Disclaimer : Les personnages mentionnés dans ce texte appartiennent à J.R.R. Tolkien, à Peter Jackson et à ceux qui les ont officiellement façonnés. Je ne fais que les emprunter.
Le titre est un extrait du conte des Frères Grimm, Blanche-Neige et ces mots ne m'appartiennent donc pas.
Note de l'auteur :
Il s'agit d'une sorte de... conte ? dans lequel Thranduil diffère un peu du personnage tel que décrit dans la trilogie de Peter Jackson. Dans mon histoire, il possède une magie ancienne et elle est en partie la raison de la légende mystérieuse qui l'entoure. Bard est... Bard même s'il ne ressemblera pas au Bard de la trilogie, à raison.
Attention :
Je suis restée très évasive quant au rating et aux archive warnings.
Cependant, dans ce texte, il est fait mention de : blessures importantes, explicitement décrites ; mort d'un personnage ; sang ; vampirisme (faute de meilleur mot), entre autres. Si ces thèmes sont susceptibles de vous déranger, je vous déconseille cette lecture.
Skin white as snow, lips red as blood, hair black as ebony
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Lorsque Thranduil, le haut roi des Elfes du domaine de Vert-Bois-le-Grand – territoire tristement renommé Forêt de Grand'Peur, un titre abhorré par son souverain – avait laissé Dale derrière lui six mois plus tôt, il n'avait pas compté revoir ses habitants avant un certain temps.
Il avait quitté en bons termes les rois fraîchement couronnés : Dáin Pied d'Acier, monarque des Nains d'Erebor et Bard, Seigneur des Hommes de Dale et d'Esgaroth. Tous trois avaient été d'accord quant aux relations cordiales qu'ils devaient entretenir les uns avec les autres à des fins commerciales et martiales. Le risque d'une guerre à venir n'était pas à exclure : le retour de Sauron n'était plus un secret désormais et trois royaumes unis valaient mieux qu'une armée isolée face aux ténèbres grandissantes.
Thranduil n'avait pas manifesté d'émotion particulière lors du couronnement de Dáin, outre un ennui incontestable. Le roi des Nains était trop bruyant et trop démonstratif à son goût.
Durant l'intronisation de Bard, Thranduil avait pris le temps d'observer le nouveau souverain, se demandant s'il avait les épaules assez solides pour gouverner un domaine et son peuple. Même si Dale était une cité de taille modérée dont les habitants avaient vu leur nombre décroître de manière considérable en raison des tragiques évènements survenus avant l'hiver, elle demeurait un carrefour stratégique à bien des égards.
L'ancien batelier avait abattu un dragon et sauvé de nombreuses vies ce faisant.
Il avait conduit les siens jusqu'aux portes de la Montagne Solitaire.
Il avait forgé une alliance avec lui, contre tout attente.
Il s'était montré diplomate et avait tenté de raisonner Thorin Écu-de-Chêne alors que celui-ci était déjà profondément touché par le mal du dragon et de son or.
Il avait pris part au combat quand une armée d'Orques et de Trolls avait déferlé sur la plaine ravagée par Smaug près de deux cents ans auparavant.
Enfin, il était l'héritier légitime de Girion, dernier Seigneur de Dale. Le même sang coulait dans ses veines. Une détermination identique, avait noté Thranduil pour avoir rencontré l'Homme par le passé.
Il était donc fortement envisageable que Bard soit le monarque que Dale méritait.
Thranduil était parti au crépuscule de l'automne, ramenant chez eux les guerriers qui avaient survécu à la bataille ainsi que le corps de ceux qui n'avaient pas eu cette chance.
L'hiver s'était écoulé au sein des cavernes remplies de silence alors que les Elfes faisaient le deuil des êtres qu'ils avaient aimés avec tendresse pendant parfois des millénaires entiers.
Thranduil lui-même avait commencé à accepter la perte d'un fils qu'il pensait ne plus jamais revoir.
Un matin de printemps, une jeune femme se présenta aux portes de son royaume.
Thranduil la suivit du regard depuis ses appartements, figure immobile sur un balcon qui surplombait l'entrée du domaine. En dépit des vêtements maculés de boue et de poussière, il reconnut la fille aînée du roi Bard. Il constata également l'état d'épuisement du cheval qu'elle avait monté et qu'elle n'avait pas ménagé.
Il entendit les Elfes lui demander de décliner son identité, ce qu'elle fit. Elle déclara qu'elle devait rencontrer le roi Thranduil de toute urgence et que le temps lui était compté.
Thranduil sentit la présence de Galion derrière lui.
« Vous pouvez la faire entrer. Donnez-lui de quoi boire et de quoi manger. Occupez-vous également de sa monture. »
Il ne vit pas l'Elfe incliner la tête avec respect et disparaître tel une ombre.
Il regagna sa chambre, revêtit une longue robe d'intérieur au-dessus de sa tunique et de son pantalon et coiffa ses cheveux presque blancs d'une couronne dont les rameaux étaient sertis de fleurs de pommier.
Il s'installa sur son trône majestueux et surélevé et ne patienta que quelques minutes car bientôt, la jeune femme fut conduite jusqu'à lui.
« Votre Altesse », dit-elle en s'inclinant.
Quand elle redressa la tête et que Thranduil put plonger ses yeux dans les siens, il prit de plein fouet les émotions gravées dans les prunelles claires : l'angoisse, la contrariété, la panique, la colère… Elle paraissait fatiguée, comme si elle n'avait plus dormi depuis bien trop longtemps. Son visage était pâle et des cernes creusaient son regard.
« Princesse Sigrid », répondit Thranduil, courbant légèrement la tête en signe de reconnaissance. « Quelle est la raison de cette visite inattendue ? »
« Je suis désolée d'arriver ainsi, sans m'annoncer… »
La voix de la jeune femme était nouée par l'émotion.
« Je ne savais pas vers qui me tourner alors j'ai pensé que… Je suis venue sans prendre le temps de réfléchir à… J'espérais… »
« Sigrid. » Thranduil fronça les sourcils, légèrement déstabilisé par les propos incohérents de la jeune femme. « Qu'est-il arrivé ? Cela concerne-t-il votre père ? »
Il ne manqua pas les larmes qui perlèrent dans les yeux de son interlocutrice. Elle hocha la tête et ses lèvres tremblèrent.
« Oui. Il a été blessé, gravement blessé. Une embuscade, des Orques, il n'a même pas eu le temps de… Il a été… » Sigrid avala sa salive et essuya ses joues car les larmes coulaient désormais librement sur sa peau blanche. « Il a été touché au ventre. Les guérisseurs ont fait ce qu'ils ont pu mais l'infection s'est propagée. Il ne se réveille presque plus, la fièvre ne disparaît pas et… »
Un sanglot se coinça dans la gorge de la jeune femme et elle porta une main à sa poitrine.
« Pardon. »
« Qu'attendez-vous de moi, Princesse Sigrid ? » questionna Thranduil, tâchant de garder la tête froide face aux informations qu'il triait au fur et à mesure de leur arrivée.
Sigrid plongea son regard brillant de larmes dans celui de l'Elfe.
« On dit que vous possédez une magie sans équivalent en Terre du Milieu. Maman me racontait des histoires sur vous quand j'étais petite et je me suis demandée, en vous voyant pour la première fois, s'il s'agissait de simples légendes. »
« Quelles histoires ? »
« Vous pouvez sauver les êtres au déclin de leur existence. Vous ne craignez pas la mort car vous la traitez en amie. Vous marchandez avec elle. »
Un sourire sans joie se peignit sur les lèvres closes du roi des Elfes.
« Les légendes sont toujours empreintes d'une part de vérité », reconnut-il, sa voix profonde et basse.
Il étudia la jeune femme, marquant un silence volontaire.
« Qu'attendez-vous de moi ? » répéta-t-il.
« Seigneur Thranduil… Mon père est en train de mourir et personne ne pourra le sauver si ce n'est vous. Votre prix sera le mien, je ferai ce qu'il faudra mais ramenez-le-nous, par pitié. »
Ce fut un cri du cœur, sincère et déchirant. Thranduil soutint le regard de Sigrid, considérant sa demande avec le plus grand sérieux. Il avait appris au détour d'une conversation que l'épouse de Bard avait disparu des années de cela, le laissant seul avec trois enfants en bas âge à élever. Force était de constater que son aînée avait du courage, une certaine audace et du caractère.
« Où se trouve votre père ? À Dale ? »
Les joues de Sigrid prirent une délicate teinte rosée.
« Non, Votre Altesse. Un convoi est en route. J'ai pris de l'avance afin de vous soumettre ma requête au plus vite. »
Thranduil sentit ses yeux s'écarquiller de stupeur.
« Votre père est en chemin alors qu'il est mourant ? Alors que vous ne saviez pas si j'étais en mesure de l'aider ? »
Les Hommes étaient une race étrange. Ils étaient capables de tout – le meilleur comme le pire – et s'accrochaient à l'existence avec l'énergie du désespoir, prêts à prendre des risques considérables pour protéger leur prochain.
« Dans tous les cas, il mourra. Pouvez-vous le sauver ? »
« Je ne peux aucunement vous répondre tant que je n'ai pas pris connaissance de l'étendue des dommages. »
La réponse du roi des Elfes, froide et implacable, fit de nouveau pleurer la jeune femme.
Thranduil retint un soupir et se concentra sur la manière adéquate de s'exprimer afin de se montrer plus rassurant. Sigrid n'était rien d'autre qu'une enfant anxieuse et effrayée à l'idée de voir s'éteindre un père qu'elle semblait aimer plus que les mots n'auraient su le formuler. Il n'était pas juste de sa part de la traiter avec son indifférence coutumière.
« Je ferai mon possible, Princesse Sigrid. »
Ces simples paroles suffirent à ramener un peu d'espoir chez son interlocutrice. Un faible sourire éclaira son visage sillonné de larmes.
« Merci, Votre Altesse. Merci. »
Elle inclina la tête avec respect.
« Ne me remerciez pas pour le moment », répliqua Thranduil.
Il ignorait tout de l'état actuel du roi de Dale. Il était plus qu'incertain de pouvoir sauver Bard.
« Où se trouvait votre convoi lorsque vous l'avez quitté pour me rencontrer ? »
« À environ une vingtaine de miles au sud-est », hasarda Sigrid.
« Vous avez eu une chance insolente de ne pas avoir été attaqués sur la route », remarqua Thranduil.
Il vit un frisson parcourir la jeune femme à ces mots : elle avait certainement entendu parler des créatures maléfiques qui avaient valu à son royaume ce surnom tant haï.
« Galion », reprit Thranduil, son regard quittant la silhouette de Sigrid pour appréhender celle du valet qui patientait en silence. « Informez Tauriel de la position du convoi. Qu'elle rejoigne le roi Bard avec dix de nos guerriers dès à présent. »
Galion hocha la tête et s'éclipsa.
« Merci, Roi Thranduil », dit Sigrid.
Un lourd soupir lui échappa, comme si toute la fatigue qu'elle éprouvait lui tombait soudainement dessus.
Thranduil se retint de lui répondre qu'il espérait que le convoi n'avait pas été pris d'assaut entre temps l'inquiéter davantage n'avait aucun sens et elle paraissait se sentir suffisamment coupable comme cela.
« Je constate que vous n'avez pas pris le temps de boire quelque chose, ni même de vous restaurer avant de me rencontrer. Cela est compréhensible compte tenu de l'urgence de votre requête. Cependant, j'aimerais que vous repreniez des forces en attendant l'arrivée du convoi. Fatiguée, sale et affamée, vous ne serez d'aucun soutien pour votre père. »
Sigrid rougit une nouvelle fois, de toute évidence consciente de l'apparence négligée qu'elle avait en présence du roi des Elfes.
« Lorsque Galion sera de retour, il vous escortera jusqu'aux cuisines. Vous pourrez ensuite prendre un bain, une tenue propre sera mise à votre disposition et vous vous reposerez dans la chambre qui vous sera attribuée. »
« Merci pour tout cela, Votre Altesse mais vous n'avez réellement pas besoin de… »
« Ne soyez pas absurde », la coupa Thranduil, pressé de mettre un terme à cet entretien car des pensées plus impérieuses nécessitaient sa pleine attention. « Vous êtes une princesse, fille du roi de Dale. Il est de mon devoir de vous accueillir comme telle. »
Sigrid baissa les yeux sur le sol et ne répondit pas. Elle ressemblait plus encore à une petite fille, soudain voûtée et vulnérable. Thranduil sentit sa mâchoire se contracter. Il aurait aimé pouvoir la rassurer… mais cela aurait été un mensonge potentiel. À l'heure actuelle, le souverain de la cité des Hommes était peut-être déjà mort.
