Stiles rabattit la couverture sur lui dans un soupir bienheureux. Un soupir de celui qui appréciait la position allongée. Qui en avait tant besoin qu'il jouit, d'une certaine manière. Mentalement, en tout cas.

Sitôt Théo parti, Stiles s'était attelé à tout faire pour que Liam se sente bien dès son réveil. Il lui avait parlé, beaucoup. L'avait rassuré. Avait passé un temps monstrueux à lui changer les idées. Lui faire oublier la visite de cet enfoiré de Raeken n'avait pas été chose aisée. En fait, Théo n'avait pas directement fait peur à Liam. Le blondinet avait péniblement expliqué à Stiles que n'importe qui aurait pu le terroriser. Qu'importe le physique, la carrure de la personne, ses intentions. Puis, il avait avoué à demi-mots que Stiles était le seul à pouvoir s'approcher de lui sans qu'il panique. Pas qu'il ait réellement l'habitude de sa présence. Simplement, Stiles était celui qui l'avait sorti des griffes de Brett. Qui l'avait pris sous son aile, qui l'hébergeait. Qui le soignait, qui faisait tout pour le mettre à l'aise. Et Liam avait besoin de se dire qu'il pouvait lui faire confiance. Dans son état, il n'avait d'autre choix que de se reposer sur quelqu'un. En l'occurrence, ce quelqu'un s'avérait être Stiles. Ce qui l'aidait à se dire que le jeune homme n'était pas mauvais, outre sa dévotion ? Sa douceur. Elle n'était pas innée, ou claire. Naturelle, oui. En fait, elle résultait d'une forme de maladresse si poussée que Stiles redoublait d'efforts. Il compensait son hyperactivité et son manque d'adresse par des manières précautionneuses à son égard. Alors oui, il s'avérait très doux avec lui, et Liam faisait beaucoup attention à cela.

Pour autant, chaque apparition de l'hyperactif dans son champ de vision restait surprenante. Et si Liam continuait d'avoir peur que son protecteur change brutalement de comportement à son égard et commence à faire montre d'une violence quelconque, il muselait ce sentiment. Parce que le ressentir avec une telle puissance, c'était juste épuisant.

Puis il voulait croire que Stiles était quelqu'un de réellement bien et que lui, Liam Dunbar, avait droit au repos.

Et Stiles faisait de son mieux pour le lui faire comprendre. Forcément, quand venait le soir, il s'allongeait épuisé. Des efforts, il en faisait. Dans un sens, il remerciait Derek de l'avoir forcé à prendre quelques jours, néanmoins… Il ne fallait pas que ça dure. Autrement, les finances se rapprocheraient lentement de l'orange, puis du rouge. Il savait que Chris pouvait l'aider un peu, mais il avait tout de même un commerce à faire tourner. Payer un employé qui s'absentait pour aider un jeune homme dans le besoin… Ce n'était pas rentable. Au moins, il était tolérant. Stiles savait qu'il ne le virerait pas pour si peu. Il fallait juste que l'hyperactif revienne rapidement.

Ce dernier devait donc, par conséquent, faire en sorte que Liam prenne ses aises le plus tôt possible.

Alors même si Stiles devait dormir – et qu'il en avait autant envie que besoin –, il réfléchit à tout ce qu'il pouvait faire, à son niveau, pour que Liam se sente bien et parfaitement rassuré ici. Qu'il cesse d'avoir peur et, dans une certaine mesure, de se méfier de lui. Stiles comprenait cette réserve que le blondinet ne pouvait pas réellement entretenir à cause de son épuisement mental : il était passé par là, lui aussi. Il lui avait fallu du temps pour comprendre… Qu'il pouvait s'accorder le droit de faire confiance à une toute petite poignée de personnes. Et parler à d'autres, sans jamais abaisser sa méfiance à leur égard. Théo faisait d'ailleurs partie de cette deuxième catégorie.

Tout cela s'était fait avec du temps. Stiles s'était péniblement reconstruit et s'était ainsi forgé une armure qu'aucun être malintentionné ne pourrait briser. Il savait ce qu'il valait et personne n'était en mesure de le rabaisser comme... On l'avait autrefois rabaissé. Fait descendre plus bas que terre.

En un sens, Stiles se sentait mentalement invincible. Sa priorité, c'était lui-même.

Et maintenant qu'il allait « bien », Liam accaparait ses pensées. S'occuper de lui était rapidement devenu le plus important. Parce que Stiles se reconnaissait en lui, pour la simple et bonne raison qu'il avait été comme lui. A sa place. Enfin, plus ou moins.

Plusieurs idées naquirent dans l'esprit de Stiles, qui finit naturellement par fermer les yeux et s'endormir sans s'en rendre compte.

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- Dis-moi quand ça fait mal.

Liam hocha timidement la tête et baissa le regard, incapable de regarder son hôte dans les yeux. Le torse nu, il frissonnait tandis que l'œil expert et les doigts d'or de Stiles passaient ses différentes blessures en revue. Il les soignait une par une, mettant un soin tout particulier à n'en oublier aucune. En cela, il était du genre méticuleux. Bien sûr, il savait que sa manipulation mettait Liam mal à l'aise : c'était évident. Cependant, il n'avait pas le choix que de faire de cette manière. Et puis il se disait que plus vite il l'aurait soigné, plus vite le blondinet pourrait se rhabiller. Stiles comprenait tout autant sa honte, que sa gêne et sa pudeur. Pour cette raison, il faisait en sorte de se dépêcher, sans toutefois bâcler ses soins. Et même si cela n'était pas forcément nécessaire, il appliqua quelques pansements ici et là, sur certaines égratignures dont les croûtes étaient encore très fragiles. Une fois le haut fait en long, large et en travers, Stiles l'aida à renfiler le haut et s'attaqua au bas. Le pantalon finit sur le rebord de la baignoire et Liam attendit, rouge de honte, que Stiles ait terminé de s'occuper de lui.

L'hyperactif banda sa cheville, qu'il trouvait un peu gonflée, et l'enroba d'une poche de glace fourrée dans une poche protectrice avec scratches. Ensuite, Liam pour remettre son pantalon de jogging, un peu large et grand car appartenant à son hôte.

- On va manger ? Fit Stiles d'un ton interrogateur mais pas moins énergique.

A nouveau, Liam hocha la tête sans dire un mot. Durant la séance de soin, il ne s'était pas plaint. Il avait grimacé, mais sans jamais ouvrir la bouche. Pas parce qu'il avait peur – s'il n'arrivait pas encore à se détendre complètement avec Stiles, il lui faisait confiance –, juste parce que… Il avait suffisamment honte de son état comme cela. Pas besoin de le rendre plus pathétique qu'il ne l'était déjà. A sa manière, il désirait se donner un air moins faible, un peu comme s'il avait commencé à guérir intérieurement, alors que ce n'était pas encore le cas. Liam n'était pas stupide, il savait que cette simple action prendrait du temps, d'autant plus… Qu'il continuait à avoir un peu de mal à réaliser. Sa « liberté » lui paraissait trop soudaine, trop belle pour être vraie. S'il acceptait de se reposer sur Stiles, il n'en avait pas moins peur d'un éventuel retour de Brett dans sa vie. Cette terreur-là se révélait difficilement contrôlable.

Peut-être était-ce pour cette raison que Liam s'accrocha à Stiles alors que celui-ci avait passé un bras autour de lui pour l'aider à marcher. Que ses doigts se crispèrent sur son haut, s'y agrippèrent de telle sorte qu'il avait l'impression d'être un chat ayant planté ses griffes pour rester contre son maître. Parce qu'il était gentil, rassurant. Son rempart contre le monde extérieur et les multiples possibilités morbides qu'il gardait en son sein.

Stiles l'aida à s'installer à table et lui prépara un petit déjeuner de roi. Il aimait bien lui présenter divers trucs tous faits mais… Sa passion pour la cuisine revenant au galop, il désirait faire plus. Le régaler, le remplumer, lui faire reprendre des forces. Alors qu'il allait commencer sa préparation aussi simple que délicieuse – il le savait par avance –, Stiles sentit son téléphone vibrer dans sa poche. Curieux, il le sortit l'air de rien et l'alluma.

Puis sourit gauchement. Comme si Liam n'était pas là. Comme si seul le contenu du message qu'il avait reçu existait. C'était un peu stupide, un peu dingue… Mais c'était toujours comme ça lorsque Derek lui parlait. Parce que c'était rare et précieux, le genre de choses auxquelles il n'arrivait toujours pas à s'habituer. Alors oui, ce n'était peut-être qu'un « Tout va bien ? », mais pour Stiles, c'était réellement précieux. Au moins, il arrivait au loup-garou de le remarquer et ça, il adorait. Quand bien même il ne se passerait sans doute jamais rien entre eux, il aimait le simple fait que Derek puisse se soucier de son existence, même un peu.

Dans un sens, cette simple attention lui faisait quelque peu oublier le fait qu'il l'avait obligé à prendre plusieurs jours de congé – et par conséquent, à bouleverser sa précieuse routine.

- Euh, je… Stiles ? Fit une voix basse et timide.

L'hyperactif releva la tête vers Liam, qui lui pointa quelque chose. La gazinière. Stiles posa prestement son téléphone sur le comptoir et se hâta de s'occuper de ce qui était passablement en train de cramer. Il n'avait pas passé tant de temps que ça à mirer le message de Derek comme un idiot, si ?

- Excuse-moi Liamou, je te filerai les parties les moins grillées, fit-il en laissant échapper un rire nerveux.

C'était dingue la façon dont Derek arrivait à accaparer ses pensées sans rien faire de particulier, sans être là. Juste en lui demandant si tout allait bien.

- Tu… C'est ton mec ?

Stiles se crispa légèrement. Il avait parlé à voix haute. Et la question de Liam lui fit se rappeler ô combien il aimerait répondre par la positive, ô combien il aimerait que Derek soit avec lui. Ne laissant rien filtrer de sa légère tristesse à ce sujet, Stiles choisit d'utiliser son humour un peu naze, mais qui fonctionnait toujours pour endormir le poisson. Alors, il se tourna vers le blondinet, juste le temps de lui faire un clin d'œil et de lâcher, pour rire :

- Bientôt.