Chapitre 3

Hermione mit une touche finale à ses préparations en ajoutant un morceau de sucre dans chacune des deux tasses fumantes.
Après quoi, elle prit en main le petit plateau sur lequel elle les avait disposées, avant de repartir avec dans son salon où l'attendait son visiteur.

"Alors, un cappuccino au chocolat pour toi - lança-t-elle à Harry en posant une des deux tasses devant lui sur la table basse devant son canapé: Et un cappuccino à la vanille pour moi" - termina-t-elle en plaçant l'autre tasse devant elle.

"Une chance que tu possèdes une boîte de chaque goût chez toi! - plaisanta son meilleur ami. D'ailleurs, je pense que tu devrais ouvrir un salon de thé, mais version cappuccino, sur le Chemin de Traverse histoire de faire découvrir cette merveilleuse boisson italienne aux sorciers qui ne connaissent pas!"

"C'est vrai que ça serait plutôt sympa! - s'amusa-t-elle à son tour. Et le pire, c'est que ça pourrait marcher!"

"Une idée à garder dans un coin de notre tête au cas où on voudrait se reconvertir"

"Après tous les efforts que tu as fait pour réaliser ton rêve de devenir auror, je doute que tu lâches l'affaire aussi facilement. Et à ce propos, qu'est-ce que tu voulais me demander?"

"Ah oui! - fit plus sérieusement Harry en lui donnant le dossier qu'il avait apporté avec lui. Tu te souviens de Barthus Goff?"

"Hum… La même année que nous et à Serpentard, si je ne dis pas de bêtise"

"Exact! Mais malheureusement, il s'est fourré dans un sacré pétrin"

Le Survivant prit alors le temps de lui expliquer toute la situation, tandis qu'elle consultait en même temps tous les documents qu'il lui avait fournis.
Elle ne put également s'empêcher de se dire que c'était vraiment très étrange cette histoire de trafic d'objets de magie noire mené par des suprématistes.

"Et comme tu dois bien t'en douter, il n'a pas du tout les moyens de se payer un avocat. Certes, tu n'es pas encore avocate, mais je sais que tu peux déjà être commise d'office, voire choisir par toi-même de plaider certaines affaires"

"Oui, c'est vrai! Mais comme je ne suis qu'en deuxième année: je ne peux me charger que de faits mineurs. Là, c'est beaucoup plus grave! Cependant ne t'inquiète pas, je connais une fille de dernière année qui peut d'ors et déjà se charger de ce genre d'affaire"

"D'accord! Mais est-ce qu'elle acceptera de le défendre?" - demanda Harry assez perplexe.

"Oh que oui! - lui assura Hermione confiante. Tout comme moi, elle est parfaitement consciente de l'existence de ce genre de victime invisible de Voldemort! Elle a des convictions, et n'a pas peur de se battre pour elles! Crois-moi, elle ne refusera pas de l'aider!"

"Ça serait vraiment sympa de sa part"

"En tout cas, ça l'est de la tienne d'essayer de l'aider; alors que rien ne t'y oblige" - le félicita-t-elle avec douceur.

"Tu l'as dit toi-même. Il existe des victimes invisibles ou inconscientes de Voldemort. Et il y en a pour lesquelles ce n'est pas encore trop tard pour faire quelque chose pour elles" - fit-il d'une voix plus morne tout en soufflant sur cappuccino pour l'aider à refroidir, avant d'en boire une gorgée.

Sa sœur de cœur ne répondit pas tout de suite, car même s'il n'avait pas citer de nom elle savait très bien à qui il avait pensé en disant ça.
Elle songea que - tout en l'imitant avec sa propre tasse - bien qu'ils n'en avaient jamais vraiment reparler en trois ans, que comme pour elle, Drago Malefoy devait revenir de temps en temps le titiller.
Le serpentard avait peut-être été ce qu'il avait été; mais s'il y avait bien une chose qu'on ne pouvait pas lui retirer: c'était cet incroyable talent qu'il avait de laisser une trace indélébile chez quasiment tous les gens qu'il avait fréquenté. Et ce en bien comme en mal.

"Et sinon - relança-t-elle la conversation sur un ton plus léger: c'est que le souci avec Ginny?"

Harry manqua de peu d'avaler de travers. Il tenta de se redonner un peu de contenance en se redressant un peu, et en se raclant la gorge.

"En fait, c'est bien plus moi que Ginny le problème - répondit-il passablement amer. J'ai tellement peur qu'elle me dise "non" que je n'arrive plus trop à savoir si je dois me jeter à l'eau ou pas. Tu te rends compte un peu? Ça me faisait beaucoup moins flipper d'aller taper sur Voldemort que de demander ma copine en mariage"

"Écoute - ria-t-elle légèrement. Je t'ai déjà dit que tu n'avais rien à craindre! Elle est folle de toi depuis la première fois qu'elle t'a parlé! Et tu le sais!"

"L'amour n'est pas toujours une garantie de réponse positive" - argumenta Harry.

"Ce n'est pas faux! - reconnut Hermione, avant de contre-argumenter: Mais pas dans le cas de Ginny! Crois-moi, elle en rêve tellement depuis toujours que même si tu fais ta demande avec un bouquet d'orties, ou un paquet de dragées surprises, ou encore avec une bague bricolée avec du fil à scoubidou de la couleur la plus hideuse: elle te dira "oui" avant même que tu finisses de poser ta question"

Cette tirade avait eu le mérite de faire pouffer le Survivant, et de le faire se sentir un peu mieux.

"C'est vrai que la bague en scoubidou serait des plus originales; mais je crois que je vais quand même opter pour quelque chose de plus classique" - affirma-t-il sur le ton de la plaisanterie.

"Tu voudras que je vienne avec toi pour choisir?"

"Non merci, c'est gentil! De plus, j'ai déjà pas mal réfléchi à la question. Mais tu seras la première à la voir. Promis!"

"Il y a plutôt intérêt! - le menaça-t-elle sans aucun sérieux, avant de lui demander plus posément: "Cependant, est-ce qu'il y a quelqu'un d'autre que moi qui connait ton projet?"

"Non! Il n'y a que toi. Même Ron n'est pas au courant! Et puisque tu m'en parles, j'aimerai que tu me fasses l'honneur d'être mon témoin"

"Vraiment? - laissa-t-elle tomber émue. J'avais pensé que tu demanderai plutôt à Ron"

"J'ai deux meilleurs amis entre lesquels j'ai dû faire un choix difficile. Et bien que j'adore Ron, je doute qu'il soit le plus qualifié de vous deux pour cette tâche. Tu sais à quel point il peut être tête en l'air et dissipé. Il serait bien capable d'oublier d'organiser mon enterrement de vie de garçon, de ne pas écrire son discours, et surtout de paumer les alliances. Ce que je redoute le plus. Et si ce n'est pas moi qui le tue, ce sera Ginny"

"Un scénario des plus probables! C'est ça le pire! " - ria Hermione aux éclats.

"Sinon, blague à part et pour changer complètement de sujet: Tu comptes faire quoi de ce week-end spécial d'avant la grande fête du Ministère décrété par Kingsley?" - interrogea le Survivant.

"Comme je retourne au boulot lundi et que j'ai pris du retard dans mon classement, j'ai ramené les dossiers concernés ici pour m'en occuper"

"Tu es incorrigible Hermione - soupira Harry désespéré. Kingsley a bien dit qu'il ne voulait que personne du Ministère ne travail ce week-end"

"Non! Il a plus exactement dit qu'il ne voulait voir personne travailler au Ministère ce week-end! Et puis, il ne va tout de même pas envoyer une délégation d'aurors pour m'empêcher de bosser chez moi!" - lança-t-elle implacable.

D'ailleurs, elle n'avait pas compris d'où Kingsley avait sorti cette idée de complètement vider le Ministère tout un week-end.
En même temps, il y avait vraiment des fois où il devenait un peu comme Dumbledore. Il lui arrivait d'être pris de lubies qu'il valait mieux ne pas vraiment chercher à comprendre.


"Ron?"

Pas de réponse.

"Ron, tu m'écoutes là?"

Toujours pas de réponse.

"RON!" - cria Georges en tapant du poing sur la table devant son petit-frère.

Ce qui fit clairement sursauter et sortir de sa rêverie l'interpellé.

Après sa sortie du boulot, il s'était rendu directement au Terrier afin d'honorer l'invitation à dîner de sa mère.

Et en attendant que le repas soit prêt, il était parti en discussion avec Georges, jusqu'à ce que son esprit ne quitte subitement son corps pour aller sur seul Merlin savait quelle planète.

"Si je t'emmerde, faut le dire!" - l'apostropha son frère.

"Quoi?... Euh… Non… Ce n'est pas ça - bafouilla le plus jeune garçon Weasley. C'est juste que de parler de la fête du Ministère m'a fait penser à Hermione"

"Quel est le rapport entre la fête et Hermione?" - s'agaça plus que ne s'étonna son frère vu qu'il avait déjà une idée de quoi il retournait.

"Et bien… comme ils ont dit qu'on pouvait venir accompagner: j'aimerai bien lui proposer d'être ma +1. Mais le problème, c'est que je ne sais pas du tout comment lui demander sans me prendre un diffindo en pleine poire" - se lamenta son petit-frère.

Georges souffla d'un air fatigué en se pinçant l'arête du nez.

"Écoute Ron - commença-t-il d'un ton plutôt ferme. Contrairement à pas mal de monde, je ne me fais pas d'illusions, tout comme je ne te conforterai pas dans les tiennes en me montrant honnête avec toi en ce qui concerne ta relation avec Hermione"

Il fit une courte pause pour observer l'air perdu de son frère, avant de lâcher d'une manière plutôt abrupte:

"Laisse tomber! Avec elle, c'est cuit! C'est mort! T'es grillé à vie! Du moins en tant qu'amants! En tant qu'amis, votre relation peut redevenir comme avant! Mais pas plus!"

"Mais… Mais" - bégaya Ron la lèvre tremblante et le regard écarquillé.

"Il n'y a pas de "mais" qui tienne! Je vais aussi te dire que même s'il n'y avait pas eu cette brouille entre-vous concernant Drago Malefoy, ainsi que tes petites infidélités, vous ne seriez probablement plus ensemble aujourd'hui, parce que ça se serait quand même mal passé à cause de ce que toi et les autres vous faites! Et j'entends par là essayer de diriger sa vie à sa place!"

"On… On ne cherche pas à diriger sa vie à sa place!" - s'indigna Ron en reprenant un peu de contenance.

"Bien sûr que si! Il y en a toujours un de vous lui susurrer ce qu'elle doit faire ou ne pas faire! Vous tenez absolument à ce qu'elle joue le rôle que vous avez écrit pour elle; à savoir la faire t'épouser de gré ou de force, de rester à la maison et de pondre plein de nouveaux Weasley! Franchement, vous la connaissez mieux que ça! Vous croyez vraiment qu'elle va se laisser faire? Vous pensez sincèrement qu'elle veut vivre comme Maman? Arrêtez de fantasmer! Ça n'arrivera jamais!"

"Mais personne n'a jamais dit que…" - commença à se défendre Ron.

"Oh arrête! - le coupa Georges toujours aussi implacable. Ou alors vous ne vous en rendez même pas compte! D'ailleurs, à chaque fois qu'elle décide d'un truc, personne ne saute vraiment de joie! Vous ne vous y opposez certes pas mais - à part éventuellement Harry et Ginny - vous ne l'encouragez pas vraiment non plus! Que se soit pour sa dernière année à Poudlard, la poursuite de ses études, son boulot ou encore pour son propre logement! Vous ne manifestez pas de réel contentement, parce qu'au fond vous n'êtes pas contents; car ça ne correspond pas à l'idée que vous vous étiez faite de la vie après la guerre! La preuve en est que, vous aviez à peine annoncé que vous étiez ensembles, que je n'ai même pas eu besoin de connaître la Légilimancie pour savoir ce qui s'est passé dans la tête de Maman! C'était visible comme le nez au milieu de la figure qu'elle réfléchissait déjà aux couleurs du mariage!"

Ron ouvrit la bouche, la referma, la rouvrit et la referma une nouvelle fois. Il avait l'air d'un poisson hors de l'eau. Il en avait même le regard.

Après quoi, il souffla lourdement en se laissant tomber la tête entre ses bras sur la table.

"J'ai vraiment tout gâcher" - se lamenta-t-il d'une voix larmoyante et étouffée.

"Oui - lui confirma son frère plus calme. Tu es en bonne partie responsable de ce désastre. Mais pas que! Même sans tout ça: c'est destiné à ne pas marcher entre vous. Vous êtes beaucoup trop différents. Mis à part la maison Gryffondor, vous n'avez rien en commun. Vous ne partagez ni aucun trait de caractère ni aucun centre d'intérêt. Les opposés s'attirent certes. Mais ça ne peut marcher que s'ils se complètent. Or, vous êtes des opposés qui ne se complètent pas"

Ron ne trouva rien à redire, et ne bougea pas non plus d'un pouce.

"Pour finir, je vais te préciser une chose petit-frère. Ce n'est pas parce Hermione n'a pas fréquenté d'autres garçons depuis toi qu'elle n'est pas passée à autre chose. C'est seulement qu'elle n'en a pas le temps. Et pour ce qu'il en est de toi: je ne saurai mieux te conseiller que d'arrêter de papillonner, et de te trouver une vraie copine. Tu verras, tu te sentiras beaucoup mieux après"


Après s'être préparé et avalé un bon petit dîner, Hermione s'était de nouveau installée dans son canapé avec une pile de dossiers posés devant elle sur la table basse.
Elle avait décidé d'attaquer son classement le soir même tout en regardant un bon film sur le choix duquel elle réfléchissait encore, pendant qu'elle vérifiait si elle avait bien tout ce qu'il lui fallait pour travailler.
D'ailleurs, elle se figea d'un coup lorsqu'elle s'aperçut qu'il lui manquait effectivement un dossier.
Elle fronça les sourcils en retournant voir si elle n'était pas passée à côté dans sa chambre. Mais malheureusement, il y brillait par son absence.

"C'est pas vrai!" - grogna-t-elle se maudissant elle-même en réalisant qu'elle l'avait oublié au bureau.

Son estomac se tordait déjà à la pensée de retourner travailler lundi avec du boulot en retard.
Quoique, elle pouvait toujours aller le chercher.
Certes, Kingsley avait bien spécifié qu'il ne voulait personne dans le Ministère ce week-end; mais ils n'étaient que vendredi soir, elle voulait seulement récupérer quelque chose, et n'en aurait que pour dix minutes à tout casser.
Allez, c'était décidé! Et ce n'était pas cet orage qui avait éclaté un quart d'heure plus tôt, et digne d'un film d'horreur, qui allait l'arrêter.
Vu qu'elle n'avait pas de cheminée chez elle, elle allait devoir se mouiller un peu. Mais ce n'était pas grave! Elle avait connu bien pire!"

Et une fois qu'elle fut au Ministère - en ayant l'air d'avoir pris une douche tout habillée - elle put constater que le personnel avait mit beaucoup de soin à respecter la consigne du Ministre.

Il semblait ne pas y avoir âme qui vive.
Mais, elle ne s'attarda pas pour vérifier, et s'empressa de rejoindre le Département des Mystères, afin de récupérer ce qu'elle était venue chercher et de repartir illico presto au chaud et au sec chez elle.

Toutefois, lorsqu'elle arriva à proximité du bureau de son patron, elle remarqua que la porte était ouverte. Ce qui n'était pas du tout dans ses habitudes. Il la fermait toujours à double tours avant de partir. Même pressé d'être en week-end. Et elle doutait qu'il fut encore là.
Elle s'approcha alors à pattes de velours tout en sortant sa baguette au cas où.

Une fois à destination, elle put percevoir un bruit de papier, tandis qu'elle passait aussi doucement et discrètement que possible la tête dans l'encadrement de la porte, d'où elle put apercevoir - légèrement penchée sur le bureau et de dos - une silhouette drapée et encapuchonnée dans un long manteau sorcier noir.
À la taille, carrure et posture: c'était clairement un homme. Mais pas du tout son patron cependant! Ou alors, il avait grandi de quinze centimètres et perdu vingt kilos depuis la semaine précédente!

Hermione eut un sourire narquois en remarquant la baguette de l'intrus posée négligemment à côté de lui sur le bureau.
Elle s'empressa d'exécuter un accio informulé pour l'attirer à elle, et de lancer aussitôt à l'homme - qui avait sursauté suite au à l'escapade de son arme - d'une voix ferme et autoritaire:

"Ne bougez pas! Qui êtes-vous?"

Cependant, l'interpellé ne répondit pas du tout de suite. Au lieu de ça, ses épaules s'affaissèrent de manière ennuyée, tout en soufflant un "Et Merde" sur le même ton.

Ce qui eut pour effet de donner l'impression à Hermione d'avoir servi de paratonnerre à l'orage qui grondait dehors. Elle s'était sentie instantanément foudroyée en entendant cette intonation et cette voix qui ne lui étaient nullement étrangères.
Elle prit une seconde fois le foudre, lorsqu'il parla de nouveau d'une voix monocorde:

"Bonsoir Granger. Ça faisait longtemps. Et désolé d'avance pour ça"

Il se retourna si vite qu'elle n'eut même pas le temps de penser "Par Merlin". Il s'ensuivit pratiquement dans le même temps un léger bruit de sifflement, et elle sentit aussitôt une fulgurante douleur de piqûre dans son cou sur laquelle elle porta automatiquement une main - après avoir lâché sa baguette - en émettant un petit cri de douleur étranglé.
En à peine une seconde, ses jambes se dérobèrent sous elle.
Néanmoins, elle ne toucha pas le sol à cause de la paire de bras qui l'avait rattrapée. Et le seule chose qu'elle eut le temps de voir, avant que tout ne devienne noir, se fut ce regard glacé qu'elle reconnaîtrait entre milles, et qui l'avait hanté durant trois ans.

à suivre