/!\ ce chapitre contient des scènes de combat avec des blessures graves décrites.


Quand Marco alla finalement chercher son prisonnier, il se sentit coupable de l'arracher à ses amis. Ace semblait tellement dans son élément, son sourire brillant comme un soleil alors que son équipage gravitait autour de lui. Plus heureux qu'il n'avait jamais osé le montrer jusqu'ici.

Malgré ça, il ne se plaignit pas une seule seconde en voyant le commandant ouvrir la porte, rattachant simplement ses menottes avec un petit froncement de nez. Ses camarades vinrent l'étreindre et le tapoter dans le dos une dernière fois dans une effusion sentimentale. En les voyant ainsi, le blond promit intérieurement de les laisser se retrouver aussi souvent que possible.

Il n'eut même pas le cœur à lui dire de retirer son chapeau, tout en sachant que ça soulèvera des questions. Un des pirates, un peu en retrait, étudia Marco d'un regard obscurci par son bandana rayé.

-Attention à lui, commandant. Nous surveillons.

Le commandant cligna des yeux, un peu surpris par ces paroles étranges, presque une mise en garde. Il parlait d'Ace n'est-ce pas ? Marco n'avait pas prévu de faire de mal à son prisonnier dans un avenir proche ou lointain. Mais avant de pouvoir obtenir un éclaircissement sur cet avertissement étonnant, le capitaine des Spades était de nouveau à ses côtés et le pirate se détourna.

Une fois dans le couloir, Ace bâilla, fatigué par l'agitation. Ses cheveux rebiquaient comiquement sous son couvre chef, victimes de trop nombreux ébouriffements énergiques. Marco le poussa doucement de l'épaule en un geste taquin.

-Allez gamin, tu vas pouvoir finir ta nuit. Peut-être même que tu pourras de nouveau visiter tes Spades plus tard.

Et le pas d'Ace rebondit un peu plus joyeusement alors qu'ils retournaient dans la chambre.


Il émergea deux heures plus tard. Marco, torse nu, était alors occupé à rapiécer une déchirure à sa chemise violette fétiche. Il soupirait parfois avec ennui. D'habitude il préférait largement laisser ce genre de travaux manuels au groupe de couture, spécialisé dans le domaine. Mais c'était un passe temps comme un autre, bloqué dans sa chambre par le sommeil de son cadet. Après ce qu'avait traversé le jeune homme, il ne pouvait résister au besoin irrépressible de lui accorder un peu de tranquillité bien méritée.

De temps en temps, une flamme bleu prenait vie sur le bout de ses doigts, soignant ses piqûres d'aiguilles avant même qu'elles n'aient le temps d'être douloureuses.

Il releva enfin la tête de son occupation, tiré du travail répétitif en entendant un petit rire.

-Même les commandants doivent raccorder leurs propres vêtements ? le taquina Ace d'une voix rauque de sommeil.

Cela n'aurait certainement pas dû le faire frissonner ainsi. Il devait probablement y avoir un quelconque courant d'air frais.

-On a des couturiers, mais c'est bien plus rapide comme ça, répondit-il en haussant nonchalamment les épaules.

Le temps qu'Ace finisse de se prélasser longuement dans le lit avant de se lever, Marco terminait son œuvre par un point d'arrêt. Il regarda d'un œil critique la couture assez désordonnée. Ce n'était peut-être pas très aligné, mais au moins elle était solide et ferait parfaitement l'affaire quelques mois de plus. Même s'il supposait qu'Izou le remarquerait au premier coup d'œil et ne pourra pas s'empêcher de poser des questions.

Il y avait un peu d'agitation sur le pont lorsque Marco et son prisonnier sortirent l'après-midi. Il fut hélé par Okham de sa division qui s'approcha immédiatement.

-Commandant Marco, on était sur le point de venir vous chercher. Un navire marchand nous demande assistance.

Le blond se tourna immédiatement vers le brick qui s'approchait à vitesse réduite, surmonté d'un pavillon blanc barré d'une croix rouge. Ils signalaient un problème, donc. Et Marco pouvait difficilement ignorer un navire en détresse, surtout venant d'une île sous leur protection.

-Plus d'information sur leur problème ? demanda Marco.

En l'absence de Barbe Blanche, il était le premier prévenu pour gérer tout ce qui sortait de l'ordinaire. En temps normal, le phénix aurait volé jusqu'à l'autre bateau mais la présence de son prisonnier l'en empêcha. La plupart des Barbes Blanches s'étaient rapprochés, curieux de leurs visiteurs. Les Spades aussi étaient de sortie, comme toujours rôdant à proximité de leur capitaine. Ce dernier s'agita à ses côtés.

N'en sachant pas plus, Okham haussa les épaules.

-Nous n'arrivons pas à rentrer en contact avec leurs escargophones, alors on soupçonne un problème de communication.

Le bateau marchand finit par arriver à leur niveau. L'équipage civil se tenaient également sur leur pont. Ses membres semblaient assez tendus malgré leur politesse, et essayaient visiblement fort de garder leurs mains loin de leurs armes. Méfiants donc, mais assez sages pour ne pas risquer un geste hostile. Être face à des pirates faisait souvent cet effet alors Marco n'en pris pas ombrage. Il se rapprocha du bastingage, s'accoudant avec flegme.

-Pourquoi demandez-vous assistance yoi ?

L'air joyeux et insouciant, un marin aussi rond que barbu s'avança, se désignant d'emblée comme porte-parole du groupe.

-Nous avons un problème ! Pouvons-nous monter à bord de votre navire pour en discuter ?

Marco fronça les sourcils, ne voyant aucune urgence justifiant ça. Surtout avec une explication aussi vague. Il tenait à respecter des normes de sécurité strictes concernant l'abordage d'inconnus sans bonne raison. Surtout quand l'absence de la majeure partie de l'équipage les rendait plus vulnérables qu'il n'aimait... Même dans un territoire leur appartenant alors que ses frères et leur Père se trouvaient juste sur l'île voisine.

-Je ne pense pas pouvoir accept...

Une balle siffla.

Marco déploya immédiatement ses flammes bleues en un tourbillon, absorbant le projectile. Une attaque. Il l'avait à peine entendue venir.

Le demi-phénix se posa sur la garde-corps, ses ailes s'étendant derrière lui en un crépitement meurtrier alors qu'il abandonnait sa nonchalance de façade.

Tous les Barbes Blanches avaient déjà leurs armes en main, attendant l'ordre de leur Second.

Son regard chercha l'un des hommes de Haruta et il ordonna calmement :

-Mildas, va lancer un appel d'urgence à Oyaji.

Un peu pâle, l'homme courut à l'intérieur. Les autres se préparaient au combat. Des hommes s'attaquant au plus fort équipage du monde, même avec la majorité des membres manquants, n'étaient pas à sous estimer. Pas quand ils risquaient les répercussions d'un yonko s'abattant sur eux. Leur ennemis devaient l'avoir envisagé, et être prêts. Cela les rendait dangereux.

Il y eut une seconde de silence lourd et tendu, rompu lorsqu'un grand homme à chapeau marcha hors de l'espace abrité, l'air narquois.

-Eh Van Augur, je croyais que le plan était de laisser Kikipatsu les convaincre de nous faire monter à bord ?

-Il allait refuser, je n'ai fait... Qu'accélérer le destin, renifla un homme en sortant de l'ombre.

Un troisième homme au physique de catcheur apparut à son tour, souriant comme un animal avide de chair fraîche. Il cogna ses poings l'un contre l'autre en les fixant, montrant qu'il n'était pas là pour jouer.

-Maintenant que la surprise est ruinée, prenons leur tête. Priorité sur Phénix.

À ses mots, les ennemis rugirent, lames brandies, lançant l'assaut que le Moby Dick.

-Défendez notre maison, pas de pitié pour les lâches, cria Marco en retour.

Il s'attaqua immédiatement à l'énorme catcheur qui venait de sauter à bord (Jesus Burgess, lui fournit son cerveau après un temps de latence), ses serres tendues pour lui déchirer la peau.

C'était clairement une embuscade. Les pirates était au courant de leur présence autour de l'île et que l'équipage serait réduit. Ils avaient eu des informations.

-Spades, bottez le cul de ces connards ! entendit-il Ace lancer un peu plus loin.

Izou sortit des cabines, seulement vêtu d'un pantalon, ses cheveux tirés en une queue de cheval lâche et sans maquillage. Un pistolet dans chaque main, il abordait un sourire féroce au possible et se jeta dans la bataille.

Marco griffa et frappa, ses serres imprégnées de haki pour un maximum de dégâts. L'autre homme était assez résistant, avec un bonne défense. Il utilisait aussi le haki offensif et perceptif ce qui corsait l'affrontement.

Mais il n'était rien face à un commandant de division. Le combat ne dura qu'une poignée de minutes, bien que gêné par une dizaine d'autres intrus qui semblaient le cibler personnellement. Il esquiva de nouveau une de leurs attaques déloyales visant ses angles morts tandis que le catcheur servait d'adversaire principal. Presque d'appât.

Le phénix s'envola après avoir violemment enfoncé Burgess dans le parquet. L'homme essaya de se relever et l'oiseau piqua de nouveau à toute vitesse, visant le visage pour le mettre hors d'état de nuire. Mais l'homme parvint de justesse à attraper sa serre alors qu'elle s'enfonçait dans la peau dure.

Tout se déroula en une fraction de seconde.

Jurant, Marco le frappa de sa patte libre et tira brutalement, s'arrachant de l'emprise quand il aperçu du coin de l'œil un flash étrange.

Il n'eut pas le temps de réagir.

Le son d'une menotte claquant sur son aile le prit par surprise. Un instant plus tard, Marco touchait brutalement terre, de nouveau sous forme humaine. Son biceps cerclé par un anneau de granite. Immédiatement, un autre ennemi se jeta sur lui, une lance en avant. Malgré le choc, il réussit à rouler par pur instinct pour esquiver le premier coup. Mais le second lui déchira le flanc.

Puis la lame transperça sa cage thoracique, le clouant au parquet comme un insecte. Le commandant cria à la brûlure d'agonie. La lance ressortit de son corps avec un écœurant bruit de succion humide.

C'était pire.

Des points noirs dansaient dans sa vision à la douleur aveuglante alors qu'il essayait de respirer.

Le trou béant ne se refermait pas, son pouvoir inaccessible. Un flot anormal de sang s'en écoulait. C'était juste à droite du sternum, quelques centimètres au dessus du cœur. Malgré l'adrénaline, il devina instantanément le problème : aorte perforée. La terreur traversa Marco, comme de la glace dans ses veines. Il essaya de plonger ses doigts dans la blessure, un maigre barrage contre la rivière écarlate. Putain. Ça ne fonctionnait pas.

Pour une seule minuscule seconde d'inattention. Ça faisait affreusement mal, chaque geste devenant un supplice alors qu'il se battait pour respirer. Le blond ne pouvait même plus redresser la tête, encore moins se relever.

Ace à quelques pas lui jeta un coup d'œil paniqué, aux prises avec un grand type chauve.

Dans un dernier regain de désespoir, le phénix essaya de couvrir sa main de haki, pour broyer l'anneau de granit marin qui l'empêchait de se soigner.

-Inutile, tu perds le peu de temps qu'il te reste, se moqua l'ennemi en levant de nouveau sa lance.

Un pistolet claqua, et cette fois ce fut l'adversaire de Marco qui s'écroula. À une dizaine de mètres de là, Izou venait de tirer et essayait maintenant de se frayer un chemin vers son frère. Il s'était rendu compte de la gravité de la situation.

Parce que c'était définitivement grave. Urgent même. Il perdait trop de sang. Sa respiration s'étouffait en un râle humide. Sans solution rapide, il allait y passer. C'était là l'horrifiante vérité.

Ace surgit, blême, tombant à genoux à ses côtés. Essayant à son tour de presser ses mains sur la blessure.

-Marco, tiens bon ! Putain !

Marco voulut parler, le rassurer, mais du sang coula de ses lèvres. Ah c'était donc ça ce goût de cuivre. Et la sensation de noyade. Il n'avait même pas la force de tousser. Les combats autours se faisaient étonnement assourdis, la voix d'Ace aussi. Réfléchir était comme nager à contre-courant dans une rivière de sirop. Il se sentait de plus en plus cotonneux et fatigué. Étrange vue l'explosion de douleur dans sa poitrine. Mais même ça diminuait dans un doux engourdissement.

Il faisait froid. Peut-être parce que sa chemise était trempée de sang. Mais le sang n'était-il pas censé être chaud ? La main d'Ace était chaude, elle. Confortable. Il pouvait presque... Dormir.

Mais il y avait... Une attaque. N'est-ce pas ? Quelque chose à défendre. Frère, sœur. Une famille. Leur maison. Ace pouvait continuer le combat, les protéger.

Il essaya faiblement de repousser sa main de sa blessure. Ça ne faisait même plus mal. Juste bizarre.

Marco était trop fatigué. Il espérait qu'Oyaji et ses frères le pardonneront.

Une lueur de folie traversa le regard du jeune homme qui se leva, chancelant, cherchant quelque chose et disparaissant de sa vue. Une poignée d'heures (de secondes ? de jours ? Avait-il brièvement perdu connaissance ?) plus tard, il était au dessus de Marco, tenant une hallebarde dans les mains. Ça ressemblait à un rêve très bizarre.

-Pardon d'avance !

Et il l'abattit.

Le sifflement de la lame tombant précéda le son nauséabond de la chair et l'os tranchés. Tout le monde se figea, ayant assisté à la scène comme au ralenti sans pouvoir agir à temps. Avec détachement, Marco fixa sans comprendre le bras qui auparavant lui appartenait. À quelques centimètres de son épaule.


Ace s'était retrouvé séparé de Marco dès le début du combat. Ce parvenus pensaient pouvoir attaquer l'équipage d'un yonko impunément ? Les ennemis arrivaient en masse, pensant pouvoir s'en tirer en jouant sur le nombre.

D'un cri, il rallia immédiatement les Spades à la défense du bateau. Ce n'était plus le moment de jouer la discrétion. Une légère impulsion de son feu suffit à fondre ses fausses menottes en gouttes d'acier brûlantes qui roulèrent le long de ses poignets. Pas qu'il les sente le moindre du monde, immunisé et déjà concentré sur ses prochains mouvements.

Il ne s'embarrassa pas d'être furtif, l'excitation chantant dans ses veines d'enfin pouvoir se déchaîner. Ses flamme ne perdirent pas une seconde pour se condenser autour de ses poings, peut-être un peu plus intenses que strictement nécessaire.

Il assomma un gars d'un coup de pied, brûlant gravement une femme dans la foulée. Une hache passa à travers lui sans dommage. Avantage d'être un logia. Le type ne semblait pas avoir reçu le mémo, regardant son arme comme si elle était responsable du manque de dégâts. Il termina projeté sur son propre bateau, se fracassant la tête contre le mât. Il fut bientôt rejoint par tout ceux qu'Ace parvenait à y balancer.

Ses lucioles de feu vibraient d'énergie, se posant sur les vêtement des ennemis qui durent se jeter à l'eau.

Un grand chauve l'attaqua, semblant avoir une quelconque capacité spéciale ignifuge. Le jeune homme sourit. Après ces simples combat d'échauffement, il était impatient de se défouler correctement.

Partout ailleurs, le combat tournait peu de peu en leur faveur. Les ennemis sous-estimaient l'équipage, et surtout leurs alliés imprévus.

Les Spades contribuaient vaillamment à repousser les pirates surpris qui devaient avoir misé sur leur défection. Il s'autorisa à ressentir une pointe de fierté envers ses nakamas courageux. Ils luttaient côte à côte avec les Barbes Blanche qui ne se plaignaient pas de l'aide inespérée.

Marco venait de faire manger le sol à un géant semi masqué aux cheveux violets quand soudain, Ace entendit un type longiligne chuchoter.

-Dakō Dakō no mi : Kossori

Soudain animée d'une vie propre, une menotte bondit en l'air, bracelet ouvert comme la gueule béante d'un serpent. Ace ne pouvait que regarder le drame se produire sous ses yeux, son cri d'avertissement se perdant dans le tumulte des combats.

Le granit se referma sur le bras de Marco

Son cadet réussit à lancer une trentaine de lucioles sur le lanceur de l'attaque et le frapper vers l'horizon, mais la menotte resta bien accrochée.

Il se détourna une seconde, une seule minuscule seconde pour esquiver un poing. Et quand son regard se reporta de nouveau sur le commandant un torrent vermeil se formait, ruisselant sur son torse pour tâcher le plancher. Comme Thatch, quelques semaines auparavant. Seul le cri de pur souffrance qui en résulta empêcha Ace de se tétaniser.

Il cogna le chauve avec la force du désespoir, l'envoyant sombrer dans l'océan alors que Marco luttait pour détruire le suppresseur de son pouvoir.

-Achevez Phénix, capitaine veut l'obtenir à tout prix ! ordonna l'un des types.

Ace bondit, guidé par l'urgence alors que la lame se levait de nouveau. La foule le ralentissait. À cette distance il ne pouvait rien faire. Il ne put agir à temps lorsque Izou sauva de justesse son frère d'un tir précis. Pas plus qu'il ne sut arrêter le flot de sang lorsqu'il atteignit enfin le blessé. Il s'en foutait de ses doigts imprégnés de rouge, de la marre imbibant déjà son short. Même lui pouvait comprendre la gravité de la situation. Et il était impuissant.

Il entendait à peine les sifflements de balles le couvrant, frappant leurs ennemis. Sa vision comme un tunnel ne pouvait se concentrer que sur le commandant. Ça n'avait soudain plus aucune importance pour Ace de laisser son dos exposé aux attaques.

Quelque part, un pirate cria de trouver la clé des menottes. La panique noua sa gorge mais il força le blocage.

-Marco, tiens bon ! Putain !

Il y avait tellement de sang, mais tout ce qu'il pouvait sentir était le pouls de Marco ralentissant. Ses doigts tremblaient. Les mots ne servaient à rien dans cette situation, mais il continua à supplier dans le vide. Tout pour ne pas entendre cette respiration difficile se faisant de plus en plus faible.

-Tu peux pas partir comme ça espèce de connard, tu es censé être fort ! Ce type n'était même pas moitié aussi bon combattant !

Même s'il conjurait sa colère impuissante pour tenir sa peur à distance, sa voix traitre menaçait de se briser à tout moment.

Il refusait d'y croire, même lorsque son aîné, les yeux flous, toucha sa main pour le faire cesser ses efforts. Ça ne pouvait pas se terminer comme ça. Marco était un phénix, il ne pouvait pas mourir aussi stupidement, alors qu'il pouvait soigner n'importe quelle blessure ! Il devait juste le débarrasser du bracelet. Une idée perça le tourbillon de terreur d'Ace. Même s'il ne voulait pas quitter le blond, sans y réfléchir à deux fois, il sauta sur ses pieds et courut.

Il arracha le premier objet coupant qu'il aperçut des mains d'un pirate (ennemi ou allié, à cet instant il n'en avait honnêtement rien à carrer). Et priant silencieusement pour que ce ne soit pas une horrible idée, il retourna sur ses pas.

Il combattit la nausée montante, se sentant extrêmement sale de retourner une arme contre son propre camarade. Il ferma les yeux en criant une excuse, puis abattit la lame sur l'épaule de Marco. Il y eut une poignée d'angoissantes secondes emplies d'un lourd silence incrédule.

Et soudain, les flammes bleues explosèrent.

Elles couvraient totalement leur propriétaire de leur chaleur protectrice, l'enfermant dans une boule incandescente. Par réflexe, Ace appela à son tour ses flammes. Celles du phénix les absorbèrent, tirant et réclamant encore plus.

Le jeune homme céda sans mal à la demande, un sourire soulagé et émerveillé naissant sur son visage en voyant le feu s'intensifier en un brasier. Les voûtes bleues, oranges et jaunes commencèrent à se rapprocher et tournoyer. Elles se compactèrent toujours plus, se teintant d'un blanc aveuglant. Puis, comme une supernova miniature, une déflagration soudaine projeta une vague de vent brûlant.

Et le phénix déploya ses ailes, prêt à botter des culs.

(Si le temps d'un instant le souffle d'Ace se coupa et son cœur rata un battement, on pouvait facilement le lui pardonner.)

-Pas cool Ace, je venais juste de réparer ma chemise, se plaignit Marco avec son sourire narquois en place.

Il avait l'air un peu bancal, un peu secoué. Mais bien vivant. À travers la brume de terreur se dissipant, le jeune homme rit, alors que son cœur s'allégeait de le voir de retour. De nouveau debout, une plaisanterie aux lèvres. Prêt à montrer au monde que Marco le Phénix méritait définitivement son surnom.

Mais n'importe qui d'autre que lui serait... Il secoua la tête. Ce n'était pas le moment.

La bataille reprit, bien plus sauvage du côté des Barbes Blanches, furieux des blessures de leur commandant. Ce dernier menait l'assaut, encadré par Vista et couvert par les balles d'Izou. Les ennemis commençaient à flancher et reculer. Le catcheur fut mis hors de combat, frappé par dessus bord si fort que son corps s'incrusta dans la coque de son navire. Mais le tireur d'élite se cachait, harcelant les commandants de tirs.

Cependant, une fois de plus, la bataille prit une tournure inattendue. L'air commença à suinter d'une désagréable sensation étouffante. L'atmosphère de faisait lourde et sirupeuse. Il y avait quelque chose de dangereux, de malsain dans ce sentiment poisseux.

Mais cette fois l'ennemi n'était pas devant eux. Teach sortit des cabines, et s'avança sur le pont.

Les Sapdes s'éloignèrent immédiatement de l'homme. Leur capitaine était innocent, le véritable coupable ne faisait aucun doute à leurs yeux. Mais le reste des Barbe Blanche hésita, gagné par la confusion face à l'aura bizarre entourant leur nakama. Un d'eux fronça les sourcils, préoccupé.

-Teach ? Tu es encore blessé tu devrais rentrer.

Une sphère d'obscurité commença à se former devant l'ennemi. Des armes et petit objets furent projeté vers lui, aspirés par cette masse sombre inconnue. Puis il y eut une impulsion, et les objets jaillirent dans le sens inverse, obligeant amis et ennemis à parrer et se jetter à terre pour esquiver.

-Fais attention ! Qu'est-ce que c'est que ça, mec ?! cria un autre membre des Barbe Blanche.

Il reçut un rire en réponse.

-Zehahahaha, mes excuses, je ne maîtrise pas encore mon nouveau pouvoir.

Ils ne comprenaient toujours pas ce qu'il se passait sous leurs yeux. Même après cette attaque, en possession de cette nouvelle capacité inconnue. Mais pour les commandants et les Spades c'était évident : Teach faisait défection.

Izou le regarda avec un pur dégoût.

-Alors tu as mis la main dessus ?

-C'était bien pensé de le cacher là, j'ai mis des jours à le trouver, mon très cher commandant.

Le surnom sonna comme une insulte dans sa bouche alors qu'il souriait.

Izou agrippa fermement ses pistolets, tirant vers son ancien nakama sans hésitation. Un écran de ténèbres apparut et absorba la balle sans effort.

-Comment as-tu pu faire ça à notre famille ? À Thatch ? feula le tireur.

-Perspicace, je vois que tu n'as pas plongé aveuglément dans la version officielle. Mais tu sais, vous ne valez rien à mes yeux. J'ai toujours détesté ces conneries sentimentales de Pops.

Les hommes à portée de voix haletèrent en entendant un ancien collègue respecté insulter leurs valeurs. Le choc s'inscrivait sur leurs visage. Il ne parvenaient pas à réaliser ce qu'il se passait. Le geisha grinça des dents, absolument furieux.

-Tu as perdu ton droit de l'appeler ainsi !

Malheureusement même ses balles renforcées par haki étaient inefficaces contre Teach, disparaissant dans ses condensés de noirceur. Les deux autres commandants ne pouvaient aider, aux prises avec les adversaires qui regagnaient de l'ardeur. Le chaos de la bataille s'éleva de nouveau en intensité.

Ignorant son ancien camarade, le regard du traitre se posa sur Ace, calculateur.

-Firefist. Tu t'es retrouvé par erreur dans cette histoire, j'en suis navré.

Le jeune homme écarquilla de grands yeux, incrédule que ce nuisible de la pire espèce ose lui parler. Il pensait avoir suffisamment exprimé son point de vue en le battant presque à mort et en l'envoyant dans le coma. Et pourtant Teach s'excusait.

-Ne joue pas la carte de l'amitié avec moi enfoiré, gronda-t-il.

Il ne se retenait qu'à grande peine de se jeter à sa gorge pour le déchiqueter. Il avait passé des jours emprisonnés, persuadé qu'il allait être exécuté à cause de cette ordure. Sa tête était remplie de flash de Thatch saignant, de Marco mourant. L'autre homme leva les mains en l'air en signe universel de paix, bien que gêné par son plâtre au bras.

-J'ai une proposition. Toi aussi tu détestes ces types là, hein ? Ils t'ont privé de liberté et retenu contre ton gré, voulant s'accaparer ta force et ton équipage. Ils vont recommencer dès qu'ils en auront l'opportunité.

L'argument toucha un point sensible, éraflant certaines de ses peurs. Ace était conscient de sa propre puissance, les marines avaient bien assez essayé de faire de lui un grand corsaire pour l'utiliser. Il savait que le but de Barbe Blanche pour le recruter était loin d'être altruiste. Il voulait un combattant de plus pour renforcer son équipage. Et le vieil homme l'avait déjà piégé une fois sur son bateau, qu'est-ce qui l'empêcherait de recommencer ? Le retenant avec de fausses promesses cette fois-ci plutôt qu'un réel enfermement.

Ace recula d'un demi pas. À sa gauche, le geisha siffla une menace lorsque Teach avança, maintenant le contact visuel.

-Faisons une alliance. Ils t'ont fait du mal, mis en cage comme un chien enragé. C'est le moment idéal pour prendre ta revanche, n'est-ce pas ? Et ensuite tu seras de nouveau libre.

-Comme s'il allait croire tes putains de conneries, jura Izou avec force.

Quelques Barbes Blanche à portée de voix jetaient de petits regards furtifs, inquiets d'un changement de camps des Spades. Ils commençaient à surveiller le déroulé avec méfiance. Le traître rit, écartant les mains dans un geste démonstratif.

-Tu vois ? Il n'ont aucune confiance en toi. Tu n'es qu'un outil pour eux. Mais le règne de Barbe Blanche est bientôt fini, l'avenir est aux nouvelles générations. Rejoins-moi et nous serons une force que marines et yonkos craindront.

Il tendit la main, absolument certain de rallier le prisonnier à sa cause.

Cet l'homme était un traître de la pire sorte. Il avait poignardé Thatch pour un fruit du démon et probablement provoqué cette attaque surprise. Il avait causé ça à ses propres frères, les utilisant comme s'ils étaient de pions sur sa route. Des crimes opportunistes pour un peu plus de pouvoir, quitte à déchirer des nakamas de plusieurs décennies.

Et il osait venir parler de confiance après avoir brisé celle de son équipage, de ceux qui l'avaient accepté comme une part de leur famille ? Les mains d'Ace étaient libres de toutes menottes, plutôt mourir que de se les lier de nouveau, surtout à une telle enflure.

Le jeune homme croisa le regard confiant d'Izou, puis se sentit sourire en apercevant du coin de l'œil les flammes indigo de Marco illuminer le ciel. Ils avaient promis de l'aider et l'avaient fait. Durant ces quelques jours il avait pu compter sur eux, croire leurs paroles et surtout leurs actes. Cela valait certainement quelque chose. Et les Spades étaient toujours là, prêts à risquer leur vie pour lui.

Teach se trompait de cible en essayant de jouer avec des peurs. Ace n'était pas une putain de victime passive, il avait des armes et des alliés pour riposter si les choses tournaient mal.

Ace releva le menton et croisa les bras, projetant tout son mépris dans sa voix.

-C'est bon, tu as fini ton speech ?

Il y eut une pause stupéfaite. Puis la main du traitre se rétracta comme un escargot titillé.

-Je t'offre une opportunité ! s'exclama-t-il incrédule.

Le logia renifla, hautain au possible. Comme s'il pouvait un seul instant croire en un baratin aussi grossier.

-Et bien sache que ton "opportunité"...

Ace laissa planer un léger silence théâtral avant de terminer, un sourire méchant se formant :

-Tu peux te la foutre bien profond.

Et il appela son feu. Son bras s'embrasa, saignant de fissures vermeilles comme une braise attisée par le vent alors qu'il se lançait à l'assaut.

Teach était en fait vraiment fort, se rendit-il rapidement compte. Maintenant, il ne bénéficiait plus de l'effet de surprise sur le traître, bien que ses anciennes blessures le gênaient considérablement. Il apparut rapidement qu'il aurait eut beaucoup de mal à le vaincre dans des conditions normales, ses réflexes plus vif qu'il ne s'y attendait. Son fruit du démon était étrange, un pur concentré d'obscurité avec un effet d'attraction surprenant. Cependant, il ne semblait pas encore totalement le maîtriser. Cela lui offrait un avantage de taille.

Lorsque un instant, Ace fut touché par la main de Teach, il sentit son feu s'étouffer comme s'il était plongé dans l'eau. C'était bien pire que le granite marin. Dégoûtant, avide et définitivement contre-nature. Un pouvoir créé pour détruire et absorber.

Il se dégagea brutalement, tout son être révolté contre la sensation. Il se sentait sali.

Avec une gerbe de pétales, Vista surgit, ses épées cinglantes forçant Teach à battre en retrait.

-Permet-moi de me joindre à ce combat Ace-san, s'inclina-t-il poliment.

Le jeune homme hocha la tête, reconnaissant et soulagé pour l'aide.

Il recula même un peu, laissant de la place à l'épéiste pour bondir à une vitesse impressionnante, ses lames se fondant en un flou argenté. Teach essayait d'utiliser son pouvoir, clairement surclassé. Quelque minutes après, il arborait déjà une impressionnante coupure au ventre.

Leurs ennemis perdaient encore du terrain, décimés par les commandants et leur équipage survolté, appuyés par les Spades. Quelqu'un siffla trois coup bruyants, le signal pour l'approche d'un navire.

-Barbe Blanche revient ! s'écria un guet.

Immédiatement un ordre de replis fusa.

Tous les attaquants sprintèrent jusqu'à leur propre bateau sans demander leur reste. Ace cru même voir un vieux cheval à l'aspect malade emporter son cavalier en le tirant par le col.

Vista essaya de couper la voie de Teach, frappant de nouveau. Alors que l'autre réussissait à le dépasser d'une feinte, l'épéiste le coupa à la cuisse.

Pas en reste, Ace lança un coup de poing renforcée de flammes. Le traître fut frappé à l'épaule, se tournant à moitié pour riposter avec des griffes de métal. Elles s'enfoncèrent avec une morsure cruelle dans l'épaule du logia avant qu'il n'ait l'esprit de se dissoudre en flammes. Douloureux mais rien de mortel. Vista profita de l'opportunité pour balancer une épée, sifflant dans l'air et Teach bondit en arrière...

Et rencontra le bastingage.

Il y eut une seconde de choc alors que ses mains battaient dans le vide pour trouver une prise. Il resta une fraction d'éternité suspendu sur le bord, en équilibre, avant que l'élan ne l'emporte finalement. Il bascula dans la mer.

Vista se détourna immédiatement, refusant de regarder. Ses phalange ressortaient, blanches de tension sur la garde de ses épées.

Ace n'eut que le temps d'entrevoir qu'un flash d'expression déchirée. La pitié et la sympathie lui serrèrent la poitrine. Malgré les horreurs commises, voir un ancien frère, un camarade et confident disparaître ainsi devait être un crève-cœur.

Les fuyards restant étaient désormais presque tous à bord de leur navire, mettant les voiles. Quelques-uns furent abandonnés sur le Moby lorsqu'ils ne parvinrent pas à se relever ou sauter à bord à temps.

Les vainqueurs hésitèrent un instant à lancer la chasse, surpris par la tournure des évènements. Le temps qu'ils réagissent, le brick s'éloignait, propulsé à une vitesse inhabituelle.

Ace envoya des gerbes de flammes de loin alors qu'il essayait de brûler les voiles tandis que Marco depuis le ciel piquait inlassablement, continuant de persécuter les lâches. Izou semblait également déterminé avec vider tout son chargeur dans leur direction, suivi par une dizaine de tireurs d'élite. Ace sourit en voyant Mihar parmi eux. Même Aggie utilisait les canons de son avant-bras, visant la coque.

À l'opposé, se rapprochant de seconde en seconde, un mini Moby surfait sur une vague gigantesque, Barbe Blanche fièrement debout sur la figure de proue.

À cet instant, Thatch se traîna sur le pont malgré la demi-douzaine d'infirmiers sur son dos qui essayaient de le retenir. Il soupira, dramatique, en voyant que tout les ennemis avaient déjà été gérés.

-Vous auriez pu m'en laisser un, même un petit, se plaignit-il.

Il gagna quelques rires, la rage des pirates s'estompant face à sa légèreté.

Contraint par la distance de cesser ses tirs, Izou s'approcha de son compagnon et le gifla faiblement derrière la tête.

-Imbécile. Tant que tu es blessé, ta place est à l'infirmerie. Pas sur le champ de bataille.

Ace ricana à la mine déconfite du cuisinier.

Le personnel médical laissa finalement leur patient sous la garde du geisha pour aller s'enquérir des blessures des combattants. Plusieurs abordaient de profondes coupures et des impacts de balles, ainsi que quelques os cassés. Heureusement, personne ne semblait entre la vie et la mort.

Le reste de l'équipage en profita pour neutraliser les quelques assaillants trop lents pour s'être enfuis à temps. Ces derniers se retrouvèrent solidement attachés et surveillés de près. Dans une habitude bien rodée, un petit groupe commença à rassembler les diverses armes laissées au sol tandis qu'un moustachu de la section de charpenterie vérifiait les dégâts du bateau.

Les Spades se rapprochèrent d'Ace qui les examina d'un œil critique, cherchant le moindre signe de blessures sur ses amis. Deuce s'affairait déjà à bander le torse de Wallace. Kotatsu arborait une oreille déchirée, peu grave mais maculant son pelage de sang séché. Il fronça les sourcils devant la coupure de Dogya.

-Tu devra faire examiner ton bras, il faudra sûrement des points de suture, conseilla Ace avec un sous-ton d'ordre.

Il savait pertinemment que l'homme, malgré sa taille impressionnante et son air dur, essayerait d'éviter tout soin impliquant des aiguilles. L'autre grimaça, essayant de cacher sa blessure derrière son dos. Mais le regard inflexible d'Ace le fit soupirer et hocher la tête à contrecœur.

-Oui cap', se résigna-t-il le visage maussade.

Satisfait, le capitaine laissa Deuce prendre soin des blessés.

-Vous vous êtes bien battus les gars, félicita-t-il avec un sourire.

-Ils étaient plutôt faibles, renifla Esmée. Sauf ce type à écailles que Saber affrontait à l'aide d'autres Barbes Blanches, il avait l'air solide.

Ses amis commencèrent tour à tour à raconter des bribes de leurs combats ou des techniques ennemies particulièrement surprenantes. Ace savait que théoriquement, il était toujours un prisonnier qui ne devrait pas parler avec ses nakamas. Mais en tant que capitaine et ami, c'était sa responsabilité de faire le debrief d'après combat. Vérifier que tous allaient bien, autant physiquement que mentalement.

Et pour l'instant, l'équipage du Yonko semblait se complaire à ignorer l'éléphant dans la pièce.

Marco revint finalement de son acharnement contre le navire ennemi, et se posa gracieusement sur le pont. Sa manche de chemise manquante lui donnait un air décalé. Ses pirates se rassemblèrent automatiquement autour de lui.

Une vague frappa la coque, puis une seconde, faisant tanguer le Moby Dick. Un instant plus tard, Barbe Blanche amarrait son embarcation, un air de menace planant au dessus de lui alors qu'il regardait au loin le bateau des fuyards.

Le reste des commandants sauta sur le Moby Dick à sa suite ainsi qu'une centaine d'équipiers. Ils semblaient n'avoir embarqué que les meilleurs combattants et laissé les autres sur Vorthale, pour être plus légers et rapides.

-Marco, que s'est il passé ? demanda le yonko la main enserrant toujours son bisento.

-On a été attaqué par un équipage inconnu. Pas de pavillon, quelques figures connues comme Jésus Burgess et Van Augur.

-Il y avait également Lafitte "Le Shérif Démoniaque" et Doc Q "La faucheuse". Le reste était du menu fretin pour nous distraire, ajouta Vista avec un geste de la main vers leurs nouveaux prisonniers.

Offensés, certains se tortillèrent dans leurs liens en feulant des injures. Ils furent ignorés.

-Je m'occuperai de l'interrogatoire, vérifier leurs antécédents et leurs primes, proposa immédiatement Haruta.

Barbe Blanche hocha la tête, se détendant progressivement maintenant qu'il n'y avait plus de danger immédiat. Son regard sérieux passait entre tous ses fils, d'inquiétant de leur état.

-Des blessés en état critique ?

Quelque yeux se tournèrent vers Marco. Il avait failli mourir, même si son pouvoir l'avait entièrement soigné. Barbe Blanche haussa un sourcil dans sa direction et il fit un petit signe de "Je t'en parlerai plus tard.". Il y avait d'autres sujets plus importants à aborder que des blessures dont il ne restait même plus de cicatrices visibles. Comme par exemple...

Il hésita, ne sachant pas comment aborder le problème principal derrière l'attaque. Quelqu'un finit par lui couper l'herbe sous le pied.

-Que diable s'est-il passé avec Teach-senpai ? demanda un homme-poisson orange assez fort pour être entendu par dessus l'agitation.

-C'est un traitre, c'est lui qui a poignardé Thatch, expliqua succinctement Izou.

Il était d'une honnêteté brutale, trop énervé par ce fait pour prendre des gants. Il y eut un silence choqué, même parmi ceux ayant assisté à sa désertion.

Le cuisinier se figea les yeux écarquillés, portant sa main à sa poitrine comme s'il pouvait se nouveau sentir la lame la transpercer. Peu à peu les attentions se tournèrent vers Ace, se souvenant alors de sa présence. Ils essayaient de comprendre les implications de l'aveu. Protecteurs, les Spades se rangèrent de chaque côté de leur capitaine en gardes du corps silencieux. Leurs expressions défiaient quiconque d'oser de nouveau le traiter en ennemi après leur aide.

Marco soupira, semblant soudain plus vieux.

-Ace avait combattu Teach après avoir assisté à la trahison. On a préféré garder l'histoire sous silence le temps d'avoir le témoignage de Thatch, et des preuves mais... Je suppose que ce n'est plus nécessaire. Les évènements parlent d'eux même.

Les pirates éclatèrent en questions et exclamations, réclamant la vérité. Ceux ayant participé à la bataille résumèrent rapidement aux nouveaux arrivants les mots de leur ancien nakama insultant leurs valeurs. Tous étaient scandalisés, absolument furieux.

Barbe Blanche claqua le manche de Murakumogiri sur le plancher ce qui créa une légère onde de choc. Son équipage se tut lorsque leur capitaine se tourna vers le jeune logia.

-Tu as mon entière gratitude pour avoir combattu à nos côtés et pour toute l'aide apportée. C'est aussi grâce à toi que notre Thatch est en vie, dit le géant en tapotant l'épaule du commandant susnommé.

Ace changea de pied d'appui, un peu mal à l'aise avec les remerciements, surtout avec le public les regardant. Ils étaient bien trop dramatiques. Heureusement, la plupart était toujours sous le coup de la trahison de leur camarade. Thatch, bien que semblant secoué, essaya de projeter son entrain habituel pour dissiper l'état de choc.

-Je te dois pour le sauvetage ! Je propose de faire une fête en ton honneur !

Les pirates relevèrent la tête en entendant le mot "fête", tirés de leurs pensées sombres. L'un laissa échapper une exclamation à l'idée :

-Il faut un feu de joie !

D'autres le suivirent.

-Et de la musique bien sûr !

-D'abord la nourriture !

Cela se propagea au reste comme une traînée de poudre. Bientôt diverses propositions fusaient de toutes part alors qu'Ace protestait faiblement. Il se semblait pas avoir son mot à dire car chacune de ses récriminations fut ignorée. Les Spades lui tapèrent dans le dos avec compassion et s'en allèrent joyeusement aider à la mise en place de l'événement.

Il ne fallut pas longtemps pour s'organiser, l'équipage du Yonko clairement habitué à l'exercice. Un petit bataillon partit récupérer le reste des pirates laissés sur l'île, et y laisser en échange les ennemis capturés dans une prison locale.

Un Thatch boudeur supervisait depuis la chaise où Izou l'avait forcé à s'assoir. Les menaces de le ramener à l'infirmerie s'il ne se ménageait pas suffisaient à l'arrêter dans son agitation enthousiaste. Ace avait néanmoins été mandaté pour le surveiller, bien qu'il se retrouvait impuissant à réfréner les idées de grandeur du cuisinier. Ce dernier était extrêmement excité de sortir pour la première fois depuis son coma, surtout pour une fête.

-Ne soyez pas radins sur l'alcool et la nourriture ! On a une île marchande à côté, pas d'inquiétude sur les stocks ! s'écriait-il avant d'être bâillonné par la main d'Izou.

-Ne dilapide pas notre trésorerie.

-Awww allez Zou~chan, ne soit pas rabat joie, on croirait entendre Marco !

Le blond apparut à ses côtés et lui jeta un regard sale, le faisant sursauter. Il écarquilla comiquement les yeux en une (fausse) expression innocente.

-Tu as de la chance d'être encore blessé. Peut-être que réduire ton budget cuisine t'apprendra à être économe, menaça le commandant.

-Tu sais que je plaisantais mon adorable poussin exotique, essaya de l'amadouer Thatch.

Ce n'était pas très efficace... Le phénix, en vengeance, frictionna vivement ses phalange dans les cheveux de son ami qui glapit. Atamos passa à côté d'eux, portant trois tables pliantes sur ses larges épaules et sourit.

-Heureux de voir que tu as de nouveau assez d'énergie pour harceler ce pauvre Macro.

-Je suis la victime ici ! pleurnicha le cuisinier une main sur le cœur. Heureusement Acey est de mon côté !

Le jeune homme lui lança un regard peu impressionné.

Au fur et à mesure, quelques Barbes Blanches commencèrent à se rassembler autour d'eux. Un roux plus courageux que les autres finit par demander un récit détaillé de la fameuse nuit de l'attaque. Thatch haussa les épaules, n'ayant pas encore récupéré ses souvenirs. Alors tous se tournèrent vers Ace avec espoir.

L'ex prisonnier essaya discrètement de repérer ses options de fuite mais il était désormais au centre de l'attention. Et bien, il allait devoir offrir un agneau sacrificiel à la foule.

Après avoir rencontré son regard suppliant, Marco soupira et se retrouva alors à raconter la vérité. La triste, sale, sombre mais surtout exacte vérité. Mettant enfin fin à des semaines de ce mensonge qui aurait pu détruire le Spade sans l'aide inespérée du commandant.

En entendant les dessous de l'histoire, les pirates semblaient de plus en plus énervés contre le traître et les attaquants. Ils étaient furieux d'avoir été trompé, autant pour l'acte de félonie qu'au nom de ce qu'avait vécu Ace.

Au fil du récit, le ton montait, lançant des appels à la vendetta. Mais Thatch qui en était l'un des principaux concerné refusa d'envoyer d'autres personnes à leur poursuite.

-Pas la peine de gaspiller nos forces pour une vengeance. Les mers sont vastes mais quoi qu'il arrive, nous les recroiseront un jours, avait-il dit dans un rare élan de sagesse.

Ace ne pouvait qu'acquiescer.

Ils en restèrent là.


La fête continua, battant son plein à la tombée de la nuit lorsque Ace se faufila dans le recoin isolé que Marco lui avait montré la veille. Il soupira au calme soudain, la musique et les exclamations bruyantes étouffées derrière les caisses le coupant du reste du monde.

Honnêtement après des jours à être ignoré au mieux et sinon cible de regards noirs, se retrouver au centre de l'attention était un peu écrasant. Soudain, tout le monde semblait vouloir boire avec lui, lui offrir des brochettes ou lui parler d'un sujet ou l'autre, parfois pour le remercier ou s'excuser. Il avait du mal à gérer un changement aussi rapide, bien qu'il ne pouvait pas en vouloir à l'équipage. Au moins, ils faisaient de sérieux efforts pour se racheter, bien que certains l'évitaient, mal à l'aise.

Ace passa ses jambes entre les barreaux du garde-corps et se laissa tomber sur le dos, les yeux fermés. Il garda son chapeau dans sa main pour jouer machinalement avec.

Il fut averti de l'arrivée de quelqu'un par un grincement sur le parquet, le poussant à relever ses paupières. Mais il ne bougea pas en reconnaissant la petite flamme bleuté tenue dans le creux d'une paume. Sûrement plus par politesse de l'informer de sa présence que par réelle utilité. Après tout, Marco savait parfaitement se déplacer dans le noir, et sans un seul bruit s'il essayait réellement. Il avait pu le constater de ses propres yeux.

-Besoin de souffler ? supposa doucement le commandant.

Il hocha la tête, sachant que l'autre le verrait. Le phénix hésita, ses yeux incertains éclairés par sa flamme. Comme s'il se demandait si sa présence était la bienvenue. Ace mit fin à son dilemme en tapotant la place à côté de lui. Il appréciait la présence calme et constante de Marco. Leurs cohabitation forcée l'avait poussé à mieux connaître le commandant et il ne parvenait pas à le regretter, malgré les circonstances.

Son camarade se rapprocha et s'assit prudemment en tailleur, rabattant sa chemise sous lui. La marque de Barbe Blanche ressortait sur sa peau pâle grâce à la faible lueur. La lance n'y avait laissé aucune cicatrice. Une bénédiction. Ace ne tenait pas particulièrement à faire face à un rappel de ce qui aurait pu arriver. S'il avait agit juste un peu plus tard...

La flamme vacilla avant de s'éteindre, assombrissant de nouveau leur cachette et dissipant ses pensées derrière une illusion de normalité.

Ils restèrent un instant en silence, à admirer le feu de joie sur le pont se refléter dans les vagues. Le blond fut le premier à reprendre la parole.

-Je ne t'ai pas remercié de m'avoir sauvé pendant le combat.

Ace émit un son entre un gémissement désespéré et un gloussements, se tournant sur le flan pour prévenir son interlocuteur :

-Pitié, si j'entends un seul remerciement ou une excuse de plus, ma tête va exploser.

Marco rit légèrement.

-D'accord je ne le ferai pas. Mais laisse moi te dire que me trancher le bras comme solution d'urgence était un plan génial. Risqué, sacrément inattendu et complètement fou, mais génial.

Ace battit légèrement des pieds contre la coque du navire.

-J'ai cru que tu allais mourir. C'est la seule solution à laquelle j'ai pensé pour te retirer ça.

-C'était vif d'esprit.

Il y eut une pause un peu trop longue où Ace hésita. Puis il repris doucement, espérant à moitié que son aveu se perdrait dans la nuit :

-À vrai dire ça ne vient pas de nul part. J'y ai pensé, au début de l'emprisonnement. Je pensais que j'allais mourir alors... Pourquoi ne pas sacrifier mes mains pour m'enfuir avec mes amis.

Marco inspira fortement en entendant ces mots. Même avec la très faible lueur, le Spade devinait sans mal la culpabilité sur son visage.

-Ace, je suis vraiment, vraiment...

-Ne le dis pas, coupa-t-il les futures excuses qu'il sentait venir. Je comprends votre réaction et je ne vous veux pas.

-Tu n'aurais pas dû subir ça, finit par soupirer Marco.

Ace se redressa et remit son chapeau sur ses cheveux, sentant un sourire sincère naître sur ses lèvres.

-Les autres commandants et toi avez tout fait pour m'aider en apprenant la vérité. De toute façon c'est terminé maintenant, tout va bien.

Et il en pensait chaque mot. Il était libre désormais. Quelqu'un tira un feu d'artifice bien trop lumineux à tribord, éclairant le ciel alors qu'Ace rencontrait les yeux lagons de Marco.

-Et maintenant, que vas-tu faire ? demanda son aîné.

Ace contempla un instant son visage, les cheveux blonds auréolés par les étincelles haut dans le ciel. Il avait une demi douzaine de réponses qui lui venaient en tête mais il repoussa chacune hors de ses pensées.

Il se força à se reconcentrer, se rappelant de la question posée par Marco la veille. "Que feras-tu une fois innocenté ?". Ace avait alors hésité, encore incertain de sa décision. Mais cette fois, il savait quoi répondre. Prenant une inspiration, il puisa son courage dans la joyeuse clameur de la fête qu'il entendait plus loin sur le pont. Puissante et stable, la musique battait au rythme de son cœur pour se répercuter dans son thorax.

-J'ai parlé avec ton capitaine, tu sais. Grand Line est dangereux. Il y a tellement d'ennemis puissants, actuellement je ne fais pas le poids. Je ne suis pas encore assez fort, j'ai besoin de plus d'entraînement et de devenir meilleur.

Il s'arrêta un instant et se mordilla les lèvres, tête baissé. Un nouveau feu d'artifice siffla, il jeta un regard hésitant vers le blond.

-Alors jusque là... Peut-être devrions-nous faire encore un peu de route ensemble ?

Et en voyant le sourire de Marco illuminer son monde, Ace sut qu'il ne regrettera pas cette décision.


FIN


C'était le dernier chapitre !

Désolée pour ceux qui voulaient plus de Ace x Marco, je voulais que le rapprochement se fasse lentement et au final même pas de bisou...

Je prévois une suite qui est en cours d'écriture mais mettra une durée indéterminée de temps à sortir

En attendant, j'ai également écrit un petit two shot (toujours sur One Piece) où Ace retrouve Sabo parce qu'ils le méritent absolument

Cela sortira sûrement dans deux semaines

Sinon quelques petites notes de chapitre supplémentaires :

Teach voulait obtenir le fruit de Marco, parce que être un phénix immortel c'est sacrément pratique

Je ne suis pas médecin donc je n'y connais pas grand chose en blessure à l'aorte, mais quelques sites disent que la mort survint en quelques minutes à peine, donc c'était grave

Je ne parle pas non plus japonais alors le "Dakō Dakō no mi : Kossori" a été bricolé à l'aide de Google traduction donc de très fortes chances (99% à peu près) que ce soit incorrect. Dakō est pour "serpenter" et Kossori pour "se faufiler". Globalement cela donner un comportement serpentin à des objets longilignes comme les cordes, des fils, des menottes...

Cette fanfic aura été bien plus longue que je ne le pensais, mais je n'ai aucun regret ! Ça me rend juste un peu nostalgique de finir (╥﹏╥)

Merci pour les reviews, les favoris et même d'avoir juste lu, j'espère sincèrement que vous avez prit autant plaisir à lire que j'en ai eu à écrire !