. . . . .
« Donc Antoine s'est montré plutôt rassurant… ?
- Oui ! Comme d'habitude en fait… Mais je peux pas m'empêcher de me dire qu'il ne pensait pas ce qu'il disait…
- Quel intérêt aurait-il à vous mentir ?
- Je sais pas…
- Est-ce que vous l'avez vu regarder une femme sur cette plage ? S'y intéresser ?
- Non… Fin' je pense pas…
- Bien. Donc pourquoi mentirait-il ?
Elle haussa les épaules en baissant la tête.
- Le problème c'est que… je peux pas m'empêcher de penser au passé… Peut-être que sans ça… J'arriverai à avoir totalement confiance…
- Vous évoquez le passé… Vous diriez qu'il y a eu un évènement en particulier qui a déclenché ces doutes ?
- Oui… Mais je… commença-t-elle difficilement. Revivre ça… J'ai les images en tête et…
- Vous n'êtes pas obligée de parler si vous ne vous sentez pas prête.
- Si… Il faut bien…
- Alors je vous écoute…
- J'ai été trompée. Par mon premier mari. Le père de mes enfants… On était à Singapour. J'avais tout quitté pour… pour le suivre et… un soir je devais à tout prix lui parler. Je suis allée à son bureau et… je suis tombée nez à nez sur leurs ébats. Super jeune… Super jolie aussi… Je… Je me suis sentie trahie, humiliée… Et ça faisait des mois que ça durait et j'avais rien vu… Pendant des mois il me disait qu'il m'aimait, que j'étais la plus belle… Et par derrière… Il faisait ça…
- En effet, une tromperie laisse forcément des séquelles et entaille l'estime de soi. Comme vous l'avez dit, c'est une vraie humiliation. Et la confiance est brisée. Et dieu sait que la confiance est primordiale dans une construction à deux…
- Mais je lui fais confiance… C'est juste que je peux pas m'empêcher d'avoir peur que… que ça refasse pareil. Donc je ne préfère pas prendre le risque de m'engager totalement… Je veux pas revivre ça… J'ai trop perdu cette fois-là…
- Justement… Vous évoquez le vécu… Comment avez-vous réagi face à cette situation ?
- Mal ? se contenta-t-elle de répondre à l'interrogatif.
- Vous lui en avez voulu ?
- Hum… Au début oui… Puis après c'est à moi que j'en ai voulu, d'avoir rien vu. Et d'imposer ça à mes enfants aussi…
- Imposer quoi ?
- Cette séparation. Je l'ai quitté. J'ai quitté Singapour en prenant les enfants avec moi… Ça paraît peut-être égoïste mais… sur le moment c'était presque… vital…
- Il fallait s'éloigner du mal. C'est quelque chose de presque normal. Beaucoup réagissent de cette manière.
- Oui…
- Donc vous êtes revenue en France ?
- Oui. Je me suis installée à Sète. J'ai repris le travail après 10 ans de disponibilité. C'était un peu un défi de repartir à zéro…
- Et ce défi, vous pensez l'avoir relevé ?
Elle acquiesça en silence.
- Ça a pas été facile mais j'ai réussi à éduquer mes enfants, seule. J'ai mis du temps à m'intégrer mais j'ai fini par réussir à me faire une place au travail. Je me suis fait des amis aussi…. Non le seul défi que j'ai pas réussi c'est… me reconstruire avec quelqu'un… enfin d'une manière durable je veux dire.
- Oui parce que lors des précédentes séances, vous m'aviez évoqué plusieurs hommes qui ont partagé votre vie… Donc ça signifie que vous avez réussi à refaire confiance.
- Hum…
- Vous n'avez pas l'air convaincue.
- C'est juste que je réfléchis et… entre mes débuts à Sète et maintenant… J'ai l'impression de ne pas vraiment avoir évolué…
- Dans quel sens ?
- J'ai jamais réussi à vraiment m'engager avec un homme au final.
- Pourtant, vous vous êtes remariée, non ?
- Oui mais pas pour les bonnes raisons. La preuve, j'ai hésité à dire oui à la mairie… Mais quand je me suis retournée et que j'ai vu tout le monde je… j'me suis dit que j'pouvais pas leur faire ça alors j'ai accepté.
- Vous en aviez envie de ce mariage ?
- Disons que j'ai fini par me convaincre que c'était une bonne chose pour moi et je me suis dit qu'à force, je m'y habituerais.
- Mais vous ne vous y êtes pas habituée ?
- A partir du moment où vous faites tout pour déserter la maison et où vous êtes en train de penser à un autre alors que vous êtes dans les bras de votre mari… C'est que non…
- C'est ce dont nous avions parlé la dernière fois… se remémora-t-il en tournant la page de son dossier.
- Oui… confirma-t-elle les larmes aux yeux. J'lui ai fait du mal avec ce mariage hein…
- Il vous l'a dit ?
- Non… Enfin… Oui… Je l'ai compris après… Puis moi aussi je me faisais du mal… Au fond, j'espérais simplement qu'Antoine se déclare…
- Et pourquoi ne s'est-il pas déclaré ?
- Les contingences de la vie… ? proposa-t-elle.
- Je vois… répondit-il en griffonnant son bloc note.
- D'ailleurs… Je… Je voulais votre avis sur quelque chose…
- Je vous écoute.
- Voilà je… J'ai pas dit à Antoine que j'avais entamé cette thérapie… J'arrive pas à assumer que j'ai besoin d'aide et je préfère le faire en silence mais… en même temps j'ai envie de lui prouver que je travaille sur mes problèmes… J'ai peur que si je lui parle pas, il décide de passer à autre chose et… même si je le fais pour moi, c'est surtout pour qu'on reparte sur une base saine tous les deux…
- Et bien peut-être que vous pouvez simplement lui dire que vous travaillez sur vos problèmes, sans entrer dans les détails. Il n'est pas obligé de tout savoir. L'important, c'est la démarche que vous venez d'entreprendre.
- Mais c'est pas quelque chose de facile à dire…
- Si vous vous sentez plus à l'aise derrière un téléphone, il reste cette alternative.
- Hum… Mais en même temps… Je peux pas lui imposer de m'attendre…
- Vous ne lui imposez pas. Vous faites simplement un état des lieux de votre situation en sous-entendant que vous êtes en train de travailler à un potentiel changement… pour vous deux…
- C'est vrai…
- Libre à lui de décider de vous attendre ou non…
- Je crois qu'en fait ça me fait peur…
- De lui annoncer ?
- Oui… Et surtout de savoir si je vais réussir un jour à lui offrir ce qu'il veut. Et de savoir s'il a envie de m'attendre… ou non… »
. . . . .
Candice ressortit de sa séance quelque peu secouée. Les mots du psy résonnaient dans son esprit et la poussèrent finalement à tapoter sur son clavier virtuel. Elle hésita avant d'envoyer son texto et les quelques mots finirent par arriver sur le lieu de travail du commissaire.
« Alors ce week-end ? Tu comptes faire quoi ? demanda Marquez avec engouement.
- Euh je… Ah ! Excuse-moi… répliqua-t-il en sentant son téléphone vibrer dans sa poche. »
Antoine s'empara de son téléphone et lut le message de son ex-compagne « Salut, j'aimerais te parler de quelque chose… Je sais que tu as beaucoup de travail mais, si en fin de soirée tu as du temps à m'accorder… Appelle-moi… ». Perplexe, il le verrouilla et baissa les yeux, l'esprit perturbé par l'annonce qu'elle voulait lui faire.
« Ça va ? osa le capitaine gêné.
- Ouais… confirma-t-il. C'est… Fin' c'était Candice… balbutia-t-il.
- Ah ?! Vous avez discuté depuis ?
Antoine hocha négativement la tête, les yeux rivés sur son café.
- Je sais pas… Elle veut me parler…
- Bah c'est positif ! Non ?!
- Je sais pas… J'crois que cette fois c'est vraiment fini…
- Ça fait combien de temps que t'es parti ?
- Presque un mois… Et jusqu'à maintenant… J'ai eu aucunes nouvelles…
- T'as essayé d'en prendre ?
- Bah non… Fin' j'allais pas revenir vers elle… J'ai été clair de toute façon…
- Mais t'en as envie ?
- De ?
- Revenir vers elle ?
- À ton avis…
- Ouais…
- T'as des nouvelles toi ?
- Non… Enfin elle dînait avec Nathalie ce midi… Et elle l'a régulièrement au téléphone…
- Et alors… ? Elle a rien dit sur moi… ? demanda-t-il avec espoir.
- Bah elle est pas bien quoi… Candice sans Antoine… C'est pas vraiment Candice…
- Hum… Et Antoine sans Candice… C'est pas vraiment Antoine… répliqua-t-il dubitatif. »
La fin de journée passa rapidement et Antoine préféra attendre le milieu de soirée pour la contacter. Il observa sa fille occupée devant le miroir de la salle de bain et s'exila à l'étage où il s'installa sur son lit. Il sortit son téléphone de sa poche et le joignit rapidement à son oreille.
« Allô ? entendit-il faiblement.
- Salut… lâcha-t-il d'une manière austère.
- Euh… Salut… Je… désolée de te déranger…
- Ça va, t'inquiète pas… C'était calme aujourd'hui.
- Ah oui… J'étais surprise que tu m'appelles si tôt… lâcha-t-elle ironique pour détendre l'atmosphère.
- Euh… Tu voulais me parler ?
- Oui… »
« Oui » avait-elle répondu d'une manière évidente. Pourtant, entrer dans le vif du sujet n'était pas évident. Alors elle se mura dans le silence sans se rendre compte que derrière le combiné Antoine attendait des explications… Étonnée de son mutisme, Antoine fronça les sourcils et s'assit sur le rebord de son lit.
« Candice ? l'interrogea-t-il à nouveau, perplexe.
- Oui… Pardon… Je… Voilà… En fait j'ai bien réfléchi à tout ce que tu m'as dit et… t'avais raison… Je… J'pouvais pas continuer comme ça… et je voulais juste te dire que j'avais compris et que je travaillais dessus… pour que ça change… »
Étonné, Antoine haussa les sourcils. Visiblement, le commissaire ne s'attendait pas à cette soudaine prise de conscience. Il acquiesça simplement, partagé entre satisfaction et surprise. Mais il connaissait Candice et ses techniques… Alors il fallait s'assurer que cette fois, ses paroles soient véridiques.
« Pourquoi maintenant ? Plutôt que y a quelques semaines ou… quelques mois ? lui demanda-t-il frontalement.
- Baaaah… Parce que j'ai compris que t'es parti à cause de moi et… Je me dis au fond de moi qu'on a toujours une chance tous les deux mais peut-être que j'espère pour rien finalement…
- En fait ce qui est triste… C'est qu'on soit obligés d'en arriver à ce stade pour que tu te décides à changer…
- Ça te fait pas plaisir ? osa-t-elle les yeux embués par les larmes.
- Je sais pas… Cette histoire de changement je l'ai déjà entendu des centaines de fois Candice…
- Sauf que cette fois, je te jure que c'est pas pareil… confessa-t-elle sans oser être explicite.
- Donc ça veut dire que tu t'es enfin rendu compte de certaines choses… Et… C'est bien... Maintenant j'espère que tu viendras à bout de… de ces problèmes.
- Ouais… répondit-elle en acquiesçant. »
Antoine ne renchérit pas. Laissant une Candice paniquée de l'autre côté du combiné. La blonde sentait malheureusement la fin de conversation arriver et d'une manière inévitable elle ne voulait pas raccrocher. Il fallait donc rapidement trouver un moyen pour relancer la discussion. Et dans ce genre de situation, l'originalité n'était clairement pas de mise.
« Et sinon… Tu vas bien ? Et ta fille ?
- Ça va… Suzanne va bien même si elle a eu du mal à accepter la situation…
- Je comprends. C'est difficile pour tout le monde.
- Ouais…
- Et au boulot ? Fin' Nath m'a dit que vous aviez trouvé quelqu'un pour me remplacer… ça doit vous alléger un peu le travail…
- Oui. Une recrue de Toulouse. Pour l'instant ça va… elle bosse bien et le courant a l'air de bien passer avec l'équipe.
- Tant mieux… se força-t-elle à répondre. Vous avez de la chance vous…
- C'est toujours tendu avec ton commissaire ?
- Ouais… C'est sûr que je préférais largement celui de Sète…
Antoine esquissa un sourire.
- Oui… Enfin celui de Sète a peut-être été un peu trop gentil parfois quand même…
Elle rigola doucement.
- Écoute, on ne peut pas plaire à tout le monde hein…
- C'est vrai…. sourit-il.
- Ah oui ! Emma et Sacha vont se marier… lança-t-elle fièrement.
- Je sais…
- Ah bon ? s'étonna-t-elle. Ils te l'ont dit ?
- Sacha est venu me voir au bureau y a quelques semaines… Il voulait des conseils sur le sujet…
- C'est gentil de l'avoir aidé… répondit-elle émue.
- Ça me faisait plaisir… Puis j'aime bien les histoires d'amour qui finissent bien... lança-t-il en sous-entendu.
- Hum… répliqua-t-elle en esquissant un sourire ému.
- J'espère juste qu'Emma la fera pas tomber dans l'eau, sa bague…
Elle rigola doucement.
- Je vais lui dire de faire attention… Puis elle est sûrement plus douée que sa mère pour ces choses là...
- Mais peut-être que sa mère se complique un peu trop la vie aussi... non ?
- C'est pas un modèle... Mais elle prend des cours... pour s'améliorer...
- Papa ?! On mange quand ? J'ai faim ! entendit-elle crier derrière le combiné.
- J'arrive chérie !
- Suzanne à l'air affamé…
- Ouais… en plus elle a eu gym tout à l'heure…
- Ah ! Bon… Bah je vais pas vous embêter plus longtemps alors…
- Ouais… Tu les féliciteras de ma part ?
- Bien sûr…
- Bon… commença-t-il avec amertume. Passe une bonne soirée… Et… Ça m'a fait plaisir de t'entendre…
- Moi aussi… répondit-elle partagée entre surprise et satisfaction.»
« Tu me manques » hurla-t-elle silencieusement dans sa tête. Le son ne sortit pas, bien trop peureux pour s'aventurer en terrain miné. Candice ravala sa salive et contint les larmes qui menaçaient de dévaler ses joues. Elle ne voulait pas qu'il raccroche. Pas maintenant alors qu'elle ne savait même pas quand elle aurait l'occasion de lui parler à nouveau… Pourtant, la conversation semblait arriver sur sa fin… La résignation la poussa désormais à le saluer et lui souhaiter une bonne soirée. Le commissaire lui rendit la pareille et raccrocha, non sans une once d'amertume dans la voix… Oui Antoine Dumas s'était encore une fois montré un peu rude mais cette attitude était réfléchie. Il voulait qu'elle aille jusqu'au bout de son cheminement, seule, et qu'elle revienne lui prouver que ses problèmes étaient réglés.
« C'était qui ? demanda la petite à son père qui descendait les escaliers.
- Où ? répondit-il l'air ailleurs.
- Au téléphone.
- Ah ! Euh… C'était pour le travail ma chérie…
- On les mange les crêpes alors ? s'enthousiasma-t-elle en s'installant à table.
- Bien sûr qu'on les mange ! Elles sont prêtes… Elles attendaient que tu sortes de la douche…
La petite approcha son assiette et croqua dans la première crêpe posée devant elle. Antoine éclata de rire.
Alors ? Elles sont bonnes ?
- Ouais ! Mais les autres qu'on avait mangé avant elles étaient encore meilleures.
- Lesquelles ? s'étonna-t-il.
- C'était quand on avait fait la soirée crêpe avec Candice, à la maison.
- Ah… Oui mais c'est normal… Candice c'est la spécialiste des crêpes… expliqua-t-il en croquant dans une crêpe à son tour.
- Ça te manque à toi aussi ? demanda-t-elle sérieusement.
- De quoi ?
- Les soirées tous les trois, ici…
- Je t'ai déjà expliqué chérie…
- Je sais…
- Oui ça me manque beaucoup mais pour l'instant c'est comme ça. Candice a plein de problèmes à régler et peut-être qu'une fois qu'elle aura terminé… Ce sera comme avant…
- Ce serait bien…
- Ouais ! confirma-t-il en caressant sa joue.
- Mais je dis pas ça juste pour les crêpes hein !
- Je sais ! rétorqua-t-il dans un éclat de rire. »
. . . . .
Candice ressortit de sa chambre le sourire aux lèvres. Entendre sa voix… Voilà quelque chose qui lui avait manqué… La conversation s'était bien passée… Ils avaient même presque rigolé ensemble… Elle qui appréhendait ce coup de fil se satisfit finalement du résultat et songea à ses paroles jusqu'à ce que sa fille ne la replonge dans la réalité.
« Eh bah… siffla Emma. On avait pas eu un sourire comme ça depuis des semaines… plaisanta-t-elle.
- Pas du tout… se défendit-elle difficilement.
- Tu lui as dit alors ?
Elle acquiesça en silence.
Et alors ?
- Il a dit que c'était bien !
- Et donc ? continua sa fille.
- Bahhh… Il a dit que c'était bien ! Mais s'il a dit que c'était bien c'est parce que y a encore une chance non ? Bon il a pas répondu clairement mais… s'il dit que c'est bien, c'est qu'il veut que je continue… pour que je change et…
- Maman !? T'es en boucle là !
- Mais oui mais et toi qu'est-ce que tu comprends ?
- J'en sais rien ! Je sais même pas ce que tu lui as dit ! répliqua-t-elle en rigolant.
- Je lui ai dit que je travaillais sur mes problèmes pour que ça change et… il a dit que c'était bien et qu'il espérait que je les règle… C'est positif non ?
- Bah oui sûrement…
- Tu m'aides pas là…
- Bah je suis pas dans sa tête…
- Ça se trouve il a dit ça pour me faire plaisir… bouda-t-elle.
- C'est pas le genre…
- Mouais… répliqua-t-elle peu convaincue. Et… J'lui ai dit pour votre mariage… Il était content…
- C'est gentil… Et peut-être que d'ici là vous serez réconciliés…
Candice haussa les épaules, gênée.
- J'espère… chuchota-t-elle. »
. . . . .
Un mois plus tard
« Papa… tenta Suzanne en grimpant sur le lit alors qu'elle le voyait remuer dans tous les sens. Papa… Oh ! Papa… continua-t-elle pour le réveiller.
- Chaton ?! hurla-t-il en se réveillant en sursaut.
- Chaton ? répéta la petite perdue. C'est pas moi chaton… c'est Candice…
- Pardon je…
- Tu faisais un rêve ?
- Euh… Ouais…
- Câlin… lança-t-elle en se jetant dans ses bras »
Antoine ouvrit ses bras et réceptionna sa fille en souriant. Blottie contre son torse, il l'entendit soupirer et la vit fermer ses yeux de satisfaction. C'était ce genre de dimanche matin que le commissaire adorait. Ceux pendant lesquels la tendresse s'exprimait sans retenue. Pourtant, ce matin-là, Antoine sentait qu'il lui manquait quelque chose. Il ferma les yeux et plongea dans ses souvenirs nocturnes, l'obligeant désormais à distinguer l'imaginaire de la réalité… Il venait encore une fois de rêver d'elle… Cela faisait trois nuits... Trois nuits pendant lesquels les images du passé revenaient le chatouiller. Comme un rappel de son existence… Comme le signal d'une absence insupportable. Regrettait-il cette décision ? Peut-être pas… Mais… Au bout de presque deux mois, le manque se faisait ressentir. Le commissaire avait beau essayer de feindre l'ignorance, Candice demeurait dans son esprit. Comme une marque incrustée et indélébile. Il était clair qu'il l'avait dans la peau cette femme… Mais fierté oblige, il était hors de question de l'appeler après s'être montré si catégorique. Alors, il attendait… Sans savoir si le changement tant attendu arriverait un jour… Fatigué d'espérer, il souffla. La situation était compliquée et pour couronner le tout, sa fille le ramena à la réalité.
« T'as rêvé de Candice ? chuchota la brunette contre lui.
- Ouais… avoua-t-il en souriant.
- C'est parce que t'aimerais bien qu'elle revienne avec nous… Moi aussi des fois je rêve d'Hugo…
- Hugo ? l'interrogea-t-il.
- Mon copain de l'année dernière… Il a déménagé loin… Tu te souviens ?
- Ah oui…
- Pourquoi tu l'appelles pas ?
- C'est compliqué chérie… souffla-t-il en caressant ses cheveux alors que son téléphone vrombissait sur la table de nuit. »
Antoine bafouilla quelques excuses et s'éloigna de sa fille pour récupérer son portable. Il glissa l'écran devant ses yeux et jeta un œil à la petite qui l'observait d'un sourire malicieux.
« C'est peut-être elle ! s'enthousiasma-t-elle en souriant.
- Hum… tiqua Antoine. C'est le travail…. Allô ?... Ok… Où ça ?... J'arrive…
Antoine raccrocha et fixa sa fille qui boudait.
- Tu dois aller au travail ?
- Oui… Je vais appeler la nounou. Allez zou ! Salle de bain chérie !
- Ok… rechigna-t-elle en descendant du lit. »
