CHAPITRE 17

Rose soupira et posa sa plume avant de relire son paragraphe, les sourcils froncés. Ce qu'elle venait d'écrire n'avait ni queue ni tête. Il manquait même un verbe. Elle grommela et se massa les tempes, ramenant son manuel de Métamorphoses vers elle.

Elle passa la fin d'après-midi à lire et relire le dernier chapitre de son livre, rédigeant un second brouillon pour sa dissertation qu'elle devrait rendre à la rentrée. Elle ne descendit au rez-de-chaussée qu'une fois satisfaite, s'étirant devant la baie vitrée en admirant le parc.

- Longue journée ?

- J'ai enfin terminé mon devoir pour McGonagall.

Elle regarda son père s'asseoir élégamment dans son fauteuil et accepter le verre qui lui tendait Benson.

- Et toi ?

- Longue journée, confirma-t-il en posant la tête sur le dossier et en fermant les yeux quelques secondes, savourant une première gorgée de son bourbon.

Rose ne put s'empêcher de faire une petite grimace, au souvenir du Whisky Pur Feu, qu'elle n'avait pas tant aimé que ça – bien moins que tous les événements de la soirée qui avaient suivi, par exemple.

- Goûte, ordonna son père en lui tendant son verre. Au moins tu sauras pourquoi tu fais la grimace.

Elle se garda bien de le détromper et avala une petite gorgée.

- Beurk.

Son père se mit à rire et récupéra son verre. Il plissa les yeux vers sa fille qui leva aussitôt un sourcil.

- Vous n'avez jamais bu d'alcool ?

- « Vous » ?

- Toi et tes amis.

Il souriait déjà devant le trouble que Rose cacha avec peine avant que ses épaules ne se baissent.

- Si, si, avoua-t-elle du bout des lèvres.

- La Bièraubeurre ne compte pas…

Un sourire lui échappa et elle marmonna :

- Oui je me doute…

- Fête de dortoir ?

- Comment tu le sais ?

- J'ai été à Poudlard moi aussi… quoique de la part de Serdaigles, ça m'étonne plus. Enfin, vous étudiez beaucoup, vous faites beaucoup la fête, ça se tient…

- Beaucoup ! s'étrangla Rose, indignée. On a fait une fête d'anniversaire l'an dernier, en octobre. C'est tout. Ah et après les BUSE, mais on a fait que vider les stocks de confiseries des garçons, qui en avaient beaucoup trop. On a partagé avec tout le monde.

- Très altruiste. Bon, et alors ? Tu as essayé quoi ?

Elle considéra son père un instant. Il était vraiment en train de lui demander ce qu'elle avait bu pendant une soirée étudiante ? Elle choisit, un peu malgré elle, de rire.

- J'ai du mal à t'imaginer faire la fête dans un dortoir de Poudlard. Désolée, ajouta-t-elle, un nouveau rire les prenant.

- Je te jure que c'est arrivé. De nombreuses fois.

- Vraiment ?

- J'étais assez populaire, la réputation Wayne, mes résultats, le fait que je n'étais pas un Préfet…

- Même si tu étais avec une Serpentard ? osa murmurer Rose.

- Absolument. Ta mère était appréciée aussi, crois-moi… mais elle n'a jamais fait la fête dans la Salle Commune de Gryffondor, ça c'est sûr, termina-t-il avec un sourire.

Il vida son verre et le posa à côté de lui.

- Et Blaise ?

- De quoi ?

- Blaise, il est aussi populaire que toi ?

- Mais je suis pas populaire, moi, maugréa-t-elle.

- Onze amis qui gravitent autour de toi, je ne sais pas ce qu'il te faut.

- On gravite tous les uns autour des autres, corrigea Rose.

- Tu éludes mes questions, lui reprocha-t-il avec amusement.

- Pourquoi tu me parles de Blaise d'un coup ?

- Hé bien… ce n'est pas ton petit-ami ?

Les joues rouges de Rose firent encore sourire son père.

- Non, plus maintenant, admit-elle enfin. Pas après ce qui s'est passé en juillet. Comment tu avais compris ?

- Les douces paroles que lui et ton ami William se sont échangées m'ont été rapportées par le personnel.

- Quelle bande de bavards, râla-t-elle en croisant les bras, arrachant un rire à Erwan.

- Plus de Blaise alors. Je n'ai même pas eu le temps de faire sa connaissance, dit son père pensivement.

- Aucune importance, vraiment, assura-t-elle, l'air détaché.

- Encore une question que tu as évitée : tu as bu quoi ?

Elle mentionna la bière et le Whisky Pur Feu et conclut en disant qu'elle préférait les sodas.

- Le jour où vous allez découvrir que vous pouvez mélanger, ça va être explosif, marmonna son père avant de lui adresser un clin d'œil.

Elle rêvait ou il la poussait à faire la fête et à boire de l'alcool ?!

- Allez viens, on va dîner.

Elle le suivit, toujours un peu hébétée par leur conversation.

Ils terminaient leur dessert quand son père la regarda jusqu'à ce qu'elle relève la tête.

- Je pensais à quelque chose, concernant l'organisation du personnel du Manoir.

Elle fit un signe de tête pour l'encourager à poursuivre.

- Depuis quelques mois, fit-il doucement, le poste de gouvernante n'est plus assuré.

Les yeux de Rose se figèrent et se firent lointains.

- Seul Benson est en charge de la gestion des domestiques, et cela fait beaucoup pour une seule personne, en particulier lorsque nous sommes tous les deux au domaine.

- Tu veux recruter une gouvernante ? demanda sèchement Rose.

- Non, non, la détrompa-t-il aussitôt. Tu n'es plus en âge d'avoir une gouvernante, pour commencer. Et ensuite, je pense qu'il est hors de question de donner ce titre à une nouvelle personne. C'est celui d'Olivia.

Rose hocha lentement la tête, rassurée.

- Tu penses à quoi alors ?

- Je pensais à avoir une intendante, à la place. Elle aurait les mêmes types de tâches qu'Olivia, à part bien sûr, celle de s'occuper de toi.

- Donc attends… Benson et une intendante pour gérer Amalie, George, Alfonso, Ted, Nelson et Eulaly ?

- C'était mon idée…

- Tu n'as pas l'air convaincu.

- Je me disais plutôt, fit-il en baissant d'un ton, qu'on pourrait proposer le poste d'intendance à Amalie. Ça fait plusieurs années qu'elle est avec nous, Olivia lui a tout appris. Il me semble qu'elle serait parfaitement capable dans ce rôle.

Comme Rose ne répondait pas, il lui fit un petit geste.

- Qu'est-ce que tu en penses ?

Elle ne s'attendait pas à ce qu'il lui demande son opinion. Elle prit le temps de réfléchir.

- Je pense que c'est une excellente idée. Et tu vas recruter une nouvelle femme de chambre ?

- Je souhaiterais d'abord en parler avec Amalie, qu'elle me fasse un point sur sa charge de travail. Toi et moi ne sommes pas souvent là, et je me demande si ce serait bien nécessaire.

- Je suis d'accord… mais c'est vrai qu'il vaut mieux que ce soit elle qui nous dise si elle peut tout gérer seule ou si elle aura besoin d'une personne supplémentaire.

Satisfait qu'elle soit d'accord avec lui, il lui sourit et se leva.

- Je la convoquerai demain pour lui faire notre proposition.

- Notre proposition, répéta Rose, l'air moqueur.

- Hé bien oui, la nôtre. Tu seras bientôt autant responsable que moi de la gestion du Manoir, s'amusa-t-il.

Rose grogna, peu enthousiaste à cette idée, et suivit son père dans la Bibliothèque où ils passèrent la fin de leur soirée.

Amalie accepta la proposition d'Erwan et devint officiellement l'intendante. Elle demanda à faire quelques semaines d'essai seule avant de publier une offre pour une nouvelle femme de chambre, ce que son patron accepta immédiatement. Rose en fut soulagée : elle s'était habituée au travail d'Amalie dans la maison, ainsi qu'à sa compagnie. La mort d'Olivia et le soutien que l'employée avait apporté à Rose les avaient rapprochées. Rose lui avait rappelé qu'il y aurait onze invités fin août, ce à quoi elle avait répondu avec douceur et respect que cela c'était très bien déroulé en avril et qu'elle avait hâte de recevoir à nouveau les amis de sa maitresse.

Ravie, Rose l'avait félicitée pour son nouveau poste avant d'aller se balader dans le parc, où elle croisa Alfonso qui était rentré quelques jours auparavant.

À son retour dans les cuisines, Benson se présenta devant elle.

- Miss, votre courrier. Il est arrivé en retard aujourd'hui, vous m'en voyez désolé.

- Merci Benson.

Elle le soulagea des deux enveloppes et déplia rapidement la lettre de Derek en montant les escaliers vers sa chambre. Il y confirmait que ses parents étaient d'accord pour venir passer quelques jours chez les Wayne, la semaine avant l'arrivée des Serdaigles. Extatique, Rose ne pouvait pas s'empêcher de sourire. Le second pli contenait une carte postale. Elle retint un petit soupir et regarda l'image de La Mata, une ville côtière au sud de l'Espagne. Elle lut le petit mot qui l'accompagnait, son ventre se serra, comme il l'avait fait plus tôt dans l'été en découvrant une carte postale de Maastricht.

« Rose,

Dans ma dernière carte j'ai promis d'attendre que tu me pardonnes, mais je trouvais injuste que tu reçoives seulement une carte de Maastricht et pas de La Mata, alors en voici une. Et, on ne va pas se mentir, La Mata est bien plus jolie ! C'est ici que la famille de ma mère habite. Le soleil nous accompagne chaque jour et la mer est magnifique. Il y a beaucoup de touristes – dont moi ! – et des Moldus partout. Ça te ferait un bon sujet de dissertation pour ton cours : les comportements similaires des Moldus et des sorciers en vacances au soleil.

J'ai égoïstement hâte de te revoir, même si tu es fâchée après moi – pour de bonnes raisons.

William V.A.

P.S. : serais-tu d'accord pour que j'arrive au Manoir le mardi 27, peut-être vers onze heures ? Voici l'adresse à laquelle tu peux me répondre. »

Un petit bout de parchemin supplémentaire tomba dans sa main quand elle secoua l'enveloppe. Elle sourit en contemplant l'écriture très serrée de William sur la carte : c'était la seule personne qu'elle connaissait qui avait besoin d'écrire sur tout le verso d'une carte postale tellement il avait de choses à dire. Elle posa l'adresse à côté de sa station d'écriture et punaisa la carte espagnole à côté de la néerlandaise, sur le tableau qui surplombait son bureau et était recouvert des photos, cartes et petits mots que Rose conservait précieusement depuis des années. Elle rédigea rapidement une réponse pour confirmer qu'il pouvait venir le mardi, et nota sa date d'arrivée sur un parchemin qu'elle pouvait désormais donner à Benson. William avait été le dernier à lui écrire pour lui confirmer la date, mais il ne serait pas le dernier à arriver. Tout le monde serait réuni au plus tard le mardi soir, et Rose s'en réjouissait d'avance. Elle avait hâte de connaître les résultats des BUSE de tout le monde.

Ses yeux se posèrent sur son courrier, affiché lui aussi au tableau et elle ne put réprimer un sourire, anticipant avec joie la tête qu'ils feraient tous lorsqu'elle annoncerait son Effort Exceptionnel en Étude des Moldus, auquel elle ne croyait toujours pas. Elle s'attendait chaque jour à recevoir un courrier lui notifiant qu'une erreur avait été commise et que sa véritable note était un P. Voire un D. La même note en Potions la faisait toujours soupirer de déception, mais elle n'avait pas été surprise, elle était même contente d'avoir obtenu une BUSE en Potions. Elle trouvait juste dommage de ne pas pouvoir continuer ce cours pour les deux années à venir. C'était difficile certes, mais intéressant malgré tout. Elle ignora le Désolant en Astronomie pour laisser la fierté l'envahir devant ses Optimaux en Sortilèges et en DCFM.

Son père avait été très content de ses résultats aussi et l'avait chaleureusement félicitée avant de rire devant son Piètre en Botanique et de se souvenir qu'il avait eu la même note. Il l'avait même emmenée au restaurant pour fêter ça et ils avaient passé une très bonne soirée. Finalement Rose allait faire comme elle avait pensé : abandonner la Botanique, l'Astronomie et l'Histoire de son plein gré, les Potions malgré elle, et garder le reste. Son père l'avait rassurée : même avec cinq matières, elle ne risquait pas de s'ennuyer. Il commençait à vraiment bien la connaitre, avait-elle pensé avec affection pendant qu'il discutait de vin avec le sommelier. Il l'avait laissée goûter un vin blanc auquel elle avait réagi bien plus positivement qu'au bourbon et son père avait ri, s'attirant quelques regards féminins que Rose avait remarqués du coin de l'œil, amusée.

La semaine suivant la promotion d'Amalie, l'humeur de Rose chuta considérablement et elle broyait du noir depuis plusieurs jours, engluée dans son chagrin qui l'avait rattrapée et violemment étreinte, comme pour la punir d'avoir autant ri depuis l'enterrement de sa gouvernante. Ses cauchemars reprirent et Amalie devait régulièrement changer les draps qu'elle retrouvait lacérés certains matins. Son père travaillait beaucoup mais le changement dans l'attitude de sa fille ne lui avait pas échappé. Un peu désemparé, il essayait de passer autant de temps que possible avec elle. Un midi, il la retrouva dans la salle de jeux où elle était assise, le regard dans le vague. Il s'installa à côté d'elle et attendit qu'elle pose sa tête sur son épaule pour l'enlacer.

- Tu voudrais aller la voir ? proposa-t-il d'un ton très bas et doux.

Rose renifla et le regarda avant d'opiner, puis se réfugia à nouveau dans ses bras. Elle pensait sans cesse aux jours qui avaient suivi l'enterrement d'Olivia : le calme du Manoir, la solitude qui l'avait envahie, l'ouverture du testament pendant laquelle elle avait eu envie de hurler à en mourir. Olivia lui avait tout légué. Rose s'était retrouvée à errer dans ses anciens appartements, où tout était déjà bien rangé, emballé et étiqueté comme elle avait pu le constater début juillet. Elle avait fouillé jusqu'à trouver le carton qui indiquait « Photos » et l'avait fait porter dans sa chambre, sans avoir le courage de l'ouvrir. Il y trônait donc depuis un moment, coincé entre le mur et son bureau, toujours scellé. Elle ne savait pas quoi faire du reste, même s'il n'y avait pas tant de cartons que cela. Elle ne savait même pas ce qu'il convenait de faire avec l'espace libéré par le salon, la chambre et sa salle de bains privée. Son père l'avait rassurée en disant que ce n'était pas pressé et que tout pouvait rester là pour aussi longtemps qu'elle le souhaiterait. C'était à ce moment-là que Rose s'était plongée dans ses devoirs, pour s'occuper l'esprit, se remplir le cerveau d'informations qui n'avaient rien à voir avec la perte de sa gouvernante.

Son père la ramena au présent et ils sortirent, conduits par Ted, pour aller au cimetière. À l'abri de la voiture, il conjura une gerbe de fleurs colorées que Rose approuva d'un signe de tête. Elle la porta jusqu'au caveau que son père ouvrit. Ils descendirent l'un derrière l'autre et furent dans une pièce bien plus grande que ce qu'on pouvait imaginer de l'extérieur – privilège de sorciers évidemment. Le cercueil d'Olivia trônait au centre et y resterait encore une année avant de rejoindre les emplacements qui tapissaient les côtés de la pièce. Une lucarne apportait une faible lumière dans laquelle de la poussière dansait. Rose posa ses doigts sur le cercueil et se mordit la lèvre. Son père l'aida à poser les fleurs dessus et lui pressa l'épaule, puis sa présence disparut.

À son grand étonnement, Rose se sentait apaisée. Peut-être était-ce par le silence, le fait qu'ils étaient sous terre, isolés du monde ; ou de savoir que Nanny était là, près d'elle. Elle pleurait silencieusement mais n'avait pas envie de se laisser tomber au sol et de ne plus bouger pendant des jours, contrairement à ce qu'elle avait ressenti ce matin en se levant. Elle ne sut pas combien de temps elle resta là, à se recueillir en silence, avant de relever la tête et de chercher son père du regard. Il était debout devant deux niches, les mains croisées devant lui. Elle s'approcha doucement et regarda les noms de ses grands-parents paternels. Son père lui prit spontanément la main et ils restèrent à observer les plaques devant eux.

- Mets des fleurs, murmura Rose.

Ils jetèrent le même regard vers l'entrée puis Erwan sortit sa baguette et fit apparaitre de nouvelles fleurs. Pour quelqu'un qui n'aimait pas la Botanique, Rose les trouva très réussies. Elle reconnut des tulipes, des iris et des roses blanches parmi d'autres inconnues.

- Ma mère adorait les roses, souffla son père.

Rose lui sourit et haussa un sourcil.

- Je ne te l'avais jamais dit, comprit-il instantanément.

Elle se nicha contre lui et le regarda poser l'assortiment fleuri sur le sol.

- J'ai de la chance qu'elle n'était pas fan des Tentacula vénéneuses alors, murmura-t-elle.

Son père eut un petit rire bas et lui sourit.

Lorsqu'ils remontèrent, ils se souriaient tranquillement, tous les deux apaisés par leur visite au caveau. Rose remercia son père dans la voiture qui les ramena au Manoir et il se contenta de presser sa main.

Cet été, le plus long, le plus étrange et le plus triste de sa vie touchait bientôt à sa fin. L'arrivée de Derek et sa famille avait ôté un poids pesant sur tous les habitants du Manoir. Rose et son père ne cessaient de s'échanger des sourires. La première était contente de le voir interagir avec des adultes qui n'étaient pas des partenaires commerciaux ni des employés, le second était rassuré et heureux de voir sa fille retrouver son comportement habituel avec la présence de Derek. Il se félicitait chaque jour d'avoir eu le courage d'inviter, des années auparavant, Stanley et son fils pour voir si leurs enfants pouvaient s'entendre. C'était allé bien au-delà de leurs espérances, et c'était grâce aux deux phénomènes, qui étaient présentement en train de s'encourager mutuellement à sauter dans l'étang, que sa relation avec Stanley ne s'était pas étiolée au fil du temps, même quand il avait quitté la société pour aller travailler au Ministère de la Magie. Il éclata de rire en voyant sa fille et son meilleur ami nager dans l'étang, autour duquel couraient les sœurs de Derek en criant, envieuses d'y aller elles aussi. Il s'approcha et prit la plus jeune sur ses épaules, tendit les mains aux autres. Puis il y entra tranquillement, les filles accrochées à lui. Rose regardait son père, avec ce visage insouciant, ce rire aux lèvres, entrer tout habillé dans l'eau, entrainant à sa suite les enfants qui criaient de joie. Elle eut une vague pensée rageuse pour sa mère biologique qui lui avait brisé le cœur et à cause de laquelle, elle s'en rendait compte, il s'était renfermé durant toutes ces années, pour ne se rouvrir que lorsque sa fille avait failli mourir. Puis elle sourit et accepta Anissa qui grimpa sur ses épaules et s'accrocha à sa tête. Mary les surveillait du coin de l'œil, allongée sur une chaise longue, pas perturbée par l'attitude de ses enfants ni par leurs vêtements ruinés. Stanley les rejoignait à peine et ses yeux bleus s'écarquillèrent avant qu'il n'éclate de ce rire si familier. Il tendit la main à son épouse.

- Ah non !

- Ah si ! De quoi on a l'air nous ? insista-t-il.

Elle attrapa sa main sous les encouragements des autres et ils se laissèrent finalement aller dans l'eau, hilares à leur tour.

Le soir, ils dînèrent sur la terrasse, un feu magique brulant au centre de la table, entouré par des lumières qui voletaient autour d'eux. Les sœurs de Derek bénéficiaient d'une chambre par personne dans l'aile réservée à Rose, ce qui les amusaient beaucoup. Elles y mirent un désordre incroyable dont personne ne leur tint rigueur. Les parents étaient au premier étage, loin de leurs enfants – Mary avait jeté un regard reconnaissant à Erwan. Derek s'était bien sûr installé dans la chambre de Rose sans qu'ils ne se posent la question. Ensemble, ils ouvrirent le carton de photos et sortirent les albums, admirant tous les souvenirs qu'Olivia avaient amassés. Rose ne pleura pas, mais elle était étreinte d'un sentiment d'amour et de nostalgie qui ne la quitta pas de la nuit, pendant laquelle elle dormit sur son meilleur ami qui ne protesta pas une seule seconde.

Lorsque les Dent quittèrent le Manoir le dimanche, il fut difficile de ne pas être amusé par les cinq sœurs qui manifestaient leur tristesse de différentes manières, principalement par des pleurs de protestation. Elles avaient adoré leurs « vacances au château » et ne voulaient pas laisser leur grand frère derrière elles. Mary et Stanley parvinrent à les faire monter dans la voiture et remercièrent pour la millième fois Erwan, qui ne cessait de les faire promettre de revenir bientôt.

Puis le silence retomba sur le Manoir, et son père parut fatigué à Rose – mais une bonne fatigue, celle des journées emplies de jeux, de rires et de discussions avec des amis.

- Et demain, on recommence, murmura-t-il.

- Tu veux qu'on annule ? hésita Rose.

- N'importe quoi, rétorqua-t-il immédiatement, retrouvant son sourire. Je vous préviens, je ne vous porte pas tour à tour sur mes épaules pour attraper les lucioles.

Derek et Rose éclatèrent de rire.

- Je m'en chargerai s'ils retombent tous en enfance, promit Derek.

- Parfait. Quel est votre programme ?

- On sait pas trop… on a juste prévu d'aller au Chemin de Traverse vendredi. Tu es d'accord pour ce jour-là ?

- Évidemment. Je vais engager des chauffeurs supplémentaires.

- Ou un minibus, s'esclaffa Derek.

Son père ouvrit un œil intéressé.

- C'est une bonne idée ça… surtout que vous allez revenir chargés. Je vois ça avec Benson demain. On pourrait le garder pour aller à la gare dimanche aussi. On partira le matin ?

- Oui, ce serait mieux. On déjeunera là-bas je pense.

- Très bien.

Un silence s'étira.

- Tu viens avec nous à la gare dimanche ?

- Ça te gêne ? hésita son père.

- Pas du tout ! C'est super que tu viennes !

Il sourit à sa fille puis étouffa un bâillement avant de déclarer qu'il allait se coucher. Rose se lova contre Derek sur le canapé.

- Qui arrive demain, à part Terry ?

- Anthony et Lisa. Elle est chez lui, ils arriveront par Poudre de Cheminette. Il n'y a que Terry qui a besoin de son chauffeur particulier, taquina Rose, faisant pouffer Derek.

- Un jour il aura une cheminée connectée au réseau de transport sorcier, affirma-t-il.

- Avec une photo de toi et lui posée dessus ? devina-t-elle avec un sourire affectueux.

- Oui. Entourés de nos chiens et de tes enfants.

- Euh, pardon ?

- Nos chiens, j'ai dit.

- Ha, ha. Mes enfants ?

- Ben oui, pas les nôtres !

- Et pourquoi pas ? s'écria-t-elle, la voix plus aigüe.

- Rose, il faut vraiment que je t'explique comment ça marche, de faire des bébés ?!

- Non, mais non, protesta-t-elle, je sais comment faut faire… en théorie…

Ils gloussèrent avant de reprendre leur sérieux.

- Et toi tu n'as jamais entendu parler de l'adoption ?

Il regarda vers la cheminée éteinte et considéra les propos de Rose.

- J'y avais pas pensé… admit-il finalement. Bon, alors, entourés de nos chiens et de nos enfants.

Il leva un doigt.

- Mais ! C'est une photo prise le jour de ton mariage.

- Ah bon ? s'esclaffa Rose. Tu me présenteras le marié avant ou tu me laisses la surprise ?

- Tu le connais déjà.

Ils se jaugèrent du regard avant de s'écrier en même temps.

- Dave Taffin !

Et leurs rires résonnèrent longuement dans la pièce.

Le lendemain, Terry arriva le premier. Il garda son calme habituel le temps de rentrer dans le hall, mais Derek ne se contint pas du tout et lui sauta dessus pour le soulever dans ses bras et l'embrasser pendant que Rose pouffait derrière eux.

- Allez, repose-moi, marmonnait Terry, à moitié rouge, l'air satisfait. Rose !

Ils s'enlacèrent longuement avant de se séparer et de se sourire.

- Bon voyage ?

- Parfait, confirma-t-il. Ted conduit très bien, j'ai dormi comme une souche.

- Vous êtes installés dans la même chambre qu'en avril, leur apprit-elle. Derek, il faudra déplacer tes affaires.

Terry ne fit aucun commentaire, même pas surpris qu'ils aient dormi ensemble. Ils patientèrent sur la terrasse jusqu'à ce que Benson n'annonce l'arrivée d'Anthony et Lisa. Les cinq amis, ravis de se retrouver, passèrent l'après-midi à discuter, principalement pour se raconter leurs vacances. Lisa demanda à Rose si elle avait eu des nouvelles de Blaise.

- Non, absolument pas, heureusement d'ailleurs… je suis pas sûre d'avoir envie de garder le contact avec lui.

- Et William ? hasarda doucement Terry.

- Bah, comme vous, des cartes postales.

- Euh, non, pas comme nous, intervint Anthony.

Un regard à la ronde fit hausser un sourcil à Rose.

- Bon, pas comme vous alors. Deux cartes postales, précisa-t-elle. Je pensais vraiment qu'il en avait envoyées à tout le monde.

- C'est pas étonnant… commença Lisa.

- Oui, il a des choses à se faire pardonner, termina Derek rapidement.

- D'ailleurs, tu comptes faire quoi ?

- Que voulez-vous que je fasse ? maugréa Rose. Vous vous imaginez vous, faire la tête indéfiniment à William ? William, le moulin à paroles qui est ami avec tout le monde ?

- C'est vrai que je trouverais ça compliqué, admit Terry.

- J'ai eu plus d'un mois pour me remettre de sa démonstration de virilité. Et il s'est excusé, en face-à-face et dans chaque carte postale.

- Bref, tu n'as pas envie de lui en vouloir, quoi, s'amusa Anthony.

Elle lui tira la langue avant de lui donner raison.

- N'allez pas lui dire ça, sinon il me le rappellera toutes les demi-heures. Il parle déjà suffisamment comme ça.

Une fois seule avec Lisa, Rose répondit à des questions plus intimes.

- Et maintenant que Blaise n'est plus dans ta vie, toi et William, tu penses que… ?

- Non, affirma Rose doucement. Je n'ai pas envie de m'embarquer dans une nouvelle histoire maintenant. Blaise m'a un peu vaccinée et puis je pense que je n'en ai pas trop la force pour le moment.

- Juste une relation amicale alors ?

- Exactement. C'est ce que j'essaie de faire depuis le mois de février, et avec tous les événements récents, je pense que ce sera plus facile qu'avant.

- C'est moi qui tu essaies de convaincre… ou toi ?

- Peut-être les deux, finit-elle par grommeler alors que Lisa lui mettait un petit coup de coude et pouffait.

- Attraction physique hein ?

- Indéniable. Mais, résistible, affirma Rose. Donc pas insurmontable de rester amis.

Lisa lui sourit sans plus rien ajouter alors que les garçons les rejoignaient.

Mardi matin, Rose tournait en rond depuis un long moment en attendant l'arrivée de William, se posant trop de questions qui commençaient par « et si ».

Et si ça se passait mal ?

Et si elle se rendait compte, en le voyant, qu'elle lui en voulait toujours ?

Et s'il pensait qu'elle avait été trop autoritaire en juillet et qu'il ne voulait plus qu'ils soient amis ?

Et s'il ne venait pas, finalement ?

- Et pourquoi il ne viendrait pas au juste ? s'enquit Derek qui la suivait des yeux.

Elle haussa les épaules et ne répondit pas.

- Ça m'étonnerait qu'il ait rencontré une belle Espagnole et qu'il ait décidé d'annuler ses vacances avec nous, taquina-t-il.

Il était tombé, comme souvent, en plein dans le mille et Rose rougit.

- Je me déteste, ronchonna-t-elle.

Il secoua la tête et regarda sa montre.

- Il va bientôt arriver. On descend ?

Rose le suivit et referma la porte de la Bibliothèque. Les autres étaient encore dehors devant les reliefs de leur petit-déjeuner tardif.

- Monsieur William Van Alten, annonça Benson rapidement au moment où le pied de Rose touchait le marbre du hall d'entrée.

- Je vais dehors, lança Derek avant de filer à toute vitesse.

Rose n'eut pas le temps de protester qu'il avait disparu et un brun très bronzé sortait de l'office, un sourire aux lèvres.

- Rose !

- Salut William.

Il s'arrêta à quelques pas d'elle, puis se décida le premier et vint la serrer brièvement dans ses bras. Après ça, Rose maintint une distance physique entre eux, pas trop grande pour que ça ne paraisse pas étrange, mais suffisamment pour qu'elle puisse facilement s'échapper.

- Je suis contente que tu sois là, dit-elle avec un petit sourire.

- Moi aussi.

Elle leva un sourcil en attendant la suite.

- J'avais un peu peur que tu changes d'avis et que tu m'interdises de revenir. Mais je me suis aussi rappelé que ce serait bizarre pour les autres si on ne se parlait plus non ? Et j'espère que tu m'as pardonné. Tu as reçu mes cartes postales ? Ha ben oui, sinon tu n'aurais pas répondu, je suis bête.

Rose dissimula son sourire derrière sa main.

- Tu vas me laisser en placer une tu penses ?

- Ah, désolé. Je suis content de te voir alors je déblatère sans réfléchir. Fais-moi taire, pitié.

Son regard pétillant fit rire Rose. Elle lui fit signe de la suivre.

- Les autres sont sur la terrasse, viens.

Il s'exécuta et put bientôt « déblatérer sans réfléchir » avec d'autres personnes que Rose.

- Tu me fais visiter ? demanda finalement William en désignant le Manoir.

- On attend les autres, non ?

- Ah non hein ! Toujours en retard mes colocataires, râla-t-il en se relevant.

- Il m'épuise déjà, souffla Lisa, faisant rire les autres.

Rose guida son ami dans les étages de la maison, désignant des pièces d'une main, ouvrant certaines portes rapidement.

- Et là c'est ma chambre, que tu connais… et le reste du couloir, des chambres d'amis.

Elle poussa une porte.

- C'est la tienne. Tu partages la salle de bains avec Marc.

- Quoi ? J'ai pas ma salle de bains personnelle ? s'offusqua-t-il.

- Privilège de Wayne, désolée.

- Comment on fait pour devenir un Wayne ? maugréa-t-il.

- Mon père est célibataire si ça t'intéresse, répondit-elle platement en retenant son amusement, puis se dirigea vers l'aile est.

Elle lui montra sans les ouvrir les portes anciennement réservées à Olivia, puis un boudoir inutilisé et une grande pièce vide.

- Pourquoi c'est vide ?

- Je pense que c'était le bureau de ma mère biologique, ou quelque chose comme ça. Père n'a jamais bien élaboré à ce sujet.

- Il y a un troisième étage ?

- Réservé au personnel. Je n'y suis jamais allée.

- Vraiment ? s'étonna-t-il.

- Enfin, pas depuis que je suis enfant, ça c'est sûr. Ce sont leurs quartiers, on n'a rien à y faire.

- Oui Madame.

Elle leva les yeux au ciel et l'entraina vers le rez-de-chaussée.

- Alors, impressionné ? demanda Anthony quand ils furent à nouveau dehors.

- Très, confirma William. C'est beaucoup trop grand pour deux personnes.

- Neuf, corrigea Rose.

- Dont sept qui vivent au même étage, contra-t-il, son sourire grandissant sur ses lèvres.

Elle haussa les épaules puis enchaina sur le programme de leur courte semaine, Terry intervint en disant qu'il leur faudrait au moins trois jours pour faire tout le tour de la propriété de toute façon, déclenchant les rires de ses amis.

Enfin, ils furent au complet vers quinze heures, se saluant avec des exclamations de joie. Rose pria mentalement son père de les pardonner pour le chahut qu'ils mettaient déjà. Il n'était pas sorti de son bureau depuis le matin et n'avait pas encore vu les nouveaux arrivants.

À l'heure du diner, elle fit installer tout le monde dans la salle à manger et arrêta Benson qui allait chercher le père de famille pour y aller elle-même. Elle toqua doucement à la porte et attendit qu'il l'autorise à entrer.

- Papa ? ça va ?

- Oui, ça va. Et toi ?

Il s'étira et se massa les tempes alors qu'elle fermait derrière elle.

- Tes amis sont arrivés ?

- Oui, ça fait un moment.

Il fronça les sourcils et regarda enfin l'heure, puis bondit sur ses pieds.

- Par Merlin ! Je n'avais pas vu qu'il était si tard ! Tu as bien fait de venir me chercher.

- Travail prenant ?

- Très… je vais devoir retourner à Seattle la semaine prochaine, je ne sais pas pendant combien de temps. J'ai passé ma journée à lire des contrats et envoyer des courriers.

Il secoua la tête et présenta son bras à sa fille.

- Descendons diner. J'ai hâte de revoir tous tes amis.

Son visage s'illuminait au fur et à mesure qu'il parlait et Rose l'admirait de parvenir à s'intéresser à une brochette d'étudiants qui n'avait pas la moitié de son âge ni de sa maturité. Rose retint un rire alors que ses amis se levèrent tous en voyant Erwan arriver dans la pièce, gênés de s'être assis avant le patriarche.

- Mais asseyez-vous voyons ! protesta-t-il en prenant place. Je suis ravi de vous accueillir à nouveau chez nous.

Rose écouta ses amis remercier en s'installant à droite de son père. Alors que Benson remplissait son verre, Erwan posa le menton sur ses mains.

- J'ai une question capitale pour vous.

Onze visages le regardèrent.

- Vos résultats des BUSE ! Racontez-moi !

Des rires retentirent autour de la table, Rose sourit affectueusement à son père. Chacun se lança dans un commentaire sur ses résultats. Elle ne fut pas surprise d'apprendre qu'Anthony avait validé tous ses examens et obtenu trois O, même si sa plus faible note – un A en Astronomie – le faisait encore grimacer. Mandy mentionna son P en Potions.

- Honnêtement je m'attendais à pire, pouffa-t-elle.

Globalement, les seuls échecs étaient l'Astronomie, sauf pour Anthony, les Potions pour Mandy et bien sûr…

- Alors Rose… la Botanique ?! demanda Michael, déjà hilare.

- Comme Mandy ! s'exclama-t-elle alors que son amie levait les bras au ciel en solidarité.

- Et l'Astronomie, commença une voix moqueuse. Un P comme tout le monde ?

- Non, le détrompa Rose.

- Hein ?

Les visages éberlués de ses amis la firent rire.

- J'ai eu un Désolant !

- Ah ouf, soupira Padma. J'avais peur que tu aies eu un E !

- Moi je comprends, l'Astronomie, franchement…

- Merci William. Toi aussi tu as eu un D aux BUSE ?

- Non, pas à ce point ! Un Piètre. Avoir un D, c'est un peu la honte quand même.

Le « O » de la bouche de Rose le fit rire et il lui adressa un clin d'œil pendant que tout le monde protestait son affirmation malgré leur hilarité. Rose lui tira le bout de sa langue en protestation et mangea un peu en écoutant les autres continuer à parler de leurs exploits aux examens.

- Mais attendez… fit soudainement Nassim alors que Nelson venait de faire disparaitre leurs assiettes vidées.

- Il y a un examen dont on a pas parlé… continua Idriss.

- Alors qu'on a tous participé ! ajouta Marc.

- C'est vrai ça !

- Tous participés ? demanda Erwan, fronçant les sourcils et regardant sa fille.

Elle secoua la main, comprenant enfin.

- Ils parlent de mon examen d'Étude des Moldus, lui souffla-t-elle. Ils m'ont beaucoup aidée à réviser. Je leur dis ou pas ?

Un sourire joueur flotta sur les lèvres de son père.

- Je pense qu'ils ne te croiront même pas.

- C'est possible… au pire j'ai le document affiché dans ma chambre.

- Mais quel suspense !

- Crache le morceau Rose !

- Attendez ! s'exclama William en levant les mains, les faisant tous taire.

Il tourna un visage à l'expression dramatique vers Rose, qui se mordit la lèvre pour ne pas rire.

- T'as quand même pas… validé ton examen… si ?

Elle leva un sourcil suggestif puis leva d'un coup les bras au ciel.

- Si !

- Mais noooooon ! s'exclama aussitôt Michael.

- Acceptable ? estima Idriss.

Mais Rose secoua la tête.

- T'as eu Effort Exceptionnel ?

Le ton ébahi de Padma fit rire tout le monde alors que Rose opinait vigoureusement de la tête.

- Elle nous fait marcher, lança Anthony.

- Pas du tout, je vous jure que c'est vrai. Le papier est dans ma chambre, vous pourrez vérifier par vous-même.

- Ben ça alors, conclut Mandy. Bravo Rose !

- Bravo nous, corrigea William. On a donné de nos personnes quand même.

- Bravo vous, accepta Rose de bonne grâce.

Ils terminèrent le repas en échangeant sur les matières qu'ils allaient garder pour les présenter aux ASPIC deux ans plus tard.

- Pas de Préfet-en-Chef parmi vous ? questionna Erwan en se tournant vers les septièmes.

- Ah non ! protesta aussitôt Nassim.

Des rires lui répondirent, Erwan leva les mains devant lui en s'excusant pour son affront.

- Mais on a le capitaine de l'équipe de Quidditch, lança Marc en désignant William. Ce qui est bien mieux que Préfet-en-Chef.

- Surtout pour faire la fête, marmonna Idriss.

Tout le monde évita le regard du père de Rose, sauf elle qui lui adressa un sourire au souvenir de leur conversation.

- Félicitations, William.

- Merci Monsieur.

Rose avait retenu son souffle dès que les yeux de son père s'étaient posés sur son ami. C'était la première fois depuis juillet qu'il lui parlait individuellement. À voir l'expression un peu coincée de William, il était aussi tendu que Rose. Ses yeux bleus se posèrent automatiquement sur elle alors qu'Erwan discutait en aparté avec le majordome. Elle lui fit un sourire qu'elle voulut le plus rassurant possible, puis se tourna vers Padma qui attirait son attention avant qu'il ne lui serve son irrésistible sourire charmeur, qu'elle avait vu commencer à apparaitre sur ses lèvres.

Même après le départ d'Erwan, ils restèrent longtemps à discuter, s'installant dans le petit salon attenant. Rose avait l'impression qu'ils étaient à Poudlard, dans la Salle Commune, et qu'ils passaient une de leurs soirées habituelles tous ensemble. Rassurée par cette routine, elle se plongea dans un énième jeu de société qu'Idriss avait déballé et participait aux plaisanteries qu'ils se lançaient constamment. Trop contents de se retrouver, ils ne montèrent se coucher que très tard sur la pointe des pieds pour ne pas déranger la maisonnée. Rose les répartit dans leurs chambres et bailla en fermant la porte de la sienne derrière elle. Kietel sautilla jusqu'à elle et elle le posa sur son épaule. Il vadrouilla dans la salle de bains pendant qu'elle prenait une douche rapide et ils s'endormirent tous les deux sous le drap, la fenêtre ouverte laissant entrer la fraicheur de la nuit.

Leur mercredi fut leur jour de repos : ils se levèrent très tard, en fin de matinée, et toute leur journée fut décalée. Rose songea que le seul vaillant avait été William. Il était passé devant sa porte, vers neuf heures peut-être, pour descendre et ne remonter qu'une bonne heure plus tard. Elle était allongée sur son lit, cramponnée aux draps, réveillée par un cauchemar quand elle l'avait entendu dans le couloir. Elle était restée dans un état de somnolence légère jusqu'à ce qu'il repasse dans le sens inverse, puis elle avait à nouveau sombré, sans faire de cauchemar supplémentaire.

Ils planifièrent leur journée au Chemin de Traverse pour le vendredi, et Rose les rassura en parlant du minibus que son père avait vraiment loué et qui les attendait déjà dans le garage du Manoir. Elle apaisa leurs craintes concernant la distance avec Londres : Ted était un chauffeur très compétent et le véhicule était équipé pour des sorciers – comprendre, pour faire plusieurs centaines de kilomètres en quelques secondes. Rose parla aussi d'aller à la plage le lendemain, mais elle ne fit aucune promesse car elle voulait en parler à son père d'abord.

Ils visitèrent – revisitèrent – l'immense parc, profitant de l'étang pour y tremper les pieds, assis tout autour de l'étendue d'eau.

En fin d'après-midi, Anthony se souvint d'une promesse qu'ils s'étaient faite.

- Mais au fait ! William, tu devais pas nous faire écouter quelque chose ?

- Par Merlin, que quelqu'un débranche son cerveau qui se souvient de tout, protesta Nassim.

William lui assena un coup de coude et eut un sourire enchanté.

- Si, j'ai amené des disques, comme promis. Rose, on peut écouter ?

- Évidemment ! J'avais complètement oublié. Venez dans le grand salon, c'est là qu'il y a le matériel.

William les rejoignit en dernier, des disques sous le bras. Elle lui sourit et ouvrit un imposant meuble qui révéla un système audio de haute qualité. Idriss poussa un petit sifflement d'admiration.

- Ben dis donc… belle machine…

William avait le même air admirateur, puis il étala ses disques sur la table et présenta les groupes à ses amis qui étaient autour.

- Je vous ai amené mes préférés, et aussi des groupes plus « grand public »…

- « Grand public », se moqua aussitôt Idriss. Ça dépend du public quoi…

Lisa le poussa de l'épaule et il fit un sourire innocent à William qui réprimait le sien. Terry commença à lire les noms de groupes à voix haute.

- Deicide, Megadeth, Slayer, Sepultura… c'est très sombre tout ça.

William haussa les épaules.

- Ça fait partie de l'ambiance.

Mandy désigna un dernier groupe.

- Pantera, gloussa-t-elle en regardant Rose qui sourit à son tour.

- Ah, celui-là c'est mon préféré, annonça William. Et là, ce sont les groupes de heavy métal plus accessibles pour des néophytes.

Il montra des noms, Metallica, Iron Maiden, Motörhead…

- On va peut-être commencer par ça.

- Oh bien sûr, eux ils ont droit à un crescendo dans l'horreur, râla Marc.

Padma étouffa un rire et Rose encouragea William.

- Vas-y, mets celui que tu veux.

Elle adressa un regard sévère à Nassim, Marc et Idriss qui baissèrent aussitôt les yeux et calmèrent le feu de leurs moqueries. William déposa un disque sur la surface et enclencha la musique. Tout le groupe eut un petit sursaut et Rose se jeta sur le bouton de contrôle du volume.

- Désolé ! Je savais pas que ce serait si fort, lança William.

- Comment ça s'appelle ?

- Iron Maiden. C'est un groupe qui vient de Londres.

- C'est pas du tout de la musique de sauvages, commenta Terry après une minute ou deux. C'est pas forcément mon style, mais c'est pas l'horreur à laquelle je m'attendais vu vos commentaires.

- Ben non, ronchonna William, déclenchant des sourires de la part des autres.

Il leur fit écouter quelques extraits, et Lisa conclut en disant qu'elle aimait bien. Ensuite ils entendirent Metallica, puis Motörhead, et William sourit en voyant Derek bouger la tête en rythme. Rose regardait son meilleur ami avec tendresse, pas étonnée que ça lui plaise. Elle ne savait pas encore trop quoi en penser, mais ce qui était sûr c'est qu'elle s'attendait à plus… dynamique, plus violent. William sourit à sa réflexion et sortit un nouveau disque.

- On peut essayer ça… c'est un groupe assez récent qui vient d'Allemagne. Ils n'ont fait qu'un seul album pour le moment, mais je l'aime beaucoup.

La musique démarra après un signe de tête approbateur de Rose. Padma ne retint pas une grimace perplexe lorsque la voix du chanteur retentit autour d'eux.

- Oh, ils ont dit leur nom ! s'exclama Michael.

- J'aime bien sa voix, fit Anthony, et plusieurs hochements de tête lui répondirent.

- Alors, Rose, assez dynamique pour toi ?

- Si elle dit oui, on peut arrêter ? chuchota Nassim avec un petit air moqueur.

Mais elle secoua la tête et désigna les disques des groupes préférés de William.

- Maintenant on écoute ça.

- Oui Madame, souffla aussitôt William.

- Deicide ?

- Euh, non, peut-être pas tout de suite, sourit-il.

Et ils enchaînèrent les groupes de thrash metal. Rose monta le son en plantant ses yeux verts dans ceux d'Idriss qui commençait à se plaindre un peu trop à son goût.

- Tu aimes bien ? murmura William près de Rose, qui était une des rares à sembler apprécier, avec Derek.

- Oui, confirma-t-elle, très sérieuse et impliquée. Je ne sais pas si j'écouterais tous les jours, mais j'aime bien. Il nous reste encore ces deux-là à écouter.

Il arrêta le chanteur de Slayer au milieu de sa chanson et tendit le disque de Deicide à Rose. Les guitares étaient plus agressives et Nassim eut un geste d'évidence devant les pas en arrière du groupe avant de cacher un fou rire qui le prit avec Mandy. Rose eut un petit hoquet de surprise lorsque la voix s'éleva et emplit la pièce. William fit aussitôt un geste pour arrêter la musique, mais Rose l'en empêcha en posant sa main sur son bras et laissa la chanson se terminer. Les autres reculèrent assez naturellement pour s'affaler dans des fauteuils un peu à l'écart, moitié horrifiés, moitié hilares.

- On vous avait prévenus, dit finalement Marc alors que le silence s'installait à nouveau, bientôt brisés par des rires plus ou moins assumés.

- Rose a bien aimé, je vous signale, protesta William en croisant les bras.

Lisa lança un regard moqueur à son amie qui l'ignora.

- Le dernier, ordonna Rose en le tendant à William. Ton préféré.

Et elle reçut un sourire qui lui fit se racler la gorge. Elle s'obligea à se concentrer sur le lecteur de musique devant elle.

- C'est leur dernier album. Il est plus agressif que les précédents, prévint-il.

Padma poussa carrément un cri d'exclamation quand la première chanson retentit et Michael enfouit son visage dans ses mains, secoué d'un rire irrépressible. L'air un peu hébété, Terry nicha sa main dans celle de Derek, qui observait Rose avec un sourire aux lèvres.

Rose, elle, n'était pas sûre d'enregistrer la musique – son regard était accroché à William, qui avait fermé les yeux et secouait légèrement la tête, pris par la musique qui résonnait dans ses oreilles. Elle remarqua que son pied battait la mesure, et finit par voir ses lèvres bouger en rythme avec la chanson qui se déroulait. Une petite voix tinta dans la tête de Rose.

Ferme la bouche.

Elle serra les lèvres et avala sa salive, puis gigota légèrement. William ouvrit les yeux et commença à lui sourire avant de s'interrompre devant son expression. Il mit la musique sur pause, incertain.

- T'aimes pas ?

- Et voilà, lança Derek comme elle ne répondait pas, t'as cassé Rose !

Les autres s'esclaffèrent et Rose revint au présent, après une gifle mentale monumentale.

- Si, si, j'aime bien ! Je préfère le groupe précédent. Je pense.

William lui adressa un de ses sourires parfaits qui retournait toujours le ventre de Rose et elle y répondit faiblement. Puis il croisa les bras et enchaina avec curiosité :

- Qu'est-ce que tu écoutes, toi, d'habitude ?

Elle fit un geste vers les étagères derrière le lecteur et il attrapa quelques disques.

- Bach… Nina Simone, Miles Davies… Rachmaninov… Vivaldi… ben dis donc ! Heureusement que tu m'as rencontré ! s'exclama-t-il, une lueur amusé dans le regard.

- Oui, heureusement, balbutia-t-elle, hypnotisée par ses yeux.

Elle adressa mentalement un appel au secours à Derek qui apparut presque instantanément à leurs côtés.

- Alors, vous avez abandonné la musique de sauvages pour la musique de riches aristocrates ?

William se mit à rire et Rose recula pour s'appuyer contre Derek, qui lui passa une grande main dans le dos.

- C'est lequel, ton préféré ? demanda William à Rose.

- Billie Holiday, répondit-elle immédiatement.

Il sourit à la rapidité de sa réponse et chercha sur les étagères.

- On n'est pas obligés de… commença Rose.

- Chacun son tour !

Un vieil air de jazz les enveloppa bientôt et Rose s'assit sur un des canapés de la pièce, imitée par Derek et William.

- Ah, c'est toujours pas mon truc, mais ça pique moins les oreilles ! fit Nassim avec un clin d'œil à Rose, qui répondit par un sourire.

- Jazz ? dit une voix à la porte de la pièce.

- Bonsoir Papa, répondit Rose.

Il salua les Serdaigles et fit quelques pas.

- Ah, Billie Holiday… c'est sûr que ce n'est pas la même chose que les atrocités que je viens d'entendre, lança-t-il avec un sourire amusé.

Dix personnes pouffèrent derrière leurs mains, une autre baissa les yeux, et la dernière protesta vivement :

- Papa !

Son sourire s'élargit et Rose soupira avant de s'excuser pour le bruit qu'ils faisaient.

- Mais non, voyons, amusez-vous… Je vous revois au diner.

William se tourna vers Rose aussitôt Erwan sortit.

- Je suis désolé d'avoir dérangé ton père avec…

- Ta musique de psychopathes, termina Marc à sa place.

Cette fois Rose eut un petit rire, puis fit un geste à William.

- T'inquiète pas. Ça lui change du quotidien.

Ils discutèrent de leurs préférences musicales en écoutant le dernier album des Bizarr'Sisters, à la grande joie de Lisa qui chantonnait les paroles, les yeux brillants au souvenir du concert auquel elle et Anthony avaient assisté. Rose finit par faire signe à tout le monde d'aller vers la salle à manger. Elle jeta un œil à William qui rangeait et vint l'aider. Elle prit un disque de Metallica, attrapa la boite de Megadeth et y plaça l'album, amusée à l'idée d'ennuyer William. Une main se posa aussitôt sur la sienne.

- Non non non, protesta la voix chaleureuse de William.

Il la considérait avec une expression outrée, Rose se mordit la lèvre pour ne pas rire.

- Laissez votre humble serviteur ranger, Miss Wayne. Parce que vous faites n'importe quoi, rajouta-t-il en marmonnant.

Elle éclata de rire, incapable de se retenir plus longtemps. Les doigts de William pressèrent les siens et leurs yeux se rencontrèrent.

Une fraction de seconde.

C'est le temps que son regard resta sur les lèvres de William. Rose sentait déjà son corps se tendre vers le sien. Puis, elle ne sut comment, elle se reprit et lui renvoya un sourire avant de reporter son attention sur les disques éparpillés devant eux pour les replacer dans les boîtes correspondantes. Elle était presque sûre de l'avoir entendu jurer, mais ne réagit pas, furieuse contre elle-même. Elle se força à compter ses respirations le temps de rejoindre la salle à manger et adressa à un sourire radieux à ses amis et son père en s'installant à table.

Lorsque Rose descendit jeudi matin, un livre sous le bras, tous ses amis dormaient encore. Elle avait décidé de les laisser se reposer tant qu'ils le souhaiteraient. Un sourire s'installa sur ses lèvres en constatant que la salle à manger était déjà occupée par son père, qui venait juste de s'asseoir.

- Bonjour Rose !

- Bonjour Papa. Je peux manger avec toi ?

- Mais quelle question. Évidemment.

Elle lui sourit et posa son livre à côté d'elle, sans l'ouvrir.

- Qu'est-ce que vous allez faire aujourd'hui ? questionna son père par-dessus son assiette.

- Hé bien, on n'est pas encore allés à la plage… donc on pensait faire ça. Si tu es d'accord.

Erwan fronça les sourcils.

- Tu ne veux pas ? demanda Rose, un sourcil se haussant.

- Disons que je ne suis pas… enthousiaste, répondit-il tranquillement en posant ses couverts.

- Pourquoi ? Tu as peur qu'on se perde ?

Son ton n'avait rien d'ironique, il était juste perplexe.

- Non, pas du tout. C'est juste que la crique est en-dehors du domaine et de ses protections.

- Ah…

Les épaules de Rose se baissèrent. Ses yeux brillèrent à nouveau.

- Tu sais, sur douze, il y en a quatre qui sont majeurs !

- Ils ont dix-sept ans, rétorqua doucement son père. Ce ne sont pas exactement des sorciers aguerris.

- Tu veux venir avec nous ? marmonna Rose, gênée à cette simple idée.

- Non, non, s'amusa-t-il. De toute façon, je ne peux pas, j'ai des rendez-vous toute la journée, je ne serai pas là.

Il considéra sa fille encore un peu plus, puis termina sa tasse de thé.

- Allez-y, mais soyez prudents. Évitez de faire de la magie, et toi… ne te transforme pas. S'il te plait, ajouta-t-il.

- D'accord, répondit Rose sagement.

Puis elle eut un sourire en coin.

- De toute façon, je suppose qu'Eulaly va me suivre, non ?

Son père ouvrit de grands yeux, puis eut une mimique coupable.

- Tu pensais vraiment que je ne m'en étais pas rendue compte ? pouffa Rose.

- J'y croyais un peu, avoua-t-il en haussant les épaules. Alors elle vous suivra, et ne l'empêche pas de faire son travail !

- Promis.

Erwan hocha la tête et se leva.

- Merci de te préoccuper de moi, et de nous tous.

- C'est normal.

Il posa un baiser sur sa tête et ils se souhaitèrent bonne journée avant qu'il disparaisse. Rose secoua la tête en souriant et ouvrit son livre, se plongeant dans une nouvelle histoire policière.

Elle avait déjà terminé son petit-déjeuner lorsque ses amis descendirent, plus ou moins réveillés.

- Ça va les marmottes ? s'amusa-t-elle en refermant son livre.

Au milieu des grognements qui lui répondirent, elle aperçut quelques sourires désolés.

- Ça fait longtemps que tu es levée ?

- Un moment, oui… Ne t'excuse pas, coupa-t-elle avant que Lisa n'ouvre la bouche, j'ai mangé avec mon père, c'était très bien aussi.

- Il est où d'ailleurs ? demanda Derek en regardant autour de lui.

- Parti pour la journée. On devrait le revoir ce soir au diner.

Rose appela Nelson et fit un geste vers la table lorsque l'elfe de maison se posta à ses côtés.

- Le petit-déjeuner pour mes amis s'il vous plait…

- Bien sûr, Miss.

Elle les regarda s'installer avec un sourire aux lèvres, contente qu'ils soient enfin là. Elle commençait à se sentir seule et à perdre le contrôle sur ses pensées, ce qu'elle tenait absolument à éviter.

- Dis Rose, ton père…

Un haussement de sourcil répondit à Mandy.

- Il ne s'est jamais remarié ? osa-t-elle enfin demander.

- Euh, tu vois bien que non… bafouilla Rose.

- Pourquoi, tu voulais proposer ta candidature ? se moqua immédiatement Idriss.

- Méfie-toi, j'ai entendu dire qu'il avait une fille assez spéciale, ajouta Michael.

- Vous êtes bêtes, rétorqua la blonde en levant les yeux au ciel pendant que tout le monde se mettait à pouffer.

- Il a jamais rencontré personne d'autre ? insista Padma, tout aussi curieuse que Mandy.

- Mais, j'en sais rien moi… on se parle pas de nos vies sentimentales…

Elle était de plus en plus rouge et se tut le temps de reprendre le contrôle sur son expression faciale.

- Ce serait étonnant, estima Lisa.

- Parce que ?

- Ben, parce que… bredouilla Mandy.

Rose baissa le sourcil qui s'était levé plus haut que jamais. Elle lança un regard perçant à ses amis.

- Je le sais, qu'il est séduisant. Y'avait qu'à voir vos mères sur le quai de la gare en juin, assena-t-elle, satisfaite de leurs petits airs choqués.

Derek s'esclaffa.

- Ah, bien fait pour vous, bande de curieux.

William posa son menton sur sa main et abandonna momentanément ses œufs au plat.

- Tu crois qu'il a une autre famille, dans un autre pays ? demanda-t-il très calmement.

Rose le fusilla du regard, puis croisa les bras. Clairement amusé, il enchaina, alors que les autres se retenaient de rire :

- Ça se trouve il a une femme aux États-Unis… et peut-être même deux ou trois en…

- Tais-toi, grogna Rose, provoquant les éclats de rire de la tablée. Il a pas intérêt.

- Et puis, quel serait le but de cacher une femme ? s'interrogea Anthony, les yeux dans le vague. Le principe d'avoir une double vie, c'est bien pour que tes deux femmes ne se rencontrent jamais non ? Alors que dans son cas…

Il s'arrêta un instant sous le regard pesant de Rose, qui termina pour lui :

- Dans son cas, il n'a plus de femme en Angleterre.

Il fit un petit geste vers elle, content qu'elle ait suivi son raisonnement. Lisa se tourna vers Anthony, ses yeux bleus éclatant d'un feu qui ne présageait rien de bon.

- Je vois que tu y as longuement réfléchi ! Alors, c'est laquelle ta principale, moi ou l'autre ?

- Mais, mais… bégaya le grand brun, remontant ses lunettes sur son nez. Enfin, Lisa !

Sa petite-amie finit par sourire, amusée par son trouble. Ils échangèrent un long regard amoureux, leurs mains posées l'une sur l'autre sur la table.

- Beurk, commenta Mandy. Ils sont trop amoureux, ça m'exaspère.

Rose lâcha un petit rire et s'étira en les regardant manger.

- Aujourd'hui, plage, comme prévu ? Mon père est d'accord.

- Oh ouais ! s'enthousiasma aussitôt Idriss. Tu crois qu'on pourra se baigner ?

- Oui, là où on va, c'est autorisé. Enfin, disons que ce n'est pas interdit, se corrigea Rose avec un sourire.

- J'espère qu'il n'y aura pas trop de monde…

- Aucun risque, il n'y a jamais personne, rassura Derek. Il faut vraiment connaitre cette crique pour la trouver.

- Pratique ça, ronchonna Marc.

- Mais au moins, on aura de l'intimité ! se réjouit Nassim.

- Pas de magie, prévint Rose. C'était une des conditions pour que mon père accepte de nous laisser y aller.

- Et pourquoi il aurait refusé ? s'étonna Idriss.

- Parce que je suis pas majeure. Et que la crique ne fait pas partie de la propriété, donc…

- Pas de protections magiques, termina Terry en comprenant.

- Voilà.

- Et c'est quoi l'autre condition ? Tu as dit « l'une des conditions », rappela William.

Elle lui fit un petit sourire.

- Pas le droit de me transformer.

Il la regarda intensément avant de prendre un air malicieux.

- Oh je sens qu'on va bien s'amuser aujourd'hui… murmura-t-il, faisant rire ses amis et soupirer Rose.

Alors que ses amis remontaient pour se préparer, Rose se mit à la recherche d'Eulaly.

- Ah, vous êtes là, dit Rose en la trouvant dans la salle de billard en train de faire le ménage.

- Oui Miss, s'inclina l'elfe.

- Mes amis et moi allons à la plage aujourd'hui, annonça-t-elle. Nous partons en fin de matinée.

- Monsieur votre père me l'a dit, en effet.

- Très bien.

Un sourire amusé dansa sur les lèvres de Rose.

- Vous resterez discrète hein ?

L'elfe se courba un peu plus en l'assurant de sa discrétion, ce qui fit sourire encore plus la jeune fille.

- Quelle autorité, s'amusa une voix.

William était appuyé au chambranle de la pièce, les mains dans les poches. Rose haussa un sourcil et le rejoignit. Elle désigna la salle derrière elle.

- Voilà, tu as enfin vu la salle de jeux pour adultes, taquina-t-elle.

- Tu es sûre que j'ai le droit d'y mettre les pieds ?

- Jusque-là, aucune violation de notre règlement, donc oui, affirma-t-elle avec sérieux.

Il lui adressa un regard surpris auquel elle répondit par une moue.

- Désolée pour hier soir.

Il hocha la tête et s'excusa à son tour.

- Notre règlement, carrément, rit-il finalement doucement. Rappelle-moi les règles ?

Elle réfléchit puis commença à énumérer, levant un doigt supplémentaire à chaque phrase.

- Un, ne pas utiliser « l'attraction physique » comme excuse.

William esquissa un petit sourire, Rose resta impassible.

- Deux, ne pas se toucher.

Il croisa les bras, elle réprima un sourire.

- Trois, ne pas s'embrasser.

Il fit un pas en arrière, elle se mordilla brièvement la lèvre inférieure.

- Quatre, ne pas faire de scène de jalousie.

Sa mâchoire se contracta légèrement, elle fit semblant de n'avoir rien remarqué.

- Cinq, ne pas faire de commentaire déplacé.

Il prit un air innocent, elle haussa un sourcil une fraction de seconde.

- Six, ne pas se faire de clin d'œil.

Il pinça les lèvres pour retenir un sourire, elle repensa fugacement au diner de mardi soir et se félicita d'avoir pensé à l'interdire.

- Sept, ne pas se donner de surnom.

Il fit un geste d'évidence, elle posa les mains sur les hanches.

- Tu vas t'en souvenir ou il te faut un parchemin ?

- C'est surtout pour toi, tout ça en fait, la taquina-t-il. Je me sens moyennement concerné.

Rose leva les yeux au ciel, un sourire aux lèvres.

- Bref. Voilà la salle de jeux pour adultes, insista-t-elle.

- Tu crois qu'on pourra jouer au billard un de ces jours ?

- Oui, pourquoi pas… on proposera aux autres. Je te préviens, je suis hyper nulle.

- Je me mettrai pas en équipe avec toi alors, s'esclaffa-t-il en la suivant dans le couloir. C'est loin la plage ?

- Non, dix, quinze minutes à pied.

- Ah c'est bien, ça va nous faire bouger un peu.

- T'es pas allé courir ce matin ?

- Non, non… pas eu le courage, avoua-t-il avec un sourire coupable.

- Tu as tout donné hier matin ?

- Comment tu sais que…

- Tu passes devant ma chambre pour descendre et je ne dormais pas, répondit-elle en haussant les épaules.

Il la rattrapa dans les escaliers, toujours incertain.

- Et ? Ta porte était fermée, non ? J'ai même pas parlé !

- Je savais que c'était toi, c'est tout.

- Instinct animal ? s'amusa-t-il.

- Probablement… fit-elle, l'air détaché.

Elle n'allait pas lui dire qu'elle avait reconnu sa démarche dans le couloir, et que ça n'avait certainement rien à voir avec son instinct animal, mais plutôt avec le fait qu'elle faisait constamment attention à lui, même sans s'en rendre compte, même lorsqu'elle ne le voulait pas.

Elle lui lança un sourire avant de se glisser dans sa chambre et de fermer la porte, poussant un soupir de soulagement et de frustration. Peu importe ce qu'elle faisait, elle en revenait toujours à la même chose : elle avait envie d'être avec lui, de rester dans les parages, où qu'il soit. C'était fatiguant, surtout en prenant en compte le fait qu'elle n'avait pas la moindre intention de se jeter dans une relation autre qu'amicale maintenant.

C'est juste la règle numéro un qui te perturbe. C'est juste physique.

Ça n'en rendait pas ses résolutions moins difficiles à tenir. Il n'y avait qu'à voir hier soir, dans le grand salon, où elle avait failli se jeter sur lui quand ils rangeaient les disques ensemble. Il fallait absolument qu'elle arrête de rester à proximité de lui, ce n'était pourtant pas compliqué…

Elle secoua la tête et enfila son maillot de bain sous sa robe et prépara un sac avec ses sous-vêtements secs, une serviette et un livre – même si elle ne se faisait pas d'illusion.

Il était presque midi lorsque le petit groupe se mit en route, mais Derek avait été rassuré : ils emportaient de quoi pique-niquer. Ils discutèrent tout en marchant et arrivèrent à la crique en un peu moins de vingt minutes, Derek loin devant. Ils descendirent prudemment et laissèrent leurs pieds s'enfoncer dans le sable avec joie.

- Oh c'est génial, murmura Lisa.

- C'est super joli, ici ! commenta Padma.

Derek et Idriss avaient déjà posé toutes les affaires sur le sable et enlevé leurs t-shirts.

- Dis, on peut y aller, on peut y aller ? s'impatienta Michael en regardant Rose.

- Pourquoi tu me demandes la permission ?! On est là pour ça.

Ils se déshabillèrent tous à la hâte, jetant leurs vêtements pêle-mêle sur le sable, puis se précipitèrent dans l'eau. Terry et Padma s'arrêtèrent net quand l'eau leur arriva aux chevilles.

- Oh c'est froid.

- Mais non ! s'écria Nassim, déjà dans l'eau jusqu'aux épaules.

- C'est vivifiant ! renchérit Marc avant de disparaitre dans la mer.

Rose et Lisa avançaient lentement, prenant leur temps pour s'acclimater à la température.

- Allez les filles, faut se lancer ! encouragea Anthony, les cheveux trempés, un sourire détendu aux lèvres.

Rose mit un coup de coude joueur à son amie.

- Ça va bien entre vous hein ?

- Tellement bien, confirma Lisa en regardant rêveusement son amoureux.

- Vous êtes adorables. Et je suis heureuse pour toi.

Lisa lui adressa un sourire ému.

- Merci. Bon allez…

Et elle s'immergea jusqu'au cou, poussant un petit cri. Rose l'imita avant d'éclater de rire en voyant Terry et Padma, toujours au bord de l'eau.

- Je pense que vos genoux sont bien habitués à la température de l'eau là ! leur cria Nassim.

- Vous pouvez passer aux fesses maintenant ! renchérit Mandy.

- Qu'est-ce que tu cherches ? chuchota une voix à l'oreille de Rose.

- Euh, rien, rétorqua-t-elle à son meilleur ami.

- Il est là-bas.

Derek pointait une tête qui nageait, assez loin d'eux. Rose se détesta de sentir son ventre se dénouer.

- Il a dit qu'il voulait en profiter pour « se dérouiller les muscles » pour commencer. Panique pas.

- Mais je panique pas, répondit-elle en toute mauvaise foi, les bras croisés sur la poitrine.

Puis elle souffla, dégonflant ses joues.

- Pourquoi il me fait toujours autant d'effet ? murmura-t-elle. J'ai décidé que c'était fini.

Derek lâcha un de ses rires qui lui réchauffaient toujours le cœur.

- Ça, mon chat… c'est pas toi qui contrôle, figure-toi…

- Ben c'est qui alors ? Parce que j'aimerais bien avoir deux trois mots avec les responsables…

Elle le suivit dans son éclat de rire.

- Allez, grimpe sur mes épaules.

Il n'attendit pas de réponse et la hissa à moitié de force sur lui.

- À trois je te lance dans l'eau !

- Oh ouais !

Et à trois, Rose atterrit très peu gracieusement dans l'eau, projetée par la force de Derek.

- TROP BIEN ! hurla Idriss près d'eux. Mandy, monte !

Et bientôt les plus musclés d'entre eux lançaient les autres dans l'eau, riant à s'en tenir les côtes.

- Rose, installe-toi bien sur mes épaules, intima Derek.

- Tu me lances plus ?

- Non.

Il vrilla Idriss de ses yeux noirs.

- COMBAT ! brailla-t-il.

Rose était sûre d'avoir vu des mouettes s'envoler. Idriss se précipita sur Mandy et la fit monter sur lui. Les garçons se ruèrent l'un sur l'autre et les filles se poussèrent, tellement hilares qu'il ne leur restait pas beaucoup de force. Rose parvint finalement à déséquilibrer Mandy qui finit sous l'eau avec Idriss. Lorsqu'ils émergèrent, ils crièrent :

- C'est de la triche !

- Derek est trop grand !

- Okay, très bien, alors on échange, contra Rose. Idriss, baisse-toi, j'arrive.

Mais le résultat fut le même, malgré les efforts de Mandy et la force de Derek : Rose réussit à pousser son amie tout en restant stable sur les épaules d'Idriss.

- Ah, tu vois, conclut-elle avec satisfaction en lui tapotant la tête. C'est grâce à mes muscles hors du commun.

Derek fit un geste pour la récupérer, mais Idriss partit aussi vite qu'il le put.

- Non, c'est ma championne maintenant !

Ils finirent dans des gerbes d'eau, s'étouffant à moitié en avalant l'eau salée à force de rire tout en se débattant.

- De nouveaux challengers arrivent sur le ring ! s'écria Marc. Équipes, reformez-vous !

Anthony et Lisa se tenaient l'un sur l'autre, les bras croisés, l'air très sérieux. Lisa haussa un sourcil dans une parfaite imitation de Rose qui les fit tous hurler de rire. Derek saisit Rose par la taille et la posa sur ses épaules, Mandy grimpa sur Idriss. Terry émit un sifflement impressionné.

- Une quatrième équipe ! Faites place à Nassim et Padma !

- Oubliez pas la cinquième !

Michael venait de s'avancer, chargé de Terry qui avait un air très digne.

- GO ! hurla Marc, hilare.

Et ils se jetèrent les uns sur les autres dans un désordre total, projetant de l'eau partout, riant beaucoup évidemment. Mandy fut la première à tomber, Idriss resta près d'elle alors qu'elle s'éloignait, proclamant qu'un jour elle aurait sa vengeance. Puis Padma chuta, entrainant Nassim avec elle.

- Non ! La victoire était si proche ! déplora-t-il en faisant un clin d'œil à Padma.

- Allez mon petit cœur, encouragea Rose, je sais que tu l'aimes mais…

- Pas de pitié ! rugit Derek en fonçant vers Michael et Terry.

Rose n'eut rien à faire et ils chutèrent spectaculairement dans la mer, sous les rires et les cris de victoire de Derek et Rose. Ils pivotèrent dramatiquement vers Lisa et Anthony. Rose rejeta ses cheveux en arrière.

- Le combat promet d'être féroce, commentait toujours Marc, très impliqué dans son rôle. Les adversaires se jaugent du regard… Qui va faire le premier pas ?

- NOUS ! brailla Lisa pendant qu'Anthony s'avançait, retenant son rire. Concentre-toi.

- Oui ma chérie.

Rose pouffa mais perdit bientôt son sourire. Lisa n'y allait pas de main morte et elles se débattirent longuement.

- Alors mon chat, tu galères ? taquina Lisa.

- Tu es beaucoup plus forte que je le pensais ! Lui aussi !

- C'est à force de porter des livres toute la journée ça !

- Comme quoi ça paye d'être un rat de bibliothèque !

Elles riaient tellement qu'elles avaient du mal à se pousser l'une l'autre. Elles manquèrent le sourire complice qu'Anthony et Derek échangèrent et ne virent pas la trahison arriver : ils poussèrent leurs compagnes par les jambes et elles volèrent dans l'eau en même temps, à leur grande surprise. Lisa sortit rapidement la tête de l'eau, prise d'une toux.

- Ça va ma chérie ? Pardon !

Lisa hoqueta encore un peu, puis expliqua en riant :

- J'ai rigolé dans l'eau et j'ai bu la tasse.

Tout le monde se mit à rire. Derek cherchait Rose des yeux. Il la sentait, mais ne la voyait plus.

- Ah si, la voilà, marmonna-t-il en se retournant.

Elle se tenait juste derrière lui, entièrement immergée sauf pour sa tête. Ses yeux verts étaient grands ouverts et il ressentit sa panique.

- Je t'ai fait mal ? s'affola-t-il immédiatement.

- Non, non, pas du tout.

Elle avait une voix étranglée qu'il interpréta mal.

- Désolé pour cette trahison, sourit-il. Tu veux sortir de l'eau te reposer ?

- Surtout pas ! s'écria-t-elle alors que tout le monde commençait à regarder dans leur direction, curieux de savoir ce qu'ils se racontaient.

- Qu'est-ce qui t'arrive ?

Sa réponse fut inintelligible et Derek la força à répéter.

- J'ai perdu mon haut de maillot, marmonna Rose, rouge jusqu'aux oreilles.

- De quoi ?!

- Arrête de rire. Il s'est détaché quand je suis tombée dans l'eau et je l'ai pas retrouvé.

Derek était dans l'incapacité totale d'aligner plus de deux mots. Il se tenait les côtes et commençait à avoir les larmes aux yeux.

- Ça va Rose ? s'enquit Lisa.

- Au top, répondit-elle faiblement en sortant son pouce de l'eau.

- C'est l'heure de manger non ? lança Michael. J'ai faim…

- Allez, venez… les tenta William. Y'a des sandwiches et tout…

Derek jeta un œil à Rose.

- Mon chat, va bien falloir que tu sortes un jour de toute façon…

Elle grommela sans répondre. Puis elle se décida.

- Euh, excusez-moi, mais… vous voudriez bien rester dans l'eau le temps que je sorte ?

Dix visages la regardèrent avec incompréhension.

- Et me tourner le dos… et aussi fermer les yeux ? S'il vous plait ?

- Nooooon ? s'exclama Mandy.

- Siiiiiiiiiii, répondit Rose misérablement, imitant son ton.

Et la blonde éclata de rire.

- Rose, qu'est-ce que tu fabriques ? s'impatienta Idriss, à moitié sorti de l'eau.

- J'ai…

Elle s'éclaircit la gorge.

- J'ai perdu mon haut de maillot.

Elle eut un geste résigné en entendant les rires autour d'elle.

- Allez, soyez mignons, lança Padma. Tournez-vous.

Ils s'exécutèrent tous.

- Les yeux ! rappela Terry.

Rose revint vers le sable aussi vite que possible, restant cachée dans l'eau autant qu'elle le put. Puis elle plaqua automatiquement ses mains sur ses seins et se redressa, les joues brulantes. Elle fonça vers le tas de serviettes, s'essuya rapidement et avisa le t-shirt de Derek sur le dessus de la pile.

- Parfait, marmonna-t-elle en l'enfilant.

Elle ne voulait pas prendre le temps de chercher sa robe pour ne pas faire attendre les autres.

- C'est bon ! cria-t-elle en leur faisant face. Merci !

- Pourquoi il a fallu qu'on ferme les yeux ? se plaignit Nassim. T'es un genre de Méduse, si on te regarde les seins on finit changé en pierre ?

William avança la main vers la tête de son ami, la bouche ouverte pour parler. Mais il se ravisa à la dernière seconde et remonta sur la plage. Rose avait suivi son petit manège, intriguée, mais ne dit rien. Il fut le premier à la rejoindre, les autres s'étant lancés dans une bataille d'eau en échangeant des noms d'oiseaux qui firent pouffer Rose. Elle secoua légèrement la tête, repensant à la fugue de son maillot de bain. Elle tripotait machinalement l'ourlet du t-shirt blanc, songeant vaguement qu'il était un peu petit par rapport à d'habitude. Elle fronça les sourcils, espérant que ce n'était pas elle qui avait pris tant de poids que ça… ni grandi, mais ça l'aurait beaucoup étonnée parce que cela faisait plusieurs mois que…

- Rose.

- Oui ? répondit-elle machinalement en tournant la tête vers William.

Il désigna le t-shirt, elle eut une moue contrariée.

- J'ai perdu mon maillot dans l'eau, expliqua-t-elle.

- Oui, j'avais compris.

Elle haussa les épaules et commença à se détourner de lui.

Ne le regarde pas. C'est lui, la Méduse en fait.

- Confortable ? lança-t-il soudainement, un sourire commençant à se dessiner sur ses lèvres.

- Euh, pardon ?

- Mon t-shirt, il est confortable ?

Elle plaqua une main sur sa bouche et ses yeux s'écarquillèrent. Le sourire de William s'étala sur son visage.

- Oh William je suis désolée ! Derek aussi a un t-shirt blanc aujourd'hui…

Elle plaqua les mains sur ses hanches et regarda le vêtement.

- Ben je comprends mieux pourquoi je le trouvais petit.

- Petit ? grommela-t-il, à moitié vexé.

Rose secoua la main pour chasser sa réflexion, puis se tourna vers le tas de vêtements.

- Euh, bon, attends, dit-elle en tendant la main pour fouiller dedans. Je vais retrouver ma robe et te le rendre. Par contre il est un peu mouillé, désolée…

- Non, non, c'est bon. Garde-le, rétorqua William rapidement.

- T'es sûr ? demanda-t-elle en se redressant.

- Aucun souci.

Son regard bleu la fuyait carrément, mais elle n'insista pas. À quoi bon ? Elle n'allait pas le forcer à lui dire tout ce qui se passait dans sa tête. Alors elle abandonna et cria aux autres de venir sur la plage s'ils voulaient manger. Dix silhouettes quittèrent l'eau et s'affalèrent sur leurs serviettes pour partager le repas.

- Ben Rose ! fit Idriss, faussement surpris, son sandwich à moitié terminé. Tu te mets pas en maillot de bain ?

- Ah, ah, répliqua-t-elle, un sourire s'étalant sur son visage malgré tout.

- Dommage que t'aies pas dix-sept ans, soupira Mandy. T'aurais pu en faire apparaitre un.

- Ou utiliser un sortilège de Transfert.

- Ah oui, comme vous avez fait au bord du lac, se souvint Terry. C'était pratique, ça.

- Vous l'apprendrez cette année, rassura Marc. Comme ça l'été prochain, Rose pourra faire des folies avec son corps sans être privée de baignade après.

Ils s'esclaffèrent tous, même Rose qui trouvait la situation aussi drôle qu'eux. Une fois repus, ils s'allongèrent tous quelques minutes, profitant du soleil et de leur, probablement, dernière sortie à la plage de l'été. Rose et quelques autres s'endormirent rapidement. Sa main se referma inconsciemment sur le t-shirt blanc, qui avait bien évidemment l'odeur de William. Elle ne fit ni rêve, ni cauchemar, ce qui la soulagea après coup ; depuis la mort d'Olivia elle faisait des cauchemars complètement insensés dont elle avait parfois du mal à se sortir.

- On retourne dans l'eau, fit une voix que Rose perçut vaguement.

- Nous on reste au soleil, répondit paresseusement celle de Mandy.

Un marmonnement confirma et Rose se tourna sur le côté puis se rendormit.

Lorsqu'elle émergea de son sommeil, elle était confortablement installée sur Derek et tenait la main de Terry de l'autre côté de son meilleur ami. Elle grimaça, dérangée par une sensation étrange sur sa nuque et ses jambes. Puis elle finit par grogner et ouvrir les yeux.

- Évidemment que c'est toi, ronchonna-t-elle en voyant Idriss secouer ses cheveux mouillés au-dessus d'eux trois, l'air ravi.

- On joue aux cartes ? lança Nassim.

- Ça m'aurait étonné, maugréa Derek à son tour.

Terry étouffa un bâillement et regarda son petit-ami, puis son amie. Ils se sourirent et se redressèrent tranquillement.

- C'est trop mignon quand ils dorment empilés comme ça, commentait Padma.

- Heureusement que Rose est célibataire, souffla Mandy.

Un ricanement échappa à Rose qui se frottait les yeux.

- Et moi j'ose pas imaginer l'arrêt cardiaque de Blaise s'il avait vu comment on fait parfois la sieste.

Derek pouffa à son tour.

- Il était jaloux ? questionna Marc.

- Grave, répondit Rose, l'air sombre. C'est en partie à cause de ça…

Elle ne termina pas sa phrase et secoua la main, pour finir par la tendre vers le paquet de cartes que lui tendait Idriss, installée en tailleur sur une serviette. Derek fit une partie puis retourna gambader dans l'eau.

Le reste de leur après-midi fut plus calme même s'ils ne se rendormirent pas. Lorsque Rose se leva et s'étira, le soleil baissait vraiment bien. Elle commença à ranger machinalement leurs affaires, pour les rassembler. Derek prit une photo d'eux tous au bord de l'eau avant qu'ils ne reprennent le chemin vers la propriété Wayne, plus silencieux qu'à l'aller. William avait encore refusé de récupérer son t-shirt et Rose le portait toujours, sa robe roulée en boule dans son sac. Elle le rattrapa et lui lança :

- Je l'ai pas sali, tu sais. Il a même séché entre temps. T'es sûr que tu veux pas le remettre ?

- Non, non, vraiment.

- Je te le rends demain alors, quand il sera propre, affirma-t-elle. Oh d'ailleurs ! s'exclama-t-elle en s'adressant à tout le groupe. Si vous voulez qu'on lave vos vêtements avant d'aller à Poudlard, hésitez pas à demander. Vous avez un panier à linge dans vos chambres, utilisez-le.

- C'est gentil ça, remercia Padma. Je mettrai des affaires alors.

Benson les accueillit à leur retour au Manoir.

- Tout va bien Miss ?

- Très bien Benson, merci. Père est rentré ?

- Pas encore. À quelle heure souhaiteriez-vous que le diner soit servi ?

- Dix-neuf heures, ça irait ?

- Bien évidemment, Miss.

Elle lui sourit et monta à son tour au deuxième étage. Elle se déshabilla en allant dans la salle de bains, abandonnant le t-shirt sur le parquet près de son bureau, puis une chaussure, et une autre, et sa culotte de maillot sur son chemin. L'eau tiède chassa le sel et le sable et elle prit son temps pour bien rincer ses cheveux, les démêlant sous l'eau. Elle soupira plusieurs fois, délassée par la journée au soleil et sa longue douche.

Dans le dressing, elle enfila des vêtements plus chauds qu'une robe de plage en prévision de la soirée. Elle passa rapidement devant les portes des chambres d'amis pour annoncer qu'elle descendait au petit salon. Quelques voix lui répondirent et elle dévala les marches, détendue.

- Rose !

- Papa, tu es rentré !

Elle l'accueillit avec un large sourire.

- Alors, la plage ? demanda-t-il en desserrant sa cravate.

- C'était super ! Merci de nous avoir autorisés à y aller. Tu dines avec nous ?

- Avec plaisir. Ça ne vous gêne pas ?

- Que tu manges dans ta maison ? Pas vraiment non, s'amusa-t-elle.

- Je vais me changer.

- On dine à dix-neuf heures !

- Oui Madame Wayne, taquina-t-il.

Elle pouffa et le regarda disparaitre vers ses appartements. Puis elle rougit soudainement, repensant à la conversation du matin avec ses amis, concernant la vie sentimentale de son père.

- Ça m'étonnerait, tu sais.

- De quoi ?

- Qu'il ait une autre famille aux États-Unis.

Un nouveau rire lui échappa devant l'air très sérieux de Derek.

- J'espère pas… je suis pas prêteuse, moi…

- Ça dépend avec qui, protesta Terry en glissant son bras sous celui de son amie.

- Ah oui, c'est sûr, confirma-t-elle avec un sourire.

Ils s'affalèrent ensemble sur un fauteuil du petit salon.

- Prêts pour demain ? questionna Michael.

- Va y avoir un monde fou… je sais pas si on a eu la meilleure idée de notre vie.

Le père de Rose fit une apparition discrète dans le petit salon et s'installa sur son fauteuil sans faire de commentaire. Benson apparut avec un petit plateau et tendit un verre plein à Erwan qui l'accepta avec gratitude.

- Longue journée ? souffla Rose alors que le reste de ses amis les rejoignait.

- Un peu, admit-il avec un petit sourire. Alors, la plage ?

- C'était très bien ! répondit Mandy avec enthousiasme.

- Qui est majeur ici déjà ? demanda-t-il subitement.

Quatre mains se levèrent.

- Vous voulez boire quelque chose ?

Rose regarda son père, la bouche ouverte par la surprise. Les quatre garçons s'empressèrent d'accepter son offre et Rose parvint à protester avant que Benson ne quitte la pièce.

- Mais… et nous ?

Son père eut l'air un peu inconfortable.

- Vous êtes mineurs et vos parents…

- On comprend, Monsieur, lança immédiatement Padma.

- Mais, mes parents, c'est toi !

La réplique de Rose fit rire tout le monde, sauf son père qui semblait plongé dans un débat interne.

- On a déjà bu de l'alcool, révéla soudainement Derek.

Quelques regards le transpercèrent et William se pinça l'arête du nez.

- Et... commença Erwan, un sourcil levé.

- Et ce n'est pas une nouveauté pour nous. Mes parents m'ont déjà fait gouter plein de trucs, argumenta Terry.

- Puis c'est mieux de boire de l'alcool sous la supervision d'un responsable, non ? tenta désespérément Michael.

- Dans la sécurité d'une maison connue, continua Anthony.

Rose et Lisa échangeaient des regards, l'une mortifiée, l'autre à moitié hilare.

- Papa, vraiment, ne les écoute pas, marmonna Rose. On va prendre des sodas et c'est tout.

- Ils n'ont pas tort tu sais, répondit-il, pensivement. Passons un marché.

Rose se détendit et se laissa aller contre le dossier du fauteuil. Passer des marchés, c'était le métier de son père.

- Je vous autorise à boire trois gorgées, pas plus, de la boisson alcoolisée de votre choix. Non cessibles, non transférables.

Il jeta un regard à Mandy qui allait parler.

- Une gorgée, disons que ce serait environ quinze millilitres. Donc quarante-cinq.

- Ou une Bièraubeurre ? osa timidement demander Padma. Même une demie…

- Ou une Bièraubeurre, concéda Erwan en inclinant la tête. Une bouteille classique de trente-trois centilitres, que tu n'es pas obligée de finir si tu ne le souhaites pas.

Il croisa ses doigts, les coudes plantés sur les genoux.

- Est-ce que vous acceptez mon offre ?

Les huit Serdaigles se jetèrent des regards, le temps de délibérer. Le dernier échange fut celui de Rose et Anthony, comme toujours.

- On accepte, annonça calmement sa fille.

- Très bien, sourit enfin son père. Benson s'il vous plait…

Bientôt le majordome revenait avec un chariot à boissons, ce qui fit secouer la tête à Nassim.

- Quoi ?

- Ah, les riches…

Rose gloussa et s'arrêta en regardant son père du coin de l'œil. Il avait l'air aussi amusé qu'elle. Erwan regarda les douze jeunes sélectionner ce qu'ils voulaient boire, et fut étonné : trois d'entre eux ne prenaient qu'une Bièraubeurre. Il lança un sourire à sa fille qui observait elle aussi ses amis. En quelques minutes, presque tous avaient un verre de Whisky Pur Feu – évidemment – dans les mains. Terry, Padma et Marc avaient accepté une Bièraubeurre avec joie, Lisa avait choisi un hydromel. Erwan leva un sourcil vers Rose, qui eut une petite moue. Dans un rire, il interpella Benson :

- Allez voir s'il nous reste une bouteille de Coteaux de Saumur du Clos Rougeard, je vous prie.

- Celle de 1990 Monsieur ?

Le maitre de maison opina.

William ne put retenir un sourire moqueur quand le majordome déboucha la bouteille, servit un fond de verre à Erwan qui le gouta et valida d'un hochement de tête, puis présenta un verre d'exactement quarante-cinq millilitres de vin à l'héritière Wayne.

- Goûte, encouragea son père. Tu vas aimer celui-là aussi.

Rose s'enfonça dans son fauteuil et porta le vin à ses lèvres. Elle eut un air de contentement qui fit sourire son père. Il vida son verre et se leva.

- Je vous rejoins dans la salle à manger.

Rose lui fut reconnaissante de les laisser quelques minutes seuls.

- Alors, Mâdâme l'aristocrate, le vin est à votre convenance ? se moqua William dès qu'Erwan fut sorti.

- Très, soupira-t-elle. C'est excellent.

- Évidemment, que vous avez une cave à vins, maugréa Nassim.

- Évidemment, répéta Rose en haussant les épaules.

- Tu as le père le plus cool du monde, conclut Marc, déclenchant des hochements de tête approbateurs.

- Jamais, jamais, nos mères n'auraient accepté ça, ajouta Idriss.

- Tu veux goûter ? finit par proposer Rose à William qui ne l'avait pas quittée des yeux.

- Non merci.

- Mais si. Ça te changera de la bière et du whisky.

Elle se leva rapidement et lui tendit d'autorité son verre.

- Goûte, intima-t-elle.

- Tu vas perdre des millilitres, taquina-t-il.

Elle haussa les épaules et il abandonna devant son air déterminé.

- Ce que Miss Wayne veut… grommela-t-il avant de porter le verre à ses lèvres.

Il but une gorgée, ses yeux bleus toujours dans ceux de Rose, debout devant lui. Leurs amis s'étaient tus et les regardaient avec intensité. Puis Derek fit un geste et tout le monde eut soudainement beaucoup de choses à raconter, les conversations remplirent vite la pièce.

- Alors ? demanda Rose en s'asseyant finalement sur la table basse pour faire face à William.

- C'est très bon, admit-il.

Elle lui fit un sourire radieux et reprit son verre, qu'elle vida petit à petit, se mêlant aux discussions autour d'elle, se sermonnant mentalement d'être encore parvenue à s'approcher de William qui n'avait rien demandé. Il avait même dit non.

Quelle idiote.

Elle se releva gracieusement et s'appuya au dossier du canapé où Lisa, Anthony et Michael se trouvaient.

- On va diner ? proposa-t-elle avant de mener la petite troupe autour de la table où son père était déjà assis.

Ils dinèrent en conversant tous ensemble, dans un brouhaha que Rose n'aurait échangé pour rien au monde.

- Dépêchez-vous ! Ted nous attend !

C'était la quatrième fois que Rose appelait ses amis du bas des escaliers, son père était déjà dans la voiture avec Amalie. Lisa était déjà près de la porte et attendait patiemment. Les derniers à dévaler les marches furent Nassim, Marc et William. Ce dernier lui fit un clin d'œil en atterrissant sur le dallage marbré. Rose haussa aussitôt un sourcil et souffla :

- Règle numéro six.

Puis elle prit les devants et ouvrit la porte d'entrée, leur faisant signe de sortir.

- Désolé, marmonna une voix chaude en passant à côté d'elle.

Le trajet fut relativement rapide et ils arrivèrent à destination, dans la grande rue où se trouvait le Chaudron Baveur, côté Moldu. Ted les fit descendre une centaine de mètres avant pour qu'ils se déplacent discrètement vers l'entrée du vieux pub.

- Je vous attendrai au Chaudron Baveur à partir de quinze heures comme prévu, Monsieur.

- Merci Ted. À tout à l'heure, lança Erwan par-dessus son épaule.

Ils entrèrent tranquillement, l'air de rien, dans le pub et saluèrent le vieux barman avant que son père ne tapote le mur de briques pour leur ouvrir l'accès au Chemin de Traverse.

Ils firent quelques mètres pour dégager le passage et constatèrent l'absence de monde. Ils virent les posters placardés sur les vitrines des boutiques, quelques magasins fermés. Erwan ouvrait la marche et Amalie la fermait.

- Bon… comment on s'organise ? demanda finalement Marc, brisant la stupeur qui les avait tous saisis.

- Qui a besoin de quoi, surtout ? rebondit Padma.

- D'abord, la banque, annonça Erwan.

Ils se mirent automatiquement en route pour Gringotts, tout en parlant.

- Tout le monde aura besoin d'aller à la librairie.

- Il me faut de nouveaux uniformes, lança Derek. Tout est trop petit.

Ils furent plusieurs à approuver.

- L'apothicaire pour les Potions…

- Et de l'encre et des plumes, ajouta Idriss. J'ai presque plus rien.

Ils firent spontanément plusieurs équipes en sortant de la banque, leurs porte-monnaie renfloués pour l'année. Rose, son père et Amalie les avait attendus dehors, observant les passants qui faisaient leurs courses, parfois avec une liste de fournitures scolaires à la main.

- Vous devriez aller chez Mme Guipure maintenant, conseilla-t-elle aux intéressés. Comme ça elle aura le temps de s'occuper de vos vêtements, on pourra les récupérer en partant.

Aux sourcils froncés de ses amis, Rose haussa un sourcil.

- Ah, apparemment quand on s'appelle Rose Wayne on peut laisser ses achats dans les boutiques une fois qu'on a payé, s'amusa Idriss.

Elle eut un petit sourire coupable que son père imita.

- Il faut qu'on aille dans un magasin de vêtements de toute façon, rappela Mandy. Pour le yoga.

- Oh c'est vrai !

Finalement, Rose, Mandy et Lisa accompagnèrent Derek, William et Michael chez Mme Guipure. Erwan suivit sa fille et fit signe à Amalie de rester avec les six autres qui se répartirent entre la librairie et la papeterie.

- Nous, on ira après.

- On essaie de se retrouver devant la banque dans deux heures ? proposa Anthony, toujours pratique.

- Riche idée.

Rose ne cessait de lancer des coups d'œil à son père.

- N'essaie même pas de me dissuader. Je t'accompagne. Mais je resterai près de l'entrée, promis, concéda-t-il.

Ils entrèrent dans la boutique de vêtements et furent accueillis par la couturière, qui fit un grand sourire à Mandy avant de se tourner vers les Wayne.

- Monsieur Wayne, Miss Wayne ! Quel plaisir de vous recevoir ! Je ne savais pas que vous seriez des nôtres aujourd'hui…

- Je suis là pour ma fille, informa-t-il avec un sourire éclatant. Je les accompagne pour la journée.

- Comme c'est gentil à vous d'avoir pris le temps !

- C'est normal, par les temps qui courent…

Rose abandonna les adultes à leur conversation et entraina ses amies plus loin dans la boutique. Une assistante avait fait monter Michael et William sur des tabourets et suspendit son geste en se tournant vers Derek.

- Non, pas vous jeune homme, ce ne sera pas nécessaire. Restez bien droit je vous prie…

Les filles se glissèrent dans les rayons en pouffant. Elles restèrent un long moment devant les vêtements de sport, Mandy et Rose grimaçant à profusion.

- Allez les filles, réprimanda Lisa. Un peu de courage. En plus, le yoga, c'était super bien quand on a essayé !

Elles fouillèrent dans le rayon et sortirent quelques pièces, les comparant à ce qu'elles avaient déjà vu Padma porter.

- Ah je crois que j'ai trouvé le bon type de tissu, annonça Mandy. Polyester et élasthanne, c'est ce que Padma a dit.

Elle tenait des leggings très élastiques dans les mains. Orange vif.

- Oula, fit aussitôt Rose.

- Panique pas, gloussa la blonde. Il y a plein de couleurs.

Elles comparèrent des couleurs et des motifs. Rose en choisit un avec différentes couleurs, Mandy en prit un violet foncé et Lisa un noir.

- Pour les hauts… continua Mandy, très impliquée, alors que Lisa et Rose la suivaient sagement. On a le choix.

Elle brandit des débardeurs larges, des moulants, des t-shirts, et même des crop-tops que Lisa refusa tout net. La rousse se décida pour un débardeur bleu qui ne moulait pas trop tandis que Mandy choisissait un t-shirt assorti à ses leggings. Rose fit la moue et hésita longuement.

- Rose, si tu ne prends pas ça, franchement, je comprends pas.

Mandy brandissait un crop-top d'un vert similaire à l'une des couleurs des leggings qu'elle avait posés sur son épaule.

- Il est très joli, commenta Rose en l'attrapant.

Elle se tourna vers un des assistants du magasin, qui répondit à la question de Rose en les dirigeant vers les cabines d'essayage. Elles se séparèrent mais continuèrent à parler à travers les rideaux.

- Ah zut j'ai pris trop petit, j'avais pas fait attention, maugréa Lisa.

- Et moi trop grand, pouffa Mandy. J'ai l'impression de nager.

L'assistante qui s'occupait des cabines leur amena les bonnes tailles.

- Rose, et toi ?

- Vous en pensez quoi ?

Elle repoussa le rideau et se planta devant un miroir.

- Oh c'est joli ! Prends-le.

- Aucun commentaire sur la couleur qui est parfaite, évidemment, sourit Lisa.

Rose tira sur le bas du t-shirt émeraude et remonta ses seins d'un geste très peu distingué avant de les lâcher.

- Vous savez quoi ? Y'a un soutien-gorge intégré dedans. Je me sens super soutenue, et en même temps… j'ai l'impression d'être à poil.

Elles gloussèrent en même temps et Lisa interpella l'assistante pour lui demander si le modèle sur Rose existait en bleu. Mandy hésita un instant avant de demander une version rose pâle.

- Et si vous avez un fuchsia… ou orange, ajouta Rose en précisant la taille de Padma. Y'a pas de raison qu'elle n'en profite pas non plus…

Rose releva la tête et croisa le regard de Derek qui attendait patiemment ses vêtements. Elle désigna sa tenue et il leva un pouce en l'air.

- Attention jeune homme ! s'exclama une voix sur la gauche du grand blond, qui tourna la tête dans cette direction.

- Pardon ! s'excusa la voix de William.

- Pourquoi est-ce que… ronchonnait l'assistant. Bon, redressez-vous. On reprend.

Derek était secoué d'un rire et fit un grand sourire à Rose, qui haussa un sourcil avant de retourner vers ses amies.

- Ah, c'est tellement confortable, commentait Lisa.

- Je vais peut-être en prendre une dizaine et ne mettre que ça, toute l'année.

- Et tu feras un très beau bonhomme de neige cet hiver, compléta Rose.

- Désolée mais tu devras t'en tenir à l'uniforme, ajouta Lisa, un grand sourire moqueur aux lèvres.

Mandy râla et partit se rhabiller, imitée par ses compagnes. Elles se rhabillèrent et posèrent leurs articles dans un panier, regardant les vêtements sur les portants.

- Vous avez pas besoin de robes et d'uniformes ? s'étonna Michael qui venait de payer et de les rejoindre.

- Non, on n'a pas grandi, sourit Lisa.

- Terminé la croissance pour nous, confirma Mandy.

- Mais… vous êtes toutes petites ! commenta Derek.

- Non, non, tu te trompes, contredit Rose. C'est toi qui es très grand.

- Je vois pas de quoi tu veux parler.

Il lui tourna le dos en croisant les bras. Mais il se retourna pour planter un baiser sur sa tempe et sortit son portefeuille avant de partir vers la caisse. Rose eut un sourire et regarda William qui était toujours sur son tabouret.

- Ben alors… t'es coincé ?

- Non, non, sourit-il. On a juste dû un peu recommencer certaines mesures…

- Quelle idée aussi de vous être retourné comme ça, soupira l'assistant. On a bientôt terminé.

Rose avait levé un sourcil et William eut un petit geste pour qu'elle ne pose pas de question supplémentaire.

- On peut vous laisser nos paquets, s'il vous plait ? Nous venons juste de commencer nos achats et nous ne retournons au Manoir Wayne que dans l'après-midi, expliqua Rose en caisse, faisant un geste à ses amis qui avaient déjà payé.

- Bien sûr Miss Wayne ! Donnez-les-moi, je les dépose dans l'arrière-boutique en attendant que vous repassiez.

Rose la remercia et se poussa pour que William puisse régler ses achats.

- Très subtil la façon dont tu as calé ton nom de famille dans ta phrase, commenta-t-il à voix basse.

- Oh William… soupira-t-elle. Ils savent déjà qui je suis. Mon père est un de leurs investisseurs.

Il n'avait clairement pas entendu la gérante s'adresser à son père quand ils étaient entrés. Il lui adressa une mimique étonnée, elle se contenta de sourire et de sortir de la boutique avant lui.

Ils se dispersèrent à nouveau et continuèrent leurs achats. À chaque fois, Rose laissait ses paquets dans les magasins pendant que son père sortait son portefeuille, mais William n'eut pas l'occasion de faire de commentaire supplémentaire, car il était parti dans une autre direction avec Michael, après une négociation avec le père de Rose qui n'était pas ravi de les laisser se séparer en de si petits groupes. Elle acheta des rouleaux de parchemin, de l'encre noire et de la bleue, quelques crayons à papier, qui étaient quand même fort utiles pour faire ses devoirs et annoter des livres, et une plume neuve.

Le groupe se retrouva devant la banque deux heures après leur séparation, comme convenu.

- Qu'est-ce qu'il nous reste ?

Ils conclurent qu'ils avaient déjà tous acheté le nécessaire : uniformes, livres, papeterie, ingrédients de potions…

- Euh pardon, coupa Padma. Pas tout le nécessaire.

- Je confirme, ajouta Mandy.

- On n'a pas acheté de chocolat, termina Terry, l'air grave.

Les autres se mirent à rire. Erwan regarda sa montre et Rose essaya de faire avancer un peu tout le monde en même temps qu'ils parlaient.

- Alors, confiseries, résuma Rose. On va voir la boutique des frères Weasley quand même ?

- On ne peut pas manquer ça, confirma Michael.

- Et je voudrais aller à la boutique de Quidditch.

- Ah évidemment… Attention, il va encore nous rappeler que c'est lui le capitaine de l'équipe…

- Vous le saviez ? lança Marc. William est le capitaine de l'équipe de Quidditch de Serdaigle !

- Quoi ?! Mais c'est une toute nouvelle information ! s'exclama Lisa.

- Mais arrêtez un peu, protesta William, un large sourire au visage.

Cette fois ils restèrent tous groupés, et systématiquement, son père entrait dans les boutiques le premier, avant d'autoriser les plus jeunes à le suivre, Amalie fermant toujours la marche. Sauf dans la boutique Weasley, les commerçants reconnaissaient aussitôt Erwan Wayne et s'empressaient de venir le saluer et d'échanger quelques mots avec lui. William lança quelques coups d'œil curieux à Rose qui finit par lui murmurer que son père était un investisseur très impliqué et qu'il connaissait souvent tous les commerces dans lesquels il avait mis de l'argent. Elle lui pressa un peu machinalement l'avant-bras pour qu'il avance, car il restait planté devant les rayonnages du magasin de Quidditch. Il bougea imperceptiblement son bras.

- Règle numéro deux.

Rose rougit malgré elle et s'éloigna aussitôt, embarrassée. Elle rejoignit son père à l'entrée du magasin où il patientait.

- Je suis désolée que ça prenne des heures.

- Ne t'en fais pas, ma chérie. Je m'excuse d'être aussi nerveux, ce n'est vraiment pas pour vous mettre la pression, prenez votre temps.

Il posa sa main sur son épaule et lui sourit avec affection. Une haute silhouette vint se planter à côté d'eux.

- J'ai faim, murmura Derek. Je suis désolé, je me retiens de le dire depuis une heure, mais là…

Son estomac illustra son propos par un bruit équivoque. Erwan ouvrit les yeux.

- Oh mais j'ai oublié ! Amalie a tout ce qu'il faut normalement. On mangera dès qu'on sortira, promit-il.

Rose admira la patience de Derek qu'il avait trouvé elle ne savait où, alors que la faim lui tenaillait le ventre. Elle ne se moqua pas de lui, parce qu'évidemment… elle aussi avait faim.

Une fois tous les quatorze dehors, Amalie leur distribua des sandwiches qu'elle sortait de son sac, préparés le matin et emballés. Elle avait à peine donné le dernier à Erwan qu'elle dût en sortir un autre pour Derek, puis pour William. Et un autre pour Rose.

- Heureusement qu'Amalie est sorcière hein, grommela Erwan, amusé par sa fille et ses amis qui mangeaient comme des ogres – enfin, pas tous, il fallait le reconnaitre.

- On a bien fait de manger avant d'aller acheter des confiseries, se félicita Mandy. On sera moins tentés.

- Parle pour toi, rétorqua Derek.

Ce fut leur dernier arrêt avant de finalement découvrir la boutique de farces et attrapes des Weasley. Ils y firent un tour qui dura longtemps, pendant lequel le père de Rose la suivit sans relâche dans la boutique. Elle finit par lui lancer un coup d'œil exaspéré qui se mua en sourire affectueux en comprenant son inquiétude.

- Cette boutique est incroyable, commenta Michael en passant près d'elle, les bras chargés.

Elle s'amusa à regarder ses amis essayer des choses et autres et rit beaucoup devant les slogans des produits étalés devant leurs yeux. Elle n'acheta rien malgré une longue hésitation devant les Boursoufs miniatures qui chantonnaient dans un panier. Elle ne savait pas si Kietel serait ravi d'avoir un compagnon ou pas… et elle prenait déjà des risques à avoir un animal non autorisé dans le château, alors ce n'était peut-être pas la meilleure de ses idées.

Une fois leur shopping terminé, Amalie fila de boutique en boutique pour récupérer les achats de Rose et des autres, quand ils avaient accepté de les laisser comme elle l'avait fait. L'intendante revint en faisant léviter de nombreux sacs et paquets devant elle. Arrivés devant le Chaudron Baveur, ils se répartirent les sacs au hasard. Ted les attendait au comptoir, un soda presque terminé devant lui. Il sauta sur ses pieds en apercevant son patron et fit un geste pour payer sa consommation, mais Erwan l'en empêcha et régla la note sous les remerciements de son chauffeur. Puis les quinze personnes rejoignirent le côté Moldu de la rue et s'engouffrèrent dans le véhicule qui les ramena prestement au domaine Wayne. En chemin, ils discutèrent du changement d'ambiance dans le Chemin de Traverse et des boutiques fermées.

Une fois au Manoir, ils portèrent les sacs de courses sans chercher à savoir à qui ils appartenaient et ne trièrent qu'une fois dans le petit salon. Ils avaient tellement remercié le père de Rose de les avoir accompagnés qu'il finit par fuir en riant, disant qu'il voulait travailler un peu avant le dîner.

- Ah, ça, c'est pas mon uniforme, s'esclaffa Michael en sortant un haut orange d'un sac.

- C'est mon sac ! réagit Rose en le prenant.

- Orange ?! s'exclama Terry.

- C'est pas pour moi, fit-elle avec un sourire. Tiens Padma, c'est pour toi.

- Pour moi ? Mais… c'est gentil ça ! Pour quelle raison ?

- On a toutes pris le même, précisa Mandy. C'est pour le yoga.

- Oh merci les filles ! C'est très joli.

- Et très, très confortable, ajouta Lisa en échangeant des regards de connivence avec Mandy et Rose qui hochèrent la tête.

Ils échangèrent encore leurs sacs jusqu'à ce que chaque paquet retourne à son ou sa propriétaire, puis ils rangèrent tout dans leurs chambres. Rose rappela à tout le monde qu'ils avaient chacun un panier à linge dans leurs chambres et qu'ils pouvaient y mettre ce qu'ils voulaient qu'Amalie fasse laver avant leur départ dimanche matin. Elle soupira en regardant le désordre autour d'elle, décidant qu'elle aurait bien le temps de ranger demain en faisant ses valises.

Ils papotèrent beaucoup pendant le diner, avant de se taire presque tous brutalement, soudainement écrasés de fatigue. Padma cacha un bâillement derrière sa main et Terry luttait pour garder les yeux ouverts.

- Vous devriez aller vous coucher, risqua gentiment le père de Rose. Vous avez l'air épuisés.

- T'as raison, concéda Rose. Allez, un petit effort et on s'écroule sur nos lits.

Tous la suivirent sans se faire prier et ils se répartirent dans leurs chambres sans même faire une seule partie de cartes – Idriss n'avait même pas proposé.

Rose soupira en se retournant sur son matelas. Elle avait quand même mis plusieurs heures à s'endormir et un bruit sourd dans le Manoir venait de la réveiller à moitié. Elle était encore fatiguée et garda les yeux fermés dans l'espoir de se rendormir. Elle lâcha prise rapidement, tombant dans les bras d'un rêve qui se transforma bientôt en cauchemar. Les formes étaient floues, mais les cris étaient bien clairs dans sa tête.

Elle ouvrit les yeux et regarda tout autour d'elle. Elle était dans une cage. Réprimant un cri, elle essaya de comprendre, mais il n'y avait rien d'autre à voir qu'une pièce blanche et lumineuse. Ses doigts s'enroulèrent autour des barreaux devant elle. Elle observa encore un instant, puis se mit à secouer les barres métalliques qui l'entouraient, cherchant la sortie, en vain. Elle voulut se redresser, mais elle ne pouvait pas : la hauteur était très faible et elle pouvait seulement se tenir à genoux, ou accroupie. Elle sentait son cœur battre jusque dans ses oreilles et tentait de se raisonner.

Quelqu'un allait forcément venir la chercher.

Peut-être qu'il fallait qu'elle appelle ? C'était sûrement ça.

Elle ouvrit la bouche, prit une inspiration, et essaya de crier. Mais aucun son ne sortit de sa gorge. Elle secoua la tête, puis recommença, pour obtenir le même résultat frustrant.

Une voix dans sa tête lui conseilla de persévérer, alors elle tenta encore et encore de faire du bruit, de s'exprimer.

Cela prit un temps considérable, et elle paniquait de plus en plus, remuant dans la petite cage, se cognant aux barreaux dans un tintement métallique qui lui écorchait les oreilles.

Finalement son instinct animal écrasa sa panique d'humaine et elle se transforma en panthère. Loin de la calmer, la vue de sa prison la fit feuler de rage, et elle s'agita encore plus, les oreilles couchées en arrière. Il y eut un claquement de porte au loin qui ne la perturba même pas. Elle poussa un grognement affolé et chuta sans savoir pourquoi. Elle n'arrivait pas à se relever et, concentrée sur son équilibre, elle entendit à peine la voix qui l'appelait, qui lui arrivait de très loin.

- Rose. Rose ! Réveille-toi !

La voix se rapprochait de plus en plus.

- Rose, tout va bien, réveille-toi !

Ses yeux s'ouvrirent brusquement sans qu'elle ne se calme, elle continua à se débattre, parvint à se redresser.

- Rose, tu as fait un cauchemar, arrête ! Tout va bien ! répétait la voix.

Quelque chose l'empêchait de bouger, ses pattes étaient coincées.

- Tu es emmêlée dans les draps, attends…

Elle entendait clairement la voix masculine mais les mots semblaient glisser sur elle. Elle trébucha et s'étala.

- Et voilà, je t'avais dit que tu étais coincée… soupira la voix. Laisse-moi t'aider… s'il te plait…

Le calme de la voix lui fit tourner la tête. Ses yeux verts se posèrent sur deux yeux bleus qui la contemplaient.

- C'est bon tu arrêtes de bouger ? Je vais te sortir de là…

Disant cela, William s'attaqua à défaire les nœuds en maugréant.

- Mais qu'est-ce que tu as fabriqué… Ah voilà. Ne tire pas ! J'y suis presque.

La patte arrière fut libérée d'un coup et la panthère fila au fond de la chambre, laissant William en plan avec le tissu roulé en boule dans ses mains.

- Tu paniques encore, comprit-il en sondant son expression. Rose, je t'assure que tout va bien. Tu as juste fait un cauchemar, tu as dû tomber du lit en t'emmêlant dans le drap…

Il désigna la chambre autour d'eux.

- On est au Manoir, dans ta chambre.

Les oreilles de la panthère se redressèrent et les yeux ne furent bientôt plus écarquillés. Elle s'ébroua alors que William continuait à parler, assis sur le parquet.

- Il est huit heures quarante et tout le personnel est déjà au garde-à-vous en bas, s'amusa-t-il. Je n'ai pas vu ton père, et tous les autres dorment encore.

Elle s'avança vers lui, marqua une seconde d'hésitation, inspectant son regard. Puis elle glissa sa tête contre la main de William posée sur son genou. Bientôt elle se frottait à lui, parcourue d'un ronronnement qui le fit sourire. Il la laissa faire, lui donnant des caresses un peu machinales. Il finit par secouer la tête.

- Bon ben visiblement ça va mieux… Ou alors tu dors encore, et si tu te réveilles maintenant et que tu te rends compte qu'on est en train d'enfreindre la règle numéro deux, tu vas m'en coller une dont je me souviendrai.

Son ton sérieux figea l'animal qui recula d'un pas, quittant la chaleur de son ami.

- On va mettre ça sur le compte du cauchemar et de ta panique, d'accord ?

Ils échangèrent un regard avant que William ne se remette à sourire.

- Pourquoi tu penches la tête sur le côté ?

Il l'imita spontanément et les moustaches de la panthère frémirent.

- Tu redeviens humaine quand tu veux, hein, sourit-il. J'aime bien parler mais j'aime bien qu'on me réponde aussi.

À son étonnement, le félin hocha la tête, puis ses yeux tombèrent sur quelque chose au pied du lit et s'écarquillèrent. William n'eut pas le temps de comprendre que la panthère avait bondi à travers la chambre et foncé dans la salle de bains, claquant maladroitement la porte d'un coup de patte.

- D'accord…

Il fronça les sourcils et regarda ce qui avait fait apparemment paniquer la panthère au point de partir en courant. Il se redressa et attrapa le tissu qui lui sembla informe, avant qu'il ne le secoue et qu'il comprenne.

- Oh…

Derrière la porte, Rose était revenue et avait plaqué la main sur sa bouche, son cœur battant la chamade. Ce n'était pas passé loin. Elle avait été à deux doigts de se transformer devant William, principalement pour lui demander ce qu'il fichait dans sa chambre alors que la sienne n'était même pas attenante. Comment avait-il su qu'elle faisait un cauchemar ?

Elle secoua la tête, pensant lui demander plus tard. Elle se racla la gorge et s'approcha de la douche quand des doigts grattèrent à la porte et une voix amusée s'éleva.

- Rose… tu voudrais peut-être récupérer ton pyjama avant de sortir de la salle de bains ?

Elle sentit ses joues la bruler et elle ne répondit pas, préférant ouvrir l'arrivée d'eau avant de se glisser dessous, s'immergeant, les yeux fermés, comme pour oublier qu'elle avait failli se retrouver nue. Devant William.

Elle ne se souvenait même pas d'avoir enlevé son pyjama cette nuit, mais n'était pas étonnée. Elle détestait dormir habillée, et si elle faisait un effort à Poudlard dans le dortoir, ici, dans sa chambre personnelle, c'était autre chose. Cependant, avec tous ses amis présents, elle s'était dit qu'il valait mieux qu'elle dorme habillée, vu qu'ils passaient leur temps à venir se voir les uns les autres, même en pleine nuit. Elle avait dû se déshabiller en dormant…

- Du coup tu prends ta douche ? demanda William. Non mais pas de souci, je vais attendre hein…

Par Merlin, même par porte interposée, il parlait. Elle esquissa un sourire avant d'ouvrir des yeux ronds. Comment ça il allait attendre ?

- C'est gentil mais je vais pas me perdre, rétorqua Rose, sa voix un peu noyée par l'eau.

- Toi non, moi peut-être…

Elle leva les yeux au ciel. Il y avait peu de risques : il avait un très bon sens de l'orientation et était l'un des rares qui ne s'étaient pas encore perdu dans le domaine Wayne. Elle coupa l'eau et s'enroula dans sa serviette. Elle se sécha, considéra son visage dans le miroir, appliqua du déodorant, démêla ses cheveux. Puis sourit en entendant William continuer à parler.

- J'ai hâte que tu sortes de là pour aller dans ton dressing. Ça va être parfaitement gênant. Pour toi.

Elle réprima un petit rire en choisissant des vêtements dans son dressing, qu'elle enfila rapidement, vérifiant que son t-shirt vert était bien glissé dans son short en jean. Elle attacha ses sandales et ouvrit tout doucement la porte du dressing qui menait dans la chambre. Elle observa William une seconde ou deux, planté au milieu de la pièce, les bras croisés, tourné vers la porte de la salle de bains.

- Et pourquoi ce serait gênant ? s'enquit-elle en prenant un air sérieux.

Il pivota vers elle et ouvrit la bouche, puis pointa la porte de la salle d'eau.

- Mais… ah, comprit-il. Pièces communicantes ?

- Pièces communicantes, confirma-t-elle en réprimant un sourire. Tu as l'air déçu.

- Très. Je pensais que tu serais obligée de sortir en serviette, tout embarrassée et sans défense.

Elle croisa les bras et attendit la suite qui ne tarda pas.

- Comme ça t'arrive souvent, quoi…

Elle éclata de rire. C'était plus fort qu'elle. Elle allait lui demander comment il avait su pour le cauchemar, quand elle tourna vivement la tête vers la porte de sa chambre. Un instant après, on toqua et la voix d'Amalie lui parvint.

- Miss, je me permets de vous déranger pour vous apporter votre courrier. Il y a le colis qui vous attendiez.

- Euh, oui, deux secondes, s'affola Rose.

Elle jeta un œil à William et le poussa d'un coup dans le dressing avant de lui fermer la porte au nez, le remerciant mentalement de ne pas avoir résisté. Puis elle bondit et ouvrit à Amalie qui attendait patiemment. L'intendante lui sourit et lui tendit le paquet.

- J'ai entendu votre douche alors je me suis permise de monter.

- Vous avez bien fait, je vous remercie, répliqua Rose en forçant un sourire sur ses lèvres.

- Vous avez encore fait un cauchemar ? demanda Amalie en désignant le drap malmené sur le parquet ancien.

- Euh, oui, admit Rose. Désolée pour le drap… mais je pense que celui-là n'est pas déchiré, juste froissé.

- Ça n'a aucune importance, Miss. Je suis désolée pour vos cauchemars récurrents.

- Merci Amalie. Les autres vont bientôt se réveiller, je peux vous laisser passer le mot aux cuisines s'il vous plait ?

- Bien sûr.

L'employée se retira et Rose referma la porte du pied, poussant un soupir soulagé. Elle posa le colis sur son bureau et tourna lentement la poignée du dressing pour y passer la tête.

- William ? appela-t-elle.

Mais le dressing était vide, et la porte menant à la salle de bains était entrouverte. Elle poussa un petit soupir, habituée à la curiosité de William, gênée à l'idée qu'il farfouille dans sa pièce privée. Elle grimaça en pensant au bazar qu'elle y avait laissé et essaya de ne pas se souvenir des vêtements qu'elle avait probablement laissés par terre.

- William, s'il te plait… commença-t-elle en s'avançant, prête à pousser la porte.

Mais elle arrêta son geste. L'eau de la douche s'était mise à couler. Sa main retomba le long de son corps.

- Vraiment ?! s'exclama-t-elle fortement. Je t'en prie, faut pas te gêner !

- Ah, merci alors !

Il y eut un petit silence pendant que Rose croisait les bras, estomaquée par son audace.

- C'est vraiment gentil de me laisser utiliser ta douche. Elle est mieux que celle de ma chambre !

- Ben tiens, ronchonna Rose.

- Dis, Rose… c'est quoi au juste ce bordel dans ta salle de bains ?!

Elle gonfla les joues et ne répondit pas, préférant changer de sujet.

- William ? Comment tu as su que je faisais un cauchemar ?

- Je suis allé courir ce matin, expliqua-t-il, sa voix résonnant dans la pièce. Je passais devant ta chambre pour retourner dans la mienne, et j'ai entendu des bruits, et des cris. Alors je suis entré, tel un preux chevalier, ma baguette à la main, pour te défendre de ton agresseur.

- Qui s'est avéré être un drap.

Elle l'entendit rire et l'imita.

- N'empêche, tu as vu comme je lui ai appris le respect à ton drap ?

- C'était très impressionnant, en convint-elle, toujours souriante.

L'eau s'arrêta.

- Il y a des serviettes propres sous le lavabo.

- Merci.

- Je suis désolée mais je peux pas te prêter de vêtements pour retourner dans ta chambre.

- Moui, je crains que tout soit trop grand, estima William.

Rose pouffa à nouveau et se décida à sortir du dressing. Elle alla ouvrir les rideaux de sa chambre, ramassa son pyjama et le plia à côté de son oreiller. Elle se décida à la dernière seconde à tourner le dos à la salle d'eau : et si William en sortait uniquement vêtu d'une serviette ? Il en était parfaitement capable. Elle prit le drap froissé et s'appliqua à le démêler, afin d'avoir les mains occupées.

- Tu veux un coup de main ? demanda-t-il derrière elle.

- Euh, ça va, ça va…

Il ronchonna et attrapa quand même l'autre extrémité. Elle garda les yeux fixés sur ses propres mains.

- Merci, finit-elle par dire sans le regarder.

- Pour le drap ?

- Pour ton intervention, corrigea-t-elle. Je faisais un cauchemar vraiment étrange…

- C'est le principe.

- Heureusement que tu m'as aidée à m'en sortir. J'étais un peu paniquée.

- Un peu, oui, s'amusa-t-il.

Ils vinrent enfin à bout des nœuds bizarres et Rose le plia vaguement avant de le poser sur son lit.

- Donc tu me regardes même plus ? interrogea subitement William.

Elle lui jeta un rapide coup d'œil puis se détendit : il ne portait pas de serviette. Il avait remis ses vêtements de sport. Elle lui sourit et le remercia encore en désignant le drap.

- Pas de problème.

Il grimaça et répondit au haussement de sourcil de Rose.

- Je sens la fille. C'est pas bon pour mon pouvoir de séduction de mâle alpha, ça.

- Quelle tragédie, soupira dramatiquement Rose. Tu comptais séduire qui ici ? Amalie ?

Elle se pinça les lèvres en réprimant un sourire.

- Ah non, Amalie tu as déjà fait, comme prénom.

- Et celle-là est trop âgée pour moi. Je les préfère plus jeunes, ajouta-t-il avec un sourire joueur. Et règle numéro cinq, Miss Wayne.

Rose se retint de lever les yeux au ciel et lui montra gracieusement la porte de la main.

- On se retrouve en bas pour le petit-déjeuner ?

Il confirma d'un signe de tête et sortit de sa chambre, la laissant seule avec son cœur qui battait trop vite et ses joues qui rougissaient. William avait pris une douche dans sa salle de bain. Elle avait été à quelques mètres de lui, elle aurait aisément pu le regarder, ou même, le rejoindre…

- Mais ça va pas, maugréa-t-elle en secouant la tête, troublée. C'est le pouvoir de séduction de mâle alpha qui te monte à la tête, ma pauvre… Pense à la règle numéro deux.

Puis elle quitta sa chambre à son tour pour aller réveiller ses amis l'un après l'autre.

Leur dernière matinée de vacances fut paresseuse, comme leur première journée tous ensemble. Ils mangèrent sur la terrasse, discutèrent et rangèrent petit à petit leurs affaires. En milieu d'après-midi, Rose chercha son père, qu'elle trouva dans la Bibliothèque et lui demanda si elle pouvait aller au cimetière, une dernière fois avant de partir.

- Bien sûr ma chérie. Tu veux y aller maintenant ?

- D'ici une petite demi-heure si tu veux bien ? Tu n'es pas obligé de m'accompagner, précisa-t-elle, je ne veux pas te déranger.

- Évidemment que je viens.

- Je vais prévenir les autres que je m'absente.

À son étonnement, elle dût refuser leurs propositions de l'accompagner.

- Non, vraiment, je préfère être seule, affirma-t-elle en les remerciant de leur gentillesse. Soyez sages pendant ce temps !

Derek ne lui demanda pas son avis et sauta dans la voiture juste après elle. Son père ouvrit encore le caveau et ils descendirent tous les trois, Rose ayant abandonné l'idée que Derek reste en haut. Elle resta longuement face au cercueil et prit le nouveau bouquet de fleurs que son père conjura pour remplacer l'ancien qui avait fané. Derek glissa ses doigts contre les siens et resta silencieux le temps qu'elle se recueille. Ils échangèrent un petit sourire et elle appuya sa tête contre lui, appréciant le moment de calme, comme la dernière fois. Son père était resté en retrait et avait refleuri devant ses parents. De nouvelles roses, rose et jaune cette fois, avaient fait leur apparition. Rose sourit devant les fleurs et quitta le caveau la dernière, après un dernier regard ému vers le cercueil d'Olivia.

À leur retour à la maison, ils trouvèrent les Serdaigles répartit dans le parc, à jouer à un jeu de société en discutant ou à lire. Derek et Rose rejoignirent naturellement la partie en cours et se mêlèrent aux conversations.

- J'ai une idée pour ce soir ! lança William.

- Oui ?

- Tu crois qu'on pourrait jouer au billard ?

- Bien sûr, confirma Rose. On pourra y aller après le dîner si ça vous va ?

Ils n'avaient jamais mangé aussi vite, sous le regard amusé d'Erwan. Rose les dirigea vers la salle de jeux et ils s'agglutinèrent autour de la table de billard. Aucun d'entre eux ne savait vraiment jouer, et Rose leur dit ne connaitre que vaguement les règles.

- Peu importe ! s'exclama Michael. On a qu'à dire que le but c'est de faire entrer les billes dans les trous, sans réfléchir à l'ordre. Non ?

- Ça me va, confirma Anthony.

Très concentrée, Rose positionna les billes en triangle, puis la bille blanche sur la ligne de zone et se pencha sur la table pour casser en la projetant au milieu.

- Voilà toute l'étendue de mon expertise, rit-elle en se redressant. Maintenant l'objectif est de mettre les billes dans les trous.

Elle fit signe vers le mur à ses amis qui l'observaient.

- Prenez une queue. On n'en a pas douze, mais c'est pas grave, on fera tourner.

Un long silence suivit sa phrase, puis Nassim et Idriss leur tournèrent le dos. Le premier se pinçait le nez et le second avait enfoui sa tête dans son t-shirt, trop hilare pour parler.

- Que vous êtes bêtes, soupira Padma.

Mais elle aussi riait le plus discrètement possible. Rose constata que tous ses amis pouffaient plus ou moins ouvertement et elle attendit qu'ils se calment, un sourcil en l'air, la lèvre inférieure coincée entre ses dents, son propre rire pas loin. Derek et Lisa reprirent leurs esprits les premiers et leur partie commença enfin. Ils faisaient un peu n'importe quoi et s'exclamaient dès qu'une bille entrait dans une poche, ravis d'eux-mêmes. Rose se rapprocha de William – enfin, elle garda quand même une distance de plus d'un mètre entre eux.

- Alors, content d'essayer ?

- Très, répliqua-t-il avec un sourire. Je suppose que les règles sont mille fois plus compliquées mais bon… c'est sympa de jouer. Ça m'avait toujours intrigué.

- Oh oui, c'est super compliqué…

- Je croyais que ton expertise était limitée ? chuchota-t-il.

- J'ai menti, rétorqua-t-elle sur le même ton. J'ai juste la flemme d'expliquer les règles, il y en aurait pour des heures.

Elle eut un léger rire.

- Et je ne sais pas si je serais la personne la plus indiquée pour expliquer des règles de billard, vu que je suis très mauvaise.

- Bien pensé, la félicita-t-il.

Il s'était rapproché d'un pas ou deux et Rose lui sourit avant de se carapater de l'autre côté de la table. Ils jouèrent une bonne partie de la soirée avant de déclarer forfait et de quitter la salle de jeux pour remonter vers leurs chambres, pour terminer leurs bagages et aller se coucher. Rose fit un détour par le petit salon où son père lisait et elle resta une vingtaine de minutes avec lui, pour profiter une dernière fois de sa présence avant de le quitter jusqu'à Noël. Ils discutèrent du nouveau semestre de Rose et des voyages professionnels d'Erwan qui se profilaient. Il laissa remonter sa fille après qu'elle lui eut promis de faire attention à elle pendant les prochains mois et de ne pas oublier de s'amuser entre deux cours. Elle promit, un sourire aux lèvres et le serra dans ses bras avant de monter au deuxième étage.

En passant devant la chambre de Michael, elle l'entendit grommeler après sa valise qui refusait de se fermer.

- Hé Michael, y'a un sort pour ranger les affaires dans les valises, lui lança-t-elle à travers la porte.

- Ah bon ? s'écria la voix un peu désespérée de Mandy. Nassiiiiim ? cria-t-elle.

- Oui ma douce ?

Des éclats de rire lui répondirent. Bientôt ils étaient tous dans le couloir et Rose répéta qu'elle connaissait un sort pour ranger les valises.

- Failamalle, ça s'appelle.

- T'es sûre ?

- Certaine, attends.

Elle se précipita dans sa chambre et en ressortit avec Enchanter votre quotidien, d'où dépassait de nombreux marque-pages. Elle l'ouvrit à la bonne page et le présenta à Marc.

- Ça a l'air simple… Michael, je peux essayer sur tes affaires si tu veux ?

Cela prit quelques secondes et des exclamations ravies résonnèrent dans l'aile ouest. Les septièmes années se firent exploiter par les sixièmes.

- Exploiter, mais bien sûr, râla Rose en pointant sa malle à William. S'il te plait ?

Elle lui fit ses plus grands yeux suppliants puis son plus beau sourire quand il sortit sa baguette et la pointa vers les affaires qui débordaient.

- Je te promets rien hein…

Il jeta un œil au livre que Rose tenait contre sa poitrine, les bras enroulés autour.

- Tu t'en sers alors ?

- Très souvent, admit-elle. C'était un très bon cadeau.

Sa bouche lui parut soudainement sèche au souvenir de son anniversaire et du moment qu'ils avaient partagé dans la Salle Commune en janvier. Il détacha son regard d'elle le premier et lança le sort. Elle fut ravie de constater qu'il y arrivait bien mieux qu'elle.

- Je t'annonce que je vais pas faire ta valise à chaque fois hein, prévint-il, une lueur amusée dansant dans ses yeux.

- On verra, rétorqua-t-elle avec un grand sourire.

Il poussa un soupir dramatique.

- Ah mais t'es encore là toi ?! J'ai eu le temps de faire trois valises pendant que tu discutais ! se plaignit Nassim. Mais c'est pas possible de jacasser autant…

Rose les regarda sortir de sa chambre en pouffant. Bientôt le silence se fit à leur étage, et une silhouette rejoignit Rose dans son lit.

- Une dernière nuit, chuchota Derek.

- Terry ?

- Est parfaitement d'accord, termina-t-il.

Rose lui sourit et ils s'endormirent l'un contre l'autre.

Leur départ pour King's Cross fut précipité, quoique bien organisé. À peine réveillés qu'ils étaient déjà habillés, nourris et attachés dans le minibus conduit par les mains expertes de Ted.

À la gare, ils essayèrent de rester le plus discrets possible en franchissant la barrière pour atteindre la voie 9 ¾. Erwan, Ted et Amalie les aidèrent à pousser les chariots à bagages et à hisser les lourdes malles dans le train. Tout le groupe remercia le père de Rose de les avoir accueillis pour cette dernière semaine de vacances, puis ils laissèrent le père et la fille se dire au revoir tranquillement.

- Passe un bon semestre, ma chérie.

- Merci Papa. Toi aussi. On se revoit à Noël.

Il lui caressa la joue.

- Je pense tous les jours à toi, mais écris-moi quand même. Même pour me raconter qu'Idriss vous a forcés à jouer à un jeu de société sans queue ni tête ou que William vous torture avec sa musique. Surtout pour ça d'ailleurs, ajouta-t-il avec un sourire.

Rose pouffa et se serra contre lui, il l'enlaça immédiatement.

- Merci pour tout ce que tu as fait cet été.

- Amuse-toi bien, c'est le principal. Oui, oui, étudie beaucoup aussi, ajouta-t-il sous le regard sévère de sa fille. Sois prudente.

- Promis.

Il l'embrassa et la poussa vers la porte du train. Une large main apparut et l'aida à monter. Rose ne put s'empêcher de rester près de la porte jusqu'à ce qu'elle se ferme, pour faire un dernier signe à son père avant de rejoindre ses amis dans leur compartiment.