Elle se leva et se dirigea vers le bureau du directeur.

Au fur et à mesure qu'elle avançait vers sa destination, une tension de plus en plus intense s'empara d'elle. Elle arriva finalement devant le bureau du directeur avec quelques minutes d'avance. Elle resta figée devant la gargouille, réfléchissant à la suite des événements. Son père était sûrement déjà arrivé. Elle avait l'impression d'avoir atteint un point de non-retour, aucune possibilité de faire marche arrière… La peur lui emprisonnait les sens, elle n'arrivait plus à faire le moindre petit geste. Elle prit une grande inspiration, comme si elle venait juste de se rappeler comment respirer, ferma les yeux et donna le mot de passe.

- Ah ! Helena ! Pile à l'heure, annonça le directeur lorsqu'elle entra dans son bureau.

- Bonjour monsieur.

Elle remarqua l'absence de son père et interrogea son professeur du regard.

- Il ne devrait pas tarder, lui répondit-il comme s'il lisait dans ses pensées. Alors, Severus m'a dit que tu étais très douée pour l'occlumancie.

- Oui monsieur. En même temps, je pense que ce n'est pas difficile de trouver la motivation lorsque votre propre père essaie d'entrer dans vos pensées les plus intimes, sourit-elle.

- En effet… Je t'en prie, assieds-toi.

Elle prit place face au bureau et ils attendirent quelques minutes en silence. La porte s'ouvrit et Snape entra.

- Désolé du retard, j'ai eu quelques affaires à terminer.

- Ce n'est pas grave Severus, venez donc vous joindre à nous.

Il vint prendre place à la droite de sa fille.

- Donc… Helena, je pense que tu as compris pourquoi nous sommes réunis ici ?

Elle hocha de la tête en déglutissant difficilement.

- Très bien. Avec Severus, nous avons planifié la date de ta rencontre avec Voldemort. Nous avons pensé que le plus tôt serait le mieux.

- Nous irons ce week-end, conclut Severus.

Elle les regarda tous les deux avec stupéfaction.

- Ce week-end ? Dans deux jours ?

- Ne t'inquiète pas Helena, je serai tout le temps avec toi, je ne te lâcherai pas une seconde. Par contre j'ai une mauvaise nouvelle… Je n'ai pas pu faire en sorte que Bellatrix soit absente. Elle colle le Seigneur depuis qu'elle est revenue comme un Niffleur à une pièce d'or. Je ne te promets rien mais je vais essayer de faire en sorte qu'au moins elle n'entre pas quand nous discuterons avec lui.

Elle n'arrivait plus à bouger ou à réfléchir. Comment allait-elle se sortir de ce bazar ?

- Voici le plan, reprit le directeur. Vous entrez directement pour lui parler et revenez immédiatement après pour me faire un rapport. Fais bien attention à ne pas trop le regarder droit dans les yeux, et veille à ne jamais l'appeler par son nom. Le mieux serait de t'adresser à lui directement par « Maître » d'accord ?

- D'accord, répondit-elle en essayant d'assimiler toutes les informations.

- Je ne peux te promettre à cent pour cent que tout se passera bien, mais c'est fort peu probable que quelque chose de désagréable ne se produise.

- Je ferai attention.

- Très bien, dans ce cas, nous nous reverrons samedi soir dans ce bureau. Tu peux partir, nous avons encore des choses à discuter avec Severus. Bonne soirée.

Elle se leva et se dirigea vers la sortie. Son cœur battait comme s'il sentait le danger se rapprocher. Elle monta dans les étages afin de se rendre à son dortoir, perdue dans ses pensées. Une main se posa sur son épaule, ce qui la fit sursauter violemment.

- Désolé de t'avoir fait peur, sourit Drago. Je t'ai appelé plusieurs fois mais c'est comme si…

Il s'arrêta en voyant son visage pâle, elle avait l'air au bord de la nausée.

- Tu vas bien ? s'inquiéta-t-il.

- Oui c'est rien, ça va passer…

- Tu sais que tu peux tout me dire Helena.

- Je sais Drago. Mais là, tout de suite, j'ai pas vraiment envie de parler.

Elle vit l'expression peinée sur son visage.

- Écoute, tu commences à me connaître mieux que personne, je ne veux pas te blesser mais j'ai vraiment besoin de réfléchir… et de dormir. Tu sais que tu es devenu mon meilleur ami ici non ? lui sourit-elle.

- Ah bon ? répliqua-t-il en faisant mine d'être choqué. C'est pas Potter ou Weasley ?

- Arrête tes conneries, ria-t-elle en lui donnant un coup de coude dans les côtes. T'es vraiment fatiguant des fois.

- Je sais, pourquoi on s'entend si bien à ton avis ? On est pareil, la taquina-t-il en lui faisant un clin d'œil.

Elle lui donna un coup derrière la tête tout en riant. Il passa son bras sur ses épaules et ils discutèrent encore quelques minutes tout en marchant quand ils entendirent des bruits de pas derrière eux. C'était Harry, Ron et Hermione qui devait sûrement se rendre eux aussi à la salle des Gryffondor. Ron et Harry jetèrent un regard mauvais à Drago pendant qu'Hermione regardait attentivement Helena.

- On ne t'a pas vu au dîner, tu vas bien ? lui demanda Hermione.

- Oui, je devais seulement demander quelque chose à mon père, et puis j'ai dîné avec Neville.

- T'as mangé avec Longdubat ? s'étonna Drago avec une expression presque méprisante.

- Oui Drago, j'ai mangé avec Neville, répondit-elle en insistant sur son prénom. C'est une personne adorable et si tu arrêtais de l'emmerder deux minutes, peut-être que tu t'en rendrais compte.

- Bon on y va ? s'impatienta Harry.

- C'est ça Potter, bonne nuit ! répliqua Drago.

Avant même que Harry n'ait pu enchérir, Helena prit la parole.

- Mais t'as quoi ce soir Drago ? T'as tes chaleurs ou quoi ? s'agaça-t-elle en enlevant son bras de ses épaules.

- Non, il est juste fidèle à lui-même mais tu dois avoir des œillères pour ne pas le voir, cracha Harry.

Les deux jeunes hommes se regardaient comme s'ils attendaient cette occasion depuis longtemps pour se battre.

- Je ne sais même pas comment j'ai pu un jour te défendre Potter… Tu as tellement la tête enflée que je me demande comment elle tient encore sur tes épaules.

- Me défendre ? Tu plaisantes j'espère, c'était quand ? Dans tes rêves ?

Drago interrogea Helena du regard sans comprendre. N'avait-elle pas rapporté leur discussion à Harry ?

- Laisse tomber Drago, il n'a pas besoin de savoir, c'est du passé maintenant…

Elle était épuisée. Elle dormait mal depuis plusieurs jours et cette dispute stérile l'énervait tellement qu'elle commençait à avoir la tête qui tournait. Quand elle commença à chanceler, Drago la rattrapa en mettant son bras derrière son dos.

- Tu es sûre que ça va ? Tu es toute pâle et tu ne tiens pas debout !

- C'est rien, juste la fatigue, le rassura-t-elle.

- Eh ben, Malefoy qui s'inquiète pour quelqu'un ça fait bizarre, s'exclama Ron.

Hermione lui mit un coup de coude pour le faire taire mais c'était sans compter sur Harry qui en rajouta.

- Tu parles qu'il s'inquiète, il fait surtout tout pour arriver à ses fins. La méthode brutale a pas fonctionné alors il essaie la douce, c'est l'une des rares qui n'a pas encore mise dans son lit, dit-il avec mépris.

- Non mais t'es pas bien ou quoi ? Tu te rends compte de ce que tu dis ? s'énerva Drago.

- Parfaitement, et je suis sûr de moi. Tu n'as d'intérêt que pour ta petite personne !

- Et si toi tu étais moins con et moins aveugle, tu n'aurais peut-être pas gâché ta chance avec elle. J'en reviens pas que tu sortes autant de débilités par jalousie mal placée sérieux, et pourtant je sais déjà à quel point tu es un crétin ! cria Drago. Finalement, tu ne la mérites pas !

Helena n'en pouvait plus de les entendre se chamailler. La fureur monta tellement en elle qu'elle sentit une chaleur à laquelle elle était bien trop habituée couler de son nez… Le sang commença à tomber sur sa robe de sorcière et elle mit sa main sur son visage pour bloquer l'écoulement.

- Vous avez fini de vous chamailler comme des gamins de deux ans ?

Elle s'échappa de l'étreinte de Drago.

- Je vais rentrer, je suis trop fatiguée… Je peux te laisser seul sans que tu laisses ta testostérone prendre le dessus et faire un truc que tu regretteras ?

Il la regarda avec un sourcil levé.

- Tu me prends pour qui ? Pour Potter ?

- Arrête tes blagues à deux mornilles qui ne font rire que toi.

- D'accord, d'accord. Je te raccompagne ou tu préfères qu'Hermione prenne le relais.

Le trio resta un moment à le regarder bouche bée. C'est la première fois qu'ils entendaient le Serpentard appeler la jeune fille par son prénom.

- Je vais y aller avec Mione si ça te dérange pas. On discutera plus tard.

- Pas de soucis.

Il se tourna vers elle.

- Prends soin d'elle s'il te plaît.

Helena était tellement fière de son comportement.

- Bonne nuit Drago, dit-elle en l'embrassant sur la joue. Et merci pour tout.

- À demain, promit-il en rougissant légèrement.

Elle s'avança vers Hermione et partit avec elle vers la salle commune en laissant Harry et Ron derrière pendant que Drago se dirigeait vers les cachots.

- Eh ben dis donc Helena… Il a complètement changé depuis que vous êtes amis… Je ne pensais pas cela possible un jour, s'étonna Hermione.

- Il fait beaucoup d'efforts pour passer par-dessus les a priori dans lesquels il a grandi, crois-moi.

Elle retira sa main de son nez pour vérifier que tout était en règle et vit que le saignement s'était arrêté.

- Je te demande une dernière fois mais… tu es sûre que tout va bien ? C'est la première fois que je te vois dans un état pareil…

- Oui Mione, t'inquiète pas, juste toute la fatigue que j'ai accumulée ces derniers temps.

- D'accord.

Elle remarqua qu'Hermione n'était pas convaincue mais elle ne pouvait rien lui dire de plus. Une fois arrivées dans leur dortoir, Helena prit rapidement une douche et se glissa dans son lit. Elle était épuisée, c'était la première fois qu'elle entrait dans un état d'anxiété et de stress si intense. Et le comportement des garçons, enfin surtout celui de Harry, n'arrangeait rien. Elle n'en pouvait plus de ses piques permanentes concernant son amitié avec Drago. Mais apparemment, cela ne lui rentrait pas dans le crâne. Pourtant, elle lui avait bien fait comprendre que ce n'était plus son problème mais c'est comme s'il voulait absolument s'accrocher et au lieu de l'impressionner, cela l'énervait. Plus il avait ce comportement, plus elle voulait s'éloigner de lui. C'était comme s'il lui demandait de choisir entre Drago et lui. Malheureusement pour lui, plus le temps passait, plus sa conduite la rapprochait de son récent meilleur ami.

Ces derniers temps, elle passait beaucoup de temps avec Drago. Ils discutaient de choses et d'autres, riaient, mais parlaient aussi de leurs histoires personnelles, de leurs blessures. Elle comprenait maintenant beaucoup mieux le comportement que le jeune homme avait eu au début de l'année. Il lui avait confié un jour qu'Helena était sa première « vraie » amie fille. En effet, son petit groupe de Serpentard le suivait partout mais il ne s'était jamais livré à eux comme il l'avait fait avec elle, la seule autre personne dont il était proche étant Blaise Zabini. Elle avait été contente pour lui d'apprendre qu'il avait récemment trouvé une petite amie mais il lui avait raconté que la jeune fille était jalouse de la complicité qu'il avait avec Helena. Pourtant, depuis qu'ils étaient devenus amis, il n'y avait jamais eu d'ambiguïté entre eux. Elle était heureuse d'avoir trouvé en lui une personne de confiance, une amitié si inattendue. Quand ils repensaient au début, à leur rencontre, ils riaient souvent de la façon dont ils s'étaient pris la tête. Helena lui avait aussi avoué qu'elle avait cru qu'Hermione était sa petite-amie, ce qui l'avait amplement diverti pour la journée. Elle s'endormit avec un sourire sur le visage à l'évocation de ce souvenir.

Samedi matin… C'était déjà samedi matin… Elle n'avait presque pas dormi de la nuit, les seuls moments où elle avait fermé les yeux étaient peuplés de cauchemars. C'est donc difficilement et silencieusement qu'elle se leva et s'habilla. Les autres filles dormaient à poing fermé et elle ne voulait surtout pas risquer de les réveiller. Elle avait menti à tout le monde en disant qu'elle devait partir avec son père pour passer un peu de temps ensemble. La seule personne à qui elle n'avait pu le faire était Drago, elle lui avait seulement dit qu'elle lui raconterait en revenant, ce qui l'avait inquiété. De toute façon, si ce n'était pas elle qui le faisait, ce serait de son père ou d'autres Serpentard dont les parents étaient Mangemorts et elle préférait qu'il l'entende de sa bouche.

Elle descendit en direction de la porte d'entrée et hésita à aller prendre un petit déjeuner.

- Tu vas bien ?

Elle se retourna pour faire face à son père. Il avait l'air d'avoir aussi bien dormi qu'elle. De profondes cernes apparaissaient sous ses yeux et une certaine lassitude se lisait dans son regard.

- Je te mentirais en disant oui…

- Moi non plus. Tu as mangé ? s'enquit-il.

- Non, et je ne pense pas que j'irai… Je ne pense pas pouvoir avaler quoi que ce soit.

- Je comprends… On devrait partir directement alors avant que quelqu'un ne vienne commencer à poser des questions.

Elle suivit son père à l'extérieur et lui emboîta le pas jusqu'au portail. Une fois à l'extérieur de l'enceinte de Poudlard, il s'arrêta et se tourna vers elle.

- Tu te souviens bien de tout ce que tu dois faire ?

- Fermer mon esprit, ne pas le regarder droit dans les yeux, l'appeler « Maître » et surtout rester impassible, récita-t-elle. Le dernier point étant le plus dur… Comment fais-tu pour ne jamais laisser paraître tes sentiments ?

- Tu dois te concentrer sur ta mission, sur ton but. Je serai à tes côtés tout au long donc ne t'inquiètes pas. Tu es prête ?

- Pas vraiment, mais on a pas le choix, répondit-elle avec un faible sourire.

- Tu as déjà transplané avec quelqu'un ?

- Jamais.

- D'accord, tu dois bien te tenir à moi. La première fois est toujours très désagréable donc reste concentrée.

Elle s'accrocha fermement à son bras et ils commencèrent à tourbillonner très rapidement sur eux-mêmes. Son père n'avait pas menti, la sensation était plus que déplaisante. Elle avait l'impression que l'on essayait de la passer de force dans un petit conduit, que ses poumons étaient comprimés et qu'elle suffoquait. Puis tout à coup, elle réussit enfin à faire rentrer l'air dans ses poumons. Elle ouvrit les yeux et eut du mal à tenir sur ses jambes.

- Ça va ? demanda Severus.

- Ça pourrait être pire.

- Nous sommes arrivés, annonça-t-il sombrement.