1. Wahhhhhhh je suis éberluée de voir les commentaires sur ce premier chapitre! Surtout sachant que c'est à peine un début d'histoire, basé sur un vieux jeu… Donc MERCI MERCI MERCI! Je ne m'attendais pas à ça!
2. Il se pourrait qu'il y ait quelques fautes d'orthographe, parce que j'ai pris l'habitude d'écrire sur mon téléphone depuis que j'ai un nouveau travail à l'autre bout de l'univers et que je passe ma vie dans les transports en commun. Je fais des relectures mais bon…
3. Je suis stupide, je déteste la physique, je ne sais pas pourquoi j'ai choisi cette matière.
4. Des clichés, je sais.
5. xxx
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CHAPITRE 2 - SCIENCES PHYSIQUE
Le lendemain matin, Prompto se réveilla avec l'impression qu'il s'était fait rouler sur le visage par un autobus. Son crâne pulsait horriblement, ses lèvres étaient enflées, et il ressentait une pression anormale sur son œil gauche.
La joie, quoi.
Il jeta un coup d'œil à son téléphone. 5h12 du matin.
Il se tira de son lit difficilement, son corps se réveillant douloureusement, et se retrouva face à face avec son miroir.
Celui-ci montrait une image horrible. Ses côtes, qui avaient brièvement réussi à retrouver leur couleur naturelle, étaient de nouveau recouvertes de marques rouges et bleues. Ses yeux étaient enflés et son œil gauche était souligné d'une ecchymose monstrueuse. Sa lèvre inférieure était fendue.
Il ne voulut pas perdre de temps. Il prit sa douche en vitesse, coiffa ses cheveux blonds au minimum et enfila son uniforme. Il s'en prépara un deuxième qu'il plaça rapidement dans son sac et qu'il accompagna de sous-vêtements, de chaussettes, de son habit de travail, de son chargeur de téléphone et de ses livres pour les deux prochains jours.
Ce soir, il ne reviendrait peut-être pas à la maison.
C'était un rituel qu'il faisait souvent. Son père, camionneur de métier, partait régulièrement pour de longues périodes de temps à l'extérieur d'Insomnia, pendant lesquelles Prompto était seul à la maison – à son plus grand plaisir. Mais dès qu'il apercevait le camion de retour devant son étroite maison, il la fuyait comme la peste.
Habituellement, son connard de père ne restait en ville que quelques jours, parmi lesquels il passait le plus clair de son temps dans des casinos illégaux pour tenter de rattraper le pognon qu'il avait préalablement perdu et qu'il reperdait toujours comme un con.
Avec un peu de chances, ce soir, il serait déjà en train de brûler son fric quelque part, et Prompto pourrait peut-être dormir à la maison. Sinon, il trouverait une solution.
Il n'avait pas vraiment d'endroit où rester, mais il se débrouillait toujours; cette fois-là ne serait pas différente.
Il enfila un vêtement en molleton épais par-dessus sa chemise et plaça la capuche sur sa tête. Puis, il enfila son sac, attrapa son téléphone qu'il glissa dans sa poche kangourou et ouvrit discrètement la porte de sa chambre.
À l'étage inférieur, c'était le silence complet. Il s'arrêta une seconde, s'assurant qu'il n'y avait aucun mouvement, puis se rendit à l'escalier.
Son père en était au pied, en train de ronfler bruyamment, affalé contre les dernières marches dans une position qui laissait entendre qu'il avait tenté de monter l'escalier mais qu'il s'était endormi pendant le processus.
Prompto échappa un reniflement de dédain.
Il descendit l'escalier, l'enjamba sans l'aider et ficha le camp.
Connard.
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– Putain! Tu t'es battu ou quoi?!
Il avait rejoint Cindy devant son casier, comme il le faisait souvent avant ses cours. Elle était assise au sol, un cahier ouvert sur ses genoux, certainement en train de terminer un devoir à peine dix minutes avant sa remise. Comme d'habitude.
Elle l'avait cependant abandonné pour dévisager Prompto de yeux ronds.
– Ouaip!, lança le jeune homme en laissant tomber son sac au sol.
Il s'assied à ses côtés, étendant ses longues jambes devant lui.
– Je me suis battu contre six ninjas dans une ruelle, je les ai tous démolis.
– Arrête tes conneries, lui reprocha Cindy.
– Je te jure putain! Cobra Kai style!
– T'es con.
Sourire en coin, la jeune femme le frappa à l'épaule. Elle atteint une ecchymose qui vibra jusque dans les doigts de Prompto, mais il avala toute réaction comme si de rien n'était.
– Ok, c'étaient peut-être pas exactement des ninjas… C'était le tranchant d'une porte.
Cindy éclata de rire en renversant la tête vers l'arrière.
– Ta gueule!, continua-t-il en souriant.
– Comment t'as réussi ton coup putain?!
– Bah, j'ai juste oublié un truc en entrant dans ma chambre et quand je me suis retourné, j'ai découvert que la porte s'était à moitié refermée. Et aussi enfoncée dans mon visage.
Le cahier roula de côté, incapable de rester en place sur les genoux de Cindy qui était prise de soubresauts hilares et incontrôlables.
– C'est pas si drôle que ça!,
– Putain oui, c'est foutrement hilarant! La meilleure de l'année!
Ce fût au tour de Prompto de la frapper sur l'épaule.
– Allez ta gueule, mon ego est assez blessé comme ça.
Elle finit par se calmer, après avoir essuyé quelques larmes.
– T'es le type le plus maladroit que je connaisse. Vraiment, deux pieds gauches.
Il haussa les épaules en souriant. Elle faisait allusion aux nombreuses ecchymoses avec lesquelles il arrivait parfois à l'école, souvent accompagnés d'histoires de toutes sortes. Parfois, il faisait semblant de s'en être pas rendu compte (Mais comment je me suis fait ça?). À d'autres moments, il inventait une histoire banale (Je me suis cogné sur la table). Et occasionnellement, il élaborait une histoire plus complexe, quand les marques étaient trop prédominantes.
Avec les années, il était devenu un spécialiste du mensonge.
– Oh oh, ton nouvel meilleur ami est juste là, chuchota Cindy.
Il tourna la tête pour apercevoir Noctis au bout du corridor. Il était debout devant la porte fermée d'une classe, attendant visiblement que son cours débute.
Il était en train de le regarder.
– Meilleur ami mon cul, marmonna Prompto.
Il s'attendait à ce que le prince ne détourne les yeux lorsque leurs regards se croisèrent, mais il n'en fit rien. En fait, celui-ci ne se gêna pas pour le dévisager allègrement.
Prompto claqua de la langue. Quel culot, putain. Et peut-être que le jeu était enfantin, mais, pendant de longues secondes absolument interminables, il s'entêta à soutenir son regard, la mâchoire serrée, jusqu'à ce qu'une groupie ne s'adresse au prince et le force enfin à détourner son attention.
Un-zéro pour lui.
– Okayyyyy, fit Cindy, maintenant que tu as gagné ton combat de mâle dominant, peux-tu m'aider avec ce devoir? Je dois le terminer avant la cloche.
Prompto se leva, ignorant son flanc qui s'étira douloureusement, et glissa son sac sur une épaule.
– Sur les six questions que t'as complétées, il y en a seulement une qui est exacte. Je crois que t'es déjà foutue.
La jeune femme roula les yeux et laissa tomber son crayon dans le cahier, qu'elle referma par-dessus d'un claquement bruyant.
– J'abandonne. Je crois que je vais finir serveuse dans un bar érotique… Hey, peut-être que tu peux demander à ton nouveau copain s'il y a un boulot pour moi au palais?
– C'est pas mon copain. Et je doute que le palais engage des serveuses de bar érotique.
– Ha. Ha.
Elle se leva à son tour.
– Bon, continua-t-elle, il faut que je marche vers ma mort. On se revoit à la cantine?
Prompto se mordit la lèvre. Il n'avait pas apporté de repas et son compte en banque était vide. Il lui arrivait de sauter le repas du midi, mais cette fois-ci il avait aussi sauté celui du matin, ce qui signifiait que la torture d'être entouré de gens en train de bouffer serait plus pénible que d'habitude.
– Je peux pas, je dois aller à la biblio pour bosser sur mon cours de physique.
– Prom, tu as déjà une cote dans le plafond, tu peux relaxer.
– Pas en physique. Et je dois garder ma cote si je veux décrocher une bourse.
Cindy fit la moue.
– Je peux pas croire que tu veux m'abandonner et partir étudier à Altissia.
– T'es cent pourcents la raison pour laquelle je veux partir.
– Pff, c'est ça, va chier.
Prompto sourit.
– Allez, dégage.
Cindy lui fit un salut militaire et marcha en direction de sa classe. Prompto se prépara à faire de même, lorsqu'il leva les yeux une dernière fois vers Noctis.
Le type était encore en train de le regarder.
Putain c'était quoi son problème.
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– Tu travailles ce soir?, lui demanda Cindy.
Elle et Prompto venaient de sortir de leur dernière classe de la journée, un cours de français qu'ils partageaient, et marchaient en direction de la sortie.
La journée avait été foutrement pénible. Le jeune homme avait eu du mal à se concentrer tout au long de celle-ci, la faim tenaillant son ventre sans pitié et l'empêchant de comprendre la moitié des mots qui sortaient de la bouche de ses professeurs.
Le plus difficile avait certainement été son cours de physique, dans lequel il avait combattu le sommeil de peine et de misère, ses paupières tombant d'elles-mêmes. Il avait cependant réussi à prendre quelques notes, contrairement au prince Noctis qui avait dormi sur son pupitre comme le champion des fainéants.
Pas que Prompto en avait quelque chose à foutre.
Quel con.
– Question stupide, commenta Cindy avant même qu'il ne puisse répondre. Tu travailles tout le temps.
Le jeune homme eut un sourire en coin.
– Mon père est à la maison ce soir, alors je m'en plains pas pour une fois.
– Ah.
Cindy savait que Prompto détestait son père, mais le jeune homme s'était toujours assuré de garder secret à quel point leur relation était malsaine.
L'inquiétude de Cindy n'aurait amélioré en rien la situation de toute façon.
– C'est nul, commenta la jeune femme. Je vais peut-être venir te saluer à l'épicerie, j'ai besoin de– HEY!
Prompto sursauta. Un type venait de passer en vitesse à côté d'eux.
– Ça va?, demanda Prompto.
– Ce gros con vient de me pincer le cul!
– QUOI?!
Le connard en question était déjà loin, mais Prompto se lança quand même vers l'avant pour le rattraper. Son élan fut arrêté par la main de Cindy sur son bras.
– Non, c'est inutile!, fit-elle.
Le connard eut le culot de se retourner et de leur envoyer un clin d'œil. Prompto serra les dents.
– Lâche-moi, je vais le défoncer!
– Arrête, ça m'arrive au moins mille fois par semaine… Si je décidais de courir derrière chaque imbécile qui fait ce genre de choses, j'aurais les cuisses de Usain Bolt.
Lorsqu'elle retira enfin sa main, le type avait déjà traversé la porte de sortie.
– Putain, ces connards, je les supporte pas, marmonna Prompto.
– On s'habitue, répondit Cindy en haussant les épaules.
Le jeune homme avait envie de répliquer, de lui dire qu'elle ne devrait pas accepter de se faire traiter de cette façon, mais il était fatigué. Son bref élan d'énergie était déjà évaporé.
Et, de toute manière, il était très mal placé pour lui faire la morale, s'il était bien honnête avec lui-même.
Lorsqu'ils traversèrent la porte à leur tour, s'exposant au vent frisquet de l'automne, Prompto jura.
– Putain ça caille, commenta-t-il en relevant sa capuche sur sa tête.
– Nah moi je suis bien!
Cindy ne portait rien d'autre que son uniforme scolaire, composé d'un minuscule chemisier trop serré et une jupe encore plus petite, dont la taille contrevenait très certainement au règlement de l'école.
– T'es pas normale. Un vrai ours polaire.
La jeune femme rigola.
– Allez, j'y vais, fit-elle en faisant un vague salut de la main. Bonne chance pour le boulot!
– Bye!
Il la regarda brièvement s'éloigner et ne put s'empêcher de frissonner en voyant son habillement. Puis, il se retourna et entama la marche jusqu'à l'arrêt de l'autobus qui l'amènerait au travail, les mains dans la poche avant de son vêtement. Il ne restait déjà presque plus d'étudiants autour de lui, comme si tout le monde s'était donné le mot pour fuir le campus au plus vite, et Prompto en profita pour marcher rapidement, impatient d'arriver à destination.
Il lui restait un gobelet de Cup Noodles dans son casier au travail. Il salivait déjà à l'idée de le savourer.
En chemin, il remarqua, garée sur la rue devant l'école, la voiture luxueuse qui venait chercher le prince Noctis tous les jours. Appuyé sur le capot de celle-ci se tenait un jeune homme à la chemise repassée, aux cheveux parfaitement lissés et à la posture beaucoup trop droite.
Ignis.
Voilà donc pourquoi Prompto se rappelait l'avoir déjà vu. C'était le chauffeur du prince. Et il avait l'air toujours aussi terrifiant, avec son air figé beaucoup trop sérieux, et ses gants argentés.
Qui bordel portait des gants comme ça, en permanence?
Un putain d'assassin, très certainement.
– Heu… Prompto, c'est bien ça?
Il sursauta et s'arrêta sec pour se retourner vers la voix, soulevant un sourcil lorsqu'il vit Noctis.
Il était surpris que celui-ci ait pris la peine d'apprendre son nom.
– Ouais?
Le jeune prince ne le regarda pas directement. En fait, ses yeux étaient partout, sauf sur son interlocuteur, comme si l'existence même de Prompto ne valait pas d'être reconnue.
Celui-ci ressentit déjà l'irritabilité grimper dans sa nuque. Vraiment, le prince avait le don de l'insulter avant même d'ouvrir la bouche.
– Donne-moi les coordonnées du vétérinaire qui a soigné Pryna, ordonna-t-il finalement.
Prompto serra les dents.
– Wow. Et c'est la façon la plus polie que t'as trouvé pour me le demander?
Noctis fronça les sourcils.
– Quoi?
– Peux-tu dire s'il vous plaît, au moins? Un minimum?
Le prince soupira de frustration, comme si Prompto venait de demander la lune. Il croisa les bras sur sa poitrine.
– Je dois avoir le nom du vétérinaire pour son plâtre. Fais juste me donner son nom.
– Demande-moi gentiment, bordel. Je suis pas ton esclave.
Pendant une seconde, Noctis le dévisagea, comme s'il s'attendait à ce que Prompto ne retire sa demande.
C'était mal le connaître.
Il eut quelques secondes où rien ne se passa, puis le prince soupira bruyamment et décroisa les bras en levant les yeux.
– S'il te plaît, pourrais-tu me donner les coordonnées du vétérinaire de Pryna?, demanda-t-il enfin.
Prompto savoura sa petite victoire intérieurement.
Deux-zéro.
– Je te texte ça tout à l'heure, fit-il en se retournant.
Il allait reprendre son chemin, mais Noctis l'arrêta.
– Hein? Mais t'as pas mon numéro?
Ce fut à Prompto de le regarder d'un air confus.
– Tu m'as pas texté hier? J'ai reçu un message d'un type qui se disait s'appeler Noctis, c'était pas toi?
– Oh. Heu… Oui. C'est juste que… j'avais pas reçu de réponse, donc je croyais que Iggy m'avait donné le mauvais numéro…
Évidemment. Le prince du Lucis n'était probablement jamais ignoré. Prompto se retint pour ne pas rouler les yeux.
– Qu'est-ce que tu voulais que je réponde? Félicitations pour ton remerciement? De toute façon…
Il s'arrêta brusquement. Au bout de la rue, son attention avait été attirée par un groupe d'étudiants, tous des mecs, qui étaient rassemblés en cercle autour d'un duo de personnes. Il se demanda s'il y avait bataille.
– Écoute, fit Noctis. Fais juste m'envoyer le nom et… Hey tu m'entends?
Prompto l'ignora. Ses yeux étaient rivés sur le groupe, un sentiment étrange lui nouant l'estomac. L'un des mecs au centre était le connard qui avait pincé Cindy, mais il n'arrivait pas à distinguer l'autre personne.
Les types rigolaient d'une façon qui ne signifiait rien de bon. L'un d'entre eux se déplaça et, tout à coup, une tête blonde apparut.
C'était elle. C'était Cindy.
Le sang de Prompto se glaça instantanément. Il retira son sac d'un coup, le laissant tomber au sol sans la moindre délicatesse, et se mit à courir aussi vite qu'il put vers son amie.
La pauvre se débattait en criant des injures alors que le connard la retenait contre lui, les deux mains sous sa jupe pour lui empoigner les fesses. Autour d'eux, les mecs claquaient des mains et lançaient des cris d'encouragement comme s'ils regardaient un spectacle des plus excitants.
Ils ne virent pas Prompto arriver dans leur groupe, et encore moins le poing qu'il enfonça à pleine force dans le visage de l'agresseur. Celui-ci tomba à la renverse, manquant d'entraîner Cindy qui cria de surprise. Prompto la rattrapa par le bras.
– Ça va?!
S'il reçut une réponse, il ne l'entendit pas. Un des spectateurs le poussa à plein régime, et il manqua de se casser la figure. Il se redressa aussitôt, mais un poing le prit par surprise et lui éclata la mâchoire.
– Prom!, hurla Cindy.
La douleur résonna jusque dans sa tempe, et pendant une seconde, il fut étourdi. Lorsqu'il revient à lui, il aperçut un troisième mec attraper Cindy par les cheveux pour l'empêcher de s'en prendre à son assaillant.
Prompto vit rouge. Il repoussa le type qui l'avait frappé, prêt à bondir sur le connard qui tirait Cindy vers l'arrière.
– ÇA SUFFIT!
La voix, d'une autorité que seule le prince d'un royaume pouvait émaner, paralysa Prompto et il s'arrêta net, tout comme le groupe autour de lui.
Il tourna la tête pour regarder Noctis d'un air ébahi. Celui-ci avait visiblement suivi Prompto dans sa course pour sauver Cindy et se tenait à un mètre d'eux, droit comme une barre et les poings serrés, dégageant une colère noire à peine maîtrisée qui faisait froid dans le dos.
Et ses yeux, putain, ils étaient flippants. Ils brillaient d'une lueur bleue vibrante et Prompto, hypnotisé, se demanda si c'était la fameuse magie des Lucii dont il avait entendu parler.
Il déglutit difficilement, le cœur battant toujours la chamade. Voir le prince hors de lui était franchement terrifiant.
– Dégagez, ordonna le prince. Immédiatement.
Il n'eut pas besoin de se répéter deux fois. Les types se dépêchèrent de quitter l'endroit, sans même lever les yeux vers les deux amis, comme si se faire leur apporterait la malédiction du prince. Même le connard qui avait agrippé Cindy, que Prompto dévisageait avec des yeux haineux, n'osa pas croiser son regard.
Il fixa le groupe pendant qu'il s'éloignait, et, lorsque celui-ci fut enfin assez loin, se permit un soupir de soulagement.
Il se retourna vers Cindy.
– Ça va?! T'as rien?
Elle était visiblement ébranlée. Ses épaules étaient courbées et ses mains étaient prises de tremblements incontrôlables.
– Fuck, il m'attendait, le salaud, murmura-t-elle. J'ai tellement eu peur…
Puis, elle leva les yeux vers lui.
– Oh merde, tu saignes!
Prompto porta sa main à sa bouche. Sa lèvre s'était fendue à nouveau, probablement au même endroit que la veille. Il l'essuya rapidement.
– C'est rien, ça date d'hier, t'inquiète.
– Est-ce que vous les connaissez?, demanda soudainement Noctis.
Pendant une minute, Prompto avait complètement oublié sa présence. Il leva un regard surpris vers lui.
Ses yeux étaient redevenus normaux.
– Oui et non, répondit Cindy. Ce n'est pas la première fois que ce con m'attrape le cul.
Ignis apparut derrière Noctis; il avait ramassé le sac de Prompto et le tenait d'une main. Un autre type était à ses côtés, un mastodonte gigantesque portant un uniforme de garde royal, et Prompto le reconnut comme celui qui accompagnait le prince lorsqu'ils s'étaient rencontrés pour s'échanger Ryan Reynolds.
– Nous allons aviser la direction, fit Ignis, en tentant le sac vers son propriétaire qui l'attrapa en murmurant un merci. Ce comportement n'est pas acceptable. Ni celui de ces spectateurs.
Prompto hocha la tête. Son cœur n'avait toujours pas ralenti, battant jusque dans son visage où il le sentait pulser étrangement sur ses blessures. Sa nuque était couverte de sueur, et la combinaison de l'adrénaline et de son manque calories commençait à lui donner la nausée.
Il avait envie de s'asseoir sur le sol et de faire un arrêt, le temps que son pouls et son estomac reviennent à la normale, mais il était déjà en retard pour le boulot et il ne voulait pas étirer la sauce plus que nécessaire.
Et puis, il était hors de question qu'il laisse son amie seule. Il lui restait au moins dix minutes de marche devant elle et rien n'empêchait son agresseur de l'attendre au coin de rue suivant.
– Viens, je te raccompagne chez toi, lui dit-il en glissant son sac sur son dos.
Il eut l'impression qu'il pesait une tonne.
– Tu dois pas aller travailler?, demanda-t-elle.
– J'arriverai plus tard, c'est pas grave, répondit-il en haussant les épaules.
La jeune femme fronça les sourcils.
– Oui, c'est grave. Si tu perds ce job, tu es dans la merde.
Elle avait raison. En fait, en y repensant, il avait probablement déjà perdu son emploi, étant donné qu'il avait loupé le bus. Son patron ne tolérait aucun retard.
– Si ça peut te faire sentir plus en sécurité, je peux marcher avec toi, proposa soudainement Noctis à Cindy. Gladio va nous accompagner, ajouta-t-il en pointant le garde derrière lui.
Prompto se tourna vers lui, les sourcils arqués. Putain, est-ce qu'il avait bien entendu?
– Ça va pas la tête?, répondit-il d'un ton ébahi. Je ne la laisserai pas seule avec des mecs que je ne connais pas.
Le prince roula les yeux.
– Tu ne me connais pas? Putain, tout le monde me connaît. Il y a même un article dans le journal cette semaine sur la soupe que j'ai mangée lundi.
La réponse aurait pu sembler être de la vantardise, mais il y avait quelque chose d'étrange dans sa voix, une exaspération qui laissait entendre que la situation le faisait chier. Prompto ravala la réplique tranchante qu'il avait au bout de la langue.
– T'as un point, dit-il plutôt en faisant un geste vague de la main, mais de toute façon, même si j'attrape le prochain bus, j'arriverai en retard, alors en théorie j'ai déjà perdu mon job.
– Permettez-moi, Prompto, de vous emmener à votre lieu de travail en voiture, interrompit Ignis. Ce serait un minimum après ce que vous avez fait pour notre chienne et, bien sûr, ça me fera grand plaisir.
Prompto blêmit. Il n'avait pas envie d'être seul dans une voiture avec une version terrifiante de Dracula. Mais avant qu'il ne puisse refuser, Cindy le claqua à l'épaule.
– Cool, c'est réglé!, déclara-t-elle.
Prompto la dévisagea de yeux exorbités. Le sourire de sa camarade s'étira.
Quelle traîtresse.
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Ce fut ainsi, après avoir fait promettre Cindy au moins cent fois de l'appeler dès qu'elle serait en sécurité chez elle, que Prompto se retrouva sur le siège passager de la voiture la plus luxueuse qu'il n'avait jamais vue de toute sa vie.
Tout l'intérieur était fait de cuir. Même le volant, mince et élégant, en était recouvert. Chaque détail sur le tableau de bord semblait dispendieux, de l'écran tactile aux indicateurs devant le conducteur.
Il n'osa rien toucher. Il avait l'impression d'être un imposteur dans une voiture aussi belle, qu'il allait la salir simplement en étant assis sur son siège. En fait, il n'osait pas bouger du tout; il était si raide qu'il devait donner l'impression qu'il s'apprêtait à sauter de la fenêtre d'un moment à l'autre.
Ce qui était peut-être ce qu'il allait faire.
Ignis était un conducteur exemplaire; il mettait toujours son clignotant et laissait passer les autres véhicules lorsque nécessaire. Sa conduite était souple et en contrôle.
Mais il roulait aussi extrêmement vite. Prompto n'arrivait pas à se détendre.
– Le prince m'a dit que vous partagiez une classe?, demanda Ignis sur le ton de la conversation.
Prompto se mordit la lèvre. Il n'avait pas envie de converser avec ce type qui lui faisait froid dans le dos. Il se retint de mettre la main sur la poignée de la porte lorsque la voiture fit un dépassement trop serré à son goût.
– Ouais, se contenta-t-il de répondre sans le regarder.
Il eut un moment de silence et Prompto espéra que Ignis ne s'arrête là. Mais il n'eut pas de bol.
– Quel est votre emploi?
– Heu. Je travaille dans une épicerie? Je viens tout juste de te donner l'adresse?
Ignis échappa un semblant de rire.
(Terrifiant)
– Je voulais dire, en quoi consiste votre métier, exactement.
Prompto ne put s'empêcher de le dévisager, mais l'homme ne le regardait pas. Son regard était fixé sur la route devant lui, clignant à peine des yeux alors qu'il zigzaguait rapidement entre les véhicules d'une exécution exemplaire, comme une espèce de robot humanoïde.
Prompto eut un frisson.
– Bah… C'est une épicerie de station service, j'imagine que tu sais c'est quoi?
Ignis ne répondit pas. Le silence rendit Prompto mal à l'aise plus que tout le reste et il balbutia la suite.
– Heu… Je vends de l'alcool à des alcoolos et des clopes à des éclopés, le classique quoi… De l'essence… Heu, ouais, voilà. Parfois une miche de pain blanc, un sac de chips… Je remplis les tablettes, passe le balai. Ce genre de choses…
– Je vois. Vous aimez votre travail?
Prompto ne put s'empêcher d'expirer un bref ricanement.
– Putain, non. T'es drôle toi.
La conversation s'arrêta là et Prompto en fut soulagé. Malheureusement, après quelques minutes de silence durant lesquelles Prompto attrapa définitivement la poignée de la porte comme si sa vie en dépendait, l'homme parla de nouveau.
– Je ne veux pas paraître indiscret, mais que vous est-il arrivé au visage?
La question le prit de court. Et, pour une raison obscure, elle l'irrita énormément.
De quoi il se mêlait, ce type.
– Ouais. C'est indiscret, répliqua-t-il d'un ton sec avant de pouvoir s'arrêter.
Il regretta aussitôt son impolitesse. Fuck, sa grande gueule allait lui mériter d'être assassiné par un robot-vampire-tueur dans une voiture de luxe. Bravo.
– Vous savez, continua Ignis sans faire de remarque sur sa réponse trop sèche, étant le conseiller du prince du Lucis, je suis entraîné aux combats et mes connaissances sur les blessures en général sont assez répandues.
Oh putain, ok. De plus en plus flippant.
– J'ai l'impression que vous avez reçu un coup de poing, conclut Ignis. Ou même plusieurs. Autre que celui que vous avez reçu aujourd'hui, je veux dire.
Prompto ne répondit pas tout de suite. Il réfléchit prudemment. Puis, après une minute :
– Je sais pas c'est quoi, la vie au palais, finit-il par expliquer lentement d'une octave plus bas que d'habitude, mais le quotidien des gens normaux n'est pas complètement rose, comme t'as pu le remarquer tout à l'heure.
Ignis se contenta de répondre un "Hum" sans pousser plus loin et Prompto fut soulagé de ne pas être forcé de donner plus de détails. Il sentait que les explications farfelues qu'il offrait à Cindy n'auraient pas été gobées par un type comme Ignis.
Les minutes suivantes furent interminables, gorgées d'un silence qui rendit l'habitacle étouffant et désagréable, et lorsque la voiture s'arrêta enfin devant son lieu de travail, Prompto se précipita pour sortir du véhicule.
Mais il n'était quand même pas du genre à oublier de remercier (comme certains) et avant de refermer la porte, il se pencha pour lancer :
– Merci, mec, salut!
Puis, il claqua la porte beaucoup trop fort comme le roi des cons.
Il grimaça.
Putain, pourvu que la voiture n'ait rien.
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Cindy lui envoya un texto au moment où il prenait place derrière la caisse, le souffle court après avoir couru et s'être changé en catastrophe dans la salle des employés.
– T'as mis ton t-shirt à l'envers, commenta son patron.
Il baissa les yeux sur le logo de son uniforme qui apparaissait habituellement sur son dos. Il claqua la langue et, laissant tomber son téléphone sur le comptoir, il faufila ses bras dans son vêtement pour le retourner sans le retirer.
– Et qu'est-ce que je t'ai déjà dit à propos de ton putain de cellulaire?!, fit l'homme de nouveau.
– Ouais ouais c'est bon, je sais.
Il regarda tout de même son téléphone.
Cindy la démone :
"Je suis à la maison saine et sauve"
"Amuse-toi au travail!"
Il appuya sur l'icône téléphonique. La jeune femme répondit après la première sonnerie.
– Qu'est-ce que tu veux putain?, fit-elle en guise de bonjour.
– Ok, je voulais juste m'assurer que tu allais bien.
Il eut un silence incrédule, puis :
– Bordel Prom, je viens tout juste de t'écrire que j'étais saine et sauve!
– Un texto ça compte pas, quelqu'un aurait pu prendre ton téléphone et l'écrire à ta place.
– Mon téléphone est verrouillé avec mon empreinte digitale.
– T'aurais pu être inconsciente et quelqu'un aurait utilisé ta main pour le déverrouiller.
Cindy soupira exagérément.
– Oui Prom. Le prince du Lucis lui-même m'a assommé et a déverrouillé mon téléphone pour t'envoyer des messages à ma place.
– Je dis pas lui, mais... Ok putain je faisais juste vérifier que t'étais pas morte, je commence à regretter que tu le sois pas.
– Cool. T'as fini?
– … Il a vraiment marché avec toi jusqu'à ta maison? Le prince Noctis?
– Ouaip. Lui et son garde du corps ont même attendu que je sois entrée pour partir comme de vrais gentlemans. Je sais pas ce que t'as contre le prince. C'est vrai qu'il est un peu coincé, il n'a pas parlé du trajet, mais il… Je crois qu'il a pas beaucoup d'amis, tu sais? Son garde du corps est vraiment plus sympathique, et putain, il est chaud, t'as vu le mec?
Ah, voilà donc pourquoi Cindy avait sauté sur l'occasion de se faire raccompagner aussi vite. Prompto aurait dû s'en douter.
Il ricana avec sarcasme.
– Le prince, pas beaucoup d'amis? Il a littéralement une armée de fans qui le suit partout.
– PROMPTO, BORDEL, JE T'AI DIT DE POSER CE TÉLÉPHONE!, interrompit le patron.
– Bon, je dois te laisser, content ou pas que tu sois en vie. Ok salut!
Il l'entendit à peine lui répondre un Bye! précipité avant de raccrocher. Il ouvrit sa messagerie et tapa rapidement :
Prompto :
"salut, merci d'avoir raccompagné Cindy."
(Parce que, bordel, il fallait donner l'exemple.)
Et puis :
Prompto :
"voici l'adresse du vétérinaire."
– PROMPTO PUTAIN!
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La soirée se déroula sans anicroches. Il attendit que son patron ne quitte pour la soirée, environ une heure après son arrivée, puis il prépara enfin son repas de nouilles instantané, qu'il savoura comme s'il s'agissait d'un plat de restaurant à cinq étoiles Michelin.
Que les dieux bénissent les Cup Noodles. Amen.
Il passa ensuite le reste de son quart de travail à réviser ses notes entre deux clients, les habitués venant chercher leur poison en bouteille ou en bâtonnets comme à leur habitude, et lorsque Prompto termina sa journée à 23h30, il fut satisfait d'avoir avancé deux chapitres pour son cours de bio et avoir écrit une demi-douzaine de paragraphes pour sa dissertation de français sur l'ordinateur portable qu'il avait loué à la biblio de l'école plus tôt dans la journée.
Il eut même de la visite de Cindy qui vint acheter un carton de lait avec l'une de ses petites sœurs.
Ce fut donc une soirée productive comme il les aimait, mais il ignorait si elle était réellement terminée.
S'il pouvait rentrer chez lui ou non.
Son père avait une certaine routine avec laquelle son fils avait appris à composer depuis très longtemps : lorsqu'il revenait de sa tournée de camionneur, il dormait toujours la première nuit à la maison. C'était aussi le moment où il buvait le plus et parallèlement celui où il était le plus dangereux.
Prompto ne rentrait jamais à la maison le premier soir. Les chances qu'il se fasse péter la gueule, comme ce qui s'était produit la veille, étaient trop élevées.
Le deuxième soir était variable. Car en plus d'être un alcoolique misérable, son père était aussi un parieur maladif. Si son compte en banque était vide, il se dépêchait de se rendre au casino illégal le plus proche pour tenter de renflouer ses poches. Et lorsque c'était le cas, il ne revenait pas de la nuit, sa dépendance le rendant incapable de quitter les tables. Ces soirs étaient habituellement assez sûrs et Prompto se permettait de dormir dans son propre lit.
Mais il arrivait aussi que son père ne décide de rester à la maison pour un deuxième soir afin de vider une quantité astronomique de bouteilles.
Bref. Le camion.
C'était son indice, car son père était absolument incapable de marcher plus de deux minutes sans que son rythme cardiaque manque d'exploser : il l'utilisait pour se déplacer partout, même dans les endroits les plus exigus, quitte à rayer les autres véhicules parce qu'il n'en avait rien à foutre.
Pas de camion garé devant la maison, pas de trou de cul dans la maison.
Prompto entama donc la marche jusqu'à chez lui, priant le ciel pour que le véhicule en question ne soit absent.
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La vie était une vraie pétasse.
C'est la conclusion que Prompto fit lorsqu'il vit le camion garé devant la maison, et il le regarda pendant de longues minutes sans bouger, assommé par la révélation qu'il ne pouvait pas dormir chez lui.
Il hésitait entre pleurer ou hurler.
La fatigue l'enveloppait tout entier, pressant sur ses blessures qui vibraient sous sa peau, et il leva les mains pour en frotter les paumes sur les yeux; un mouvement qu'il regretta aussitôt lorsque son œil au beurre noir lui offrit une décharge électrique de douleur jusque dans le cuir chevelu. Il jura.
Il ne voulait pas collectionner les coups. À cette heure, son père devait avoir déjà consommé une quantité obscène d'alcool et il ne souhaitait pas se faire taper sur la gueule deux soirs de suite.
Il accepta son sort à contre cœur et se retourna pour marcher d'un pas abattu vers la rue principale du quartier, où se trouvaient plusieurs commerces ouverts vingt-quatre heures.
Il arrêta son choix sur le classique McDonald's, parce que les employés étaient payés une misère et donc refusaient de jouer à la police avec les types comme lui qui ne faisaient que flâner. Et puis, leur Wi-Fi était gratuit et avait de la gueule.
Dès qu'il mit le pied dans le restaurant, son ventre gargouilla bruyamment et il se plaqua la main sur l'estomac. L'odeur de frites et de burgers était absolument divine et il eut l'eau à la bouche instantanément.
La bonne nouvelle, s'il y en avait une, était que sa paye était prévue être déposée dans son compte en banque à minuit pile. Il décida, sur un coup de tête, après avoir crevé de faim durant toute une putain de journée interminable, qu'il méritait un repas chaud et une bonne dose de gras.
Mais il restait encore huit minutes avant les douze coups de minuit et il dut attendre comme un imbécile devant une employée qui le dévisagea étrangement, feignant d'être indécis sur quoi manger comme s'il s'agissait de la décision de sa vie. Et lorsque minuit passa, il attendit quelques minutes de plus, parce qu'il n'y avait rien de plus horrible que de voir apparaître un gigantesque REFUSÉ sur le terminal avec lequel il payait.
Et quand décida enfin de procéder à son achat, il sua malgré tout à grosses gouttes en fixant la petite machine jusqu'à ce que la transaction soit enfin officialisée.
Quelques minutes plus tard, lorsque l'employé lui remit enfin son repas – une combinaison ingénieuse de tous les articles les moins dispendieux du menu – il se sentit vibrant d'euphorie. Il se dépêcha de rejoindre sa banquette habituelle, devant la grande baie vitrée, pour déballer son précieux festin.
La viande était juteuse, le pain moelleux, les condiments d'une proportion parfaite, et ses yeux roulèrent de jouissance jusqu'au fond de son crâne lorsqu'il y croqua sa première bouchée.
Merci aux dieux, pensa-t-il.
Il avala quelques bouchées lentement, savourant chacune d'entre elles, tout en observant distraitement le va-et-vient des gens marchant dans la rue et la lumière des réverbères les enveloppant avec délicatesse. Puis, au bout d'un moment, il s'essuya rapidement les doigts sur son pantalon et sortit l'ordinateur de son sac pour le poser devant lui.
Venait maintenant la partie la moins agréable du jour de paye. Les factures.
Il attendit longuement que l'ordinateur archaïque ne démarre enfin tout en continuant de grignoter son repas, mais le bien-être que celui-ci lui procurait était déjà en train de s'évaporer.
Il sentit ses tripes se tordre dans son ventre, comme toujours lorsqu'il vérifiait son compte en banque et il soupira bruyamment lorsque les chiffres apparurent devant lui.
Bordel.
Il calcula ses budgets au gil près. Il remboursa en premier sa facture d'électricité – pas au complet, mais le minimum pour que la compagnie ne coupe pas le service, puis fit de même avec l'eau et le gaz. Passa ensuite le téléphone et l'internet, et grinça des dents en voyant qu'ils venaient d'augmenter leur tarif de quelques gils. Il dut se pencher à nouveau sur son budget pour tenter de compenser pour ce nouveau chiffre.
Lorsqu'il arriva à son compte de crédit, il eut envie de pleurer.
La dette du vétérinaire était monstrueuse, et elle avait l'air encore plus horrible lorsqu'elle était combinée à ses achats quotidiens. Il regarda son burger avec dégoût et regretta soudainement d'avoir dépensé pour un repas chaud. Il aurait dû se contenter d'une miche de pain ou de quelque chose de moins extravagant. Quel con qu'il était.
Il termina ses paiements et n'eut pas le courage de regarder le total qui lui restait sur son compte en banque. Il ferma en catastrophe toutes les fenêtres sans même regarder.
Il devait trouver du pognon au plus vite, merde.
Il reprit son burger, mais il ne lui sembla soudainement plus aussi bon qu'auparavant. Il avait un goût amer, celui de la mauvaise décision.
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Il avançait sa dissertation, les paupières tombantes et l'estomac lourd d'une quantité de calories qu'il n'était pas habitué de digérer, écrivant des phrases qui n'avaient pas la meilleure des syntaxes, lorsqu'il fut interrompu par la vibration de son téléphone. Il souleva les sourcils en voyant le nom de son interlocuteur.
Le prince et roi des cons :
"t'as vmt nommé ma chienne ryan reynolds?!"
"wtf"
Prompto :
"c'était supposé être ryan gosling"
Il laissa tomber son téléphone sur la table dans un claquement sec et se plaqua les paumes sur ses yeux.
Putain pourquoi il avait écrit ça?
Imbécile.
Il reprit son téléphone.
Le prince et roi des cons :
"quoi?"
Prompto :
"comment t'as su ça d'ailleurs ?"
Le prince et roi des cons :
"je l'ai emmené chez le vétérinaire et ils m'ont demandé si j'étais bien le propriétaire de ryan reynolds. À cause de toi, j'ai passé pour un vrai crétin."
Prompto roula les yeux. Oh non, le prince ne se remettrait certainement jamais de cette insulte inimaginable.
Bien fait pour lui.
Il ne répondit pas parce qu'il sentait qu'il allait répliquer un truc cinglant qui étirerait la conversation interminablement, et il n'avait pas réellement envie de discuter avec un snobinard imbu de lui-même. Il reprit donc son travail, écrivit quelques lignes, puis les effaça parce qu'elles étaient stupides. Il réécrit son paragraphe de nouveau, effaça une deuxième fois, puis fixa le pointeur pendant une bonne minute.
Putain, pourquoi Ryan Reynolds avait-elle eu besoin de voir un vétérinaire?
Il savait qu'il lui restait plusieurs semaines avant de faire vérifier son plâtre ; Prompto se rappelait la date parfaitement, puisqu'il avait pensé qu'il devait absolument retrouver son proprio avant que cette dépense de plus ne se pointe le bout du nez. Alors pourquoi cette soudaine visite chez le doc?
Il blêmit. Et si son état s'était aggravé? Si elle avait fait une infection? Un caillot?
Il flancha.
Prompto :
"comment va-t-elle?"
Il n'eut pas de réponse et il tapa du pied dans un tic nerveux. Puis :
Le prince et roi des cons :
"elle va bien. La doc a dit que sa patte guérissait normalement."
Il échappa un soupir de soulagement. Mais quelque chose clochait.
Prompto :
"mais pourquoi elle a eu besoin de voir la véto??"
Le prince et roi des cons :
"sans raison particulière. je voulais juste faire un suivi."
Putain.
"Juste faire un suivi" devait lui avoir coûté au moins deux mille gils. Ce type avait du fric à gaspiller.
Au moins, il fut rassuré d'apprendre que Ryan n'avait rien de grave. Et que son proprio prenait bien soin d'elle.
Noctis était peut-être un vrai trou de cul envers les humains, mais il semblait mieux traiter son chien. C'était une consolation.
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Il avait l'impression de passer sa vie dans son cours de physique.
Il n'avait pas réellement plus de périodes de physique que des autres matières, mais le temps passait si lentement dans cette classe qu'il était convaincu qu'une heure à écouter le professeur Barborossé était l'équivalent de cinq heures dans le monde extérieur.
Il baissa les yeux sur son cahier de notes. Il n'y avait écrit que quelques mots disparates et il n'avait aucune idée de ce qu'ils signifiaient. Il soupira.
Il avait envie de dormir. Sa nuit, passée sur une banquette du McDonald's, à serrer son sac à dos contre lui par peur de se le faire voler, ne l'avait pas reposé le moindrement. Au contraire, il s'était réveillé avec un mal de cou insupportable, encore pire que toutes ses ecchymoses.
Il ne travaillait pas ce soir-là – merci aux dieux – et son père n'allait certainement pas résister à l'appel des tables deux soirs de suite; il était donc sûr à quatre-vingt-quinze pourcents qu'il allait pouvoir enfin avait une bonne nuit de sommeil, et putain qu'il en avait besoin.
Il rêvait de dormir plus que tout, et pour une fois, il ne fut pas irrité, mais plutôt envieux, de voir que le prince Noctis se gavait de sommeil sans la moindre hésitation. Non seulement celui-ci s'était-il appuyé le front sur ses bras pour dormir sur son bureau comme à son habitude, mais en plus, il avait eu le culot de se couvrir la tête de son veston.
Quel insolent, putain. Foutu fainéant, qui ne faisait aucun effort et qui allait quand même se faire offrir une note brillante, parce qu'il était le ô combien incroyable prince du Lucis.
Bon, peut-être était-il un peu irrité. Il secoua la tête et reporta son attention sur le professeur.
– Les géodésiques sont les trajectoires vérifiant le principe de moindre action…, expliquait ce dernier d'une voix morne et sans vie.
Les yeux de Prompto se refermèrent. Une seconde.
– …une importance majeure pour la compréhension intuitive d'un espace...
Puis la cloche sonna.
Prompto sursauta si fortement qu'il se frappa le genou sous son bureau, entraînant son matériel qui tomba au sol dans un fracas épouvantable. Il jura et plusieurs collègues de classes, pour la plupart debout et déjà en train de ranger leurs affaires, le dévisagèrent de yeux surpris.
Il regarda autour de lui, confus pendant une seconde. La classe se vidait et le professeur était en train de ranger ses choses dans sa mallette.
Putain. Il s'était endormi. Il ignora l'ironie de la situation – l'épuisement et la paresse n'étaient pas la même chose, se défendit-il intérieurement – et il se leva lentement.
Il se frotta le visage et se pencha pour ramasser son bordel sur le sol. Il rangea le tout rapidement dans son sac et se prépara à quitter, le local déjà vide de ses étudiants, lorsque la voix du professeur Barborossé l'arrêta.
– N'oubliez pas d'inscrire votre nom sur la feuille.
Prompto le regarda d'un air perplexe.
– Pour le projet de mi-année, précisa le professeur en lui montrant un bout de papier sur lequel était inscrite une liste de noms.
– Oh. Heu… Oui, pardon…
Il s'avança vers le pupitre et se pencha sur la feuille en question. Le titre indiquait ÉQUIPES, et, en dessous, deux colonnes de noms.
– Heu. Je peux faire le projet seul?, demanda le jeune homme.
Barborossé rangeait sa mallette d'un geste lent; il ne leva pas les yeux lorsqu'il répondit :
– Non, équipes de deux uniquement.
Prompto soupira. Il ne savait pas en quoi consistait le projet de mi-année exactement – il avait probablement dormi pendant les explications – mais ce travail allait certainement représenter un pourcentage important de sa note finale.
Et cette note finale devait être parfaite s'il voulait décrocher une bourse pour l'université d'Altissia. L'idée de faire le projet avec quelqu'un de moins motivé que lui ne lui plaisait pas du tout.
– Il n'y a plus personne avec qui faire équipe, insista-t-il en faisant un mouvement vague vers le reste de la salle vide.
– Il y a sa majesté le prince Lucis Caelum.
Le visage de Prompto se draina de tout son sang. Il se retourna et découvrit qu'en effet, Noctis était derrière lui.
– Hors de question, répondit-il aussitôt.
Noctis souleva un sourcil. Le professeur Barborossé ignora complètement sa remarque comme s'il n'avait rien entendu; il attrapa sa mallette et tendit un crayon de l'autre main à Prompto.
– Inscrivez vos noms, s'il vous plaît, ainsi que vos numéros d'étudiants respectifs. Je dois quitter.
Prompto se mordit la lèvre. Putain comment avait-il réussi à se retrouver dans ce cauchemar?
– Professeur…., commença-t-il.
Mais l'homme secoua son crayon sous son nez d'un geste irrité et Prompto se tut. Contre son gré, il attrapa le stylo et signa son nom accompagné de son code en bas de la liste. Il déposa le crayon sur la table et Noctis s'avança pour écrire son nom à son tour, sans rien dire, à côté du sien.
– Merci messieurs, fit le vieil homme en reprenant son stylo et sa feuille. Bonne chance à vous deux.
Prompto le regarda quitter comme s'il venait d'entendre sa condamnation à mort.
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– Putain de bordel de merde, l'univers m'en veut, c'est pas possible!
– C'est pas la fin du monde, Prom, répondit Cindy.
Les deux amis étaient assis à une table de la cantine. Prompto s'était payé un petit sandwich au jambon, mais il était si énervé qu'il l'avait presque oublié.
– Oui c'est la fin du monde! Je dois remonter ma note en physique, sinon je perds toute chance d'obtenir une bourse, et je serai coincé dans ce quartier pourri pour le restant de mes jours. Et il fallait que je fasse équipe avec le pire fainéant de l'histoire, merde! Il a dormi la totalité de ses cours, c'est sûr et certain qu'il est nul!
Cindy le regarda d'un air navré.
– Est-ce que ça te remonterait le moral si je te donne une de mes frites?
– Oui.
Elle roula les yeux alors que Prompto en attrapa trois en même temps et les enfonça dans sa bouche d'un coup.
– Ça fonctionne?, demanda la jeune fille.
– Non, répondit le blond en mastiquant, tout en volant quelques frites de nouveau.
– Pourquoi t'en reprend alors?!
– Tu m'offres des frites gratuites, Cindy, réfléchis putain!, répondit-il en brandissant l'aliment comme s'il s'agissait d'une évidence.
Elle se pencha au-dessus de la table pour le frapper d'un poing à l'épaule, mais Prompto ne réagit pas.
– En plus, ce petit con doit être habitué à se faire servir en tout temps, se plaignit le jeune homme en s'enfournant sa deuxième cueillette dans la bouche. Ça va être l'enfer de travailler avec lui.
Il tendit la main de nouveau vers les frites, mais Cindy dressa sa fourchette.
– Tu touches encore à mon assiette et je te plante ce truc dans la main.
– Mais mon moral n'est pas complètement remonté!
– T'es une cause perdue, Prom.
Le jeune homme soupira, puis souleva son sandwich pour en prendre une bouchée, mais s'arrêta.
– S'il croit que parce qu'il est monsieur le prince, je vais faire tout le boulot pour lui, il peut aller se faire foutre.
– Putain Prom, avoir su que tu comptais être aussi dramatique aujourd'hui, j'aurais amené mon violon.
– Je déteste ce type.
– Ouais, j'avais compris les trois cents premières fois.
Prompto soupira bruyamment et mordit enfin dans son sandwich. Il était fade et mou, mais c'était le dernier de ses soucis.
– En plus, j'ai un horaire de fous, se plaignit-il en mastiquant. J'ai pas le temps pour des rencontres d'équipe… Ah merde.
– Quoi?
– Ce soir, c'est mon seul soir de congé avant… je ne sais pas quand. Je n'aurai pas le choix de le rencontrer ce soir même, sinon on va déjà prendre du retard.
Génial, quelle journée de merde. Il avait planifié passer sa soirée à se relaxer en regardant une série quelconque sur Netflix, question d'enfin se remettre de la fatigue qu'il avait accumulée durant ces deux derniers jours. Mais il semblait que le destin ne lui permettait aucun répit. Il attrapa son téléphone.
Prompto :
"peux tu me rejoindre à la biblio de l'école après les classes ce soir pour commencer le projet de physique?"
– Tu sais, commença Cindy en déchirant un sachet de ketchup pour le verser sur ses frites, je crois que tu dois le vouvoyer… C'est le prince, non? Peut-être que tu devrais te renseigner sur comment t'adresser à lui… Tu sais, le protocole et tout et tout.
Prompto la dévisagea comme si elle venait de dire la chose la plus stupide qu'il n'avait jamais entendu de sa vie. Ce qui était précisément le cas.
Cindy roula les yeux.
– Il est l'héritier de la couronne, insista-t-elle, et le futur roi du Lucis. Tu peux quand même pas t'adresser à lui en l'appelant Yo mec, dude, bla bla.
– Cindy, t'as pas idée de l'effort que je dois faire pour ne pas l'appeler Connard. Si je dois l'appeler son altesse, je vais faire un arrêt cardiaque.
Son téléphone vibra et Prompto ignora la réplique de Cindy.
Le prince et roi des cons :
"déjà? mais la date de remise est dans un mois?"
Prompto :
"j'ai un horaire complexe et je veux pas prendre de retard"
– Tout ce que je dis, c'est de te rappeler qu'il est le prince.
– J'écouterai pas les conseils d'une fille qui fout son ketchup directement sur ses frites. Putain, c'est quoi ton problème? Ça gâche le croustillant!
– Qu'est-ce que t'es con.
Le prince et roi des cons :
"ok, je dois demander la permission, je te reviens"
Prompto dévisagea son téléphone.
– Il doit demander la permission pour aller à la biblio après les cours?!
Cindy se pencha pour lire le message.
– J'imagine qu'être prince a quand même quelques inconvénients…, commenta-t-elle.
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La bonne nouvelle était que Noctis obtint la permission de se rendre à la bibliothèque de l'école après les cours.
La mauvaise était qu'il était accompagné d'Ignis-le-psychopathe.
Prompto n'osa pas demander qu'est-ce que le conseiller faisait là, mais il ne put s'empêcher de dévisager l'homme qui prenait place sur une table voisine, dans la grande salle de la biblio dédiée aux travaux d'équipe, sans se choisir de livre ou même sortir son téléphone.
Il portait toujours ses gants étincelants. Comme un tueur en série.
Noctis se racla bruyamment la gorge et le jeune homme sortit de sa transe pour se retourner vers lui. Son nouveau coéquipier portait un uniforme scolaire à l'apparence neuve – rien à voir avec la version rapiécée que Prompto était forcé d'utiliser – et une cravate au nœud immaculé, serré sur son cou. Sa coiffure habituelle était parfaitement placée, malgré l'heure tardive, et Prompto se demanda brièvement si le prince avait fait un arrêt chez un coiffeur au courant de la journée.
Il glissa une main nerveuse sur sa tête, soudainement conscient de sa propre apparence échevelée. Il avait bien tenté de sauver sa coiffure dans la salle de bain du McDonald's, mais le résultat avait été peu impressionnant.
Il secoua la tête et ouvrit son sac à dos pour y sortir ses manuels scolaires, puis son cahier de notes, qu'il posa sur la table.
– C'est quoi ça?, demanda le prince, fronçant les sourcils devant le carnet aux pages fanés.
– Mon cahier de notes, répondit Prompto d'un ton absent.
– Tu écris tes notes à la main? Mais pourquoi tu n'utilises pas un ordi?
Au même moment, Prompto sortait l'ordinateur portable de son sac à dos, celui-là même qu'il avait loué la veille à la biblio, pour le poser sur la table.
– Putain, c'est quoi, cette brique de fauché?
Le commentaire réussit à irriter Prompto, qui claqua de la langue.
– C'est la raison pour laquelle j'écris mes notes à la main, t'es content?!
– Oh.
Wow. Ce projet allait être pénible, Prompto avait déjà envie de frapper son partenaire.
– J'ai heu..., balbutia Noctis en tendant un bout de papier froissé qu'il tira de son sac. J'ai la feuille explicative… pour le projet.
Au moins le type allait servir à quelque chose, puisque Prompto avait dormi durant les explications. Il attrapa le papier et lut rapidement.
Il y avait un choix entre quatre sujets pour lesquels il fallait tester des théories, toutes plus compliquées les unes que les autres, et Prompto y reconnut immédiatement la signature de Barborossé; un projet exigeant, complexe, ennuyant et pénible. Génial.
– Qu'est-ce qui t'intéresse là-dedans?, demanda le blond.
– Huh?
– Il faut choisir parmi les quatre sujets… Il y en a un qui te plaît plus?
Noctis fronçât les sourcils et reprit le papier pour lire son contenu. Le silence s'étira interminablement, et Prompto commença à taper du pied. À cette vitesse, ils y passeraient la nuit.
– Il y a bien un sujet qui te sonne plus de cloches que les autres?, insista-t-il.
– Heu, en fait… Je…
Puis le prince soupira bruyamment et abaissa la feuille.
– Je n'y comprends rien. Pas un mot.
– Qu'est-ce que tu comprends pas?
– Tout. Je… Je ne suis pas… heu, pas très bon en physique.
Prompto roula les yeux. Évidemment que le type n'était pas très bon en physique. Il avait dormi durant la totalité de ses classes.
– Écoute, mec, commença-t-il.
Ignis claqua de la langue et Prompto s'interrompit pour le regarder brièvement, mais l'homme garda le silence.
– Écoute, reprit Prompto. Je ne vais pas faire tout le boulot seul, ok? Je m'en fous que tu sois un prince ou un putain d'astronaute.
Le visage de Noctis se transforma aussitôt. Il croisa les bras sur sa poitrine et il dressa le nez dans un geste snobinard.
– J'ai jamais dit que je n'allais pas faire ma part, déclara-t-il d'un ton frustré.
– Cool, parfait. Donc, quel sujet?
– Je ne sais pas!
– Tu veux me faire croire qu'il y a aucun mot là-dedans qui t'interpelle?
– Choisis, toi, merde!
– Je viens de te dire que je ne veux pas faire tout le boulot!
– D'accord, alors! Le truc sur le, le, l'énergie circulaire!
Il eut une pause.
– Tu veux dire l'énergie cinétique?, demanda Prompto.
– Peu importe.
– Tu sais c'est quoi, au moins?
– Non. T'es content?
Prompto le fixa pendant un moment, silencieusement, se demandant s'il exagérait par exaspération.
– L'énergie cinétique?, insista-t-il prudemment. Le rapport entre la masse et la vitesse?
– Je te dis que je ne sais pas c'est quoi, confirma Noctis d'un ton colérique.
Prompto sentit son visage blêmir, la révélation se faufilant lentement sous son épiderme.
Bordel, l'énergie cinétique était une notion de base. Un minimum à connaître lorsqu'on parlait de science au sens large. Si le prince ne savait pas de quoi il s'agissait, ils étaient plus que dans la merde.
Prompto se laissa tomber sur le dossier de sa chaise, ses yeux tombant sur les livres devant lui. Il s'était attendu que son partenaire ne soit pas particulièrement talentueux en physique, mais pas complètement inapte, merde.
Sa plus grande crainte se réalisait. Sa note allait en souffrir. Et sa candidature de bourse par extension.
Tout à coup, l'idée de faire le projet seul pour ensuite ajouter le nom de Caelum comme auteur à côté du sien lui sembla moins monstrueuse. C'était peut-être la seule façon de se sortir de ce merdier dans trop perdre de plumes, mais…. Bordel, il ne voulait pas être l'un de ceux qui encourageait le prince à ne rien faire du tout, comme toute cette foutue école le faisait déjà. Cette pensée lui était intolérable.
Le blond se frotta le visage, soupira bruyamment. Puis, après quelques secondes de réflexion, il se pencha vers l'avant et ouvrit son manuel au premier chapitre, glissant le livre entre les deux garçons.
Et puis, merde.
– Ok, je vais t'expliquer, alors.
Noctis lui fit un regard surpris, puis hocha la tête et se pencha sur la page devant lui.
Prompto commença par lui expliquer les termes scientifiques les plus courants, la base pour comprendre tout le reste, et, alors qu'il s'attendait à ce que son coéquipier forcé ne se mette à râler à tout moment, Noctis resta silencieux. Ils passèrent la première heure ainsi, penchés vers le même livre, leurs têtes presque collées.
Prompto tenta de ne pas penser au fait qu'ils perdaient un temps ridicule. Mais il dut cependant avouer que le prince n'était pas aussi insupportable qu'il l'avait imaginé.
Celui-ci était étonnement attentif. Et respectueux, ce qui fut encore plus surprenant. Il posait même des questions appropriées, semblant enclin à vouloir bien comprendre ce que Prompto lui expliquait, et ce dernier eut la réflexion que tout n'était peut-être pas perdu.
En fait, tout se déroula à merveille jusqu'à ce que Noctis ne décide de dénouer sa cravate et d'enlever son veston. Et tout à coup, Prompto prit conscience de leur proximité.
Son cerveau court-circuita.
Il ne put s'empêcher de remarquer les muscles sous la chemise du prince. Celui-ci s'entraînait régulièrement, c'était évident, à voir ses pectoraux développés qui étiraient le tissu sur son torse, et ok, putain, c'était sexy, et peut-être que Prompto était en manque de contact physique parce qu'il était impossible qu'une chemise trop serrée lui fasse cet effet, et pourtant, merde, la masse inerte, disait-il, voilà, rien de mieux qu'une résistance de la matière au changement de vitesse pour se remettre sur le droit chemin.
La masse théorique. Pas la masse musculaire.
Ce putain de bouton allait exploser, ce n'était pas possible.
– Ça va?, demanda soudainement Noctis.
Prompto sursauta et devint rouge fluo, et merde, c'était quoi son problème?! Il agissait comme un putain de pervers, qu'est-ce qui lui prenait tout à coup?
Il se racla la gorge.
– Désolé, je suis fatigué, s'excusa-t-il en faisait un vague mouvement de la main.
Oui, voilà la raison, il était complètement lessivé après sa nuit de merde.
– Tu veux qu'on arrête?
– Non, non, c'est ok.
Il leva la tête vers son coéquipier et croisa son regard. Ses yeux, bleus cobalt, étaient absolument hypnotisant – presque irréels – et pendant une seconde, il eut l'impression d'y déceler de l'inquiétude. Et peut-être même un soupçon de pitié.
Putain, pensa Prompto, il devait avoir l'air d'une merde avec son visage massacré, les ecchymoses qui devenaient jaunes et la lèvre fendue qui gonflait sa peau, en plus de ses cheveux en batailles et son uniforme froissé.
Le regard soutenu de Noctis le rendit mal à l'aise.
– Ça va, j'ai dit!, répéta-t-il plus brusquement qu'il ne l'avait voulu. On perd assez de temps comme ça.
L'inquiétude disparut aussitôt pour être remplacée par le fameux regard arrogant que Prompto connaissait déjà trop bien, et le jeune homme se pencha à nouveau sur son livre, n'ajoutant rien de plus.
Puis, ils reprirent leur leçon où ils en étaient.
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Lorsque Prompto arriva chez lui ce soir-là, il fut soulagé de constater que le camion était bel et bien absent. Il grimpa les trois marches menant à sa porte d'entrée de pas lourds avec l'impression qu'il escaladait une montagne, et appuya son épaule contre la porte pour la déverrouiller.
Il était tard, beaucoup plus tard qu'il avait planifié rentrer; le prince et lui étaient restés jusqu'à la fermeture de la biblio, le nez enfouis dans les manuels de physique, n'abandonnant que lorsque la bibliothécaire leur avait demandé de quitter.
Et maintenant, il était fatigué. Les deux derniers jours chaotiques, les poings sur la gueule qu'il avait reçus, la nuit sur la banquette du McDonald's… C'était beaucoup. Et ça le rattrapait rapidement.
Il retira ses chaussures et jeta un coup d'œil circulaire à la cuisine. Des cartons de jus et des bouteilles translucides vides traînaient sur la table, aux côtés de verres collants et d'assiettes sales. Un chaudron à moitié rempli de pâtes avait été abandonné sur la cuisinière, son contenu figé et peu appétissant.
Prompto se frotta les yeux d'un geste découragé. Il ouvrit la porte du congélateur et retrouva un plat de prêt-à-manger qu'il plaça dans le micro-ondes.
Sous le son du bourdonnement monotone de l'appareil, il ramassa les bouteilles et les déchets traînant sur la table, les jetant à la poubelle et au recyclage de mouvements lents et fatigués, puis rinça la vaisselle qu'il laissa tremper dans le lavabo. Il ne toucha pas à la casserole, incertain si son père avait l'intention de manger à son retour des tables, et ne voulant pas risquer sa colère si jamais il ne retrouvait pas son repas.
Le micro-ondes sonna bruyamment dans le silence de la maison et Prompto s'assit à la table pour manger. Il baissa les yeux sur le coin de la cuisine où Ryan avait l'habitude de déguster son propre repas, et il soupira.
Il aurait voulu que la chienne soit là pour lui tenir compagnie, pour le faire rire avec sa maladresse et son excitation continue. Pour qu'elle frotte sa tête contre son mollet dans sa façon d'exiger des grattouilles sur les oreilles, pour qu'elle sautille de joie dès que Prompto lui adressait la parole.
Il avait toujours tenté de se convaincre qu'il préférait la maison vide; mais la vérité était que la solitude lui était insupportable.
Il termina son plat, jeta l'emballage et monta l'escalier de pas lents pour finalement se laisser tomber sur son lit, où il s'endormit aussitôt sans même avoir eu le temps d'enlever son uniforme.
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Merci d'avoir tout lu ceci! :)
Charlie xxx
