Deuce entra dans la chambre, l'air calme mais une pointe de méfiance transparaissant dans sa posture un peu trop raide. À ses côtés, Haruta l'escortait. Mais à peine arrivé, le commandant s'en alla, lançant avec enthousiasme qu'il devait rechercher la poudre noire manquante avant que le navire ne soit coulé.

Les yeux du nouvel entrant se posèrent immédiatement sur les mains libres de son capitaine. Sa confusion et sa méfiance augmentèrent encore d'un cran. Marco haussa les épaules et retourna à son bureau, laissant clairement Ace gérer la situation avec son ami. Cependant, le jeune homme savait qu'il écoutait chaque mot de la futur discussion.

Après une seconde d'hésitation, l'homme aux cheveux bleus se rapprocha vivement de son capitaine, posant une main sur son épaule pour chuchoter.

-Tout va bien Ace ? Pourquoi veulent-ils qu'on parle ensemble ?

Il ne put s'empêcher de sourire en entendant la voix de son meilleur ami pour la première fois depuis une éternité. Il lui avait manqué ; fort et douloureusement. Quelques jour auparavant, Ace pensait même mourir sans jamais revoir Deuce, et une petite partie de lui avait refusé de permettre trop d'espoirs même alors que tout s'améliorait peu à peu. Mais maintenant... La main sûre et chaude sur son épaule l'ancrait auprès de son ami, promettant silencieusement de rester à ses côtés. Peut-être pouvait-il même enfin y croire. Son équipage était tout près, Ace avait tellement hâte de revoir tout les autres.

C'est alors qu'il se remémora son objectif d'éviter une explosion et une réelle guerre contre un yonko. Il se passa une main dans ses cheveux noirs, un peu contrit.

-Désolé de t'avoir inquiété. C'est un peu long à expliquer, mais pour l'instant, il faut un cessez le feu avec les pirates de Barbe Blanche... Et arrêter les plans de secours.

La surprise s'afficha clairement sur le visage de son second avant de céder sa place à l'inquiétude et la suspicion. Son regard oscilla vers le dos de Marco qui griffonnait paresseusement un papier puis revint sur son capitaine.

-Hé Ace, tu te souviens de ce jour au Honey-Hope ?

En entendant le nom du bar, les yeux d'Ace s'écarquillèrent brusquement en comprenant à quoi il allait faire référence. Dans l'urgence, il lui sauta immédiatement dessus pour couvrir ses lèvres avec sa main. Ils réussirent d'une manière ou d'une autre à tomber sur le lit. Ace se retrouva à califourchon sur son ami et chuchota furieusement avant qu'il ne dise quoi que ce soit de compromettant :

-DEUCE ! C'est pour une putain de bonne raison si on a appelé ça un "oh mon dieu oublions cet accident, prétextons que ce n'est pas arrivé et n'en parlons plus jamais, jamais, JAMAIS" !

Il se tourna brièvement vers le bureau, espérant que son geôlier ne les avait pas écoutés mais l'immobilité suspecte un peu trop longue du blond le trahit. Heureusement il ne s'était pas retourné vers eux. Profitant de cette seconde de distraction, Deuce réussit à dégager suffisamment sa bouche pour ricaner un :

-Tu avais pourtant aussi dit que...

Ace appuya de tout son poids sur son amis couché sous lui jusqu'à le faire couiner, hésitant à le faire définitivement taire sous un coussin. À la place, il dit de sa voix la plus menaçante :

-Un mot de plus Deuce et je tuerai, puis je ferai croire à tout le monde que ton prénom de naissance était Eustache Kimberley Hénaff, et je publierai ton journal d'aventure post mortem sous ce nom.

Ace prétendit poliment ne pas remarquer que la toux soudaine du commandant à son bureau était un éclat de rire réprimé.

Deuce cessa immédiatement de se débattre, un peu pâle à la menace. Ou peut-être était-ce la main couvrant ses voies respiratoires qui l'empêchait de respirer. Dans le doute, Ace l'enleva lentement, prêt à la remettre au moindre signe de rébellion. Heureusement, son second resta immobile sous lui, ses yeux écarquillés sous son masque.

-Tu n'oserais pas.

-Teste moi, articula très lentement Ace en imitant le sourire dangereux de Marco.

Cela fonctionna étonnamment bien sur son ami qui lui céda immédiatement la victoire, détendant sa posture rigide.

-... Bien reçu, mon capitaine.

-Pour quelle maudite raison avais-tu besoin de rappeler cette histoire ? râla Ace en relâchant doucement son emprise.

Son second battit innocemment des cils, absolument pas repentant.

-Je vérifiais juste que tu étais toujours mon bon vieux Ace et que personne ne t'avait lavé le cerveau.

Son capitaine roula des yeux et se releva, tendant la main à son meilleur ami pour l'aider, en gage de paix. Il la prit sans aucune hésitation.

-Si tu avais attendu une minute, je t'aurais déjà expliqué.

-J'ai peut être été légèrement excessif en évoquant le Honey-Hope... s'excusa Deuce.

Ace grinça des dents en entendant de nouveau le nom de ce lieu infernal mais passa outre alors que l'autre continuait :

-La situation est juste tellement bizarre, je veux dire, tout le monde ici pense que tu es coupable et que tu vas être exécuté. Nous, on sait que tu n'aurais jamais poignardé quelqu'un dans le dos.

Il s'arrêta, tripotant le bord de son masque comme à chaque fois qu'il était nerveux. Ace s'adoucit en le remarquant. Il lui devait la vérité après tant de temps à inquiéter les Spades. Le capitaine tapota le lit à côté de lui. Autant être assis, raconter tout allait prendre du temps.

Ainsi commença le récit de son emprisonnement, depuis le début. En bon public, son second écouta attentivement, réagissant lors des passages les plus importants. Au début, il jetait quelques coups d'œil nerveux vers Marco, conscient de sa présence proche. Mais au fil de l'histoire, ses regards vers le commandant s'adoucissaient quand Ace expliquait son aide puis l'offre des fausses menottes.

-Ça, c'est une sacrée aventure, finit par souffler Deuce dont les doigts se contractaient comme à chaque fois qu'il voulait écrire dans son journal.

-Et c'est pour ça que pour l'instant, ne faites pas de grabuge les gars, précisa le capitaine très utilement les connaissant.

Son ami lui adressa un clin d'œil lent :

-On fera de notre mieux, mais tu nous connais... D'ailleurs Skull a récupéré ton chapeau, on le garde au dortoir pour l'instant.

Le capitaine fronça les sourcils au détournement soudain de sujet avant qu'il n'ait l'occasion de protester. Mais la bonne nouvelle suffit à le convaincre de ne pas être trop regardant sur leurs petites manigances. Ce qui était probablement le plan de l'homme masqué depuis le début. Au moins, son couvre-chef fétiche n'était pas perdu. Malheureusement il ne put demander à récupérer son chapeau, ni même son poignard. Deuce ne resta pas longtemps, même si Ace le fit d'abord avouer contre son gré là où se trouvait la poudre volée. Ainsi que les armes. Et les munitions.

Puis il se rendit compte après quelques minutes de discussion qu'il devait en fait absolument se préoccuper des méfaits de ses amis. Ce que Deuce laissait sous entendre était suffisamment inquiétant pour nécessiter une intervention.

Alors, avec un soupir fatigué, il découragea leurs plans de couper les voiles du Moby, d'appeler Garp à la rescousse, de barricader aléatoirement des portes, de prendre un des pirates en otage pour négocier la libération d'Ace, de voler un escargophone pour provoquer une guerre, de jeter du poil à gratter dans les lits, d'être globalement des nuisances et de remplacer tout l'alcool de Barbe Blanche par de l'eau de mer.

Il voyait distinctement Marco se détendre à chaque nouvelle catastrophe évitée, bien que le dernier plan reçut son approbation discrète. Bref, Deuce put seulement s'en aller après avoir promis sur son honneur d'encourager les Spades à faire profil bas.


Pour une fois, le déjeuner fut relativement tranquille. Les commandants, étonnamment calmes, discutaient de choses ennuyeuses telles que le budget et les stocks de diverses choses. Barbe Blanche et Ace s'évitaient mutuellement comme lors des autres repas, leurs places éloignées. Aucun des deux ne voulait exacerber les tensions.

C'était si calme que la narcolepsie faillit frapper Ace en plein milieu du réfectoire. Ses oreilles commençaient à bourdonner alors qu'il se laissait peu à peu tomber dans ce sentiment de torpeur. Quelque part dans la salle, quelqu'un frappa un peu trop fort sur une table et le jeune homme releva immédiatement la tête.

Le bruit lui rappelait à temps qu'il était toujours dans une pièce remplie d'ennemis. Cela suffit à le maintenir suffisamment sur ses gardes pour chasser tout sommeil.

... Bien qu'il s'écroula une bonne demi-heure sur le lit de Marco, une fois de retour dans la chambre. Comme la veille, le commandant le laissa même de nouveau s'occuper de quelques rapports en navigation incomplets. Il y en avait plus qu'il ne le pensait, autant en cartographie qu'en météorologie.

Marco avait probablement magouillé d'une manière où d'une autre pour lui donner de quoi s'occuper. Il n'allait pas s'en plaindre. Le jeune homme avait retrouvé sa place sur le sol, amenant avec lui un oreiller pour plus de confort.

-On se dirige vers l'île de Vorthale ? s'enquit Ace après une vérification et estimation de la trajectoire.

Cela lui semblait plutôt évident même sans que le commandant ne le dise. C'était à vue de nez encore à trois jours de navigation. D'après les informations, l'île se trouvait dans une zone stratégique et il y faisait un climat chaud très agréable, attirant l'attention de pirates mal intentionnés.

-On y fait une escale de quelques jours, confirma Marco. Il y a des tensions de quelques gros bonnets traînant dans la région. Alors on va réaffirmer que l'île est toujours sous notre protection... Et les plages de sable chaud sont un bon argument pour s'y attarder.

Ils furent alors interrompus par des bruits de pas s'arrêtant juste devant la porte, suivis d'un toquement inhabituel. Les deux se figèrent, échangeant un regard surpris. À l'air de Marco, il ne s'agissait pas d'un des commandants dans la confidence. Retrouvant sa lucidité, Ace essaya de ressembler ses feuilles étalées au sol tandis que le blond se levait, le poussant vers le lit avec un enchaînement de mimiques, puis se pencha pour ramasser le bazar.

Mais celui derrière la porte ne voulut pas attendre et appuya sur la poignée. Ace eut tout juste le temps de mettre ses mains derrière le dos pour cacher l'absence de menottes avant que Speed Jiru n'entre.

Il marqua une pause, son regard passant sur le côté droit du visage d'Ace -il avait oublié de retirer le crayon derrière son oreille- puis vers Marco qui se relevait calmement après avoir récupéré les papiers au sol. Avec un peu de chance, cela passerait pour des documents simplement tombés.

-Jiru. Un problème ? demanda-t-il en les posant sur son bureau.

L'autre homme ne ferait pas irruption ainsi si ce n'était pas important. Le second commandant se remémora alors la raison de sa venue :

-Thatch a ouvert les yeux !

Immédiatement le visage de Marco s'illumina, perdant l'accumulation des derrières semaines de stress. Il était prêt à aller immédiatement à l'infirmerie. Mais après une brève réflexion, il devina que le patient aurait déjà suffisamment d'agitation autour de lui pour en rajouter inutilement. Surtout que les premiers réveils pouvaient être un peu confus et très brefs.

-Je suppose qu'Izou y est actuellement ?

Jiru lui sourit d'un air entendu :

-Bien sûr, il est arrivé juste avant son réveil ; je vais finir par croire qu'il est télépathe. Teto est déjà en train de vérifier son niveau de conscience.

Sachant son ami entre de bonnes mains, Marco hocha la tête. Il demanda quelques détails supplémentaires et à être informé des résultats. Sous son apparence nonchalante, il bouillonnait d'excitation réprimée à la bonne nouvelle. Se concentrer sur sa paperasse était désormais bien plus difficile.

Après cinq minutes à fixer le vide, il finit par renoncer à prétendre travailler. Il préféra à la place observer Ace qui avait prudemment repris sa place sur le lit et terminait un calcul sur un relevé météorologique, concentré. Il rejeta une mèche noire derrière son oreille, fronçant les sourcils en examinant son résultat.

-Un problème ? s'enquit Marco.

Le jeune homme tressaillit, ne s'étant pas rendu compte qu'il était observé. Il se reprit vite :

-Pas forcément. Demain soir, nous traversons une zone assez sujette aux trombe marine à cause de cet endroit où les vents de... Enfin peu importe. Ça reste peu probable, mais il vaut mieux être sûrs.

-Oh, alors que proposes-tu ? Contourner cette zone yoi ?

-Vu la faible possibilité, pas besoin de faire un détour. Mais j'aurais besoin que tu t'envoles pour prendre quelques mesures supplémentaires demain matin.

Marco acquiesça, un peu amusé des ordres assurés d'Ace. C'était agréable de voir qu'il prenait peu à peu confiance.

Un peu plus tard, le rapport d'infirmerie arriva. Cette fois-ci, ils réagirent à temps pour masquer la liberté relative d'Ace. Peut-être parce que cette fois, le coursier attendit la réponse de Marco avant d'entrer et délivrer son fardeau.

Le phénix se plongea immédiatement dans la lecture. Il parcourut soigneusement l'état de santé général, puis l'échelle de Galsgow détaillée qui atteignait un score très encourageant de 11 sur 15, ainsi que les diverses annotations complémentaires. Voilà pourquoi Teto était sa préférée : précision et clarté. En plus de savoir tenir tête à Père pour le forcer à respecter ses prescriptions médicales. Ce n'est pas pour rien qu'elle était officieusement surnommée la commandante de l'infirmerie. Le rapport ajoutait cependant que Thatch s'était rendormi à peine le test effectué.

Pendant ce temps, Ace lui jetait de petits coups d'œil. Son doigt tapotait nerveusement au sol, déconcentré de son travail. Il voulait savoir comment Thatch allait. Marco finit sa lecture et la lui résuma lorsqu'il remarqua son impatience.

-Malheureusement, il n'a pas encore dit quoi que ce soit sur le soir de l'attaque, il était surtout confus à son réveil, ajouta le phénix.

Ace haussa les épaules, assez indifférent. Un jour de plus ou de moins n'allait rien changer. Il était surtout soulagé que l'état du cuisinier se soit amélioré. Et puis Marco n'était pas un geôlier désagréable. Loin de là.

Le commandant hésita, puis sortit de son bureau un compte rendu, gardé là depuis la veille.

-Cependant, tu dois savoir que Teach a déjà donné sa version de l'histoire.

Il tendit le papier à Ace qui le prit en fronçant les sourcils, les yeux le parcourant rapidement. Son air auparavant satisfait s'assombrissait à chaque ligne. Son énervement atteignit son paroxysme lorsqu'il lut la partie où Teach se faisait passer pour un héros qui avait essayé d'intercepter Ace attaquant Thatch.

-Quel tas de merde, cracha-t-il.

Il le reposa sur le bureau pour ne pas céder à la tentation de le brûler. Il sentait son feu picoter dans ses mains, se concentrant au bout de ses doigts sous sa colère. Machinalement, il les frotta pour essayer de faire disparaitre la sensation. Marco lui jeta un regard compatissant :

-Le rapport n'a pas été officiellement révélé mais les infirmiers ont tendance à parler. Et quand Teach sortira de l'infirmerie, on ne pourra pas l'empêcher de répandre sa version. Pas mal de gars de l'équipage veulent que tu sois jugé et condamné. On continue de repousser jusqu'au rétablissement de Thatch.

Une pensé fit tiquer Ace qui se mordit la lèvre, soudain inquiet.

-Mais si Teach s'en prend de nouveau à lui pour s'en sortir ?

-Ne t'en fais pas, les deux sont sous bonne garde, le rassura Marco avec un air bien trop satisfait.

Le jeune homme se détendit à son assurance. S'il avait appris quelque chose lors de ses mésaventures, c'est que le commandant ne trahissait pas sa parole. Il pouvait lui faire confiance pour ça.

-Je vais aller voir Oyaji pour lui en parler, l'informa son aîné. Veux-tu venir ? Je peux envoyer Izou ou Haruta te garder sinon.

Ace tergiversa quelques secondes, peu sûr de vouloir être en compagnie de Barbe Blanche. Mais il préférait assister à la conversation si elle concernait sa situation. Alors il finit par accepter de venir.

Une demi-heure plus tard, Marco à ses côtés ouvrait la porte de la chambre personnelle du géant.

Ce n'était pas une première pour Ace. Après tout, il y était parfois entré pour ses tentatives de meurtre... Bon d'accord, après réflexion il pouvait comprendre pourquoi tout le monde le prenait pour l'agresseur de Thatch. Mais le capitaine ennemi le retenait alors en otage sur le bateau, il ne pouvait pas comparer les situations.


Newgate, confortablement assis dans sa chaise, se redressa à l'entrée de son fils et d'Ace. Marco s'approcha avec un moindre ressort dans ses pas, confiant et détendu. Cependant il ne déploya pas ses ailes pour se percher sur son épaule comme il en avait l'habitude.

Le vieil homme ne put s'empêcher de remarquer qu'il se tenait consciemment ou non entre lui et le prisonnier. Ce dernier préférait rester un peu en retrait, les bras aussi croisés que ses menottes le permettaient. Le plus jeune se crispa imperceptiblement en rencontrant son regard, alors il le détourna, ne voulant pas le mettre plus mal à l'aise qu'il n'était déjà.

-Marco, Ace. Que me vaut ce plaisir ?

Bien entendu, il avait déjà une légère idée de la question. Les informations allaient vite à bord. Il était auparavant fier de savoir tout ce qu'il se passait sur le navire.

Du moins, jusqu'à une certaine trahison. Bien qu'il ait fait de son mieux pour le cacher à Marco, l'apprendre avait été une frappe brutale de réalité. Comme si le monde qu'il connaissait, ou du moins croyait connaître s'était soudain écroulé autour de lui.

Il avait vu grandir Teach, ce gamin des rues sans nul part où aller, devenu un homme sur qui l'équipage comptait. Barbe Blanche se moquait de la gloire et des trésors. Il voguait sur les mers pour offrir une famille à ceux qui n'en avaient pas et prendre des îles sous sa protection.

Mais soudain plus rien n'avait de sens. Comment protéger ses fils, quand la menace venait du cœur même de leurs frères ? Et surtout... Y avait-il d'autres Teach parmi eux ? Ses enfants, cultivant les rancœurs ou un but caché, prêts à marcher sur leurs propres camarades pour l'atteindre ? Newgate n'avait rien vu. Par aveuglément volontaire, peut-être, ou parce qu'il n'avait su consacrer assez de temps à ses fils pour le remarquer.

Il avait échoué. En tant que capitaine, mais surtout en tant que Père.

-Je suppose que tu as déjà entendu parler du réveil de Thatch ? commença prévisiblement le blond.

-Gurararara bien sûr, dit-il sincèrement heureux du rétablissement de son enfant. Jiru m'en a informé. Bien que je n'ai pas encore eu les détails.

Les infirmières n'étaient pas encore passées pour leurs vérifications quotidiennes et il ne pouvait se toute façon pas pour un sou comprendre tout le jargon médical que Marco et Teto affectionnaient tant. Son fils commença immédiatement à lui raconter les dernières nouvelles. Il l'écouta avec attention, souriant à l'énergie qui transparaissait sous son air flegmatique habituel.

Cependant une fois les bonnes nouvelles partagées, Marco se calma et se redressa visiblement comme à chaque fois qu'il souhaitait aborder un sujet sensible. Même à bientôt 42 ans, après plus d'un quart de siècle dans l'équipage, il n'avait jamais perdu cette habitude. Il revoyait encore cet adolescent blond, à peine plus haut que son genou, la posture raide mais déterminé malgré la peur de décevoir. Sur le point de lui confier qu'il était un enfant différent des autres. "Un monstre", avait-il dit d'une voix qui finissait à peine de muer.

C'est peut-être là l'une des raisons pour lesquelles Newgate s'était mis en tête d'adopter ces pseudos "monstres" qui croisaient sa route. Ces enfants perdus, différents des autres ou simplement malchanceux, rejetés par la société. Des abîmés par la vie qui la plupart du temps ne souhaitaient pourtant qu'une maison. Ils avaient tous cette flamme dans les yeux, un désir ardent d'être reconnus. Il pouvait le voir aussi clairement que si c'était écrit sur leur visage.

Il attendit calmement que Marco finisse de réfléchir à comment aborder le sujet. Ou plus probablement à une douzaine de formulations alternatives, avant de s'arrêter sur la toute première à laquelle il avait pensé. Le blond prit une inspiration :

-Oyaji, que se passera-t-il une fois que la trahison de Teach sera révélée ?

Marco affirmait de nouveau clairement sa position du côté d'Ace, refusant de prétendre être impartial dans ce drame. Le jeune homme s'était trouvé un allié précieux. Mais cela ne rendait pas la tâche de Barbe Blanche plus facile. Il allait devoir juger un de ses enfants qui s'en était pris à son frère de la manière la plus vile.

Une honteuse partie de lui aurait préféré que le coupable soit Ace, ici depuis quelques semaines à peine, et non un homme qu'il a adopté et vu grandir. Il ferma brièvement les yeux pour essayer de faire disparaitre cet horrible goût d'échec. Le Moby était censé être leur maison, un endroit sûr pour sa famille.

-Il sera jugé par le Conseil des Commandants pour décider de son sort.

Dans un cas aussi grave, les peines décidées par vote pouvaient aller d'un bannissement définitif jusqu'à la peine de mort. Heureusement, la survie de Thatch rendait cette possibilité très peu probable. Malgré tout le mal que cette traîtrise avait pu causer, Barbe Blanche n'était pas prêt à devenir le meurtrier d'un de ses enfants. Les pirates étaient très loin d'être des saints, pouvant tuer ou être tués à chaque instants. Mais c'était toujours des inconnus, dénués de rêves et d'idéaux. Des ennemis sans visages, ni personnalités, ni familles. Du moins, c'était facile de s'en convaincre. L'illusion était plus difficile à maintenir avec un homme adopté depuis des décennies.

Mais il se reprit. Il n'avait pas le temps pour ces pensées, pas quand il devait réparer ses erreurs. À commencer par celles commises envers Ace. Alors il se tourna vers le jeune homme avant d'ajouter :

-Quand à toi fils, tu sera libre de partir si tel est toujours ton souhait. Nous avons une dette envers toi pour avoir sauvé Thatch, et tu es en droit de demander réparation pour ton emprisonnement.

Le prisonnier commença à se hérisser à l'appellation, mais la reconnaissance de la dette l'immobilisa dans son acte. Il décroisa un seul bras très lentement, l'autre main toujours agrippée, la méfiance gravée dans sa posture.

-Quel genre de réparation ?

-Et bien, tout ce que tu voudras dans la mesure du possible. Ça peut être une compensation financière ou matérielle, un statut d'allié, un parrainage, des laissez-passer ou encore divers avantages.

Et Newgate le pensait sincèrement. Il ferait de son mieux pour accéder aux souhaits du capitaine et faire amende honorable. Il en allait de son honneur. Et Izou, passé plus tôt, avait été particulièrement convainquant en lui expliquant en quoi forcer un capitaine adverse à rester sur le Moby avait été une erreur dès le départ. Ace fronça à les sourcils :

-Et je n'aurai pas à jurer allégeance et devenir un vassal pour ça ?

-Les équipages de l'armada ne sont pas des vassaux, la relation va dans les deux sens, intervint Marco.

Le jeune homme plissa son nez couvert de tâches de rousseur. Sa moue renfrognée rappelait encore quelques choses d'insaisissablement familier à Barbe Blanche. Mais une fois de plus, il ne put mettre de mot dessus, et l'impression se dispersa.

-Peu importe, c'est pareil. Je peux demander n'importe quoi sans contrepartie alors ?

Barbe Blanche acquiesça. La proposition n'était pas destinée à être un test mais cela en dirait beaucoup sur sa personnalité. Il était, à vrai dire, un peu curieux de ce que pourrait demander l'enfant. Ce dernier avança d'un pas et releva des yeux gris illuminés d'une lueur effrontée.

-Et si je demande ta tête, vieil homme ?

Marco roula des yeux à sa provocation et Newgate, surpris, ne pu retenir un rire tonitruant.

-Malheureusement ce n'est pas une demande que j'appellerais "raisonnable", je vais devoir refuser.

Le coin des lèvres du jeune se relevèrent en un demi sourire moqueur alors qu'il enfonçait nonchalamment ses mains dans les poches de son short.

-Je n'en voudrais pas de toute façon. Je te surpasserai avec ma propre force.

-Tu es bien ambitieux, mon garçon, j'aime ça ! Tu as du potentiel mais tu es encore bien jeune. Actuellement tu ne pourrais pas vaincre la moitié de mes commandants.

Ace grinça des dents. Cependant, il ne put nier la dure vérité derrière ses paroles. Ce n'était pas une insulte pourtant, l'équipage de Newgate était le meilleur au monde pour une raison. Chacun des commandants atteignaient ou dépassaient le niveau des grands corsaires. Même s'il ne connaissait pas exactement son âge, le petit capitaine n'avait probablement même pas encore la vingtaine. Encore un bébé, à l'échelle de Newgate. Et pourtant, il montrait la détermination de pirates du double de son expérience.

Même si l'enfant continuait sa route par ses propres moyens, hermétiquement fermé à l'idée de rejoindre l'équipage, il tenait à garder un œil sur lui. Un D était toujours promis à un grand destin après tout. C'était déjà une petite force de la nature, fougueux et tenace. Et Barbe Blanche attendait avec impatience de voir en quel genre de fleur s'épanouira ce bourgeon d'homme.

-Tu as encore du temps pour t'entraîner avant de me combattre. Affronte moi quand tu penseras être au niveau, mais en attendant forme toi contre des adversaires puissants.

S'il n'avait pas été attentif, il aurait pu manquer la légère oscillation de son regard vers Marco à cette dernière phrase. Il lissa sa moustache pour cacher son sourire. Peut-être qu'il pouvait y voir une ouverture. Une minuscule, certes, et pouvant à tout instant se refermer. Mais toujours une possibilité bien réelle.

-Tu regretteras tes conseils, finit par dire Ace d'un ton léger.

-J'ai hâte de voir ça ! Mais je maintiens mes propositions.

Et il ne parlait pas seulement du remboursement de sa dette. Il y aurait toujours une place dans l'équipage pour lui, si jamais le jeune capitaine changeait d'avis et décidait de rester. Il sut que l'adolescent comprenait l'implicite derrière ses paroles car il écarquilla légèrement les yeux. Le souffle d'Ace se coupa un instant alors qu'il se figeait avec le visage d'un funambule en équilibre précaire. Il finit par se ressaisir, recroiser ses bras et hocher sèchement la tête :

-J'y réfléchirai.

Et ce fut tout. Mais c'était suffisant.


Ace resta silencieux sur le chemin du retour, et même une fois arrivé dans la chambre. Une idée auparavant inconcevable s'était implantée dans son esprit et il ne parvenait pas à s'en défaire. Juste quelques mots et un instant de distraction, puis il s'était surpris à réfléchir. Devait-il rester ?

Pas pour toujours, bien sûr ; peut-être seulement quelques mois. Une chose était vraie, c'est que l'équipage du Yonko était le plus puissant au monde. Il pourrait y trouver tant d'adversaires de taille pour s'entraîner. Ses Spades auraient l'occasion d'apprendre et d'améliorer leurs compétences auprès de très bons spécialistes. Leurs familles seraient sous protection jusqu'à ce qu'Ace ait à son tour une flotte assez grande pour être présente dans tout les océans.

Il pourrait lui aussi agir et peut-être même sortir combattre avec une division, ne plus être inutile pour protéger les peuples contre des ennemis trop puissants. Il se souvenait encore de son impuissance lorsqu'il avait dû abandonner à son sort le pays des Wa, laissant derrière lui Yamato, O-Tama et bien d'autres.

Alors peut-être...

Il écrasa l'idée fermement. Il devait cesser ces stupides élucubrations. Il était, quoi qu'il arrive, le descendant de Gol.D Roger. Le danger se cachait sous chaque conversation, au milieu de tout ces gens qui avaient un jour ou l'autre croisé son géniteur. Chaque seconde supplémentaire sur ce bateau était un risque inutile pour son identité. Les sonnettes d'alarme s'accumulaient dans son esprit, le suppliant de fuir, vite avant que...

"S'il avait un fils ? Il faudrait le noyer comme un rat dans de l'eau croupie" "... l'éventrer, le prendre avec ses propres tripes !" "... même les chiens et les porcs ne voudraient pas de son cadavre" "et en engrais, il ferait pourrir les plantes zrahahahaha".

(Quand il était rentré ce soir là, les poings meurtris et son tuyau rouge de sang séché, Sabo avait juste soupiré tristement.)

Ace ne voulait plus y penser.


Marco avait fini ses rapports remarquablement vite, maintenant que sa charge de travail s'allégeait. Le navire retrouvait peu à peu son rythme, les commandants travaillaient efficacement. Ace s'occupant d'une partie de la paperasse en navigation était un bonus non négligeable. De plus, Deuce avait tenu sa parole et les Spades se tenaient à carreau. Ce retour à la normalité rendait le phénix particulièrement de bonne humeur.

Les deux hommes ressortirent même sur le pont sous les doux rayons de fin d'après-midi. Le phénix en profita pour s'assoir sur le sol et finir son livre, tandis qu'à ses côtés, si près qu'ils se touchaient presque, Ace s'étalait dans une flaque de soleil comme un gros chat satisfait.

Il y avait un nombre étonnamment élevé de Spades qui rôdaient dans les alentours, s'échangeant entre eux des coups de coude et des chuchotements. Ils ne s'approchaient toujours pas, jetant des regards vers leur capitaine avant de hocher la tête et continuer leur chemin. Puis ils faisaient demi-tour et se postaient à une relative proximité. C'était à peu près les espions les moins subtiles des mers. Marco, supposa qu'ils surveillaient tout signe d'abus de pouvoir sur Ace. Il ne faisait aucun doute qu'il subirait des représailles si c'était le cas.

L'espèce de puma (ou quelque soit l'espèce du félin) géant des Spades finit par s'approcher prudemment de son maître, rampant presque dans une tentative d'être discret. Marco se tendit, toujours méfiant envers les animaux sauvages qui pouvaient être imprévisibles. Mais Ace ouvrit les yeux au son des griffes sur le plancher et immédiatement tendit les bras :

-Kotetsu ! Viens là minou !

L'animal abandonna immédiatement sa timidité, sautant sur le logia sans hésitation. Ils roulèrent sur le sol. Le phénix se crispa au mouvement brusque mais le rire ravi d'Ace sous les coup de langue du félin le rassura vite. Honnêtement peut-être que Marco était censé intervenir, empêcher tout contact entre le jeune homme et ses anciens compagnons ne serait-ce que pour préserver les apparences. Mais bon, on pouvait bien lui pardonner un petit manque de prudence. Ce n'était qu'un chat après tout.

Après avoir chahuté, les deux trublions s'allongèrent l'un contre l'autre pour faire une sieste. Le bras d'Ace encerclait le torse de l'animal, le visage à moitié plongé dans l'épaisse crinière. Il avait l'air paisible. Marco s'appuya plus confortablement contre le garde-corps et reprit son livre.

Au loin, quelques Spades observaient la scène, l'air satisfaits.


Ce soir là, Haruta et Izou débarquèrent dans la chambre du commandant blond, un paquet de cartes en main. Ils avaient apparemment décidé de faire une soirée de jeu malgré les yeux levés au ciel du phénix qui les laissa néanmoins entrer. C'était une soirée d'intégration, prétendirent-ils. Ace fut un peu sceptique mais on lui força quelques cartes entre les mains et il n'eut pas forcément son mot à dire.

La partie de poker commença une fois que Marco et Izou parvinrent, par un "Non." ferme et synchronisé, à dissuader le troisième commandant qui proposait la version strip. Tous s'assirent en cercle au sol en raison du manque de table et de chaises. D'un commun accord, ils décidèrent de ne pas miser d'argent.

Ace s'amusa en fait énormément. Le trio bavardait avec insouciance et il en apprenait beaucoup sur l'équipage au gré du jeu et des discussions. Il ne vit pas le temps s'écouler jusqu'à ce qu'ils doivent s'arrêter pour allumer une lanterne lorsque le jour céda sa place à l'obscurité.

-Awwww pourquoi tu gagnes encore Aaaaace, se plaignit Haruta qui se laissa tomber face contre terre avec les bras tendus devant. Ne viens jamais aux tournois du mois s'il te plaît, il y a déjà assez de bons joueurs...

-Pour quelqu'un dont l'équipage s'appelle "Spade" et qui a littéralement un prénom de carte, on aurait dû s'en douter, commenta Izou en mélangeant adroitement le jeu puis le tendant à Marco.

Ce dernier sourit, récupérant le paquet et le redistribua pour l'ultime partie :

-L'épée de Roger s'appelait aussi Ace et pourtant je n'ai jamais vu quelqu'un d'aussi mauvais aux cartes.

Ce n'était qu'une réflexion sans arrière pensée mais en une seconde, le sang d'Ace se glaça dans ses veines. Son cœur battit dans ses tympans, étouffant un instant les sons extérieurs. C'était comme être brutalement plongé sous des kilos de neige, engourdi et le souffle coupé par l'attaque surprise. Il avait passé presque 20 années de sa vie à savoir inconsciemment respirer, sans même y penser. Mais à cause d'une seule phrase, cela semblait être devenu un effort insurmontable.

Il enfonça ses ongles un peu trop longs dans sa cuisse sous la table. S'ancra par la douleur avant que quelqu'un ne s'aperçoive de son moment de panique. Il lui fallut un instant pour se rappeler que son identité n'était toujours pas en danger. Mais avec l'adrénaline pompant dans son sang, soudain il eut envie de rire. Comme... Sérieusement ? Il apprenait ainsi l'origine de son prénom ? L'idée d'être nommé d'après la célèbre épée de Roger lui donnait envie de glousser hystériquement. Heureusement il avait encore trop de santé mentale pour ça. Ou il était trop abasourdi. À la place il se concentra sur autre chose :

-Vous... Jouiez aux cartes avec cet homme ?

Honnêtement, il ne voulait pas poser de question sur lui. Mais lorsqu'il le dit, l'étrangeté de cette information le percuta enfin. Leurs équipages étaient de mortels ennemis, tout le monde le savait, n'est-ce pas ? Le trio de commandants échangea un regard et ils eurent l'air indulgents. Marco expliqua patiemment :

-Le Roi des Pirates étaient un homme comme les autres. Nos équipages étaient rivaux mais on a eu l'occasion de faire quelques fêtes ensemble.

-Pops gagnait des fortunes à plumer Roger, soupira Haruta avec nostalgie. Il tombait dans les pires bluffs.

Ace cligna des yeux, toujours perdu, confus et stupéfait. Alors les capitaines étaient des sortes... d'amis ? Même pendant leurs affrontements de légende universellement craints ? Izou roula des yeux :

-Je suis toujours persuadé qu'il a appelée son épée comme ça à cause de Blackjack. Il vivait pour attirer son attention.

-Blackjack ? répéta-t-il, le surnom sonnant familièrement à ses oreilles.

Le vieux merdique n'avait-il pas mentionné ce nom, une fois où deux, avant de secouer la tête et de prétendre que ce n'était rien ?

-Rouge, la capitaine de l'équipage Blackjack. Il faisait tout pour l'impressionner yoi.

Les mots de Marco furent un autre coup de poings métaphorique dans les poumons du jeune prisonnier. Le prénom de sa mère. Il ne savait même pas qu'elle était une pirate. Ces minuscules morceaux d'informations furent avidement mémorisés. D'autres personnes l'avaient rencontrée. Cette même femme courageuse qui lui avait donné sa vie avant même de le connaître. C'était comme apprendre qu'un mythe était en fait réel. Gramps n'avait dit que le strict minimum.

Son instinct le poussait à poser autant de questions possibles sur elle, donc l'existence semblait pour la première fois tangible. Mais il ne pouvait pas sans attirer l'attention et la curiosité des commandants. La chance lui sourit cependant car le trio commençait à échanger de vieux souvenirs.

-Vous vous rappelez quand elle lui a fait croire que les hommes poissons se transformaient en sirènes les nuits de pleine lune ? se moqua Izou.

Haruta rit tellement au souvenir qu'il tomba presque à la renverse.

-Et quand elle l'a persuadé qu'un pommier pousserait dans son estomac s'il mangeait un pépin ! Il a refusé d'approcher le moindre fruit pendant des jours.

Marco roula des yeux.

-Ça aurait pu être dangereux. Crocus, -le médecin de Roger, précisa-t-il à Ace- a dû demander à Blackjack de démentir avant qu'il n'attrape le Scorbut.

Les deux autres commandants reniflèrent, synchronisés. Le geisha ajouta quelques jetons supplémentaires à la mise avant de dire :

-Un capitaine qui n'écoute pas son médecin mérite ce qu'il lui arrive. Mais il faut dire qu'elle était très convaincante.

-Il était surtout complètement et stupidement amoureux, acquiesça le phénix.

Ace, plongé dans ces histoires, sentit un coude lui piquer les côtes. Il mit quelques secondes à comprendre que c'était son tour de jouer. Izou s'appuya au mur, le regard nostalgique.

-Il était comme un papillon de nuit après une chandelle, toujours à lui tourner autour au risque de se brûler. Je me demande ce qu'elle est devenue...

-Et puis... Elle était sur Baterilla, et il y avait ces rumeurs... hésita Haruta.

Il y eut un silence lourd et tendu, contrastant douloureusement avec la précédente atmosphère enjouée. Le massacre restait dans les mémoires, même des année après, malgré les vaines tentatives du gouvernement pour le dissimuler. Ace replia ses genoux contre son torse, se sentant nauséeux. Il savait la vérité. Toutes ces femmes et leurs enfants avaient été tués à cause de lui. À cause de sa simple existence.

Izou reprit, les mains crispées de colère sur ses cartes et le ton venimeux de dégoût :

-Ce putain de gouvernement, un jour ils payeront pour tout ça. Ils ont tué des centaines de personnes pour un pauvre bébé qui peut-être n'existait même pas.

-Et si cet enfant existait vraiment ? demanda une voix basse et douce.

Tout le monde se tourna vers Ace qui jusque là était resté silencieux. Les mots étaient sortis de sa bouche contre sa volonté et sa raison. À quoi s'attendait-il en posant cette question ? Il prétendit étudier ses cartes pour ne pas croiser leurs regards, effrayé de ce qu'ils pourraient y lire. Et de ce qu'il pourrait y voir en retour. Dans sa main, un roi et un as de pique lui faisaient face comme un présage.

-Et bien, même dans l'éventuelle idée qu'il serait né et aurait survécu... Ce gamin n'a rien à voir avec Roger hormis quelques gènes en commun, soupira Marco. Mais pour un père qu'il n'a jamais connu, les marines en étaient terrifiés.

Le plus jeune joua nerveusement avec les perles de son bracelet, cherchant la moindre preuve de haine envers cette enfant hypothétique dans ces mots. Il n'en trouva pas.

Haruta eut un petit rire sec dépourvu d'humour, tirant une carte avec un peu plus de force que nécessaire.

-Ils ont eu peur qu'il se revendique Prince des Pirates ou quelque chose comme ça. Comme si c'était un titre héréditaire !

-De toute façon, le plan du gouvernement a échoué. La volonté de Roger s'est répandue dans le monde avec ses dernières paroles yoi. La plus grande ère de piraterie de tout les temps est loin d'être terminée.

-Teeeellement de travail pour surveiller tout ces nouveaux équipages, se plaignit dramatiquement le commandant vert. Pas d'offense Ace, vous les rookies êtes juste trop nombreux.

Le jeune homme réussit à lui sourire, un peu plus détendu maintenant que le sujet sensible s'éloignait et agita la main pour montrer qu'il ne le prenait pas personnellement. Haruta continua sa diatribe :

-En plus, la plupart ne veulent que s'enrichir en pillant les civils, ils s'en foutent de trouver Raftel, de la recherche de la liberté ou de lutter activement contre le gouvernement.

-Aaah les jeunes de nos jours, ils ne vivent que pour la paresse et l'argent facile, toutes nos belles valeurs de piraterie se perdent ! le taquina Izou avec un sourire narquois.

-Tu... ! Tu déformes mes propos !

Les deux commencèrent à se chamailler et le capitaine sentit sa pression nerveuse redescendre. Cependant lorsqu'il releva les yeux, il remarqua le regard d'un Marco silencieux s'attarder brièvement sur lui. Il le détourna rapidement quand son cadet haussa un sourcil vers lui. Ce n'était probablement rien alors.

Le jeu se termina sur un Carré d'Ace qui lui concéda la victoire.


Enfin les retrouvailles avec Deuce (et Kotetsu !), plus un réveil de Thatch ! L'échelle de Glasgow dont parle Marco est une unité de mesure pour le niveau de conscience lors d'un coma.

Ace a également sa première vraie discussion avec Barbe Blanche, les négociations commencent

J'avoue que je n'ai aucune idée de comment jouer au poker, bien que j'ai essayé de rechercher

Portgas D. Rouge en capitaine d'un équipage nommé Blackjack ne vient pas de moi mais de plusieurs autres fanfictions. J'aime bien l'idée donc je l'utilise ici, si ce n'est pas dérangeant

Les noms d'îles, de bars, de villes et d'à peu près tout les Barbe Blanche aléatoires, excepté les commandants, sont purement inventés.