Remus
Je regardai par la fenêtre de mon bureau, le spectacle que m'offrait le jardin de Poudlard en ce moment était époustouflant. L'automne avait bien pris sa place dans la végétation, colorant les arbres avec une palette de jaune, de marron et de rouge. L'humidité ainsi que la douce odeur de champignon qui accompagnait cette saison chatouillèrent mes narines, m'arrachant un sourire.
Un bruit répété à ma porte m'arracha à ma contemplation du paysage. Je me demandai bien qui c'était, Nohela étant partie à Pré-au-lard pour faire quelques courses. Bien qu'elle m'ait proposé de venir avec elle, je n'avais pas eu le cœur de l'accompagner. Le village me rendait bien trop nostalgique, me mettant en proie aux crises d'angoisses.
À peine eus-je entrebâillé ma porte qu'un nuage de plume s'engouffra dans mon salon. Je me retournai, surpris, et découvris Pyxis qui s'était installée sur le dossier de mon fauteuil. Elle me montrait avec son bec la lettre accrochée à sa patte. Je m'approchai d'elle puis décrochai le parchemin. Ça devait provenir de ma mère. Je la dépliai puis me mis à lire :
Mon cher Remus,
Je suis contente que tu aies eu l'idée de me contacter. Je suis très heureuse pour toi. Tu mérites tout l'amour du monde. Envoie-lui mes sincères salutations.
Concernant le problème que tu rencontres, j'ai peut-être quelque chose qui devrait marcher. Tu devras cependant te rendre dans une pharmacie moldue pour trouver les ingrédients. Le mélange est à base d'huile essentielle, tu auras juste à mettre le nombre de millilitres indiqué dans une huile végétale quelconque (l'huile végétale d'arnica est pas mal). Étant donné que tu avais des facilités en potion, ça ne devrait pas de poser trop de problème.
Pour 24 ml d'huile végétale :
- 1 ml d'huile essentielle de Basilic tropical
- 4 ml d'huile essentielle d'Ylang Ylang
- 1 ml d'huile essentielle de Clou de girofle
- 2 ml d'huile essentielle de Camomille Romaine
Il faudra qu'elle masse son ventre avec. Les premières heures, elle pourra l'appliquer toutes les 20 minutes. Après, une fois par heure si elle en ressent le besoin. En premier, elle pourra prendre sur un sucre une goutte d'huile essentielle d'Estragon (c'est très mauvais, ça risque de la surprendre). L'huile essentielle de Citron se prend de la même manière et diminue les nausées.
En espérant que ça marchera,
Ta mère qui t'aime
Je souris paresseusement à la fin de ma lecture. En plus d'être une très bonne pharmacienne spécialisée dans l'aromathérapie, elle était une mère douce et aimante. J'avais de la chance de l'avoir.
Ni une ni deux, je m'engouffrai dans ma cheminée pour atterrir au Chaudron Baveur. Je quittai à la hâte le pub pour me retrouver dans le Londres moldu à la recherche d'une pharmacie.
J'en trouvai une plus bas dans la rue. Je rentrai dedans puis cherchai des yeux les huiles essentielles. Un pharmacien vint m'aider et je lui listai la liste que m'avait donnée ma mère. Une fois tout trouvé, je passai à la caisse. Mon porte-monnaie en prit un coup, mais c'était pour la bonne cause.
— Vous êtes bien renseigné, Monsieur, j'espère que ça soulagera votre Dame. Faites bien attention à ce qu'elle n'applique pas le mélange plus de six fois par jour, me dit le pharmacien.
— J'y veillerai, merci.
Je sortis de la pharmacie puis me dirigeai vers une épicerie pour acheter des carrés de sucre. Une fois toutes mes emplettes faites, je retournai au château tout guilleret.
Le mélange fut prêt en un temps record. Je le rangeai dans ma pharmacie avec tout ce qui restait. J'espérais que ça aiderait Nohela pendant ses règles. On en avait un peu parlé et malheureusement à part les médicaments moldus (et encore), rien ne la soulageait vraiment. Elle s'estimait heureuse malgré tout, car ses douleurs ne duraient qu'un jour ou deux.
Personnellement, une douleur était une douleur, qu'elle ne dure qu'une minute ou plus d'une semaine. Personne ne méritait de souffrir et encore moins Nohela. Je m'étais donc tourné vers ma mère qui se soignait principalement grâce à l'aromathérapie dans l'espoir que ça puisse soulager Nohela.
Je jetai un coup d'œil à l'horloge et vis qu'il était déjà seize heures. Il était étonnant qu'elle ne soit toujours pas revenue. J'en profitai pour me préparer une bonne tasse de café. Le liquide noir fumait dans ma tasse, je pris une gorgée et me délecta du goût corsé de mon espresso. J'eus à peine le temps de reprendre une gorgée qu'une touffe de cheveux noirs apparut dans mon champ de vision. Elle était habillée d'un jean avec une coupe lâche, d'un tee-shirt Marvel accompagné d'une chemise à carreaux en laine, ses éternels Doc Martens au pied. Sa tenue était entièrement composée de noir, contrastant avec sa peau pâle et ses yeux verts.
Elle était magnifique.
Elle se déchaussa rapidement, puis vint se poster devant moi. Elle posa ses mains sur mes cuisses et les frotta doucement tandis qu'elle se penchait vers moi pour déposer un tendre baiser sur mes lèvres, gonflant mon cœur d'amour. Lorsqu'elle recula, un sourire avait élu domicile sur ses lèvres.
— Salut, souffla-t-elle.
— Salut, murmurai-je en retour.
Elle embrassa ma joue et s'assit à côté de moi avec enthousiasme. Elle se pelotonna contre moi, pris ma main libre entre ses doigts puis étudia le contenu de ma tasse. J'allais me faire disputer à coup sûr.
À ma grande surprise, elle sourit puis déposa un baiser sur mes doigts, me faisant fondre de bonheur.
— Tu m'en fais un, mon cœur, me demanda-t-elle d'une voix douce.
— Bien sûr, mon petit corbeau.
Comment pouvais-je refuser quand elle me regardait comme ça.
Je me dirigeai vers mon garde-meuble et en sortis une tasse. Je versai le café moulu dans le filtre en inox puis remplis le réservoir d'eau. Je tapotai de ma baguette la cafetière italienne pour la faire bouillir et attendis que l'extraction du café se fasse. Quand celle-ci fut terminée, je versai le café dans la tasse de Nohela puis me rassis à ses côtés en lui tendant le mug brûlant.
— Merci.
Elle déposa un baiser léger sur ma joue et souffla sur sa tasse.
— Alors qu'est-ce que tu as fait de beau cette après-midi ? lui demandai-je, curieux.
— Oh, rien de palpitant. Comme je te l'avais dit, je suis allée acheter quelques vêtements et de quoi re remplir ma salle de bain. Des courses quoi, ria-t-elle légèrement.
Je la regardai souffler de nouveau sur sa tasse puis prendre une gorgée. Je l'observai à la dérober, ses cheveux bouclés étaient ébouriffés, tandis que ses joues et son nez étaient encore rougis par le vent. Malgré son apparence un peu désordonnée, il émanait d'elle une beauté naturelle à couper le souffle.
Je dégageai une mèche de son visage en la repoussant derrière son oreille, me permettant d'admirer entièrement son visage. Ses lèvres commençaient à gercer à cause du froid, ce qui me donna envie de les embrasser. Ce que je fis aussitôt, une douce saveur de café vint titiller mes papilles lorsque ma langue lécha le pourtour de ses lèvres, la faisant gémir. Quand je reculai, ses yeux brillaient de tendresse. Je calai mon dos contre le dossier de mon canapé puis déplaçai les jambes de Nohela afin qu'elle repose sur mes cuisses, me laissant tout le loisir d'y promenait mes mains.
On but notre café en se racontant des anecdotes sur nos années Poudlard. J'appris que Nohela avait un meilleur ami, Rémi, avec qui elle avait fait les quatre cents coups. Même si en comparaison avec les conneries que j'avais pu faire, les siennes n'étaient pas bien graves. Je lui racontai le jour où j'avais ensorcelé le plafond magique de la grande salle afin qu'il y neige pour de vrai. Cela avait fait la joie des étudiants qui s'étaient bien amusés. Les professeurs, eux, avaient été moins emballés par l'idée, mais je ne m'étais jamais fait choper pour ça.
Elle rit de bon cœur à ma bêtise d'en temps puis se leva. Elle prit ma tasse vide des mains et les débarrassa. Elle revint avec un livre dans la main. J'allongeai mes jambes sur le canapé et lui fit signe de venir. Elle s'installa entre mes cuisses et s'appuya contre mon torse. Je me mis à jouer machinalement avec ses cheveux pendant qu'elle lisait. J'aimais nos après-midis ensemble, elles m'apaisaient. J'étais bien en sa compagnie, je me sentais aimé et protégé. J'avais le doux sentiment que rien ne pourrait nous arriver quand nous étions ensemble.
Je soupirai d'aise, mes bras encerclèrent sa taille, tandis que je nichai mon nez dans son cou, humant par la même occasion la douce odeur de citron et de vent frais qu'elle émanait. La pleine lune était dans trois jours, mais pour une fois je ne l'appréhendais guère.
Le cœur au bord des lèvres, j'attendais que la Lune soit complète. L'anticipation de la douleur était stressante. Puis, celle-ci vint m'enveloppait, brûlant à blanc ma peau, refaçonnant mes os un à un. J'entendis au loin les cris de Nohela, ne faisant qu'accroitre ma propre souffrance. La douleur était si intense, qu'elle finit par m'anesthésiait l'esprit.
Quand je rouvris les yeux, j'étais à quatre pattes, mon corps couvert de poils. La porte s'ouvrit et un lévrier noir et blanc vint à ma rencontre. Elle me lécha le museau affectueusement. En loup, sa fragrance était décuplée, me faisant grogner. Elle se frotta à moi, déposant son odeur partout sur moi. On se dirigea vers le lit, elle se mit en boule sur les draps et je calquai mon corps au sien, l'entourant de ma chaleur.
Je décidai dans un élan de possessivité de la marquer à mon tour de mon odeur. Elle couina d'approbation et se lova un peu plus à moi. Une fois satisfait, je fermai les paupières, ma truffe enfouie dans ses poils. Elle s'endormit au bout d'une demi-heure.
Personnellement, le sommeil me fuyait. Les rayons de lune me narguèrent, l'insomnie pointait le bout de son nez. Le silence était assourdissant, je me mis alors à surveiller la respiration de Nohela. J'étudiai attentivement les battements de son cœur.
Elle était là avec moi, en vie, tout allait bien.
Les battements réguliers de son cœur finirent au bout de quelques heures par agirent comme un somnifère, anesthésiant mon insomnie
Le réveil avait été affreux. La douleur bien qu'habituelle était toujours aussi horrible. Je m'en voulais de la faire subir à Nohela, mais comme elle n'arrêtait pas de me le répéter, je n'y pouvais rien.
Je me retrouvais donc pour la énième fois dans son lit en pyjama, attendant qu'elle vienne me voir pendant sa pause. N'y tenant plus, je sortis du lit.
Qu'est-ce que je me faisais chier.
D'habitude, j'étais tellement fatigué que je dormais toute la journée. Étonnamment, ce ne fut pas le cas aujourd'hui. Je balayai la pièce du regard en quête de quelque chose pour me divertir. L'immense bibliothèque de Nohela attira mon regard. Je parcourus des yeux les titres présents et pris un livre que j'avais vu dans ses mains il n'y a pas si longtemps.
Je feuilletai la quatrième de couverte, ça m'avait l'air d'être une romance.
Bon, ça fera l'affaire.
Je ne vis pas les pages qui défilaient tellement je fus happé dans ma lecture. Les personnages me touchèrent énormément. Je me retrouvai dans le personnage masculin. Il avait tout perdu et pourtant le monde ne s'était pas arrêté de tourner alors que le sien s'était brutalement stoppé. Il se voyait comme un monstre et s'était donc exilé de la société, se plongeant dans une longue solitude. Bien que ça soit une romance, le livre abordait de nombreux thèmes importants. Comme la dépression, le syndrome du survivant, le pardon …
— Remus ?! Mais qu'est-ce que tu fais ? me demanda Nohela, m'extirpant de ma lecture.
— Comme tu peux voir, je lisais en t'attendant, expliquai-je en lui montrant le livre dans ma main.
— Une romance ? questionna-t-elle, septique.
— Parfaitement, madame, c'est très enrichissant, figurez-vous, rétorquai-je.
— Je suis tombée amoureuse de l'homme parfait, s'extasia-t-elle.
Mon cœur rata un battement et je me mis à rougir violemment. Elle se rua vers moi puis couvrit mon visage de baisers.
Elle m'aimait …
Elle s'installa entre mes jambes et cala son dos contre mon buste.
Elle m'aimait …
Je repris ma lecture.
Elle était amoureuse de moi …
Nohela lut en même temps que moi, nous permettant d'échanger sur l'histoire. C'était agréable, je voulais passer toute ma vie avec elle.
Je pouvais être aimé …
Un éclair de lucidité me transperça. Je l'aimais, et ça me faisait incroyablement peur.
Note du 20.08.23 : Je viens de me rendre compte que j'ai inversé le chapitre 13 et 14. Désolé pour l'erreur qui est rectifiée à présent.
