sexe, Dean essaya de reprendre son souffle en sentant une vive chaleur lui monter jusqu'au front, puis c'est son cœur qu'il sentit s'emballer quand il prit la mesure de la scène qu'il venait de surprendre. Il venait non seulement de voir son frère dans son intimité la plus extrême, mais il l'avait aussi entendu l'appeler tandis qu'il faisait coulisser le sextoy dans son rectum. Preuve, s'il en fallait, que Sam avait plus qu'apprécié la sodomie que son aîné lui avait pratiquement imposée, ce qui ne facilita pas pour Dean la gestion du torrent d'émotions qui l'assaillait. Il était choqué, certes, mais sans indignation. C'était surtout parce qu'il avait trouvé la scène incroyablement excitante, que la tête lui tournait, et il eut beau tout faire pour empêcher l'effrayante vérité de prendre forme dans son esprit, c'est son sexe, dur et raide derrière sa braguette gonflée, qu'en cet instant il aurait ardemment voulu planter entre les fesses de son frère, en lieu et place du jouet en plastique que Sam lui avait préféré.