Salutations !
Je n'ai pas écris dans le fandom depuis bien trop longtemps, heureusement que la saison deux est arrivée avec tous ces beaux moments et surtout un tas de traumatismes pour nourrir ma Muse capricieuse ;p
C'est la première fois que j'écris à 100% sur les personnages de la série, jusqu'à présent j'étais plutôt sur le canon du livre avec quelques détails piqués à la fin de la saison 1. J'espère m'être bien débrouillée !
Du coup, sniff, adieu les notes de bas de page à l'humour décalé (j'espère vous retrouver bientôt mes jolies) ici 100% de trauma et de questions existentielles sur la fin de la saison 2, youpi !
Belle et bonne lecture à vous 3
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Malheureusement, la colombe ne put se résoudre à se laisser dévorer par le serpent
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À la défense d'Aziraphale, ce n'était pas un baiser. C'était une attaque. Une attaque vicieuse d'un serpent aux abois, bondissant sur une naïve colombe.
Pas étonnant que, comme un doux lapin devant les phares d'une voiture, l'ange de la porte orientale se soit figé, les yeux écarquillés.
Six mille ans, six mille ans à côtoyer un démon. Six mille ans à penser le connaître, à s'habituer à ses actions loufoques, et il parvenait encore à être surpris.
Un démon qui transformait les chèvres en corbeaux et les humains en geckos. Qui se muait en cygne géant pour secourir les enfants des flots. Un démon qui entrait dans une église pour sauver les ailes d'un ange. Qui ne savait pas manier un fusil. Un démon qui affirmait être son ami. Qui se dressait contre le Grand Plan afin de sauver la Terre à ses côtés.
Un démon qui l'embrassait avec toute la fureur d'un coup de poing et l'angoisse d'un sanglot.
Aziraphale n'était pas prêt.
Six mille ans à se fréquenter dans ce qu'il apprenait depuis quatre ans à qualifier d'amitié. Cela ne pouvait pas être faux, si ? Avait-il encore raté quelque-chose ? Fallait-il déjà qu'il remette en question ces six mille années ?
Il était un ange, il pouvait ressentir l'amour, il l'avait toujours pu. Mais rien de hors norme ne semblait émaner de Rampa. Pas quand il menaçait une plante verte. Pas plus quand il conduisait la Bentley à travers Londres à la vitesse qu'il considérait comme extrêmement basse de 90 miles à l'heure. Ni quand il nourrissait ou faisait mine de noyer générations après générations de canards. Et surtout pas quand il regardait Aziraphale à travers les époques. Rien, jamais. Aucune bouffée ni aucun pic, juste un amour profond pour la Terre et ses merveilles ancré dans l'essence du Serpent depuis le premier jour, au jardin d'Eden.
Cela devait donc être faux.
C'était forcément faux, juste une tentative désespérée de le garder sur Terre. Un acte égoïste cherchant à éloigner Aziraphale du rang d'Archange suprême par peur d'être laissé pour compte. Comme si Aziraphale l'aurait fait...
C'était donc cela la vérité.
Aziraphale éloigna ses mains traitresses qui tentaient de s'accrocher au col de Rampa. Il ne pouvait pas les laisser faire, elles risqueraient de le rapprocher.
Il ne devait pas tomber dans le piège. Ce n'était pas un baiser. Juste une tentation démoniaque. Rampa était tombé bien bas pour user de la luxure sur un ange.
Ou peut-être, savait-il que cela fonctionnerait sur cet ange en particulier ?
Non. Il ne se laisserait pas tenter.
Ses plumes s'ébouriffèrent alors que dans un autre plan de réalité, la présence immense, écailleuse et ailée de velours s'enroulait autour de lui. Ce devait être de l'effroi. L'attaque d'un prédateur ne pouvait en aucun cas procurer chez sa proie un frisson d'exaltation. Jamais la colombe n'inviterait le serpent à la croquer.
Car ce n'était pas un baiser.
Les lèvres sèches qui se mouvaient contre les siennes avaient le goût du mensonge.
Les mains osseuses qui agrippaient son col étaient des griffes tentant de l'emprisonner.
Le nez qui se heurtait contre sa joue ne pouvait compter comme une caresse.
Le souffle chaud qui se glissait sournoisement dans sa gorge n'était que manipulation.
Ce n'était pas un baiser, c'était une attaque.
Pourtant, Aziraphale ne pouvait le repousser.
Mais il ne devait pas l'accepter. Jamais.
Il n'avait pas le droit de tomber dans une si fausse vérité. Il ne pouvait faire cela à Rampa.
Que valaient six mille ans d'amitié s'il se laissait prendre dans un tel mensonge ? Ce pauvre cher finirait par le détester pour s'être perdu dans une illusion. Et le jour où ce serait trop, le jour où Rampa ne pourrait plus faire semblant, il n'y aurait plus d'amitié à retrouver. L'égoïsme d'Aziraphale l'aurait brisé en mille morceaux, cet amour à sens unique l'aurait pillé et dispersé aux quatre vents.
Aziraphale ne pourrait survivre si Rampa cessait de l'apprécier.
Enfin, comme après une éternité de tourment - douze secondes, douze minuscules secondes sur six mille ans à parcourir la Terre, douze interminables secondes pour remettre en question tout ce qu'il croyait -, le baiser se rompit.
Aziraphale avait l'impression de s'étouffer. Il avalait l'air, à cours de mots, comme s'il en avait un jour eu besoin. Son corps agissait sans lui, ne sachant s'il fallait rire ou pleurer.
Le regard qu'il lança à Rampa était-il un regard de haine ou de désespoir ? Il ne le savait pas. Il ne savais plus grand chose à dire vrai. Mais il savait une chose, ce sentiment qui éclatait en lui comme des bulles de savon et qui passa ses lèvres presque sans le vouloir.
« Je te pardonne ».
Une phrase familière qui signifiait tout.
Je te pardonne. Car tu n'es pas impardonnable. Je te pardonne, alors élève-toi à mes côtés et bâtissons un monde meilleurs main dans la main. Je te pardonne, alors oublions ça et continuons côte à côté comme nous l'avons toujours fait. Je te pardonne, alors ne cherche plus à me tenter avec un faux baiser. Je te pardonne, ne recommence plus sans quoi je ne pourrais te résister.
Je te pardonne tes tours démoniaques.
Je te pardonne, plein et entier.
Je te pardonne ton baiser.
Car n'était pas un vrai baiser. Il fallait être deux pour s'embrasser et ils n'étaient aucun. Aziraphale n'était pas là physiquement, de toutes ses forces il avait résisté à la tentation. Rampa, quant à lui, n'était que dents et lèvres, son cœur restant à l'abri sous un corps de chair et une veste de tailleur miraculée.
Ce n'était pas un baiser.
Quand Rampa s'éloigna, l'offre d'Aziraphale s'en fut avec lui. Cela semblait si important pourtant, quelques instant auparavant. C'était la plus belle offre qui soit, offrir la Bonté du Ciel à celui qui la méritait le plus. Lui redonner les étoiles. Tant de siècles à observer le firmament avec du regret dans ses yeux jaunes, enfin terminés. Aziraphale lui aurait offert la possibilité de dessiner des nébuleuses à nouveau. Les myriades de la créations à portée de main. Rampa aurait été glorieux.
Mais, alors que le démon s'éloignait, Aziraphale n'arrivait pas à se soucier des étoiles.
Une perte déchirante prenait place, remplissant tout son être de ce vide glacial.
Qu'importent les étoiles et la grâce de Dieu retrouvée ? Son meilleur ami partait.
Non. Aziraphale l'abandonnait.
Parce-qu'il avait pensé que la blancheur immaculée du Paradis pourrait profiter à Rampa.
Mais surtout, parce-qu'il voulait faire le bien, changer les choses de l'intérieur, mais qu'il ne s'imaginait pas le faire seul.
Parce-qu'il n'avait pas su bien le formuler.
Les mains tremblantes, Aziraphale toucha ses lèvres. Elles picotaient.
Il ne se sentait pas souillé.
Aucune énergie tentatrice. Pas un brin de séduction. Même la colère s'était évaporée. Seul restait sur ses lèvres le goût du chagrin. Un chagrin si puissant que, dans un autre plan de réalité, ses ailes se mirent elles aussi à frémir.
Le chagrin, et cette note boisée et ambrée qui était toute Rampa. Familière comme l'ozone de ses propre miracles, aussi confortable que l'odeur douce des feuilles jaunies de ses livres préférés.
Et peut-être, tellement mêlée qu'elle en était presque indiscernable, une bouffée d'amour blessé.
Ses yeux s'écarquillèrent.
Non...
Si c'était vrai, il allait devoir faire bien plus qu'une danse pour se faire pardonner.
Cela ne le pouvait...
Il l'aurait remarqué. Quel amour se fond si bien dans l'aura de son hôte qu'il faut le goûter pour le repérer ?
Il devait rêver.
La porte de la librairie s'ouvrit.
Ce n'était pas un certain démon.
Non, c'était le Métatron.
Aziraphale cacha ses mains derrière son dos. Les émotions n'étaient que faiblesses dans le royaume de Dieu. En un souffle, elles étaient stables, au repos face à la Voix de Dieu.
Seulement envisager de quitter la librairie, son port d'attache, aurait dû le remplir d'effroi. Mais Aziraphale ne sentait plus rien. C'était comme si le lien qui, depuis six milles années, l'ancrait sur Terre s'était déjà brisé. L'ange Muriel saurait s'en occuper.
Il n'avait rien à emporter, non. De la collection de trésors qu'abritaient la librairie, aucun ne valait la peine d'être pris avec lui. Le seul trésor qu'il voulait emmener avait fuit sans se retourner.
L'Archange suprême Aziraphale.
Cela allait être glorieux.
Il allait faire le bien et quand le Paradis mériteraient vraiment son nom, il redescendrait sur Terre.
Il parlerait à Rampa.
Il trouverait de meilleurs mots pour exprimer ses pensées. Il lui montrerait ses avancées.
Et peut-être qu'il pourrait démêler cette histoire d'amour dissimulé.
Le Ciel était Bon.
Aziraphale le prouverait.
Il le fallait.
Car sinon il aurait repoussé Rampa en vain.
Aziraphale faisait le Bien.
Au moment de passer la porte de l'ascenseur vers le Paradis, Aziraphale se figea, les mots du Métatron résonnant sinistrement.
Comment ça, le second avènement ?
Soudainement, il lui était impossible de respirer. Le vide dans son être tourbillonna en faisceaux de glace aiguisés qu'il sentait transpercer sa gorge et s'enrouler autour de son cœur. Heureusement qu'il n'en avait pas besoin pour fonctionner.
Parmi la panique et la douleur, sous la façade de confiance et la foi en son bon droit, une seule pensée était vraiment articulée.
Oh ma Terre, et si je m'étais leurré ?
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