La forêt s'étend à perte de vue, mais ce n'est pas la forêt de Forks. Non, celle ci ne se trouve pas dans une montagne. Les arbres sont gigantesques et je m'appuie contre l'un d'eux pour reprendre mon souffle qui est haletant. Je cours, j'accoure, sans trop savoir pourquoi. Je dois le faire, c'est tout, il le faut. Mes gestes sont maladroits et je peine à me déplacer correctement à cause de la tenue que je porte. Une lourde robe brodée de quelques fils d'or, cousue dans un tissu argenté. Mes souliers sont des plus inconfortables. Mes jambes sont si épuisées qu'elles me brûlent. Je me sens compressée au niveau de la taille, plus que la normale, comme si je portais un corset. Et pourtant je m'élance entre les arbres et me dépasse plus que tout, animée par une rage de vivre que je ne me connais pas. Je me demande où je vais. Je me sens comme un pantin, ce n'est pas moi. Survis. Survis. Ce mot résonne dans ma tête.
- Je sens ton odeur ! Où que tu ailles, nous te retrouverons ! Lance une voix glaciale, qui me glace le sang. J'ai le réflexe de me réfugier derrière un buisson, et même si j'ai un feu dans ma poitrine, je cesse de respirer.
Me sentant épiée, je comprends que je ne vais nul part. Ce que je cherche, c'est à fuir. Mais à fuir qui ? Quoi ? S'il peut me sentir, il me trouvera c'est certain. J'entends ses pas. Il n'est pas seul. L'homme approche de quelques pas, et je croise de beaux yeux d'un brun si doux en contraste avec son ton glacial. Il me regarde, alors que je meurs de peur, mais il se contente de sourire et s'éloigne auprès des hommes qui l'accompagnent. Ces derniers ne m'ont pas remarqué. Ils ont un accent britannique et sont vêtus, eux aussi, de tenues d'époque.
- Elijah, elle est forcément ici, je sens son odeur ! Insiste un de ses compagnons, qui me semble être un subalterne.
- Katherine n'est pas ici.
Pourquoi m'a-t-il épargné ? Qui est-ce ? Ce n'est pas l'homme que j'ai vu l'autre fois, dans cet chambre. C'est un autre. Celui ci se nomme Elijah et il me traquait. Soudain, un profond mal de crâne saisit mon esprit et je gémis de douleur. Qu'est-ce qui m'arrive ? La vaste forêt disparaît petit à petit et je me sens comme chavirer, comme m'évanouir pour me réveiller aussitôt dans un autre décors. Le parfum sauvage de la forêt laisse place à la froideur et à la terre. Une grotte. J'ai déjà fait un rêve ici. La grotte est humide, je me trouve à l'intérieur, plongée dans une certaine obscurité. Une tombe se trouve au centre. Je me redresse péniblement, les mains sur les genoux, et je peux remarquer que je ne suis plus vêtue de la robe. J'ai récupérée mes vêtements. Tout est floue, nébuleux. La dernière fois, il y avait une personne qui me ressemblait trait pour trait … Enfin, cette personne était plutôt une créature.
- Je suis impressionnée ! Tu es presque brave. S'écrie une voix rauque.
Je n'ai pas le temps de me poser plus de questions quand je me retrouve plaquée contre un mur. La main de la jeune femme m'encercle le cou sans une once de difficulté. Je me débats, en vain, terrorisée par ses prunelles d'un rouge qui tend vers le noir. Sa fine silhouette si semblable à la mienne, dissimule en vérité une force colossale. Je ne peux pas luter, c'est inutile.
- Arrêtez, arrêtez …
- Viens à moi. La grotte est tout près. Viens à moi, ou tu en paieras le prix, petite humaine. Elle susurre, en relâchant sa prise.
Les mains qui tremblent et en pleine hystérie, mon dos glisse le long du mur jusqu'à ce que je retombe avachie sur le sol. Mon corps souffre et mon esprit est confus, comme lors d'un sommeil interrompu.
- Je, je ne sais pas ce que tu attends de moi … Quand est-ce que ça va s'arrêter ? Je trouve le courage de poser cette question, avant que le mal de tête ne revienne et que je grimace de douleur à nouveau.
- Tu poses les mauvaises questions.
Ce sont les dernières paroles que l'être puissant m'adresse, elles me paraissent déjà lointaines, avant de s'engouffrer dans la noirceur au plus profond de la grotte. Et alors qu'elle s'éloigne, je peux me sentir glisser ailleurs.
*
Mes paupières s'ouvrent sur le plafond de ma chambre. Il y a une minuscule mouche qui a élu domicile au plafond, ça me perturbe. Je ne tarde pas à me lever pour ouvrir la fenêtre afin qu'elle s'en aille. Un vent frais pénètre la pièce. L'heure indiquée au mur est celle de dix heures du matin. Nous sommes vendredi. Je suis restée cloîtrée chez moi depuis mercredi après midi et j'ai passé l'essentiel de mon temps dans mon lit. Pourtant, j'ai l'impression de ne pas avoir fermé l'œil de la nuit. Mon corps est épuisée, je me sens vidée de toute énergie. À chaque fois que je cligne des yeux, l'image du loup s'impose à moi. Jared n'avait pas tardé à reprendre forme humaine alors que je courrais, mais je ne voulais pas lui adresser la parole. J'étais incapable de le regarder. Depuis, il m'a envoyé bon nombre de messages, il m'a appelé et il est venu toquer mais … Comment le revoir ? J'ai la sensation malheureuse d'être dans un film d'horreur. J'enchaîne les tâches comme un robot. Me doucher, me laver les dents, me laver le visage, enfiler un sweat sur mon pyjama, me servir un petit déjeuner auquel je ne touche pas. Mon téléphone vient rompre ce quotidien finement orchestrée.
- Allô chérie, tout va bien ? Tu prends bien soin de toi ? Je regrette de ne pas être là. Couvres toi bien, manges quelque chose de chaud, et prends tes médicaments …
Évidement, il s'agit de ma mère. J'étais certaine que le lycée l'appellerait à cause de mes absences d'aujourd'hui et d'hier, alors j'ai pris les devants. J'ai préféré mentir en disant que j'étais malade. Qu'est-ce que j'aurais pu dire ? Pardon maman, je ne vais pas au lycée par ce que le garçon dont je suis amoureuse m'a traîné dans la forêt pour se transformer en une bête sauvage sous mes yeux et ça me terrifie ? Déjà qu'elle me prend pour une petite chose fragile. Pour une timbrée.
Elle n'a peut être pas tord.
*
Je me retrouve encore dans une forêt, mais cette fois ci, c'est bien celle de Forks. Je cours, la pente est descendante, pour fuir la bête qui me poursuit. Un coup d'œil en arrière me suffit pour me rendre compte que c'est un loup. Un loup. Jared. Je manque de glisser à de nombreuses reprises, pour ensuite enfin sortir de la forêt. Mais je ne suis pas sortie par la plage ou par la route. Non, c'est la falaise. Une immense falaise qui surplombe l'océan, un océan sauvage.
- Putain ! Je lâche un juron, une main qui me tire les cheveux sous l'effet de ma crise de nerfs.
Je vais mourir. Je n'ai aucune chance. Le loup ralentit et avance de quelques pas, d'une lenteur absolue. Il est sadique. Le bout de mes doigts tremblote. Si je saute, je vais me noyer ou me briser les os. Et si je ne saute pas, le loup me dévorera sans aucune pitié.
*
- Laisse moi ! Je m'exclame en me réveillant avec un sursaut.
Je suis affalée sur le canapé du salon. Tiens, je ne m'étais même pas rendu compte du fait que je m'étais assoupie. Inutile, je suis toujours aussi épuisée. Confuse, je n'ai pas le temps de me remettre de mes émotions à cause de la sonnerie qui résonne dans la maison. À l'idée que ce soit Jared, mon estomac se tend. Calmement, je me lève, habillée d'un simple pyjama constituée d'un fin débardeur, d'un sweat et d'un sombre legging. Si je suis assez calme, il pensera que je ne suis pas chez moi … Par le judas, je ne vois pas Jared mais Emily. C'est un soulagement, la pression retombe quand je me décide à lui ouvrir.
- Bonjour, j'espère que je ne te dérange pas. Elle me salue avec son habituel douceur.
- Bonjour, tu peux entrer … Je réplique en baillant, avant de refermer la porte derrière elle.
Je lui fais signe de me suivre dans la cuisine et nous bavardons de banalités insignifiantes pendant quelques minutes, le temps que je lui serve un café. Son café est fumant sur la table de bois. Elle le prend sans sucre, vu mon stress, j'en aurais mis trois à sa place. Assises l'une en face de l'autre, nous savons toutes deux de quoi il en retourne. Jared a du tout leur raconter. Jared est un loup. Sam en est sûrement un aussi. Et puis Paul pendant qu'on y est. C'était peut être lui, sur la photo …
- Poses moi les questions que tu veux. Propose gentiment Emily, dont la perspicacité lui a permis de voir que j'étais ailleurs.
- C'était Paul, sur la photo que j'ai prise ? Ça peut pas être Jared, quand il s'est transformé il était brun et de toute façon quand j'ai prise cette photo il se trouvait avec moi. Ce loup était noir.
- C'était Sam. Il était sûrement en pleine ronde et en voyant Jared il a voulu approcher avant de se rendre compte que tu te trouvais avec lui. D'ailleurs, tu manques beaucoup à Jared …
- Une ronde ? Je demande en faisant mine d'ignorer le fait que Jared veuille me voir.
- Quand ils se transforment, ils font des rondes pour surveiller la réserve, c'est leur devoir …
- Je ne comprends rien. Je lance avec plus de froideur que je l'aurais voulu.
- Voyons, Kim, tu connais nos légendes et …
- Oui, je les connais plus ou moins et je les apprécie, mais quand elles restent des légendes. Là on est dans la réalité.
- Justement, les légendes sont réelles. Ce soir nous avons organisé un feu de camp pour toi. Emily m'apprend cette information alors que j'écarquille des yeux.
- Pour moi ? Je ne veux pas venir. Je ne veux plus entendre parler de cette histoire
- Donc tu vas rester enfermée dans cette maison toute seule pour l'éternité sans rien vouloir entendre ? La jeune fille plus âgée me lance cette question rhétorique, me faisant faire la moue.
- Non, ma mère rentre bientôt et …
- Tu ne peux pas en parler à ta mère. M'interrompt Emily, le regard alarmé.
C'est pas faux, de toute façon elle ne me croirait pas. Personne ne croirait à cette histoire de fou. Mes mains jouent avec les manches de mon sweat dans le silence. Je suis une mauvaise hôte, je devrais lui servir à manger … Mes iris détaillent Emily. Elle est plus petite que moi. Elle doit faire moins d'un mètre soixante, a des hanches larges et des clavicules qui ressortent. Ses cheveux coiffés d'une frange sont d'un noir profond, tout comme ses beaux yeux qui expriment tant de compréhension. Son visage est celui d'une poupée, parfaitement structuré et symétrique, avec de belles pommettes. Son teint est à peine plus clair que le mien. Elle serait indéniablement parfaite, s'il n'y avait pas cette cicatrice qui lui parcourait la moitié du visage … Quel dommage … Tout ça à cause de l'accident avec cet ours … Mais était-ce la vérité ? Ou encore un des énièmes mensonges de cette petite bande composée de Jared, Paul, et Emily, avec Sam en tête ?
- Ce n'est pas un ours qui t'a attaqué. J'affirme sans attendre de réponse.
- Non, tu as raison. C'était un loup.
- Lequel ? J'interroge en priant pour que ça ne soit pas Jared. Emily souffle et je regrette mes questions qui sont indélicates.
- C'était Sam, mais c'était un accident …
- Emily, pourquoi tu restes avec lui ? C'est dangereux, et s'il le refaisait, et si … La jeune femme m'interrompt en prenant ma main. Sa peau est douce, mais son geste se veut ferme.
- Kim, je te demande seulement de venir au feu de camp. Je t'en prie. Tu auras toutes les réponses à tes questions ce soir. Et si après ça, tu ne veux plus entendre parler de nous, je te promets de ne plus t'embêter.
L'expression de la petite amie de Sam est si insistante, et ma curiosité dévore ma peur. Des réponses, c'est tout ce que je souhaite. Connaître la vérité. C'est irrationnelle et effroyable, mais si Jared pouvait me prouver que je n'ai rien à craindre … C'est impossible.
- Très bien, je viendrais. Je finis par céder.
C'est le retour des mauvais rêves de Kim, j'espère que ça vous plaît. N'hésitez pas si vous avez des théories à ce sujet. Quelles sont vos idées ou attentes pour la suite ? Comprenez vous la peur de Kim vis à vis de la transformation de Jared ? Et que pensez vous du lien qui commence à se créer avec Emily ? Comment voyez vous le personnage d'Emily ? Kim n'est pas au bout de ses peines et je vous préviens, on va bien s'amuser. Certains auront peut être deviné qu'un crossover arrive. Mais, n'ayez crainte, on reste dans du Twilight. J'ai hâte de vous présenter le prochain chapitre !
Alexise-me : Je te jure, sa mère est vraiment limitante. Elle a créé autour d'elle une forteresse qui donne l'impression que le monde et tout ce qui le constitue est terrifiant. Je te remercie, énormément ! T'es reviews sont une chance pour moi, j'ai trop hâte que tu découvres la suite de l'histoire. Profites aussi de cet été !
