09/08/23 NDA : Bonsoir ! J'ai pris tout mon temps comme on dit, mais le voilà, le chapitre suivant. J'espère qu'il vous plaira, parce qu'il contient quelques révélations sur ce que je prévois ensuite.

Une bonne lecture à tous, et n'hésitez pas à lâcher des reviews !

Chapitre 11 : Un guerrier se relève toujours.

Comment les choses étaient-elles devenues si compliquées ? Il l'ignorait. Pourtant, alors qu'un gobelin lui ceinturait la taille pour lui briser les os, Link gigotait comme un vers pour se sortir de ce mauvais pas. Midona l'aidait de son mieux, d'autant que les insectes qui avaient volé des perles de lumière trainaient encore, au milieu de ce désastre.

Ce qui le dérangeait, c'était qu'il ne voyait plus Auryn.

Le début de leur périple s'était voulu plus calme que ce à quoi il s'était attendu. Hormis les attaques de chauves-souris maudites et de plantes carnivores, rien ne les avait détournés des insectes dévoreurs de lumière. En fait, c'était même carrément facile, à coté des trois monstres tentaculaires qu'ils avaient dû occire avant de rejoindre l'esprit de la lumière souffrant.

En traversant la forêt à la poursuite des insectes, ils s'étaient retrouvés bloqués devant un étrange marais brumeux, et avant d'avoir eu la possibilité de tester en s'y engouffrant, Auryn avait jeté une chauve-souris dedans. Cette dernière s'était débattue, puis laissé faire, comme totalement défoncée par les vapeurs. Il avait eu la nausée à la pensée que cela aurait put être lui. Mais ils avaient trouvé le moyen d'avancer.

Sous forme de loup avait été plus que pratique. Il avait bondi sur diverses branches et rochers dépassant du marais, jusqu'à la berge suivante. Et puis, il s'était rendu compte qu'Auryn ne pouvait pas traverser. Il était revenu, tout bredouillant d'excuses, avant de lui proposer de se joindre à Midona sur son dos. Cela avait été plus difficile que prévu, car même s'il avait largement la force de le faire, son équilibre était totalement modifié. Et ils avaient manqué de passer par-dessus bord lors de son atterrissage sur la cime d'un arbre.

En arrivant de l'autre coté du marais, deux autres insectes les attendaient, grouillant sous terre. Link les avait dénichés, et Auryn s'était chargé de les abattre à coup d'épée, usant de l'arme étrange qui se trouvait dans son dos. Ils en avaient attrapé dix. Ce qui permettait de remplir plus que rapidement le calice donné par l'esprit de la lumière.

Et puis… Ils avaient été séparés par deux groupes de gobelins à la sortie du marais.

Link poussa un grognement guttural et se retourna, écrasant le gobelin qui l'avait maintenu au sol jusque-là. Se dépêchant de se relever sur ses quatre pattes, il fit volteface pour aller égorger la créature d'un coup de griffe. Mais à peine ce dernier rendait son dernier souffle, qu'un autre lui donnait un épais coup de massue dans le flanc. Poussé du futur cadavre avec violence, le loup couina de douleur.

Un autre coup, cette fois, la massue était plantée d'une corne, et elle le trancha à hauteur de l'épaule. Le sang éclaboussa la pelouse jaunit, et Link roula sur le côté, haletant et douloureux. Midona se plaça devant lui, en rempart, avec l'épée qu'ils avaient chipé au village, tout en sachant pertinemment qu'elle ne pourrait pas lutter contre les gobelins. À 7 contre une, c'était impossible.

L'orage tonna au-dessus de leur tête.

Et il l'entendit. Ce chant qu'il avait cru rêver, pendant des mois. Une voix inquiète et colérique à la fois, féminine, qui semble tourner dans un refrain rythmé. Il l'entendait là. La voix résonnait, forte, claire, plus haut, vers le sommet du tunnel dans lequel ils auraient dû s'enfoncer par la suite. L'orage gronda plus fort encore. Un éclair zébra le ciel. Les gobelins levèrent la tête comme un seul être, stupéfait par cette nature sauvage qui se rebellait.

La foudre fracassa le sol entre eux et les créatures, soulevant des mottes de terre violemment et les éjectant de là.

Midona se retourna, lâchant l'épée et le forçant à se relever pour l'éloigner, quitte à revenir vers la berge du marais. Il n'y avait pas le choix. L'orage devenait fou. Relevant la tête tout en suivant la petite twili, Link chercha Auryn du regard. Et son cœur rata un battement en comprenant.

Perché sur la crète, au-dessus du tunnel, l'épée étrange levée bien haut, c'était elle qui chantait cette mélodie infernale. Un coup de massue de troll lui aurait paru moins violent que cette réalisation. Ce chant des tempêtes qu'elle utilisait présentement pour foudroyer les gobelins qui s'en étaient prit à eux, elle l'avait déjà employé autrement. Ailleurs. Presque quatre mois auparavant, dans cette même forêt, alors qu'il partait à sa recherche après l'altercation qu'elle avait eu avec Iria.

Et devant ce spectacle funeste, l'hylien sous sa peau de loup se demanda si cet orage était volontaire, ou s'il s'agissait d'un trop plein d'émotion qu'elle avait mal évacuée. Voulait-elle raser le village à l'époque ? Il n'osait même pas lui demander.

« Loup, bouge de là ! Ne reste pas au milieu pour qu'elle puisse les griller ! Aller ! » Hurlait Midona dans ses oreilles.

Mais Link arrivait à peine à bouger ses membres, tout endoloris, blessé, il sentait sa patte avant droite s'engourdir. Il fit au mieux, incapable de détacher son regard de sa compagne perchée, et du chant qui filtrait d'entre ses lèvres.

Larguant le loup dans un coin, Midona jeta un coup d'œil sur les hauteurs et jura. Derrière la fausse prophétesse – car oui, la Twili se doutait bien qu'une personne avec autant de magie n'était pas qu'une vulgaire oracle – Un gobelin mastoc approchait, levant sa hache pour sectionner en deux la jeune femme. Etait-elle assez folle pour traverser un champ d'éclair et voler à son secours ? Ce n'était qu'une hylienne étrange… Oui… Mais… C'était la compagne du loup, et si elle la laissait mourir, il ne bougerait plus ses fesses pour l'aider.

Puis, c'était aussi un mystère à résoudre. Une fausse prêtresse, avec des pouvoirs pareils, une épée aussi dangereuse, et cette impression de la connaitre… Non. Midona ne pouvait pas laisser passer ça.

Elle fila, esquivant les éclairs qui foudroyaient le sol et soulevait l'herbe et la terre, ignorant les cris des gobelins qui se faisaient sauter la cervelle, et tendit les bras en avant pour pousser la blonde de la trajectoire de la créature. Les deux filles roulèrent dans l'herbe, et si la tempête se calma légèrement, elle ne cessa pas pour autant d'agir.

Midona se retrouva couchée sur le bras d'Auryn, et, tentant de se relever pour lui dire de fuir et vite, elle s'appuya sur la lame opaline de l'épée. Le feu se propagea dans sa tête avec une allure infernale, et des larmes lui montèrent aux yeux. Il y avait de la lumière partout, des faisceaux blancs qui irradiaient avec violence. Sans qu'aucune ombre ne puisse subsister nulle part.

« Par les larmes d'Hylia et la force de Din, naquit l'élue. Elle sera guidée par les étoiles, et déversera le Saint Graal sur les trois royaumes, pour que la paix et l'équilibre reviennent à nouveau. Et de sa vie elle paiera pour les pêchés autrefois commit par ceux qui ont brisé leur promesse envers les déesses. »

Midona l'entendait, ça se répétait, en écho, de tous côtés. Dans sa tête, derrière, devant. Des chœurs d'hommes, de femmes, de créatures, elle ne savait pas. Les mots allaient et venaient, sur tous les timbres, avec toutes les intonations possibles. La Twili essaya de couvrir ses oreilles pour faire cesser le vacarme, mais sans succès, comme si elle était incapable de bouger. Et elle l'était. Voulant hurler, ses lèvres restèrent scellées de-même.

Et soudain, le silence.

Ou plutôt, le retour de la tempête, des éclairs et des gobelins. Auryn s'était redressée, saisit de l'épée et avait transpercé la créature maudite en plein ventre. La retirant du corps de l'ennemi, elle essuya la lame dans l'herbe jaune, avant de ranger l'arme dans son fourreau. Elle se tourna ensuite vers la petite monochrome, et lui tendit la main pour l'aider à se relever. Sans un mot.

Midona croisa le regard de la compagne de Link. Rubis unique contre perles turquoise. Elle savait. Cette prophétie, on la lui avait racontée lorsqu'elle était petite, mais sous la forme d'un conte. Une fille de l'ombre et de la lumière venue libérer les royaumes, et s'endormant à tout jamais après cette aventure. Midona avait toujours trouvé que cette histoire était horrible, étant toute petite, elle rêvait encore de liberté, d'aventures et d'amour. La fin de cette guerrière était insupportable pour la petite rêveuse.

Et puis, on l'avait bannie, éjectée de son propre royaume par ce traitre de Xanto. Et elle s'était rendue compte que l'horreur, c'était chez eux. Il n'y avait pas d'amour, pas de joie, pas de liberté. Seulement le pouvoir, et ceux assez dangereux pour s'en emparer. Son instinct ne l'avait pas trompée, Auryn était louche. Et maintenant, elle savait parfaitement ce qu'elle était allée demander à la princesse Zelda.

Je t'en foutrais, des prophétesses ! Pensa la Twili.

La guerrière de l'entre-deux. Fille de l'ombre et de la lumière destinée à mourir pour rétablir l'équilibre entre les mondes. Elle était là à cause d'elle, et du mélange des royaumes. Quoique… Était-elle vraiment cette héroïne ? Pouvait-elle être une usurpatrice qui aurait récupéré l'épée des déesses pour exhausser un vœu ? Comme… Elle ne savait pas. Là, déjà, il était évident que cette Auryn était en deuil, et le loup, son compagnon, refusait de lui dire qui il était. Donc ça pouvait être n'importe quoi.

« On arrête les conneries. Je sais qui tu es. Et ce n'est pas du tout l'histoire que tu nous as servi tout à l'heure. Pourquoi restes-tu avec nous ? » Midona se le demandait. Avait-elle reconnu son compagnon ? Si c'était réellement le cas… Si c'était une usurpatrice, normal qu'elle ne réagisse pas à ce dernier.

Auryn récupéra sa main, la twili n'était visiblement pas décidée à accepter son aide. Le visage, déjà bien fermé depuis le début de leur périple, se figea.

« Ça me regarde, j'ai dit. » Elle avait serré les poings.

« Non, ça nous concerne aussi. Tu te trimballes à nos côtés, et tu veux entrainer le loup, ok, mais maintenant, t'es plus juste une prophétesse qui veut aider. Tu es l'él- » La petite Twili se fit saisir subitement, et la main de la guerrière se posa sur sa bouche pour la faire taire.

« Tais-toi. Tu ne sais absolument pas de quoi tu parles. Ce que tu as entendu ne change rien. J'aiderais de mon côté. Ce qui m'arrive ensuite, c'est mon affaire. » Midona écarquilla les yeux, bien qu'un seul soit visible.

Auryn était vraiment la compagne de Link, elle n'en avait plus aucun doute. La rune sur sa poitrine, la métamorphose du garçon en loup, cette volonté de garder tout pour elle. L'évidence était là. Cette femme se préparait à se sacrifier sans aucune possibilité de retour. Voilà pourquoi elle était prête à aider. Midona voulut parler, quelques secondes après avoir été relâchée.

« Attends ! Tu ne sais pas qui- » Le regard de la blonde la sécha sur place.

« Cette conversation s'arrête là. Tu ne diras plus rien et n'y penseras plus. C'est mon problème, pas le vôtre, fin de l'histoire. Princesse du Crépuscule. » C'était une menace.

Elle le savait.

Et Midona ne pouvait pas se permettre de laisser l'information filtrer. Au même titre que la guerrière de l'entre-deux. Elles se trouvaient désormais devant une impasse. Ni l'une ni l'autre ne pouvait voir son identité révélée, et si la Twili savait ce qu'elle désirait faire pour récupérer son royaume, elle n'avait aucune idée de ce qui se tramait dans la tête de l'autre, si ce n'est une lourde peine. Et ça, c'était dangereux dans un contexte de guerre.

oOoOoOo

Link n'était pas certain de comprendre ce qu'il se tramait. Mais lorsque les deux filles étaient redescendues, elles étaient muettes au possible. Et même Midona ne faisait plus de remarque. Pourtant, la Twili l'aida à se relever et à immobiliser les deux insectes qui avaient esquivé le gros du combat. Auryn les acheva à coup de cimeterre, et les perles de lumière furent saisie pour être relayée dans le calice.

« Il en reste deux… » Annonça le loup d'une voix fatiguée. La plaie sur son épaule était toujours bien là, et même si le saignement s'était arrêté, la croute récente était douloureuse.

« Dépêchons-nous de chopper les derniers, alors. Tu redeviendras humain. » Fit Midona, avant de se rendre compte de ce que ça allait donner. Si Auryn ne réagissait pas plus que ça, le loup s'était crispé. « Et tu pourras porter ces outils ! » Se permit-elle d'ajouter, en montrant le bouclier et l'épée qu'elle transportait.

Sans un mot de plus, Auryn s'engouffra dans le tunnel, suivit de Link et la twili sur son dos. Ce n'était pas très long, comme trajet, pourtant, il eut l'impression que le silence entre eux apportait de mauvaises nouvelles. En un sens, c'était le cas, la tempête d'Auryn le mettait mal à l'aise, et son futur retour à la normale, devant cette dernière, l'angoissait. Il l'avait réalisé à l'instant.

Comment allait-elle réagir en comprenant qu'il était le loup ? Et avec elle tout ce temps ? Serait-elle heureuse ? Ou le verrait-elle comme un monstre ? Son histoire ne tenait déjà pas debout, alors… Il ne savait pas.

Mais pas le temps de se remettre, parce qu'à peine retrouvaient-ils la lumière au bout du tunnel que trois monstres leur tombaient dessus. Plus précisément, Auryn était déjà à terre et une flaque de sang se répandait sous son sarouel. Le tissu blanc commençait déjà à s'imbiber du rouge de la vie. La bête difforme à tête tentaculaire s'agit, et un grand bras vint s'abattre sur le corps déjà blessé.

Jamais il ne toucha sa cible.

Le loup s'était mit en travers dans un bond, éjectant la twili dans le mouvement, et avait saisit le bras dangereux avec sa gueule. Link n'était pas près d'abandonner celle qui faisait battre son cœur, même si une armée de mensonges les séparaient désormais. Tirant sur le membre de toutes ses forces, il parvint à l'arracher et repousser la bête d'un coup de patte.

Un gémissement attira son attention. Auryn était en vie, bien en vie, même, et ce n'est qu'à cet instant précis qu'il se rendit compte que l'odeur qui s'élevait n'était pas ferreuse comme le sang. Tout du moins, pas aussi forte que ce qu'elle aurait dû être.

« Qu'est-ce que ? »

« Ma potion de soin… » Répondit la blonde, en se retournant sur le dos.

La seule chose qu'elle avait de blessé, c'était son bras, dont il apercevait la chaire fumante à travers les déchirures des manches rouges. Il y avait des bris de verre sur l'herbe, et une odeur de plante bizarre. Soudainement hagard, parce qu'il prenait conscience d'avoir réagit de manière totalement impulsive, il réalisa un peu sèchement qu'ils étaient au milieu d'un combat. Une énorme secousse l'envoya rouler plus loin, et il percuta un pont de bois sectionné.

Il jura dans sa gueule, avant de se redresser et de foncer sur l'une des bêtes. L'acier chanta derrière lui. De nouveau en position, Midona les rejoignit, se positionnant sur le dos du loup, après qu'il eut arracher le second bras du monstre. Tenant ses arrières, elle avait sorti les deux cimeterres qui pendaient à sa ceinture.

« Je vais attendre qu'ils soient dans notre sillage pour les immobiliser, vous, vous les occirez, ok ? »

« Ça me va. » Répondit simplement Auryn à la rouquine.

Link resta silencieux mais hocha brièvement la tête. Les deux monstres humanoides leur foncèrent dessus, pendant que le 3e tentait de se refaire une santé. Le trio bougea de concert, et Midona lança un sort qui bloqua les bêtes dans un champ d'un mètre autour d'eux, le blessé comprit. S'ils ne pouvaient pas s'enfuir, ça n'évitait pas pour autant les attaques. Et l'un des monstres envoya son bras violemment sur la guerrière.

Auryn para par le coté droit et envoya son bras gauche fendre la bête d'un revers bien vif. Une large entaille se forma dans la chaire noire de son buste. Pas assez pour terrasser le monstre, mais juste ce qu'il faut pour l'handicaper. Délaissant sur l'herbe sèche un sang noir et gluant, la créature tangua de nouveau jusqu'à Auryn qui le frappa de plus belle. Cette fois, l'arme sectionna l'épaule et fendit le torse de moitié. L'usage du bras était désormais impossible, car une partie du buste pendait lamentablement sur le côté.

Link grogna pendant une seconde, avant de se jeter à la gorge du monstre, broyant ce qu'il supposait être un cou entre ses crocs. Il sentit plus qu'il ne vit, les tentacules qui correspondaient à la tête s'enrouler autour de son encolure. La créature voulait le déloger, et ça emploie la force dans les deux sens. Link couine de douleur, sentant ses muscles se faire lentement mais sûrement tiré vers l'arrière, dans un angle plus que mauvais. Sauf qu'il refuse de lâcher. Il serre encore plus fort et tourne la tête comme il peut.

Un craquement sinistre résonna.

Le monstre qui le tient le relâche brutalement et s'effondre sur lui-même. Une giclée de sang lui vient par derrière, et le dernier des monstres suit les autres au sol. Un portail menant au crépuscule s'ouvrit au-dessus de leur tête et aspira les restes des créatures sur le sol.

« C'était moins une. » Commenta Midona en s'étirant. « T'as vrillé, le loup, hein. »

« Tais-toi. » Répondit Link, encore sous pression.

Il avait eu peur, il le savait. Mais plus Midona l'appelait le loup, et plus il se sentait fébrile. Lorsqu'il allait retrouver son apparence originelle, qu'allait-il se passer ? Déglutissant, avant de s'étouffer en se rappelant du sang qu'il avait dans la gueule, il alla vomir un peu plus loin, franchement pas à l'aise.

« En route… » Enonça Auryn, après avoir remit ses cimeterres à sa taille.

Link suivit d'un pas lent, surveillant ses arrières sans honte, tout en songeant parfaitement à autre chose. Il était inquiet pour elle. Non pas qu'il doute de ses capacités à se défendre, pour le coup, il n'avait aucun doute sur son talent… Mais… Chaque fois qu'elle parlait, ou qu'elle le regardait, il lisait la souffrance dans ses perles turquoise, et ça lui faisait mal.

Sauf que plus il y réfléchissait, et plus l'explication qu'il cherchait prenait sens. C'était son départ qui l'avait plongé ainsi. Sa faute. Ils avaient parlé du mariage, essentiellement à cause du village, mais ils en avaient brièvement parlé. Et quelques jours à peine après qu'il ait été aspiré par le mur du crépuscule, elle portait la rune de l'union à même sa peau.

La traversée du pont en terre se fit sans problème, heureusement, mais aussi sans aucune trace des insectes lumineux. En revanche, l'autel, à l'autre bout, semblait clairement animé.

« Un singe… » Le murmure d'Auryn le laissa troublé.

Elle avait l'air sans défense. Se rappelait-elle des blessures qu'il avait eu à cause des petites bêtes, la veille de son départ ? Probablement. Il lui avait laissé son bracelet de force…Pour que la plaie à son poignet se résorbe. L'avait-elle toujours ? Il voulu regarder, mais les manches rouges l'empêchaient de bien voir.

« Il y a des insectes autour du macaque. » S'amusa Midona en pointant du doigt.

Soupirant, Link se jeta sur le premier, écoutant les appels à l'aide du petit animal, et Midona immobilisa le second, jusqu'à ce que le loup se jette dessus. Les éclats de lumières rejoignirent naturellement le calice prévu à cet effet.

« Je suis sauvée ? » Le petit singe, qui était clairement une guenon, rajusta la fleur accrochée à son oreille, et se précipita sur ses sauveurs, avant de se tourner vivement vers Auryn. « Vous… La princesse de la forêt, c'est vous qui m'avez aidé...»

« C'était normal…» Répondit Link d'une voix qu'il voulut rendre plus douce. Mais peine perdue, et la guenon lui jeta un regard outré.

« Je ne parle pas aux méchants loups. » La petite rousse pouffa de rire.

« Ça a le mérite d'être clair. »

« La ferme, Midona. » Dirent les deux autres en chœur. Mais si Link y vit un signe, Auryn détourna immédiatement son attention, et revint à la petite guenon.

« Que se passe-t-il ? »

« Princesse, alpha, mon mari, il est devenu tout bizarre, et avec l'arrivée des monstres… je… j'ai pris peur vous savez ? » Des larmes coulèrent sur sa figure grise. « J'ai vu les montres emmener les enfants du village, c'était si effrayant… et… Vous m'avez sauvé… Merci… merci… » Et sur ces mots, elle s'en alla vers le cœur de la forêt, ignorant les protestations de la twili, ou les grognements de Link.

« Bon. Maintenant que le macaque débile est parti, et qu'on a récupéré toutes les perles lumineuses, on retourne voir la bébête qui brille ? »

La rouquine n'eut aucune réponse orale, et soupira lourdement. Ce qu'ils pouvaient être ennuyeux, ces deux-là ! Entre l'autre qui déprimait, et le loup qui angoissait comme un idiot. Non vraiment, ça allait être n'importe quoi. Surtout quand la vérité allait éclater. Cette partie-là, elle l'attendait avec impatience cependant. Car si elle doutait toujours de l'identité d'Auryn sous son voile rouge, le retour à la forme hylienne de Link allait accélérer les choses.

Le trajet inverse se fit dans les mêmes conditions que plus tôt. Un silence pesant entre tous, ponctué par des répliques acerbes de la twili sur l'un ou l'autre de ses compagnons. Elle cherchait vraiment à les faire sortir de leurs gonds. Mais plus ils approchaient de la cascade, et plus la tension devenait palpable.

Le chant de l'eau qui ruissèle ne fut pas plus apaisant que le reste. Link était crispé au possible, et se tenir sur son dos devenait douloureux pour Midona. Le moindre de ses mouvements étaient saccadé, sec.

Heureusement, la voix de l'esprit, alors qu'ils approchaient de leur point d'ancrage, la soulagea. Ça allait enfin être réglé, et il arrêterait d'être aussi chiant, et elle macabre. Pas vrai ? Ou alors ils devraient la combattre elle, parce que ce serait un faussaire. Dans les deux cas, ça calmerait le jeu. Et Midona avait besoin de calmer tout ça. Vraiment. Parce que même si elle ne comptait pas tenir la chandelle, elle avait déjà choisi qui allait l'accompagner dans sa quête, et c'était ce garçon loup. Hors de question qu'elle se tape un autre débile à former.

« Vous avez rempli le calice… Et ramené la lumière sur ces terres… » Un murmure, alors que la magie de la créature attire à elle le calice rempli de perles lumineuses. Ces dernières s'enfoncèrent dans l'eau, et bientôt, l'endroit retrouva sa splendeur et sa luminosité d'antan. Les plantes se remirent à grimper, à fleurir, se déployant tout autour de la zone avec vitalité.

« Pff… Ouais… ça brille, ça sent bon… C'est vert… je vois pas trop pourquoi vous aimez tant que ça la lumière, hein… c'est plat.» Commenta la petite Twili, venant flotter au-dessus de la cascade, bras croisés. Elle dût s'écarter vivement cependant, parce qu'une bête énorme et lumineuse jaillit de l'eau, tournoyant sur elle-même. « Bon. Bah je vais vous laisser, hein ! À plus ! » Affirma Midona dans un sourire. Et elle disparut dans l'ombre de l'eau.

L'animal de lumière, qui ressemblait un peu à un grand singe, avec une queue immense, encerclait une sorte d'étoile scintillante de pureté avec ses bras. Et il la tenait désormais bien serrée contre lui. Tournant son énorme tête en relief vers le loup et la princesse, l'animal n'ouvrit cependant même pas la bouche pour parler.

« Mon nom est Firone… Et cette forêt m'a été confiée par les déesses lors de sa création. Jeune homme au cœur vaillant… » À ses mots, Auryn se recula, sait-on jamais, que l'esprit veuille soudainement parler de son œuvre à elle. « Ton passage dans le monde du crépuscule t'a changé en bête aux yeux saphir… Mais si ce sort fut probablement horrible, c'est cependant un signe. Le signe que le pouvoir de l'élu des déesses sommeillait en toi, et qu'il s'est réveillé. »

Auryn porta une main à son cœur. Ça y est, elle avait la preuve qu'elle voulait. Le porteur du courage était là, c'était bien lui, il n'y avait plus de doutes. Elle était donc sur la bonne voie pour récupérer les trois fragments et une fois le graal déversé sur tout Hyrule, elle irait rejoindre son amour dans l'au-delà. C'était presque un soulagement.

« Contemple la forme que prends ce pouvoir… » Le faisceau de lumière lui fit relever la tête vers le loup. Sauf qu'il n'était plus un loup.

Une tunique verte sur un pantalon de lin gris, agrémenté d'une côte de maille en cuivre, un bonnet émacié de kokiri, une épée, et un bouclier. Elle reconnaissait ces vêtements, elle savait pertinemment à qui ils avaient appartenus. Le héros du temps était le premier hylien en terre de lumière à l'avoir accueilli.

L'homme observa ses mains, semblant enjoué de les avoir retrouvés. Mais ce n'était pas ça qui la dérangeait. C'était sa silhouette, qu'elle connaissait depuis plusieurs mois. C'était son parfum, que la brise charriait jusqu'à elle. C'était cette chevelure châtaine, et ces anneaux à chaque oreille, qu'elle avait déjà trouvé bizarre aux oreilles lupines.

« Ton nom est Link. Et tu es le héros élu des déesses. » Le singe n'avait pas terminé qu'Auryn était à genoux dans l'eau, suffoquant et horrifiée.

Un guerrier se relève toujours. Elle le savait. C'était une règle que lui avait apprise Nabooru. Et elle l'avait vu des milliers de fois. Mais Link… Link était un berger sans histoire. Oui… Mais Link était étrange, puissant, confiant, en harmonie avec les bêtes et les hommes. Il rayonnait. Il avait toujours rayonné, et c'était pour cette raison qu'Auryn avait succombé à son charme.

Parce que c'était un soleil, même dans la nuit. Un phare aveuglant qui vous tire de la plus terrible des peines. Link était un guerrier. Un guerrier qui s'ignorait, mais il l'avait toujours été, dans sa manière d'être, de vivre, et de vouloir protéger le monde entier. Link, son amour, son seul et unique mauvais choix dans cette vie où elle n'en avait pas, était vivant.

Car Link était le héros du temps.