Chapitre treize

Hermès et Apollon n'avaient jamais couru aussi vite que depuis le jour où ils avaient malencontreusement renversé une statue de leur père dans le salon de ce dernier. Essoufflés par la course, les deux dieux prirent du temps à retrouver une respiration normale et ils restèrent quelques minutes les mains sur les cuisses, tête baissée, avant de regarder autour d'eux. Et de blêmirent.

Aucun des deux ne l'avait remarqué, trop occupés qu'ils étaient par le fait de rejoindre Ambre, dont les cris devenaient de plus en plus terrifiants et terrifiés, mais la porte de la chambre de la jeune fille était grande ouverte. Le lustre éclairait la pièce d'une intensité qui leur fit mal aux yeux et Ambre… Ambre se débattait entre ses oreillers et ses draps, en proie, semblait-il, à un ou plusieurs cauchemars. De la sueur coulait le long de son front et bien que d'un d'ordinaire plutôt pâle, Apollon jurerait n'avoir jamais vu la fille d'Iris aussi blanche. A genoux aux côtés de sa jumelle, Matthew Jones leur jetait un regard désespéré et humide.

« Qu'est-ce… Qu'est-ce que… », tenta Apollon, la respiration encore haletante, en désignant Ambre d'un geste de la main.

« Elle… j'ai tout essayé pour la réveiller, mais… je… je n'y arrive pas et… et c'est la première fois que c'est aussi difficile de la ramener… »

La première fois. Se redressant soudainement, Apollon entendit Hermès déglutir difficilement et lâcher un « Par les Parques. ». Ainsi donc, ce n'était guère le premier cauchemar de ce type. Se passant une main dans les cheveux, Apollon, qui sentit un drôle de poids tomber sur son estomac, se rapprocha du lit et tenta tant bien que mal de croiser et d'ancrer son regard dans celui de son descendant. Il avait besoin de quelques informations s'il souhaitait pouvoir agir rapidement et avec efficacité.

« Qu'est-ce qui fonctionne d'ordinaire, Matt ? »

« Je… Je l'appelle et la secoue légèrement. Ça prend parfois plusieurs minutes mais… mais ça… ça march… marchait… jusqu'ici. »

Le désespoir se faisait sentir dans la voix du fils d'Iris et Apollon fit de son mieux pour lutter contre son envie de le réconforter : la priorité était de ramener Ambre à la réalité, Ambre qui venait de nouveau de lâcher un hurlement à vous percer les tympans. Alors, tandis qu'Hermès fermait la porte de la chambre, le musicien poursuivit son interrogatoire :

« Et après s'être réveillée, elle agit comment ? Elle se souvient de ce qu'elle a rêvé ? »

« Elle… »

Matthew s'interrompit, soudainement mal à l'aise. Et si, de part la réponse qu'il donnait, il passait pour un frère indigne ? Pour un jumeau qui n'en avait absolument rien à faire de sa sœur ? Alors qu'en soit, c'était tout le contraire. C'était juste que…

« Matt, on n'a pas le temps pour les combats intérieurs. Ambre est déjà en train d'en mener un elle-même et elle s'épuise. Réponds simplement, s'il te plaît. »

Le jeune homme se frotta l'arrière de la nuque en rougissant légèrement, avant de répondre d'une petite voix, le regard soudainement fuyant :

« Elle… Ambre s'enferme dans un mutisme qui peut durer plusieurs jours. J'ai beau me montrer présent, essayer de poser des questions, c'est comme si… comme si elle n'était pas réellement là. Ou trop absorbée par ses pensées pour se concentrer pleinement sur le présent. »

« Ok. Psycho trauma. »

« Quoi ?! »

Mais désormais pleinement conscient de ce qu'il devait faire et se concentrant du mieux possible sur les actions à venir, Apollon entendit à peine le cri de désespoir et d'incompréhension mêlés que lâchèrent Hermès et Matthew dans une synchronisation parfaite et ne prit donc pas la peine d'élaborer davantage sa réponse. De toute manière, il n'en avait guère le temps.

Avec précaution, Apollon s'approcha du lit et observa avec attention le visage crispé de sa descendante avant de poser délicatement une main sur son front. Chaud. Terriblement chaud.

« Hermès, de l'ambroisie et du nectar. Matt, de l'eau fraîche et une trousse de secours au cas où. Allez ! », insista-t-il alors qu'il sentait leur regard posé sur lui.

Cet ordre sembla les ramener à la réalité et à l'urgence de la situation, parce qu'un instant plus tard, tous les deux avaient disparu de la chambre, occupés qu'ils étaient désormais à courir dans les couloirs et à fouiller les chambres.

« A nous deux, Ambre, murmura Apollon, plus pour lui-même que pour autrui. Montre-moi ce que tu vois. »

D'un geste, Apollon glissa sa main libre dans celle de la fille d'Iris et ferma les yeux, s'infiltrant dans son esprit.

XXxXxXx

Au début, tout n'était qu'une succession d'images et de scènes floues, qui se remplaçaient à une vitesse telle qu'Apollon en attrapait le tournis et les nausées qui allaient avec. Puis, tout sembla se calmer et, sans qu'il ne s'en rende compte, le dieu finit par sentir un sol dur sous ses pieds et les images s'éclaircirent, le flou laissant place à quatre murs au papier peint d'un rose défraîchi.

Un tour sur lui-même informa Apollon qu'il se trouvait sans aucun doute dans une chambre d'enfant : la taille du lit, les quelques jouets étalés sur le tapis multicolore, l'immense peluche licorne… et une version miniature d'Ambre Jones.

La fille d'Iris ne devait guère avoir plus de quatre ans mais loin de l'innocence et de la joie qu'on retrouvait d'ordinaire dans les pupilles des enfants de cet âge, le regard d'Ambre brillait de tristesse et de peur. D'une peur qui vous tétanisait sur place, qui accélérait dangereusement les battements de votre cœur et qui ne devrait guère être connue à un si jeune âge.

La petite était recroquevillée contre l'un des murs de sa chambre, celui qui faisait face à la porte. Les genoux serrés contre la poitrine, elle ne cessait de fixer la poignée des yeux, comme si elle s'attendait que celle-ci vole en éclats d'une seconde à l'autre.

« Ambre ? »

Le ton d'Apollon s'était fait prudent mais cela n'empêcha pas la petite fille de sursauter.

« Chuuut, murmura-t-elle d'une voix si basse qu'Apollon n'aurait sans doute pas compris si Ambre n'avait pas porté son index à ses lèvres. Il ne faut pas qu'il vienne. »

« Qui donc ? »

« Papa. »

Le ton inquiet, non, terrifié que la fille d'Iris venait d'employer laissa Apollon sans voix.

Papa. Papa n'était guère un mot qu'on prononçait avec crainte… c'était… c'était un mot qu'un enfant scandait avec joie, avec amour, avec fierté et qui faisait briller ses yeux. Papa n'était pas un terme qu'on employait pour désigner quelqu'un qui, apparemment, nous faisait peur. Et pourtant…

Un bruit sourd se fit entendre un peu plus loin dans la maison, suivi immédiatement par un chapelet de jurons. Apollon observa Ambre se ratatiner davantage alors qu'une voix masculine criait :

« Ces p… de gamins ! Ambre, Matthew ! Ici ! Tout de suite ! »

Les accents étaient graves, inquiétants et Apollon avait davantage l'impression que l'homme appelait ses chiens plutôt que ses enfants. Un frisson lui descendit le long de la colonne vertébrale.

« Ambre, souffla-t-il alors qu'il s'agenouillait aux côtés de la fillette. Ambre, regarde-moi. Il ne va rien t'arriver, tu m'entends ? Tu es en sécurité. »

Mais la fille d'Iris secoua la tête avec force.

« Papa est méchant. Papa me fait peur. Papa n'est pas content. Et papa fait mal quand il n'est pas content. »

Papa fait mal quand il n'est pas content ? Une horreur indescriptible submergea Apollon alors que la réalité le frappait de plein fouet, et le dieu du soleil ne put s'empêcher d'en vouloir subitement à Iris : par les Parques, mais dans quel pétrin la déesse des arcs-en-ciel avait-elle laissé grandir ses enfants ? Comment avait-elle pu être d'accord avec ça ?

Les yeux d'Apollon observèrent les hématomes sur les bras de sa descendante et le dieu sentit une colère sourde bouillir soudainement en lui.

« Aïe, tu m'éblouis… », se plaignit Ambre, en se frottant les yeux avec ardeur.

Et ce ne fut qu'à ce moment-là qu'Apollon prit conscience qu'une aura de chaleur et de lumière intense s'échappait de son être. Il se recula alors légèrement de la petite fille et essaya de souffler, de se rappeler qu'il était en ce moment-même dans un cauchemar. Un simple cauchemar.

Mais un simple cauchemar qui n'était rien d'autre qu'un mauvais souvenir. Un trauma d'enfance qui avait suffisamment marqué Ambre pour que celle-ci s'en rappelle encore plus de dix ans après les faits. Non, décidemment, Apollon ne pouvait pas se calmer.

Dans la maison, les bruits de pas s'étaient faits plus précipités et plus proches. Les jurons et les menaces plus durs. Ambre blêmit davantage et se cacha finalement le visage dans ses mains alors que la porte de sa chambre s'ouvrait avec violence.

« C'est encore toi, n'est-ce pas ? C'est encore toi ! Combien de fois va-t-il falloir que je me répète avant que cela rentre dans ton petit crâne d'idiote ?! Je ne veux absolument pas de ça chez m… »

L'homme d'une quarantaine d'années, à la barbe mal rasée et aux cheveux en pétard, aux joues et au nez étonnamment rouges, scandait ces mots avec une sévérité extrême, mâchoires serrées. Il s'apprêtait d'ailleurs à donner un coup de poing à l'un des murs lorsqu'il prit conscience de la présence d'Apollon dans la pièce. Suspendant son geste, il lui octroya un regard noir, son regard faisant sans cesse l'aller-retour entre cet étranger et sa fille. Sa maudite fille.

« Qui êtes-vous ? »

Son ton était sec, menaçant. Mais Apollon ne fléchit pas pour autant.

« Mon identité importe peu. Il est hors de question que vous touchiez encore une fois cette enfant. »

Malgré la colère qui grondait et l'envie de lui décocher un beau crochet du droit qui le démangeait, Apollon garda un ton calme et posé. Ce genre de ton calme et posé qu'utilisaient les dieux et les déesses pour faire passer un message aux mortels et les dissuader de se les mettre à dos. Un ton impérieux, qui ne laissait place à aucune discussion.

Ce n'était qu'un cauchemar, certes. Mais si le dieu en pouvait changer l'issue, peut-être qu'alors Ambre arrêterait de le faire. Ce serait déjà un à rayer sur la longue liste de tous ceux qui devaient la hanter.

L'homme, que Apollon avait bien du mal à désigner comme le père d'Ambre, eut un rire amer.

« Vous êtes qui, pour me dire ça, hein ? Pour vous mêler de mes… »

Le père Jones s'arrêta brusquement, et détailla Apollon. Et plus il le détaillait, plus il blêmissait.

« C'est elle qui vous envoie, n'est-ce pas ? C'est cette… Qu'elle s'occupe de ses affaires ! J'ai encore le droit de faire ce que je veux dans ma maison ! C'est elle qui les a laissés, après tout ! »

« Personne ne m'envoie. Mais je peux vous garantir que ce n'est pas aujourd'hui que vous toucherez encore à votre fille. Je l'emmène. »

Malgré la peur qui s'installait subtilement en lui, le père d'Ambre émit un nouveau rire sans joie.

« Je ne crois pas, non. Elle mérite d'être punie. Vous n'avez… Aaah ! »

Malgré lui, Apollon n'avait su résister et venait de saisir l'homme par le col de sa chemise, avant de le coller contre le mur. Derrière lui, Ambre émit un petit hoquet où se mêlaient surprise et inquiètude.

« J'ai tous les droits. Je suis connu pour être l'un des dieux les plus impitoyables du panthéon grec lorsqu'on me met en colère. Alors, si j'étais vous, je la fermerais. J'emmène Ambre loin d'ici et vous, vous restez bien tranquillement dans votre salon, à cuver je ne sais quelle bière immonde, compris ? »

Apollon avait pris soin de détacher chaque mot, le nez plissé par l'immonde odeur d'alcool dont tout le corps de son interlocuteur semblait imprégné. Le regard ancré dans le sien, il lui avait également envoyé quelques visions des pires châtiments qu'il pourrait lui infliger.

Le père Jones était désormais blanc comme un linge et, lorsqu'Apollon le lâcha, le père de famille – si on pouvait appeler cela un père de famille -, s'écroula au sol, où il resta, muet et tête baissé.

Apollon s'empressa alors de revenir aux côtés d'Ambre, qui, plus effrayée que jamais, s'était roulée en boule et tremblait comme une feuille.

« Hé, Ambre… Ambre, tout va bien, souffla Apollon à son oreille alors qu'il frottait l'un de ses bras dans un geste rassurant. C'est fini, Ambre. Ton papa ne te fera plus de mal. »

Il fallut quelques minutes pour qu'un œil, un seul, émerge par-dessus le coude de la petite.

« Tu peux me faire confiance, Ambre, continua Apollon, du ton le plus sincère et le plus doux dont il était capable. Tu n'as plus rien à craindre de ton papa. Il faut juste que tu viennes avec moi. »

D'un geste lent, pour ne pas effrayer davantage la petite fille, le dieu du soleil lui présenta sa main droite. Ambre l'examina quelques secondes avant de souffler :

« Je peux vraiment te faire confiance ? »

L'inquiétude et la peur dans son ton ne cessaient d'attrister Apollon qui, petit sourire triste aux lèvres, ébouriffa légèrement les cheveux blonds d'Ambre – si semblables aux siens, pour ne pas dire identiques -, de sa main gauche.

« Bien sûr. Je ne te ferai jamais de mal. Et je vais t'emmener dans un endroit où tu seras en sécurité et avec des gens que tu aimes. Qu'en penses-tu ? »

« Ambre, ne l'écoute pas, il raconte n'importe quoi ! »

Apollon s'apprêtait à faire tomber malencontreusement un dictionnaire sur la tête du père Jones, lorsque Ambre lui saisit doucement la main. Quelque part, l'aversion que son père semblait éprouver pour cet étrange inconnu lui disait que ce dernier était quelqu'un de bien.

« Tu promets de ne pas me faire de mal ? », souffla-t-elle alors que ses doigts hésitaient encore un peu à se lier aux siens.

« Je peux même te le jurer. », renchérit Apollon avec un léger hochement de tête.

Et alors que son père criait une nouvelle fois son prénom, Ambre sembla prendre sa décision : après tout, qu'est-ce qui pouvait être pire qu'ici ?

Ses doigts à peine liés à ceux du musicien, les deux disparurent dans un éclat de lumière vive, laissant une douce odeur de laurier derrière eux. Et un père plus fulminant que jamais.

XXxXxXx

« Je… argh, Hermy, je n'arrive pas à comprendre ! »

Il était un peu plus de vingt-trois heures à Phoenix, et cela faisait trois bons quarts d'heure qu'Apollon faisait les cent pas dans la chambre qu'il partageait avec Hermès. Une heure était passée depuis que le dieu de la médecine avait réussi à sortir Ambre de son cauchemar, une heure qu'il avait entraperçu un fragment de l'enfance de ses descendants, et, pour être honnête, il avait bien du mal à s'en remettre.

« Comment… Comment on peut laisser deux gosses avec un individu pareil ? Tu l'aurais vu… et tu aurais vu les bleus sur les bras d'Ambre… si on peut encore appeler cela des bleus… Je… argh, je ne comprends pas ! »

D'un geste rageur, Apollon envoya valser sa lecture en cours posée sur le bureau. Le recueil de poèmes atterrit sur la moquette avec un petit bruit sourd.

« Peut-être… peut-être qu'Iris… »

Mais Hermès n'eut pas le cœur de terminer sa phrase : après tout, à quoi cela servait d'émettre une hypothèse à laquelle lui-même ne croyait guère ? Peut-être qu'Iris ne savait pas. Cela lui paraissait inconcevable : il connaissait assez la déesse pour savoir qu'elle faisait partie de ces rares divinités qui veillaient régulièrement sur leurs enfants. Et pourtant… ce qu'avait vu et répété Apollon dépassait l'entendement. On était à l'encontre de la définition de la bienveillance et cela déroutait Hermès. Aurait-il été possible qu'Iris est passée des années à faire la sourde oreille ? A regarder, sans vraiment regarder, ses enfants se faire maltraiter par leur père ? Quelque chose au fond de lui criait à Hermès que cette attitude ne ressemblait pas à sa collègue messagère. Que quelque chose clochait, qu'il manquait définitivement une pièce au puzzle. Mais laquelle ? Et pourquoi ?

Le messager imaginait mal Ambre s'être convaincue de tout cela. Quel enfant se convaincrait que son père était un bourreau ? Ou lui avait-on mis ces idées en tête ?

Hermès se frotta le visage d'une main, complétement perdu. Ambre n'était pas une menteuse et les cauchemars comme celui qu'elle venait de faire n'apparaissaient pas pour rien. D'un autre côté, il voyait mal une déesse aussi bienveillante qu'Iris laisser ses enfants entre les mains d'un individu aussi hostile et brutal. Ces deux convictions se battaient pour obtenir la première place dans son cœur et cela le rendait malade. Nauséeux.

Le silence s'installa dans la pièce, les deux dieux plongés chacun dans leurs pensées, dans leur propre dilemme intérieur. Cela sembla durer une éternité avant qu'on ne frappe à la porte.

Intrigués, Apollon et Hermès s'échangèrent un regard avant que le dieu du soleil ne se décide à aller ouvrir. Prudent, il jeta un coup d'œil à travers le judas avant d'ouvrir doucement la porte, une expression de surprise et d'inquiètude sur le visage.

Dans l'embrasure de la porte se tenait Ambre. Vêtue de son pyjama bleu clair, les cheveux légèrement en pétard et les yeux encore rougis, la fille d'Iris se balançait d'un pied sur l'autre, sa main gauche tirant inconsciemment sur l'une de ses manches.

« Tout va bien ? Tu as encore mal quelque part ? », s'enquit Apollon alors qu'Hermès sautait aussitôt sur ses pieds, de nouveau en état d'alerte.

« Non… non, tout va bien mais… »

Ambre s'interrompit, le feu aux joues, avant de passer une main dans ses cheveux.

« … Laissez tomber, je… je vais… »

Mais la jeune fille avait à peine fait demi-tour qu'Apollon lui avait doucement saisi le poignet. Les deux n'avaient pas réellement parlé de ce qu'il s'était passé mais leur relation semblait s'être apaisée, Apollon ayant sans doute découvert ce que cachait l'attitude froide de la jeune fille et Ambre grandement reconnaissante de ce qu'il avait fait pour elle.

« Je ne veux vraiment pas vous déranger… », retenta-t-elle après quelques secondes de silence.

« Mais... ?, l'encouragea Apollon, tu ne nous déranges pas, Ambre, ajouta-t-il après s'être rendu compte que son « mais » pouvait être mal interprété. J'ai fait semblant de ne pas savoir vous voir en peinture uniquement parce que j'en voulais à la terre entière de me retrouver coincé ici, tu sais ? »

Ambre l'observa pendant quelques secondes, silencieuse et cherchant à savoir si le dieu du soleil agissait par pure pitié. Mais elle n'était guère en état de tenir un débat intérieur à l'heure actuelle. Tout ce qu'elle souhaitait, c'était avoir de la compagnie. N'importe laquelle.

« Matt dort et je n'ai pas la force de le réveiller… alors je voulais voir si… »

« Si tu pouvais passer du temps avec nous jusqu'à ce que Morphée revienne à ta porte ? »

Gênée, Ambre acquiesça d'un simple mouvement de tête. Les lèvres d'Apollon se fendirent, quant à elle, en un sourire chaleureux.

« Je t'en prie, s'exclama-t-il en se poussant pour inviter Ambre à entrer. Tu as déjà joué à la belote ? »