Note de l'autrice : SURPRISE JE PUBLIE PLUS TÔT ! Partant demain en vacances (oui encore !:p) et que mon programme s'avère chargé, je préfère ne pas vous faire faux bond et publier immédiatement. Bonne fin de mois d'août tout le monde et bonne lecture ! Plus que trois chapitres après celui-ci, et nous seront séparés pendant quelques temps avant l'apparition de la partie 3...


Chapitre 35

Un serpent… Un serpent…

, par Merlin, était passé la biche ? Qu'est-ce que cela signifiait ?

Le groupe avançait silencieusement. Le corps de Pettigrow flottait devant eux. Le patronus de Harry galopait encore à leurs côtés. Les détraqueurs avaient tous disparu.

Severus n'avait pas manqué d'écouter le récit de Lupin. Il savait donc ce que signifiait ce cerf.

James n'était plus mais il vivait toujours en Harry.

Parce que les morts ne quittaient jamais vraiment les vivants. Parce qu'il était le père de Harry et qu'il avait chéri son fils.

L'amour laisse des traces.

Il aurait dû être en rogne, jaloux, outragé, vexé. Mais le Severus adolescent reposait dans la Cabane Hurlante désormais.

Et cela voulait dire que Harry était apaisé.

L'essentiel était là.

- Serait-ce ? Albus Dumbledore ? demanda Sirius Black, brisant la bulle de réflexion dans laquelle Severus était plongée.

Au loin, au pied du château, se tenait le directeur de Poudlard. Sa silhouette dégageait une aura imposante. Sans un mot, ils accélérèrent le pas. Dans un silence solennel, le groupe arriva devant Dumbledore qui les observa un par un. Lorsque le regard du vieillard se posa sur lui, Severus sentit un frisson le parcourir.

Le directeur de Poudlard demeurait l'air grave, sérieux, critique.

- Mr Pettigrow, dit-il finalement d'une voix posée. En voilà, une surprise. L'un de vous peut-il me dire ce qui s'est passé ?

Granger, comme à son habitude, prit la parole aussitôt, noyant tout le monde sous une tonne d'informations dans un débit de mots supérieur à la normale.

- Sirius Black n'est pas le coupable ! C'est Peter Pettigrow qui était le gardien des Potter. C'était un animagus ! Sirius Black doit être acquitté ! Il faut appeler le Ministre de la Magie tout de suite !

- Du calme Miss Granger, déclara Severus qui sentait la migraine pointer le bout de son nez. Si nous allions à l'intérieur, nous pourrions tout vous expliquer. Mr Weasley a besoin de soins.

.

Alors que l'infirmière de Poudlard s'affairait autour de Weasley, Severus expliqua à Dumbledore tout ce qui s'était passé, n'omettant aucun détail. De temps en temps, le maître des potions jetait des coups d'œil à Harry qui demeurait silencieux. A ses côtés, Sirius Black paraissait épuisé et regardait autour de lui comme si tout allait disparaître en un claquement de doigt et se réveillerait dans sa cellule à Azkaban.

Peter Pettigrow était molesté à un lit. Les pupilles serrées et son souffle court trahissaient la peur panique qui l'habitait.

- C'est Harry qui a souhaité un jugement pour Pettigrow, conclut le maître des potions d'une voix froide.

- C'était tout à fait honorable de ta part Harry, déclara le vieux sorcier.

Sirius Black jugea que c'était le bon moment pour prendre la parole :

- On se connaissait déjà un peu Harry et moi. Lors de mon évasion, je n'avais pour seul but de retrouver Peter. Et puis, un jour où je me promenais dans les rues de Londres à la recherche de nourriture, j'ai entendu un agent du Ministère de la Magie parler de toi Rogue. Il disait que Harry Potter logeait chez un mangemort repenti. Il n'était pas sûr de lui mais je voulais en avoir le cœur net. Et j'ai réussi à te retrouver, dit-il d'une voix plus grave à l'attention de Harry.

Le Survivant offrit un sourire complice et Severus se fit violence pour ne pas exploser de colère. Il déclara simplement d'une voix froide :

- Cela aurait pu être dangereux…

- Oh bon sang Rogue ! Tu sais bien que les adolescents ne disent pas tout aux adultes !

- Poursuivez Sirius, coupa Dumbledore avant que Severus ne puisse répliquer.

- Je restais sous la forme d'un chien. Ah oui, au fait, il faut que je vous dise monsieur le directeur… Je suis un animagus, comme Peter, avoua-t-il comme un gamin prit à manger le dessert de son petit frère.

Severus pinça les lèvres, masquant son irritation de voir Black user comme à l'époque de ses yeux de chiens battus pour être dans les bonnes grâces des professeurs. C'était fou comme il n'avait pas changé ! Black était de toute façon bien obligé de tout avouer… Mais il risquait gros, même innocenté.

Comme pour appuyer les pensées du maître des potions, les portes de l'infirmerie s'ouvrirent en grand. Le Ministre de la Magie, Cornelius Fudge, approchait d'un pas rapide. Le talonnait le dirigeant du Département de la Justice Magique, Bartemius Croupton. L'homme, réputé pour sa sévérité et son sens plus que douteux des droits de l'Homme, semblait être tombé du lit. Le regard hagard, le visage froissé et le souffle court, ses yeux s'écarquillèrent à la vue de Sirius Black.

L'évadé se leva d'un bond, le regard furieux. Ni une, ni deux, les deux hommes brandirent leur baguette. Satané Gryffondor, pesta le maître des potions.

- Je ne suis pas certain que ce soit le bon moment pour faire un esclandre, Black, dit Severus.

- Il m'a enfermé sans procès ce fou-furieux ! Ne crois pas que je vais rester sans rien faire.

- Il va bien le falloir, marmonna-t-il.

Dumbledore accueillit les deux hommes, les intimant à baisser leur baguette et que tout irait bien. Severus coula un regard dubitatif vers Black qui tremblait de tous ses membres. Harry s'était levé à son tour et Granger se rapprochait de la scène, abandonnant le chevet de Weasley qui mourrait d'envie de les rejoindre.

- IL Y A BEAUCOUP TROP DE MONDE DANS CETTE INFIRMERIE ! beugla Pomfresh.

Severus manqua de sursauter, ayant oublié qu'il se retrouvait dans l'antre d'un dragon prêt à vous souffler dans les bronches si vous restiez trop longtemps sur son territoire.

- On ferait mieux de sortir, proposa Severus. Non, vous deux, vous restez à l'infirmerie, ajouta-t-il lorsqu'il vit que Harry et Hermione étaient prêts à les suivre.

Docile, Harry comprit que le moment n'était pas à la contradiction. Il hocha la tête et retourna au chevet de Weasley.

- Attendez ! Qui est cet homme ? demanda Fudge en pointant du doigt Pettigrow.

- C'est ce que je vous expliquais dans ma missive… Il semblerait qu'il y ait eu une erreur de jugement, commença Dumbledore.

- Il n'y a jamais eu de jugement ! Vous m'avez enfermé sur des suppositions ! J'avais le droit à un procès ! s'emporta Sirius Black à l'attention de Croupton.

L'homme masquait tant bien que mal sa gêne, secouant la tête, agacé. Fudge leva une main, dans un appel au calme.

- Allons discuter de cela à l'extérieur.

Le maître des potions ne manqua pas le regard haineux qu'envoya Black au dirigeant du département de la Justice Magique. S'il l'avait pu, Severus se serait frappé la tête avec la paume de sa main. A croire que Black ne comprenait rien à rien !

Mais la fraîcheur de la nuit de printemps sembla remettre l'ordre dans les pensées de l'évadé qui s'apaisa quelque peu, croisant les bras sur la poitrine et écoutant avec attention Albus Dumbledore.

Une fois la vérité révélée, un silence foudroya l'assemblée. Fudge secouait la tête dans tous les sens, Croupton semblait vouloir se réveiller de ce cauchemar. Pour sa carrière, c'était un véritable enfer… Son propre fils Mangemort et enfermé à Azkaban par ses soins quelques années plus tôt l'avait mené à la disgrâce. Un peu plus et il allait s'évanouir. Une erreur judiciaire de la sorte le mènerait tout droit à une chute inévitable. De toute évidence, il ferait tout pour l'éviter, quitte à trouver un quelconque moyen peu orthodoxe.

- Qu'est-ce qui nous dit que tout cela est vrai ? somma Croupton. Des enfants d'à peine quatorze ans ne sont pas des témoins valables !

- Si je puis me permettre Monsieur Croupton, je suis un témoin, déclara Severus. J'étais présent pendant tout ce temps et le professeur de Défense contre les forces du Mal également. Il n'est pour le moment pas… en état de répondre mais il saura vous confirmer les éléments que vous avez sous les yeux.

Il ne savait pas pourquoi il défendait ainsi Black. Peut-être parce que voir Pettigrow subir un jugement et probablement le baiser du Détraqueur le rendait plus heureux que jamais. Mais s'il avait du mal à se l'avouer, il savait qu'il faisait cela pour Harry, déjà attaché à son parrain.

Fudge claqua sèchement la langue sur son palais. Sans surprise, le discours d'un Mangemort repenti, d'un Loup-Garou ainsi que de trois adolescents ne vaudrait pas beaucoup dans la balance… C'était même pitoyable.

Le maître des potions se tourna vers le directeur de Poudlard, jusqu'alors silencieux. L'œil vif et brillant, l'homme caressait sa barbe, signe indéniable qu'il réfléchissait à toute vitesse.

- Vous avez vu comme moi que Peter Pettigrow a été arrêté, dit-il finalement d'une voix calme mais imposante. Je pense qu'il serait judicieux qu'un procès en bonne et due forme ait lieu.

- Je ne veux pas retourner à Azkaban ! aboya Sirius Black, la peur se lisant sur son visage.

- Vous n'y retournerez pas, déclara Albus Dumbledore comme s'il annonçait qu'il y avait du pudding au dîner.

- Je vous demande pardon ? s'offusqua Fudge. Coupable ou non du meurtre des Potter, Black s'est évadé d'Azkaban, ce qui est contraire à nos lois !

- Voyez-vous monsieur le Ministre, il semble clair qu'une erreur judiciaire ait été commise. Vous allez avoir bien à faire ces prochains jours et je suis certain que la Gazette du Sorcier sera tout à fait à même de rapporter les nouvelles dès demain matin. Vous savez à quel point les emprisonnements par erreur peuvent soulever la population…

- Serait-ce une menace ? s'emporta Croupton.

Tel un gamin à qui on aurait annoncé Noël en avance, Dumbledore se contenta de secouer la tête dans un sourire espiègle.

- Jamais de la vie ! Juste un conseil. Pour le moment, je me charge de garder Sirius Black auprès de moi. En tant que Président du Magenmagot, ajouta-t-il dans un argument d'autorité parfaitement assumé. Par ailleurs, je crois bien que les Aurors arrivent. Alastor !

Dumbledore ouvrit les bras et Severus dut se retourner pour apercevoir les nouveaux invités. Au bout du couloir, un auror à l'air sévère, le visage abîmé et la démarche claudicante approchait. Severus le reconnut immédiatement. Alastor Maugrey n'était pas de ses grands amis. Mais il avait fait partie de l'Ordre et vouait un culte à Dumbledore. A ses côtés marchait une jeune fille âgée d'environ vingt ans - ou plutôt tentait de ne pas s'emmêler les pieds. Elle trébucha deux fois sur les dalles de pierres inégales avant d'arriver à hauteur. Severus la reconnut comme une de ses anciennes élèves. Il mit un temps fou à se souvenir de son nom.

- Bonsoir, déclara l'Auror d'un ton bourru. Je suis venu avec mon apprentie, Tonks.

La jeune femme hocha la tête dans un sourire naturel. Son regard se posa longtemps sur Black. Ils n'eurent cependant pas le temps de bavarder. L'heure était à l'arrestation de Pettigrow, une cellule du Ministère l'attendait avant d'être envoyé à Azkaban jusqu'à son procès.

Les Aurors suivirent le directeur et le Ministre de la Magie. Croupton observa tour à tour Severus et Black. Puis, il s'approcha de l'évadé, le regard sombre.

- Ne croyez pas que ce sera aussi simple pour vous, Black. Un animagus non déclaré qui s'évade d'Azkaban ? Vous êtes foutus, croyez-moi.

Sirius Black se redressa, leva le menton et jaugea l'homme comme s'il n'était qu'un vulgaire insecte. La voix aiguisée, coupante, il cracha :

- Certainement moins que vous.

Croupton remit sa cravate en place et s'échappa auprès du Ministre.

Le vent siffla dans les couloirs et Black se racla la gorge. Aucun des deux ne souhaitaient retourner à l'infirmerie mais discuter paraissait encore plus insurmontable.

Sauvé par le gong, Harry sortit de l'infirmerie en courant, suivit d'Hermione Granger.

- Il serait temps d'aller vous coucher tous les deux.

- Est-ce que ce sont des Aurors ? Les deux personnes qu'on a vu ? demanda Harry aussitôt.

Severus hocha la tête, toujours mal à l'aise en présence de Black.

- Ils vont vous libérer alors ? demanda Granger.

- Je l'espère, rigola Black avec douceur. Pour le moment je suis sous le contrôle de Dumbledore. Mais je vais sûrement avoir un procès. Cela ne va pas être de tout repos…

- L'important c'est que vous ne soyez plus dans cet endroit horrible qu'est Azkaban ! lança Granger.

Severus proposa d'accompagner les adolescents dans leur dortoir. Il se rendit alors compte à quel point Black était affaibli. L'homme avait du mal à suivre le pas et son corps paraissait ankylosé.

- A quel âge est-ce qu'on peut devenir Auror ? Elle était jeune la fille avec l'autre homme ! lança Harry une fois au pied des escaliers.

- Je pourrai tout t'expliquer un de ces jours ! lança le parrain du gamin qui ouvrit les yeux comme des soucoupes.

- Vraiment ? Tu étais un Auror toi aussi ?

- Ah ça non, lâcha l'homme dans un rire si fort que les tableaux aux alentours grognèrent. Mais ton père, oui !

Severus observa la scène avec distance, se protégeant de toute attaque envers son égo fragile. Il se contenta d'admirer son gamin sourire et vivre.

- Dément ! Alors bonne nuit et à bientôt !

Harry s'approcha aussitôt de son parrain et se réfugia dans ses bras. Pour Black, cela semblait être un geste parfaitement naturel et simple à réaliser. Dire que Severus avait mis plusieurs mois avant de se sentir à l'aise avec ce genre d'étreinte… Pourtant, quand Harry l'encercla dans ses bras, le maître des potions ne se sentit rien d'autre qu'à la place où il devait être.

- Allons-y, lança Severus lorsque le tableau se referma.

- Où ? demanda l'autre.

- Aux cuisines. Si Dumbledore apprend que j'ai laissé son élève préféré mourir de faim, je suis bon pour un stage de métamorphose en Ouganda.

Black trouva visiblement cette réplique acerbe particulièrement hilarante.

- Arrête ce raffut ! s'agaça Severus. Je te rappelle que les élèves dorment.

- Ce que tu peux être aigrie, ronchonna l'autre.

Severus serra les poings bien fort et accéléra le pas.

- A ce propos, la petite dont parlait Harry…

- Tonks ?

- Oui… Est-ce la fille de… Enfin… Tu sais…

- Non je ne sais pas non ! Parle correctement, j'ai déjà bien assez de mal à comprendre les cornichons qui me servent d'élèves pour que tu baragouines de la même façon !

- La fille d'Andromeda Black, dit-il finalement. Ma cousine… Elle a les yeux des Black.

Severus soupira, continua de marcher quelques secondes. Parfois, c'était peut-être pas si mal de ne pas avoir de famille. Ça évitait les problèmes.

- Oui c'est elle.

- Il faudra que je trouve un lieu de vie bientôt… Si j'ai de la famille qui n'est pas du côté obscur, ça pourrait m'aider. Et puis, elle m'inspire confiance.

Severus n'avait vraiment pas envie d'écouter les inquiétudes de Black. S'il voulait aller chez sa cousine, grand bien lui fasse !

- Pour le moment, t'es à Poudlard. Et arrête de croire que les turpitudes de ta misérable existence m'intéressent.

- Ça intéresse Harry, contra Black, un sourire victorieux aux lèvres. Et tu n'auras pas d'autre choix que choix de m'intégrer dans ta vie !

Severus accéléra méchamment le pas. Une fois aux cuisines, il se commanda une tarte épinard-chèvres et laissa Black se débrouiller. Sans surprise, l'homme prit rapidement possession des cuisines. A tel point qu'un elfe le reconnut et pleura de joie.

- Missa savait que vous étiez innocent, Missa vous servira tout ce que vous voudrez manger, Missa est si heureux ! Albus Dumbledore protégera monsieur Black !

- En voilà une bonne nouvelle, se moqua Severus. Tu pourras monter une association avec Granger, elle prend la citrouille à Harry pour le droit des elfes de maison depuis plusieurs semaines.

oOo

Lorsque Harry se réveilla le lendemain matin, il mit un temps considérable pour se rappeler où il était.

- Le petit déjeuner va bientôt se terminer, tu devrais te dépêcher, dit Neville qui sortait de la salle de bain. La nuit a été courte apparemment ? Où est Ron ?

Harry se redressa, cherchant des vêtements propres autour de lui. Il marmonna à Neville qu'il lui expliquerait tout plus tard.

Une fois parfaitement réveillé, il se décida à courir jusqu'aux cachots pour obtenir des nouvelles de Sirius Black auprès de son tuteur. Plusieurs élèves se tournèrent sur son passage. Il accéléra le pas, inquiet. Au détour d'un couloir, il bouscula Hermione qui tenait dans sa main des patisseries. Elle aussi portait les traces de sa courte nuit sur son visage.

- Ah te voilà ! J'ai pris ça aux cuisines, allons-y !

Mais Hermione prit un chemin différent et Harry l'arrêta d'un geste, lui demandant où est-ce qu'elle allait.

- Voir Ron ! Où est-ce que tu comptais aller ?

- Aux cachots pour demander des nouvelles de Sirius à mon tuteur ! s'exclama Harry comme si c'était une évidence.

- Vraiment Harry parfois…, dit-elle sans terminer sa phrase et en lui collant les pâtisseries dans les mains afin de fouiller dans son sac et d'en sortir un exemplaire de la Gazette du Sorcier. Tout est dit ici ! Et le professeur Rogue a cours avec les quatrièmes années, tu pourras le voir juste après.

Convaincu, il suivit la jeune fille qui marchait d'un pas déterminé. Ils pénétrèrent dans l'infirmerie où Ron se réveillait à peine. Sa jambe semblait déjà totalement remise. Harry et Hermione s'installèrent au bout du lit. Harry déposa les gâteaux devant eux et Hermione entreprit de lire le journal.

- C'est en gros titre " Sirius Black retrouvé. Albus Dumbledore réclame une véritable enquête".

- Si Albus Dumbledore le demande, ça sera fait ! dit Ron en se servant un gâteau.

- N'as-tu pas eu de petit déjeuner ? s'agaça Hermione.

- Je suis en pleine croissance, j'ai toujours faim, se défendit Ron en enfournant un autre biscuit dans sa bouche.

Hermione soupira d'exaspération et reprit la lecture :

- "Hier dans la nuit, Sirius Black a été retrouvé dans l'enceinte de Poudlard. Ce dernier tentait d'arrêter Peter Pettigrow, un ami de longue date des Potter ayant trouvé la mort la nuit du 31 octobre 1981 et où Harry Potter est devenu le Survivant. Selon nos premières informations, Sirius Black aurait été accusé à tort. En effet, Peter Pettigrow serait celui qui aurait trahi les Potter puis, se serait échappé par le biais d'un sortilège de métamorphose, laissant Sirius Black se faire accuser à sa place.

Comme nous l'avions souvent dénoncé à l'époque, les arrestations des partisans de Vous-savez-Qui ont été expéditives et rarement accompagnées d'un véritable procès. A ce jour, nous ne savons pas où se trouvent les deux hommes si ce n'est entre les mains du Ministère de la Magie. Ce matin, le Ministre de la Magie n'a pas souhaité répondre à nos questions. Il a simplement déclaré que "la lumière serait faite concernant le rôle de chacun dans la mort des Potter et des moldus la nuit du 31 octobre". Puis, il a ajouté que "la communauté sorcière était désormais en sécurité".

Autour du Ministère de la Magie, des groupes de sorciers se rassemblent. Certains réclament plus d'informations comme Mrs. Ourm : "le Ministère doit nous dire la vérité ! Je pense qu'on nous cache beaucoup de choses. Pourquoi Sirius Black serait tout à coup innocent ? Il a tout de même échappé à Azkaban ! Est-ce le pouvoir de son nom qui lui a donné des privilèges ? Je pense qu'on ne nous dit pas tout et qu'il faut chercher les informations par nous-mêmes…".

Le dirigeant du Département de la Justice Magique, Bartemius Croupton, était absent ce matin. Une conférence de presse devrait bientôt avoir lieu."

- C'est n'importe quoi ces gens qui veulent mettre leur nez dans cette histoire ! s'offusqua Ron.

- Il faut un véritable procès, c'est tout, expliqua Hermione.

- J'espère que ce sera rapide, déclara Harry soudainement inquiet pour son parrain. Sirius a été enfermé douze ans à tort, ce serait la moindre des choses qu'il puisse enfin profiter d'une vie d'homme libre.

- Les choses sont plus compliquées qu'il n'y paraît. Le Ministère a fait une grosse erreur en enfermant Sirius sans procès. En plus de cela, il a réussi à s'échapper. Cela prouve que le Ministère ne maîtrise rien. Fudge et Croupton feront tout pour garder leur place et éviter une humiliation publique. Ils vont essayer de sauver les meubles et leur peau avec.

- Tu as raison Hermione, déclara Ron en hochant la tête, l'air pensif. Papa m'a raconté qu'à la fin de la guerre, Croupton enfermait n'importe qui à Azkaban dès lors qu'il y avait un soupçon. Les Aurors avaient même le droit d'utiliser des méthodes un peu douteuses si vous voyez ce que je veux dire.

- Et même avec ça, ils ont laissé échapper le père de Malefoy alors qu'on sait pertinemment que c'était un Mangemort, s'offusqua Harry.

- Ce système est pourri jusqu'à la moelle, dit Ron dans une grimace amère.

Leur éveil politique fut interrompu par Pomfresh qui annonça que Ron pouvait retourner en cours. Ils se dépèchèrent de se rendre en cours de Potions où ils arrivèrent tout juste à l'heure. Drago Malefoy se retourna plusieurs fois sur son tabouret pour invectiver le trio, en vain. A chaque fois, le professeur de potions réclamait le silence.

- Vous ferez ami-ami avec Mr Potter plus tard, Mr Malefoy, dit-il sous le regard outré des deux concernés. Je vous rappelle que l'examen de fin d'année aura lieu mercredi prochain. Il comptera pour cinquante pour cent de votre note finale. Si je dois vous le rappeler, seule une poignée d'élèves peut se targuer d'avoir des notes suffisamment élevées au contrôle continu pour se permettre de lambiner alors silence !

Harry soupira, pensant à la semaine à venir qui allait être très longue. Sans grande ambition, Harry visait la moyenne en Potions. Après tout, c'était déjà bien plus que ce qu'il avait eu en première année. Il savait son tuteur insatisfait par ses notes dans cette matière mais il n'y pouvait rien. Il n'aimait pas ce cours et ça ne l'intéressait pas. En revanche, il avait bon espoir de remonter sa dernière note en Défense. Lors de la dernière évaluation, il s'était endormi comme un loir sur sa table. Le professeur Lupin lui avait gentiment proposé de rendre un devoir sur table afin de rattraper cette note.

Harry eut du mal à se concentrer durant la matinée et Severus le reprit plusieurs fois alors qu'il oubliait des ingrédients dans sa potion. A la fin du cours, Harry s'approcha du bureau de Severus qui corrigeait des copies.

- Tu devrais profiter du beau temps pendant la récréation, déclara l'homme sans lever les yeux de sa correction.

- Je suis désolé pour aujourd'hui, j'ai du mal à me concentrer, expliqua Harry de but en blanc.

L'homme posa sa plume et accorda toute son attention au Gryffondor.

- J'ai lu la Gazette du Sorcier de ce matin. Où est Sirius ?

- Avec Dumbledore.

- Dans le château ?

L'homme répondit d'un haussement d'épaules, confirmant qu'il n'en savait pas plus à ce sujet.

- Ne t'inquiète pas pour lui, déclara Severus d'une voix impénétrable. On devrait en savoir plus ce soir, on a rendez-vous chez le directeur à seize heures. Ne sois pas en retard.

- Mais j'ai piano !

- J'ai prévenu Miss Crescent, tu reprendras les leçons dans deux semaines une fois les examens terminés. Elle viendra un peu à Inverness pour travailler avec toi.

- Oh… D'accord. Alors à tout à l'heure Severus.

- A tout à l'heure gamin.

.

Lorsque Harry passa les portes du bureau du directeur de Poudlard, il sut que l'instant était solennel. L'homme se tenait droit devant son bureau, les mains croisées. Il attendait Harry et Severus. Il ne dit pas un mot avant que tout le monde ait pris place sur les fauteuils disposés au centre de la pièce.

Installés ainsi, tout le monde pouvait se regarder de face. Un peu inquiet, Harry se tortilla sur son siège et il accueillit avec soulagement les biscuits et tasses de thé qui apparurent sous leurs yeux. Il attendit poliment que Dumbledore l'invite à se servir puis mâchouilla un des biscuits, prêt à écouter ce que le directeur avait à dire.

Harry était un peu déçu de ne pas voir Sirius dans le bureau mais il ne demanda rien, de peur de paraître impoli.

- Harry, Severus, j'ai plusieurs choses à vous annoncer, dit finalement l'homme. Tout d'abord Harry, je tenais à te féliciter pour le sortilège de Patronus que tu as magnifiquement bien réalisé.

- Vous avez vu quand j'ai réalisé le sortilège ?

- Vois-tu, j'ai une superbe vue depuis cet endroit, répondit l'homme en pointant du doigt l'une des fenêtres de son bureau.

- Une aide supplémentaire n'aurait pas été de trop monsieur le directeur, intervint Severus, sarcastique.

Harry coula un regard vers son tuteur. Ses épaules étaient raides et ses sourcils froncés. Mais Albus Dumbledore ne sembla pas s'émouvoir.

- J'étais tout prêt à vous venir en aide mais j'ai laissé faire une part du destin. Il me semblait que tout le monde avait beaucoup de choses à se dire hier soir, n'est-ce pas ?

Harry opina du chef dans un sourire coupable. La veille avait été le spectacle de nombreuses révélations. Entre le professeur loup-garou, le véritable traître et la paix intérieure qu'avait trouvé Harry vis-à-vis de feu son père… On pouvait dire que c'était une soirée mouvementée.

- Merci Severus d'avoir veillé sur Harry, une fois encore. Je sais que vous le faites pour de bonnes raisons mais ne paniquez pas, je ne vais pas vous parler du pouvoir de l'amour, s'amusa-t-il.

Severus souffla du nez, blasé.

- Du moins pas tout de suite, précisa Albus. Si je vous ai fait venir dans mon bureau, c'est parce qu'une prophétie a été révélée hier dans l'après-midi par nulle autre que Sybille Trelawney.

- Le professeur de Divination, c'est ça ? demanda Harry.

- C'est exact. C'est la même femme qui quelques années plus tôt, a réalisé une prophétie te concernant. Mais nous y reviendrons plus tard.

Imperceptiblement, Harry vit le maître des potions se tendre, l'inquiétude suintant par les pores de sa peau et sa magie frétillant autour de lui.

- La prophétie de Sibylle, hier soir, annonçait que l'un des serviteurs de Voldemort briserait ses chaînes pour retrouver son maître. Cela afin que Voldemort revienne à la vie, plus puissant et plus terrible que jamais. C'est pour cela que je guettais les alentours.

Harry sentit son estomac se contracter et sa bouche devenir extrêmement sèche.

- Mais..Je ne comprends pas… Pettigrow a été arrêté.

- Je pense que c'est précisément là où veut en venir le directeur, déclara Severus d'une voix blanche.

- Exactement.

Harry observa tour à tour les deux hommes, sans réellement comprendre les enjeux de la discussion. Dumbledore reprit :

- Il y a au Département des Mystères, tout un tas de prophéties. Des centaines et des centaines. Comme tu le sais, il y en a une à ton nom.

- Une prophétie qui dit que je devrais tuer Voldemort, confirma Harry.

C'était très facile à dire car en réalité, il avait mis cette information loin, très loin dans sa tête sans jamais y réfléchir pleinement. Il préférait se cacher derrière les moments de douceur en présence de ses amis et surtout de Severus. Il lui avait promis une protection et il voulait y croire.

- En réalité Harry, cette prophétie est un peu plus complexe. Je la détiens ici même. Une copie demeure au département des mystères et porte ton nom. J'aimerais te la faire écouter. Je pense qu'il est temps.

- Albus…

- Mais avant cela, coupa le directeur, je voudrais que tu gardes à l'esprit qu'une prophétie n'est jamais gravée dans le marbre. On en a eu la preuve hier soir.

- Albus, je pense qu'il est encore trop tôt. J'ai mon mot à dire dans cette histoire ! Je suis son tuteur légal.

Dumbledore observa longuement Severus. L'un et l'autre semblaient discuter par la pensée. Harry eut la sensation d'être invisible mais, trop pris par ses propres inquiétudes, ne s'en offusqua pas.

- Je ne lui aurais jamais tout révélé à un si jeune âge si je n'avais pas eu la chance de vous avoir à ses côtés Severus. Les plans ont changé.

- Cessez de me parler de plan, je vous en conjure !

- Sybille commence à annoncer des prophéties inquiétantes et même si elles ne se réalisent pas, c'est le signe que des choses se préparent. Le procès de Pettigrow motivera certainement d'anciens partisans.

- Je le sais, soupira Severus.

Le maître des potions planta son regard dans celui de Harry. Il réfléchissait à toute vitesse. Puis, il se redressa et rapprocha son siège du Gryffondor qui ne comprenait pas grand-chose à ce qu'il se passait. Était-ce si dramatique ?

- Tu sais que je te dis toujours que le savoir c'est le pouvoir n'est-ce pas ?

Harry opina du chef, incertain quant à la conduite à tenir. Devait-il paniquer ? Severus était rarement aussi prévenant pour expliquer les choses.

- Ce que l'on va t'expliquer ne doit jamais remettre en doute l'affection que je te porte et je serai toujours derrière toi pour te soutenir.

Harry soupira, comprenant clairement où voulait en venir le professeur de Potions.

- Mais ne vous inquiétez pas, je sais que c'est vous qui avez transmis la prophétie à Vold… Vous-Savez-Qui. Mais je ne suis pas en colère…

- Non ce n'est pas ça, Harry ! J'ai transmis une partie de cette prophétie mais ce soir on va te la révéler dans son entièreté. Il faut que tu sois fort, d'accord ?

- Oui, répondit précipitamment Harry dont le cœur commençait à battre plus fort.

Albus Dumbledore se leva aussitôt et apporta une boule de cristal. Il la tendit à Harry. Dans ses yeux bleus résidaient une grande tristesse et il semblait très vieux.

- Une fois que tu l'auras entendue, je veux que tu te souviennes de ce qu'on s'est dit concernant la prophétie d'hier soir d'accord ?

Harry hocha la tête et, d'une main tremblante, se saisit de la boule. Elle s'illumina. Une voix rauque au ton dur s'éleva dans les airs :

- Celui qui a le pouvoir de vaincre le Seigneur des Ténèbres approche…

il naîtra de ceux qui l'ont par trois fois défié, il sera né lorsque mourra le septième mois…

et le Seigneur des Ténèbres le marquera comme son égal mais il aura un pouvoir que le Seigneur des Ténèbres ignore… et l'un devra mourir de la main de l'autre car aucun d'eux ne peut vivre tant que l'autre survit…Celui qui détient le pouvoir de vaincre le Seigneur des Ténèbres sera né lorsque mourra le septième mois…

Harry manqua de faire tomber la prophétie. Il la déposa sur la table, comme si elle lui avait brûlé les doigts. Il devait être pâle comme la mort car Severus lui tendit une tasse de thé. Harry la repoussa d'un geste sec.

- Je… Je ne suis pas sûr d'avoir tout compris, dit Harry le cerveau en compote.

Il avait la sensation que la prophétie résonnait encore dans sa tête. Un bourdonnement désagréable lui donnait l'impression d'être dans une bulle de coton. Quelle était cette histoire de pouvoir ? Pourquoi Voldemort l'avait-il marqué comme son égal ? Il ne comprenait plus rien ! Il n'avait jamais pensé que la prophétie en question était aussi claire et limpide. Plus personne ne parlait dans la pièce, même les tableaux avaient cessé de respirer. Harry lui-même manquait d'air.

- Cela signifie qu'il y a près de quatorze ans, une prophétie a déclaré que la seule personne ayant le pouvoir d'anéantir Voldemort naîtrait de parents qui par trois fois l'avaient déjà défié. Que ce bébé naîtrait à la fin du mois de juillet.

- C'est… C'est moi, lâcha Harry le souffle court. Je le savais déjà mais là…

- En réalité Harry, cela concernait deux enfants, annonça Severus d'une voix plus grave qu'à l'ordinaire. La prophétie ne disait pas qui était l'enfant en question mais un autre aurait pu tout à fait correspondre, il s'agissait de Neville Londubat.

- Mais le directeur vient de me dire que la prophétie au Département des Mystères porte mon nom !

- Parce que Voldemort t'a choisi comme tel, dirent les deux hommes d'une même voix.

Harry ressentit une affreuse envie de pleurer. Il ne comprenait plus rien. Il chassa la boule grandissante qui commençait à lui enserrer la gorge et, pour faire bonne figure, prit une gorgée de thé. Ses gestes étaient précipités, maladroits. Il avait du mal à contrôler ses mains tremblantes. Il reposa sa tasse, un peu brusquement.

- Mais peut-être que ce n'est pas moi ! Peut-être que Voldemort s'est trompé !

- Non Harry, répondit Severus d'une voix douce.

Severus n'avait jamais de voix douce. Severus était sec, franc et froid. Jamais il ne mettait les formes. Pire, son regard à lui aussi était triste. Il le masquait mais Harry le voyait.

- Mais puisque vous dites que Neville correspond aussi…

- Tu oublies la partie où la prophétie parle de marquer son adversaire "comme son égal", précisa Dumbledore. C'est ce qu'il a fait avec toi. Et note bien ça Harry, avant même que tu naisses, il t'a vu comme son adversaire. Il aurait pu choisir Neville qui est un Sang-Pur mais il t'a choisi toi, Sang-Mêlé. Il s'est vu en toi.

Harry s'étrangla et il constata que la panique commençait à le submerger.

- Mais c'est stupide ! Il aurait pu attendre qu'on soit plus âgés Neville et moi et il aurait su qui était plus à même de le vaincre.

- Pas sûr que ça aurait changé grand chose, lança Severus.

- Mais… Mais…, bégaya Harry qui sentait son visage se tordre dans une grimace de douleur.

- Tu ne dois pas avoir peur Harry, dit Severus d'une voix calme.

Et ce fut les paroles de trop.

Harry éclata en larmes, prit d'une panique monstre qu'il n'avait jamais ressenti de toute sa vie. Il réalisait maintenant ce que signifiait cette prophétie. Et il se rendit bien compte qu'il ne pouvait rien y faire, qu'il n'avait pas la main dessus et que son destin était lié à Voldemort. Ses épaules étaient secouées d'affreux sanglots et sa respiration si erratique qu'il en avait mal au thorax.

- Harry regarde moi, demanda le professeur d'une voix ferme.

Il s'exécuta tant bien que mal, cherchant sa respiration.

- L'espion qui avait entendu la prophétie, c'était moi. Je ne lui en ai rapporté qu'une partie. Tu-Sais-Qui n'en connaît pas la fin. Celle qui dit que tu as un pouvoir que le Seigneur des Ténèbres ignore.

- Mais je n'ai pas de pouvoir ! hurla Harry, accablé par le désarroi.

- Bien sûr que si Harry, lança Dumbledore. Le pouvoir qui te pousse en ce moment même à faire confiance et aimer un homme comme ton propre père. Le pouvoir qui t'a poussé à demander d'écouter Sirius Black car avant d'être un humain, c'était ton animal de compagnie. Le pouvoir qui te poussera tout à l'heure à te confier à tes meilleurs amis.

Harry secoua la tête, pleurant de tout son soûl. Une main se posa sur son épaule et il s'y accrocha telle une bouée de sauvetage avant de basculer en avant, plongeant sa tête dans ses mains, le dos voûté et tressaillant sous ses larmes.

Personne ne parla pendant de longues secondes. Seuls les reniflements de Harry brisaient le silence lourd. Il pleurait comme un enfant. Mais tout le monde s'accordait silencieusement sur le fait qu'il en avait bien le droit. Il était un enfant. Alors il ne s'arrêta pas. Il laissa échapper ses pleurs, submergé par la peur, l'injustice et la colère.

Quand Harry se sentit capable de parler, ses yeux fixant le tapis aux ornements zoomorphes, il demanda :

- La… La suite de la prophétie dit que… Aucun des deux ne peut vivre tant que l'autre survit. Je vais devoir le tuer ?

- Oui.

La voix était tellement grave que Harry ne distingua pas la personne qui avait répondu. Harry se redressa lentement, des larmes coulaient toujours sur ses joues mais les sanglots s'étaient apaisés.

- Je t'ai demandé de te souvenir de la prophétie d'hier soir. Qu'est-ce que tu en conclus ? demanda Dumbledore comme s'il jouait aux devinettes avec son petit-fils préféré.

Harry haussa les épaules, las.

- Je ne sais pas vraiment, répondit-il la voix rauque. Qu'il peut y avoir des erreurs ? Pourtant vous venez de me dire que la prophétie me concernait bel et bien alors…

- Réfléchit mon garçon. Les prophéties ne disent pas toujours la vérité absolue. Sinon, nous n'aurions plus qu'à rester dans notre lit et attendre que les jours passent ! Ou mieux, jouer aux dés pour décider du cours de notre vie.

Harry secoua la tête, prêt à fondre à nouveau en larmes mais se faisant violence pour ne pas craquer. Il inspira et expira profondément.

- La prophétie n'a de sens que parce que Voldemort lui en a donné un. Crois-tu que les centaines de prophéties au Département des Mystères se sont toutes réalisées ? Voldemort t'a désigné comme son ennemi le plus dangereux et c'est donc ce qui a fait de toi son plus grand danger !

- Mais… ça revient au même !

- Non mon garçon, déclara Dumbledore d'une voix ferme.

Harry fronça les sourcils, passablement agacé. Severus se pencha un peu plus vers Harry, d'un air déterminé :

- Si Voldemort n'avait jamais entendu parlé de cette prophétie, crois-tu qu'elle se serait réalisée ? Comme l'a expliqué le directeur, des centaines de prophéties sont annoncées chaque année. Elles ne se réalisent pas forcément. Mais en tuant ton père et ta mère, le Seigneur des Ténèbres a fait de toi son pire ennemi. La protection qui coulait dans tes veines et ton besoin de vengeance… C'est lui qui les a créés ! Comme tous les oppresseurs de cette terre, ils se créent leur propre ennemi. Mais toi, tu as su t'affranchir de tout ça. Tu as le choix.

- Mais je devrais quand même le tuer, déclara Harry d'une petite voix.

- Cela n'aurait rien changé ! coupa Dumbledore. Réfléchis bien Harry. Ce n'est pas à cause de la prophétie que tu dois le tuer. C'est simplement parce qu'il est constamment à tes trousses. Ces trois dernières années, tu ne connaissais pas l'existence de cette prophétie et pourtant, n'as-tu jamais essayé de le vaincre ? Ne voudrais-tu pas qu'il cesse de faire du mal ?

Harry se mit à réfléchir. Ses yeux le brûlaient, le sel sur ses joues lui tirait la peau et il se sentait vidé de tout.

Il pensa alors à son père et sa mère. Puis aux dommages collatéraux. Sirius accusé à tort, les moldus assassinés sauvagement, Ginny possédée lors de sa première année à Poudlard…

- Je voudrais qu'il soit tué.

- C'est ça Harry ! lança Dumbledore. Tu pourras toujours tourner le dos à cette prophétie mais comme Voldemort croit à cette prophétie et t'a marqué comme son égal, il te traquera à vie. Et donc, tu seras obligé de le tuer.

Harry commençait à comprendre le chemin de pensée. Finalement, cela résumait parfaitement sa vie. Voldemort voulait toujours sa peau et la voudrait jusqu'à ce qu'il l'arrête. Finalement, prophétie ou non, ça ne changeait rien pour lui.

- Pour cette dernière injonction, déclara Severus, je me permets d'apporter quelques nuances. Tu ne seras pas obligé de le tuer. Le Seigneur des Ténèbres mourra mais rien ne t'oblige à te salir les main

- Non ! coupa Harry se redressant totalement sur sa chaise. Si Voldemort me poursuit, je ne vois pas pourquoi je resterai sans rien faire !

Severus se redressa à son tour, observant son protégé d'un œil chirurgical. Puis, il hocha la tête comme pour dire "nous verrons cela plus tard".

- Il me semble que vous vous entraînez déjà, déclara Dumbledore. M'est d'avis que les cours d'Occlumancie pourraient être utiles.

- Figurez-vous que c'est au programme pour l'année prochaine. Je voulais que Harry sache poser son esprit avant cela. La musique fait des miracles.

Albus Dumbledore hocha la tête avant de prendre un bonbon au citron. Il tendit le pot à Harry qui se servit par politesse sans pour autant mettre la sucrerie dans sa bouche. Il avait la sensation que le moindre aliment dans son estomac sortirait aussi sec.

- Où est Sirius ? demanda-t-il plutôt.

- Sirius Black se trouve dans mes appartements en sécurité pour le moment.

- Pourrais-je aller le voir ? demanda-t-il autant à l'adresse de Severus que de Dumbledore.

- Je suis sûr que ça lui fera le plus grand bien, répondit le vieil homme.

.

En chemin vers la Grande Salle, ni Severus, ni Harry ne parlèrent. Les jambes en coton, Harry avait la sensation d'avoir mal partout. Son estomac se tordait et une migraine tambourinait contre ses tempes. Le bonbon au citron resté au creux de sa main lui collait désormais les doigts. A quelques pas de la Grande Salle, Harry s'arrêta net. Le maître des potions se retourna, interloqué.

Il n'eut pas besoin de dire grand chose. Harry secoua simplement la tête et Severus l'entraîna dans leurs appartements sans un mot.

oOo

Severus préparait la table à manger quand Harry apparut dans le salon en pyjama les yeux humides. Le maître des potions préféra laisser la place au silence encore quelques instants.

Harry l'aida sans un mot, comme il en avait l'habitude à Inverness. Une fois devant leurs assiettes, Severus servit une louche de soupe à Harry. Le Gryffondor observa son repas sans un mot, tel un zombie. Ses yeux s'apparentaient à deux pierres de jade sans reflets.

- J'ai mal à la tête, je crois que je préfèrerai aller dormir, dit finalement Harry.

- Tu ne veux pas de tarte à la mélasse ? J'aimerais bien que tu manges un peu.

- S'il te plaît, ajouta-t-il, secouant la tête.

Désemparé, le maître des potions capitula dans un geste du menton. C'était la première fois que Harry tutoyait Severus. Ces deux dernières soirées avaient bouleversé la vie des deux sorciers à tout jamais tout en les rapprochant.

Une fois Harry dans sa chambre, Severus se laissa aller contre le dos de sa chaise. Il avait la sensation d'avoir pris dix ans en l'espace de deux jours.

La réaction de Harry dans le bureau de Dumbledore était parfaitement légitime. Le garçon avait réalisé que, quoiqu'il arrive, Voldemort serait à ses trousses et ne le lâcherait jamais. Dumbledore avait insisté pour que Severus soit présent. Parce qu'il le savait capable d'apporter l'aide nécessaire à Harry pour qu'il combatte le Seigneur des Ténèbres.

Severus parviendrait à empêcher cela. Lorsque le jour viendrait, il serait aux côtés de Harry.

La gorge serrée, Severus se servit une rasade de vin rouge qu'Alma Hardi lui avait envoyé quelques jours plus tôt en guise de "bonne amitié".

Il savourait le liquide fruité en bouche et chaud en gorge quand on frappa à la porte. Sentant la magie du loup-garou, Severus ouvrit la porte d'un geste de baguette.

Comme après chaque pleine lune, l'épuisement émanait par tous les pores de la peau du loup-garou.

- Ne devrais-tu pas être à l'infirmerie ?

Lupin ne répondit rien, haussa les épaules et s'écroula sur le canapé. Le maître des potions grinça des dents mais ne dit rien.

- Où est Sirius ? demanda l'autre de but en blanc, le souffle court.

- De toute évidence, pas dans cet appartement.

Lupin se frotta le torse, une grimace de douleur sur le visage.

- Je ne compte pas te ramener à l'infirmerie Lupin ! File d'ici !

- J'ai besoin de savoir où est Sirius. Je veux que tu m'expliques tout ce qu'il s'est passé.

Le loup-garou fut pris d'une quinte de toux. Il semblait à deux doigts de rendre les armes. Ne souhaitant pas gérer un cadavre en plus de tous ses problèmes, Severus fit apparaître une potion de force, histoire que l'homme ne s'écroule pas.

Si Lupin reprit quelques couleurs, il paraissait toujours aussi malade et épuisé. Il fallait le reconnaître, la malédiction du Loup-Garou faisait des dégâts. A bien y regarder, être en plus professeur à Poudlard, relevait presque du suicide.

- Sirius Black se trouve dans les appartements de Dumbledore. Il a dit à Harry qu'il pouvait lui rendre visite. J'imagine que tu pourras faire de même dès lors que tu seras remis.

Remus Lupin hocha mollement la tête. Il paraissait incapable de se relever pour rejoindre l'infirmerie.

- Veux-tu que j'appelle Pomfresh par la cheminée ?

- Attends quelques minutes s'il-te-plait, déclara l'homme qui ferma les yeux.

C'était surement ça le pouvoir de l'amour : ne plus avoir aucune fierté au point de se vautrer sur le canapé de son ancien ennemi. Tout ça pour avoir des nouvelles de Sirius Black…

Severus débarassa la table, l'appétit coupé par tant de mièvrerie. Il termina son verre de vin et retourna à son bureau. De là où il était, il voyait que Lupin s'était assoupi, la bouche entrouverte.

Gé-nial.

Il terminait la rédaction de l'examen pour ses classes de deuxième année lorsque du bruit provenant de la chambre de Harry le fit se lever. Lupin ouvrit les yeux au même moment, le regard interrogatif. Severus eut à peine le temps d'arriver à la porte de la chambre du gamin que celle-ci s'ouvrait à la volée.

A son habitude en temps de crise, les yeux de Harry demeuraient dans le vague. Il se dirigea vers la cuisine pour se servir un verre d'eau, marmonnant des choses incompréhensibles. Lupin suivait des yeux le Gryffondor, surpris et inquiet.

Quand Harry se mit à fouiller dans les tiroirs dans un raffût tonitruant, Severus s'approcha de lui. Avec douceur, il le prit par le bras et Harry se laissa faire.

- Retourne te coucher, intima-t-il à voix basse.

- Mais il faut mettre du sel dans le potager ! répondit le garçon.

Lupin éclata de rire, dérouté. Severus envoya un regard courroucé à l'homme puis dirigea Harry vers son lit. Sa couverture était au sol et son oreiller sur le bureau. Bien que ce genre de crises de somnambulisme ne se fut pas produite depuis des mois, Severus retrouva ses gestes habituels. D'un mouvement de baguette, il refit le lit du garçon et l'attira vers celui-ci. Harry se recoucha docilement, baragouinant dans un langage que seul Morphée pouvait comprendre.

Severus ferma doucement la porte. Remus Lupin s'était approché de la scène.

- Il était inutile de te lever et d'utiliser tes dernières forces.

- Je ne savais pas que Harry était somnambule.

- Seulement lorsqu'il est perturbé. Ça faisait longtemps, déclara Severus machinalement.

Remus Lupin pinça les lèvres mais ne dit rien de plus. Le maître des potions n'avait pas envie d'expliquer que Harry connaissait l'existence de la prophétie dans son intégralité. Il voulait surtout se coucher et que le loup-garou déguerpisse de là.

- Je vais y aller, dit Lupin comme s'il avait entendu le cours de ses pensées.

Il marcha jusqu'à la porte d'un pas lent et lourd, posa la main sur la poignée et se retourna :

- Si Harry a besoin de discuter, il peut compter sur moi.

Il n'attendit pas de réponse et s'en alla.

Severus soupira, passa une main sur son front et hésita à se resservir une rasade de vin, voire augmenter les doses. Il se fit violence pour ne pas craquer.

Les mots de Lupin résonnaient encore dans la pièce.

Harry avait certainement besoin de discuter. Et Severus devait admettre qu'il pouvait faire tout son possible, Harry lui cachait parfois des choses. Parce que c'était évidemment idéaliser une relation que de croire qu'un adolescent se confiait sur tout.

Hestia Jones l'avait prévenu.

Elle lui avait aussi répété à de nombreuses reprises qu'elle se tenait présente pour échanger avec Harry si besoin.

Severus soupira. Incertain de la conduite à tenir.

Mais Harry avait besoin d'aide.

Il mit sa fierté de côté, prit un parchemin et écrivit une lettre succincte à la sorcière.

oOo

Sirius avait ouvert grand les fenêtres. En haut de cette tour, dans la chambre côté Est, il pouvait voir le soleil se lever. L'air frais lui caressa le visage et il ferma les yeux.

Comme une vieille amie, la paix s'empara de lui.

Depuis trois jours, il réalisait les mêmes gestes chaque matin. Observer le parc, la nature, les sombrals qui volaient au-dessus de la forêt interdite. Pour la première fois en trois jours, aucune larme ne coulait sur ses joues. Pour la première fois, il croyait enfin à sa remise en liberté prochaine.

Il avait confiance en l'avenir.

Pour la première fois également, il se sentait en forme. Alors qu'il avait passé les deux dernières journées à dormir, manger, pleurer et lire la Gazette du Sorcier, une envie de courir à toute vitesse dans le parc lui démangeait les jambes.

Mais Albus Dumbledore avait été clair. Sirius ne devait pas sortir de cette tour. Pas avant le procès.

De ce procès, il en rêvait toutes les nuits depuis que Peter Pettigrow avait été arrêté. Ses rêves tournaient souvent au cauchemar. Pour se consoler, il s'accrochait à Dumbledore et son air confiant. Et puis, il avait hâte de retrouver son ami d'antan et faire plus ample connaissance avec Harry.

De cela, il en eut l'occasion dès la récréation du matin. La cloche avait sonné et les élèves faisaient un tel raffût dans le parc que Sirius les entendait jusque dans la tour. C'était du bon bruit. La vie, la joie, l'innocence.

On frappa à la porte et Sirius se raidit aussitôt.

Albus Dumbledore l'avait quitté le matin même. Remus devait certainement encore se remettre de la pleine lune.

Cela devait être donc soit Harry, soit un agent du Ministère qui venait l'embarquer pour un procès. La gorge nouée, il parvint à s'approcher de la porte et l'ouvrir.

Devant lui se tenait Harry. Ses grands yeux verts le dévisageaient avec bienveillance. A ses côtés, Ron et Hermione souriaient.

- Bonjour les enfants, dit-il d'une voix rauque.

Son cœur tambourinait dans sa poitrine. Merlin que c'était bon d'avoir son filleul en face de lui et en bonne santé ! Il les invita à entrer, ouvrant la porte plus franchement. Il leur proposa des biscuits ainsi que du thé et ils s'installèrent à la table, près de la fenêtre.

- Vous n'avez pas cours ? demanda-t-il davantage pour faire la conversation que par surveillance.

- On est censé avoir Défense mais le professeur Lupin est encore convalescent, expliqua Harry. Et puis c'est la semaine des examens.

- A mon époque, lors de cette semaine, en dehors des examens, les professeurs proposaient des cours de préparation. Est-ce toujours le cas ?

- Oui, mais hormis Hermione, aucun de nous n'y va, déclara Ron qui avalait un troisième scone.

Sirius éclata de rire. Il s'installa plus confortablement et mangea à son tour avec l'impression que tout avait bien plus de goût. Ce fut facile de discuter avec le trio.

L'amitié entre Ron et Harry lui rappelait celle qu'il avait eue avec James. Hermione Granger semblait avoir le rôle de Remus. Merlin merci, ni Ron, ni Hermione n'avaient de point commun avec Peter.

- Si on allait dehors ? proposa Sirius sans réfléchir.

- Allons-y ! lança Ron en se levant d'un bond mais Harry et Hermione échangèrent un regard.

Sirius fronça les sourcils. Harry avait l'habitude d'aller dans la forêt interdite, que pouvait-il craindre ?

- Tu n'as pas le droit de sortir, expliqua finalement son filleul d'une voix prudente.

Il avait l'impression de voir Lily et Sirius n'en fut pas vraiment enchanté.

- Tu ne vas pas me dire que tu crains une punition quand même ?

Harry secoua la tête vivement, le regard dur.

- C'est pour toi que j'ai peur ! lâcha-t-il.

Sirius resta cloué sur place, les yeux ronds. Il chercha ses mots, tentant de rassurer Harry, que rien ne lui arriverait mais Ron vint à son secours aussitôt :

- Harry, on est à Poudlard ! Il ne pourra rien arriver à Sirius. Il suffit simplement qu'il se transforme en chien et le tour est joué.

- La condition d'animagus de Sirius n'est pas connue mais si on nous voit avec un chien…

- Et alors ? coupa Ron. Bon sang Hermione, Sirius est resté douze ans enfermé dans la pire prison qui existe sur cette Terre. Il peut bien sortir une petite demi-heure dans le parc !

Harry, totalement convaincu, se leva aussitôt. Sous la pression du regard de ses amis, Hermione suivit le mouvement, dans un sourire inquiet.

- J'ai échappé aux détraqueurs, ce ne sont pas quelques élèves qui vont me faire peur ! Bref, appelez-moi Patmol ! rigola-t-il avant de se changer en chien.

Retrouvant ses sensations canines, il ressentit les émotions des adolescents : peur, joie, excitation. Il s'approcha de son filleul qui posa sa main sur le sommet de sa tête avant de sortir du bureau.

Se balader dans Poudlard demeurait un jeu d'enfant. A Azkaban, quand les nuits étaient froides et sombres, pour tenir le coup, Sirius se voyait gambader dans le château en présence de James et Remus. A cet instant, grisé par le bonheur, il avait l'impression d'être dans un de ses nombreux rêves éveillés.

- Un petit tour dans le parc Patmol ? demanda Harry dans un sourire.

Sirius aboya si fort que les tableaux crièrent d'agacement et que les élèves qui ne l'avaient pas encore remarqué, se retournèrent sur son passage.

Il prit ses pattes à son coup et détala dans les couloirs de l'école, empruntant de nombreux passages secrets au plus grand bonheur du trio.

Cavalant à travers le parc, le rire d'Harry résonnait en une douce mélodie dans ses oreilles. Le vent rafraichissait sa truffe, l'herbe lui chatouillait les pattes et le soleil éblouissait le parc. Sans réfléchir, Sirius vira à quatre-vingt-dix degrés et fonça droit vers le lac de Poudlard. Puis, d'un gigantesque bond, il plongea droit dans l'eau dans un plat tonitruant. Lorsqu'il émergea, il chercha son filleul du regard qui était plié de rire, sur les berges du lac. Son meilleur ami se déchaussait déjà pour tremper ses pieds. Il aboya avec force, intimant aux deux autres à le rejoindre.

Sirius courait à toute vitesse, éclaboussant le trio d'or qui se prit au jeu. Plusieurs curieux les observaient mais aucun n'osait s'approcher.

Du moins, jusqu'à ce que la cloche sonne.

Le parc se vida de la majorité de ses élèves. Seuls ceux qui n'avaient pas d'examen profitaient des rayons du soleil.

Hermione retourna sur la terre ferme, se sécha d'un geste de baguette et fit de même pour Harry et Ron. Sirius se contenta de secouer ses poils et d'éternuer lorsque les gouttes d'eau lui chatouillèrent la truffe.

La jeune fille, tête pensante et sérieuse, ouvrit un livre et interrogea ses amis dans l'optique d'une dernière révision pour l'examen de Sortilèges.

- Hermione, l'examen est dans une heure, il est trop tard pour réviser ! grinça Harry qui s'allongea dans l'herbe aux côtés de Sirius.

- Il n'est jamais trop tard !

- Harry a raison, tout se mélange dans ma tête avec tes questions.

Sirius commençait à s'assoupir, son corps anesthésié par la chaleur des rayons du soleil. Il aurait pu basculer dans un sommeil sans rêve s'il n'avait pas senti une mauvaise énergie s'approcher.

Il identifia aussitôt les émotions du sorcier avant de le voir : jalousie, envie, malveillance.

- En même temps, il n'y a pas grand chose à mélanger dans ta tête Weasmoche.

L'ambiance devint électrique. Sirius n'avait pas ressenti autant de mauvaises émotions depuis Azkaban et cela l'oppressa. Si seulement il avait pu se transformer en humain à cet instant et renvoyer son petit cousin sur les roses…

Drago Malefoy était le portrait craché de sa mère si ce n'est qu'au même âge, Narcissa paraissait moins hautaine. Il était entouré de deux grands gaillards, Crabbe et Goyle si ses souvenirs étaient corrects. Harry lui avait tant parlé de ses conflits avec le blond que Sirius le détesta immédiatement.

Il sortit ses crocs, prêts à croquer les cuisses des Serpentard s'ils ne déguerpissaient pas dans la seconde qui arriva. Si Malefoy recula d'un pas à la vue du chien, il ne montra rien de sa crainte. Patmol, en revanche, la sentit et grogna pour la forme.

- Alors c'est vrai ce qu'on raconte ! Potter et ses amis ont un toutou avec eux pour compléter leur équipe de dégénérés ! Tu as raison Weasmoche, c'est plus simple de faire la manche avec un cabot !

Sirius s'approcha à pas de loup, crocs en avant, ignorant les appels à la raison d'Hermione. Finalement, l'air supérieur de Malefoy s'effaça lorsqu'il aboya fort et bondit au plus près de lui.

- Allons-y ! cria l'un des deux gros musclés.

S'il ne faisait plus le malin, Malfoy observa Sirius avec curiosité et crainte avant de suivre ses deux amis en courant.

- Patmol ! lança Hermione. Tu ne sais pas ce dont est capable Malefoy ! Si tu lui avais fait du mal, cela aurait pu aggraver les choses.

Cette gamine était plus adulte que lui. Un peu pénible s'il devait être tout à fait honnête. Pour la bonne cause, il se roula dans l'herbe, usant de son plus bel air innocent.

L'éclat de rire de Harry sonna comme une victoire.

.

- Enfin Sirius, nous vous cherchions partout !

Albus Dumbledore se tenait droit comme un i, le regard sévère. Sirius eut la douce impression qu'il venait de faire un bond dans le passé, pris sur le fait d'une de ses nombreuses blagues. Et comme à l'époque, il se contenta de lancer son plus beau regard de chien battu. Il savait très bien le faire, transformé ou non.

A côté de Dumbledore, une jeune femme aux cheveux fushias attendait, l'air passablement amusé. Elle avait les mêmes iris gris que Sirius.

- Je suis navré monsieur le directeur, je souhaitais simplement passer du temps avec mon filleul.

Dumbledore garda un air impassible et Sirius se sentit comme un petit garçon pris en faute. Le directeur resta silencieux et un malaise commença à se diffuser dans le bureau.

- Cela ne se reproduira plus, ajouta-t-il d'une voix ferme.

A ces mots, Dumbledore sembla satisfait et hocha la tête, signe que l'incident était clos.

- Voici Nymphadora Tonks, présenta-t-il. Elle vient pour prendre votre déposition et votre témoignage sur les évènements. Il faudra tout dire, ne rien omettre et faire confiance.

Sirius retint une grimace. C'était facile à dire !

- Je vous laisse.

La jeune femme s'installa au bureau et invita Sirius à faire de même dans un sourire bienveillant. Elle ouvrit un calepin et une plume d'enregistrement apparut.

- Etes-vous Sirius Orion Black, né le 3 novembre 1959, fils d'Orion et de Walburga Black ?

- Oui, déclara-t-il tendu.

- Je suis Nymphadora Tonks, Auror en dernière année de formation et je vais procéder à votre interrogatoire dans le cadre de l'affaire Peter Pettigrow.

- On m'envoie une Auror en formation ?

Le visage de la jeune femme s'illumina dans un sourire joueur.

- C'est moi qui ait demandé, déclara-t-elle. Mener à bien un interrogatoire fait partie des actions à réaliser avant la fin de la formation. Et puis… Mieux valait une nouvelle tête pour recommencer sur de bonnes bases, vous ne croyez pas ?

Sirius offrit un sourire amusé à son tour. Effectivement, il aurait été très malvenu de lui mettre un vieil Auror qui l'avait arrêté à l'époque sans même un procès.

Il se détendit et l'interrogatoire put commencer.

Cela ne fut pas une partie de plaisir. Il fallut tout raconter depuis le début. De son premier jour dans le train le menant à Poudlard jusqu'à l'arrestation de Pettigrow quelques jours plus tôt. L'Auror proposa plusieurs fois de faire des pauses, força Sirius à boire un peu d'eau et de reprendre ses esprits quelques minutes.

Il passa par toutes les émotions, la colère, la tristesse, la peur.

Nymphadora Tonks était d'une douceur et d'une bienveillance telle que Sirius n'avait plus savouré depuis longtemps. Andromeda avait fait un excellent travail.

Lorsqu'ils arrivèrent à la fin du récit, la cloche annonçant le dîner sonnait. Par réflexe, le ventre de Sirius gargouilla et la jeune femme rigola franchement.

- Je pense que nous avons tout.

- Merci, déclara-t-il aussitôt. Merci pour votre gentillesse. Je n'avais pas été traité de façon si humaine par des Aurors depuis…

Sirius laissa sa phrase en suspens. En réalité, depuis son arrestation et qu'il avait eu à faire à eux, Sirius n'avait jamais été considéré comme un humain aux yeux de l'autorité magique.

- C'est normal, dit simplement Tonks.

- Quand aura lieu le jugement ? demanda Sirius, la question lui brûlant les lèvres.

La sorcière dont les cheveux venaient de passer du fushia au brun se tortilla sur sa chaise.

- Le plus rapidement possible. Les faits sont là. En revanche…

Sirius sentit son coeur tambouriner dans sa poitrine et son estomac se contracter.

- Il y aura aussi votre jugement.

- C'est une blague ? souffla-t-il.

- Malheureusement non, dit-elle en secouant la tête. Vous vous êtes échappé d'Azkaban et vous êtes un animagus non déclaré. C'est hors-la-loi.

- Et enfermer quelqu'un sans jugement, qu'est-ce que c'est ?

La visage de la jeune femme se referma et elle reprit contenance. Pourtant dans ses yeux, Sirius voyait bien qu'elle n'en pensait pas moins.

C'était injuste de s'en prendre à elle. Il baissa alors la tête et ferma les yeux, cherchant à se calmer.

- Ne vous inquiétez pas, je suis certaine que vous serez innocenté.

Puis, elle se leva et prit congé.

Lorsque la porte claqua, Sirius s'autorisa à crier de désespoir.

.

Quand un plateau repas apparut sur son bureau, Sirius ne chercha même pas à voir ce qu'on lui proposait comme dîner. Il demeura assis au bord de la fenêtre, les genoux repliés contre son torse. Le ciel dégagé brillait d'étoiles et la lune se reflétait sur le lac noir.

- Salut, lança une voix timide.

Sirius se retourna. Il ne l'avait pas entendu.

Dans l'encadrement de la porte se tenait Remus. Comme après chaque pleine lune, la fatigue se lisait sur son visage.

Sirius se mit sur ses jambes, la bouche entrouverte, savourant pleinement cet instant.

Ils s'observaient. Les deux Maraudeurs restant. Les deux innocents, les deux perdants.

Le sourire jusqu'aux oreilles, Sirius enjamba les mètres qui le séparaient de son vieil ami et le prit dans ses bras.

Il le serra contre lui, incapable de retenir ses sanglots de bonheur. L'odeur de Remus n'avait pas changé. Boisé et chaleureuse, Sirius se rendit compte à quel point elle lui avait manqué. Il aurait pu s'endormir comme ça, debout au milieu de cette tour, tant il était apaisé.

- Sirius…

- Oh Remus, tu m'as tellement manqué, craqua-t-il, le visage enfoui dans l'épaule de son ami. Ils veulent encore me faire un procès.

- Pour t'innocenter ?

- Non, parce que je me suis évadé d'Azkaban et que je suis un animagus non déclaré !

Remus se raidit. Sirius savait déjà quel cheminement de pensée s'activait dans la tête de son ami et il l'arrêta immédiatement, se redressant et le prenant par les épaules pour l'observer droit dans les yeux.

- Ce n'est pas de ta faute. On va s'en sortir, dit-il déterminé.

Puis, voyant l'air fatigué de son ami, il ajouta :

- On devrait manger quelque chose.

Sirius bougea les deux gros fauteuils pour les positionner près de la fenêtre. Ainsi, ils pourraient toujours regarder les étoiles. Puis, il apporta le plateau repas qu'il n'avait pas touché.

Une pile de sandwichs apparut soudainement complétant la soupe de légumes.

- Tu vois Lunard, même le château veut qu'on soit ensemble !