Il y a des hommes qui font preuve d'un mutisme à toute épreuve lorsqu'ils sont avec une fille de joie. À l'inverse, il y en a qui parlent avec animation et force détail. C'était vraiment étrange mais une aubaine pour les oreilles attentives.

Les activités clandestines exigeaient du doigté, de la finesse. Ce n'était pas pour les amateurs d'aventures ni pour ceux qui aimaient le goût du risque et encore moins pour ceux qui partaient pour la gloire.

Tanya avait fait le voyage jusqu'à Gil'ead pour trouver des condamnés, des hommes sans finesse, probablement sans discipline et uniquement désireux de quitter les cachots de la forteresse mais qui ne seraient pas contre une petite chance d'être libérés quelque soit le prix à payer ou bien qui seraient prêt à faire tous les serments tout en guettant la moindre occasion de filer. Ils étaient assez méfiants, pour la plupart, pour refuser catégoriquement de jurer en ancien langage. Ils ne comprenaient pas ce dont ils s'agissaient et éprouvaient de la répulsion pour la magie à cause des nombreuses séances de tortures auxquelles Durza les avait soumis, par pur plaisir bien souvent.

Mais Tanya n'eut pas grand-chose à dire avant que les volontaires n'affluent.

Dans le pire des cas, une mort après une tentative d'évasion était préférable à leur sort actuel

Au Surda, Trianna examinait le message avec attention.

Elle ne voyait qu'une succession de lettres sans sens apparent.

Au moins, ce message codé prouvait que l'ambassadeur impérial était plus important qu'il n'en avait l'air.

Elle resta un long moment à contempler le message sans savoir quoi faire.

Prudemment, elle fit une copie sur une tablette de cire qu'elle observa attentivement.

Le message n'était pas très long. Il remplissait la moitié du parchemin.

Elle essaya de lire à l'envers mais sans résultat.

‒Voyons, voyons, marmonna-t-elle.

‒Ce ne peut être compliqué, déclara Arya en la faisant sursauter. Les humains manquent de subtilité.

Elle prit le parchemin et observa à son tour avant qu'une moue dédaigneuse ne déforme ses traits.

‒J'ai compris.

Trianna continuait de scruter la tablette de cire, vexée que l'elfe ait découvert la vérité aussi facilement.

Sans s'en soucier, l'elfe prit une plume et écrivit rapidement avant de finalement tendre le parchemin qu'elle avait noirci.

Malgré sa vitesse, les mots qu'elle avait écrit étaient parfaitement lisibles et calligraphiés avec élégance.

Trianna ne put s'empêcher d'être impressionner et sentit une pointe de jalousie devant la nonchalance elfique contrastant avec les efforts que les humains devaient fournir pour arriver à un résultat de qualité inférieure.

Ses pensées étaient protégées mais Arya remarqua bien son manque d'enthousiasme mais elle était habituée à la jalousie des humains aussi elle ne réagit pas.

‒Comment.. ? réussit seulement à dire une Trianna frustrée de ne pas comprendre comment Arya était arrivée à ce résultat.

‒Il suffit de prendre chaque carré de lettres et de le faire pivoter d'un cran, dit simplement Arya.

‒Je vois. Et qu'en est-il de ces mots là ?

Elle désigna plusieurs groupes de lettres totalement dénués de sens.

‒Il doit s'agir de noms de personnes, supposa-t-elle en lisant les phrases complètes.

‒Un autre code a été utilisé, dit Arya. C'est…

Elle s'arrêta brusquement et son visage exprima une vive surprise avant de reprendre son impassibilité habituelle.

‒Ce sera plus compliqué de déterminer de qui il s'agit.

‒Comment cela ? Aberon

L'elfe pointa le début du message. Trianna lut « Après votre arrivé à robena voyez sire drefuna et »

Voyant que Trianna poursuivait la lecture, Arya l'interrompit.

‒Ne voyez vous pas ? Le premier mot est un anagramme d'Abéron.

‒Effectivement, cela semble bien être le cas. Mais alors… ?

‒Il va falloir comparer avec les noms des grands du royaume.

‒Mais nous n'en connaissons qu'une poignée ! Et la reine veut de nous une discrétion absolue. Nous ne pouvons pas établir une liste complète.

‒Voyons déjà ceux que nous connaissons, répondit calmement Arya. L'empire ne se donnerait aucune peine pour les petites gens. Or, nous avons rencontré tous ceux dont la position peut participer à la guerre. Nous aviserons ensuite.

Tanya n'aimait pas s'exposer mais elle ne savait pas à qui elle pouvait déléguer les missions à faire.

Elle s'était donc retrouvée avec une vingtaine de criminels, meurtriers, pillards de tout genre.

Elle était aussi accompagnée de son escorte. Il fallait bien quelques soldats pour rappeler à cette engeance qu'ils n'étaient pas en promenade.

Les criminels n'avaient pas la moindre idée de ce qui se passait.

Certains supposaient qu'ils seraient envoyé contre le Surda à cause des rumeurs de guerre mais la présence d'une enfant ne cadrait pas avec cette hypothèse.

Il y en avait un petit nombre qui pensaient qu'ils seraient mis à mort et que tout ceci faisait partie d'une sorte de formation pour la fillette pour l'endurcir pour une raison quelconque.

La grande majorité avait décidé d'obéir en attendant d'avoir une occasion.

Mais Tanya les tenait à l'œil.

‒Si vous choisissez de venir, leur avait-elle dit, je ne vous garantie pas que vous en sortirez vivant. Dans la mesure du possible, je ferai au mieux pour limiter les pertes mais il y en aura. Mais je vous promets que si vous me suivez sans avoir l'intention d'aller au bout, vous le regretterez amèrement. La mutinerie et la désertion sont punis de mort. Même si vous n'êtes pas des soldats, vous serez traités comme tel.

Si l'un d'eux ne la prenait pas au sérieux, il ne pourrait pas se plaindre de ne pas avoir été notifié des conséquences et son cas servirait d'exemple.

Les anciens prisonniers et les soldats étaient traités de la même façon. La possibilité d'avoir trois repas nourrissants était suffisamment alléchante pour limiter le risque de fuite dans la nature.

Ils continuèrent vers le sud en évitant les villes et les villages. L'intendance était assurée par deux soldats que Tanya envoyait.

Peu à peu, ils changeaient d'aspect.

Tanya leur avait interdit de se raser. Ils laissèrent derrière eux tout objet permettant d'identifier leur origine.

A Abéron, Nasuada était fébrile. Les choses avançaient enfin.

Après moult conseils de guerre, il avait enfin été décidé où les armées coalisées frapperaient.

Orrin avait quelque réticences à aller de l'avant alors que les nains et les elfes étaient toujours dans leurs royaumes .

‒Nous aurons besoin de toutes nos forces, disait-il.

Nasuada se retint à grande peine de lever les yeux au ciel.

‒J'entends bien mais cela prendrait trop de temps aux elfes de contourner l'empire pour nous rejoindre.

Arya prit alors la parole :

‒Une partie des elfes rejoindra les armées alliés pour combattre cote à cote. Mais, ils ne sont envoyés que pour soutenir Eragon dans ses efforts. La reine Islanzadi attaquera Ceunon dès que ses forces seront prêtes. L'ouverture d'un second front après le début de la guerre forcera l'empire à diviser ses forces.

‒Nous pouvons penser, continua Nasuada, que les les soldats qui seront envoyés au nord seront les troupes d'élites. Au moment d'affronter les elfes, ils seont fatigués par la marche rapide et d'autant plus facile à vaincre et nous de notre coté auront affaire à des troupes plus faibles.

‒J'ignorais quels étaient les plans des elfes, fit remarquer Orrin. Il est bon de savoir que l'on peut compter sur ses alliés.

‒Quand aux nains, ils ont bientôt fini de se préparer. Ils nous rejoindront. Partir sans eux poussera l'empire à nous sous-estimer et pourrait faire commettre des erreurs fatales. Leur arrivée prendra les impériaux par surprise.

‒Nous savons maintenant à quoi s'en tenir, dit Orrin, fâché de ne pas avoir été tenu au courant des projets de ses alliés alors que Nasuada ne paraissait pas surprise le moins du monde.

‒Je pense qu'il serait bon d'attaquer par ici, dit Nasuada en désignant sur la vaste carte du Surda la frontière à l'endroit où elle était traversée par la rivière Jiet. L'armée pourra avancer en suivant la rivière, ce qui simplifiera le ravitaillement. Après avoir atteint le lac Léona, il faudra détruire les places fortes ennemis avant de se diriger vers Uru Baen où nous devrions être rejoints par les elfes.

‒Et qu'en est-il des nains ?

‒Ils devraient nous avoir rejoint avant que nous ayons atteint Bellatona.

Orrin contempla la carte un moment.

‒Donc vous prévoyez que nous attaquions le gros des forces de l'empire en espérant qu'ils soient déstabilisés par l'arrivée des nains et qu'une partie aille au-devant des elfes. Nos armées seront en difficultés si le combat débute trop tôt.

‒En agissant ainsi, nous pourrons affaiblir l'empire et nous emparer de plusieurs villes avant qu'il n'ait eu le temps de réagir.

‒Ceunon n'est pas une place stratégique. Pourquoi perdre du temps à la conquérir ? Ne serait-il pas plus simple que les elfes attaquent Gil'ead ? Les impériaux ne s'attendent pas à une attaque de sitôt et l'effet de surprise pourra obtenir la victoire. Et après, la route d'Uru Baen sera ouverte. En toute logique, les armées impériales devraient aller à la rencontre des elfes et nous seront sur leurs talons. À cause de leur précipitation, ils seront facile à vaincre.

Arya secoua la tête.

‒Ma reine a vu de nombreuses guerres. Si elle a décidé d'attaquer Ceunon en premier, c'est qu'elle estime que c'est le meilleur plan qui s'offre à nous.

Peu d'hommes pouvaient soutenir le regard de l'elfe mais Orrin ne fléchit pas le sien.

‒Je ne souhaite pas que mon peuple soit exposé aux représailles de l'empire.

‒Nous sommes tous exposés, intervint Nasuada.

‒Nous avons tous choisi d'affronter Galbatorix depuis un siècle déclara Arya. Nous savons les dangers que nous prenons. Elfes, vardens et nains combattent depuis un siècle.

Les yeux d'Orrin s'enflammèrent mais il garda son calme.

‒L'empire ne peut frapper au cœur de la foret ni dans les Béors. En revanche, il peut frapper le Surda avec facilité. Les soldats sont prêts à donner leur vie. Ce n'est pas le cas du peuple.

‒Le peuple surdan ne sera en sûreté qu'après la mort du tueur de dragon. C'est bien pour cela qu'il faut frapper maintenant que nous en avons l'occasion.

Orrin se retint de répliquer. Il commençait à douter. En un siècle, jamais l'empire n'avait menacé le Surda.

‒Attaquer en suivant la rivière Jiet permettra d'empêcher que des renforts de Dras Leona ne nous prennent en tenaille quand nous assiégeront Uru Baen, expliqua Arya sur un ton monocorde.

‒Parlant de la possibilité d'être pris en tenaille, déclara Nasuada, il y a peut-être un risque à l'intérieur même du Surda.

‒Je suis heureux de voir que vous vous souciez de mon royaume !

‒Vous souvenez-vous de l'émissaire impérial qui vous a menacé ?

‒Ce godelureau ?

‒Le Du Vrangr Gata a subtilisé un message codé qu'il transporté. C'est très préoccupant. Il est écrit de prendre contact avec plusieurs aristocrates et bourgeois surdans mais aussi de s'occuper du cas du duc Mérovitz tout en veillant à ne pas blesser le marquis Sardouin.

Tout en parlant, elle tendit à Orrin deux parchemins.

‒Voici une copie du message et une copie du message décodé, dit-elle.

Elle lui expliqua brièvement comment le message était codé.

‒ Nous n'avons pu identifier toutes les personnes mentionnées. Je pense que le prévôt devrait être plus à même que nous pour reconnaître de qui il s'agit. Nous avons interrogé plusieurs personnes qui ont reconnu avoir été en contact avec l'émissaire impérial mais sans expliquer la raison.

‒Comment exactement avez-vous interroger mes gens ? gronda Orrin. Chaque fois que des accusations ont été portées contre les Vardens, le prévôt a demandé votre coopération. Jamais il n'a décidé que l'enquête serait menée à votre insu !

Surprise par sa colère, Nasuada le regarda sans répondre.

‒Il y avait un risque que des Surdans coopérent avec l'empire, intervint Arya. Nous ne pouvions prendre le risque d'attendre. De plus, je craignais que le prévôt lui-même ou de ses assistants puisse être impliqué. Il était nécessaire de vérifier que leurs noms ne correspondaient pas.

‒J'admets bien volontiers qu'il n'était pas possible de demander à mon prévôt de se charger d'enquêter mais je ne saisis pas bien pourquoi je n'ai pas été informé bien avant. Ou peut-être avez-vous également vérifié si j'étais mentionné dans ce message ?

‒Non pas. Mais vous paraissiez avoir tant à faire entre le début de sécheresse dans la région de Pathou et vos expériences que j'ai remis à plus tard le moment de vous en aviser.

Galbatorix prit les parchemins.

‒Une enquête minutieuse aura lieu. Naturellement, je prendrai soin de vous faire parvenir les résultats puisque nous sommes alliés.

‒Je vous remercie, sire, répondit Nasuada sans relever le ton mordant d'Orrin.

Le duc Mérovitz était un meneur d'hommes. Bien que le Surda n'ait connu aucune guerre depuis sa fondation, il s'était distingué en chassant les pirates qui dévastaient les cotes du Surda quinze ans auparavant. Après les avoir soumis, il ne les avait pas fait exécuter en place publique mais avait préféré les faire intégrer la flotte du Surda.

En revanche, les pirates qui attaquaient Pétrovya avaient des tactiques différentes, préférant surgir brusquement et se réfugiant dans la forêt pour échapper aux poursuites. De crainte de la réaction de l'empire si une armée était envoyée, il n'avait pas été possible de les poursuivre.

Évidemment, un marin aussi habile soit-il ne paraissait pas un atout pour envahir l'empire par la voie terrestre mais sa popularité et son charisme entraînait les hommes derrière lui.

Il était de toute façon impossible d'attaquer par voie maritime. Teirm était trop bien protégée. Kuasta était trop éloignée de l'objectif et ne ferait que diviser les forces alliées. Narda était bien trop loin au Nord.

Il inspectait les camps d'entraînement et soulevait d'enthousiasme les recrues qu'il y trouvait.

Le marquis Sardouin était parmi les intendants du royaume.

Il voyageait beaucoup depuis l'arrivée des Vardens et allait de villages en villages, faisant le compte des réserves.

Il avait aussi négocié avec les nains pour obtenir des livraisons de fer.

Hrothgar avait consenti à baisser les prix pour participer à l'effort de guerre mais le prix à payer était tout de même exorbitant.

Le roi nain avait proposé de livrer les armes à crédit. Il laissait au Surda dix ans pour rembourser la somme plus les intérêts. Heureusement, les nains étaient friands de certaines denrées qu'ils ne produisaient pas eux-même. La bière au miel était très appréciée.

En temps normal, maintenir une armée en état de combattre impliquait un budget conséquent. Une armée en marche avait des besoins encore plus grands.

Il fallait de l'approvisionnement en abondance. Il fallait des armes en nombre suffisant pour remplacer celles qui seraient cassées. Il fallait payer les soldats.

Les armées alliées ayant l'ambition de sauver les peuples de Galbatorix, le pillage des terres ennemies traversées n'avait pas été envisagé.

Dans ces conditions, seule une victoire rapide permettrait au Surda de ne pas se trouver en très mauvaise posture.

Il y avait un risque de désertion en masse si les troupes n'étaient pas payées. Dans le pire des cas, les déserteurs pouvaient former des groupes de brigands.

Et si la guerre se prolongeait, l'approvisionnement ne pouvait être assuré qu'en rationnant les paysans au risque de provoquer une révolte.

Autant dire que le marquis Sadouin manifestait peu d'enthousiasme pour la guerre. Il avait longuement tenté de dissuader le roi de s'engager dans cette aventure, en vain.

Malgré sa réticence, c'était un bon serviteur du Surda. Il avait perdu un bras dans sa jeunesse mais ne reculait pas devant l'effort.

Après quelques recherches, le Du Vrangr Gata avait découvert que ces deux là devaient se retrouver pour faire le bilan de la logistique nécessaire.

Le sénéchal du Surda devait les retrouver dans un petit village.

C'était un rendez-vous secret. Mais Trianna était assez douée pour fouiller dans les esprits qui avaient des informations sans être bien protégés.

Et Tanya avait assez d'agents infiltrés pour recueillir ce qui se disait.

Nasuada envoya Jörmungand avec une troupe pour assurer leur protection.

Un fortin était dressé un peu à l'écart du village. Une tour fortifiée et quatre grands murs avec quelques bâtiments : une écurie et un entrepôt.

La réunion qui se déroulait était importante mais la région était calme alors la surveillance manquait de vigilance.

Après le crépuscule, la plupart des soldats étaient occupés à se reposer. Des braseros avaient été allumés sur les murs pour le plus grand plaisir des sentinelles.

Du bétail paissait paisiblement mais les guetteurs n'y faisaient plus attention.

Les vaches s'avançaient de plus en plus des murs à cause d'une petite suggestion mentale.

Derrière les vaches, des soldats impériaux se cachaient.

Tanya lançait l'attaque.

‒Brisingr, murmura-t-elle.

Sa torche s'enflamma.

La plus grande partie de son groupe s'avança parfaitement visible allant au pas, comme si leurs chevaux étaient fatigués d'une longue route.

Ils furent naturellement repérés facilement.

L'une des sentinelle alla prévenir Sardouin et Mérovitz de l'arrivée d'une troupe.

‒Il doit s'agir du sénéchal ! Ses quartiers sont prêts. Dès qu'il se fera reconnaître ouvrez les portes. En attendant, préparez un repas pour lui et une barrique de bière pour ses soldats. Ils ont bien mérité du repos.

Pendant que l'attention des sentinelles était distraite, les impériaux cachés rejoignaient le pied du mur.

Ils sortirent des grappins et les accrochèrent au sommet avant de grimper.

Après avoir sorti leurs arcs, ils commencèrent à tirer sur les guetteurs.

Le retentissement d'un cor réveilla tout le monde.

Plusieurs impériaux abattirent les Surdans qui se précipitaient dans la cour pendant que les autres couraient vers la porte.

Les sentinelles furent facilement maîtrisées mais les Surdans gardant la porte étaient plus forts et l'effet de surprise était passé.

Mérovitz sortit portant une hache et un bouclier.

Il grimpa sur le mur et décapita le premier impérial qui croisa son chemin. Il se précipita vers la porte mais un archer lui tira dans la jambe par derrière.

Dans le même temps, la troupe de Surda était passé au galop pendant l'attaque et avait fini devant la porte.

‒Au nom du roi, ouvrez !

L'un des Surdans décida de laisser le passage à ceux qu'ils pensaient être alliés.

La lourde porte s'abaissa et les cavaliers s'engouffrèrent à l'intérieur.

Mérovitz arracha lui-même la flèche de sa jambe et continua d'avancer en se tenant d'une main. Il réussit à abattre un autre impérial.

Les impériaux formèrent une ligne à peu près droite et une partie fonça dans un entrepôt et emportèrent des sacs d'or avant d'y mettre le feu. D'autres allèrent à l'écurie où ils firent s'enfuir les bêtes.

Les Surdans étaient regroupés autour de l'entrée de la tour.

‒A vos boucliers !

Des archers surdans tirèrent depuis la tour forçant les impériaux à reculer en désordre.

‒En avant, s'écria Sardouin. Boutez-les hors d'ici !

Avec un féroce cri de guerre, les Surdans obéirent.

Les impériaux reculèrent en donnant du fer.

Ceux qui portaient les sacs d'or s'étant enfui, les autres leur emboîtèrent le pas.

Ceux qui avaient grimpé aux murs rejoignirent leurs camarades. Avant de détaler, l'un d'eux tira une flèche et atteignit Sardouin.

Ils filèrent à grande vitesse mais les Surdans n'avaient plus assez de chevaux pour les poursuivre.

Ils ne purent que refermer la porte et s'occuper des blessés.

Ils n'avaient aucun magicien avec eux.

Ce ne fut que le lendemain que le sénéchal arriva.

Une quinzaine de Surdans avaient été tués dont Sardouin. À part quelques blessures, les autres allaient bien.

Beaucoup d'or avait été volé. La plupart des chevaux étaient revenus mais aucune poursuite n'avait été lancée. Les chevaux étaient fatigués et personne ne savait où aller. Une patrouille avait été envoyée pour vérifier les alentours.

‒Probablement des voleurs, estima Mérovitz. Ils ont fait leur coup, ont prit l'or et se sont enfuis.

‒Comment de simples voleurs ont pu oser s'en prendre à des soldats ?

Mérovitz secoua la tête.

‒Ce n'était pas de simples soldats. Ils étaient bien organisés. Ils ont profité d'un manque de vigilance de notre part.

‒Vous aurez à rendre compte pour votre négligence, menaça le sénéchal.

Les cadavres des intrus furent examinés. Ils avaient des cicatrices sur le corps, preuve de leur habitude des combats.

À courte distance, d'autres coprs furent retrouvés. Quelques pièces d'or se trouvaient dans l'herbe.

Il fut supposé que les bandits s'étaient disputés pour le partage et avaient réglé leur différend à coup d'épée.

Jörmungand arriva dans la journée avec sa troupe.

‒Trop tard ! s'exclama-t-il.

Informé de sa présence, le sénéchal le fit venir.

‒Que faites-vous céans ?

‒La reine Nasuada m'a envoyé. Elle m'a dit qu'une attaque aurait lieu.

‒Elle est bien informée, dit le sénéchal en fronçant les sourcils.

‒Nos magiciens ont découvert qu'une menace pesait sur le duc Mérovitz et nous sommes venus le secourir.

‒Comment le saviez-vous céans ?

‒Les impériaux ont prévu d'assassiner le duc Mérovitz. Ils voulaient épargner le marquis Sardouin et comme le duc et lui se rencontraient, nous avions pensé que l'empire pourrait frapper.

‒Le seigneur Mérovitz est bien vivant ! Un peu blessé mais il est vivant !

Un sourire apparut sur le visage de Jörmungand.

‒Ah bien ! L'empire a échoué alors !

‒Mais le seigneur Sardouin est mort.

‒Ah il n'est plus possible de l'interroger alors !

‒L'interroger sur quoi exactement ? Quelle accusation portez vous sur le seigneur Sardouin ?

‒Aucune, dit fortement Jörmungand en levant les main en geste d'apaisement.

‒Aucune accusation. L'empire ne voulait pas sa mort, c'est tout. Cela ne signifie pas qu'il était à la solde de Galbatorix. Peut-être l'empire estime-t-il simplement qu'il n'est pas une menace.

‒C'est ridicule,intervint Mérovitz. Le marquis Sardouin était à l'arrière pendant le combat. Il était facile de ne pas le tuer. Il a été visé délibérément. Et moi-même me suis retrouvé blessé. Je n'ai pas été spécialement visé. Le marquis Sardouin est un loyal serviteur du roi. Quand je serai guéri, nous nous retrouverons pour que je puisse vous faire regretter d'avoir la langue trop pendue.

‒Je vous présente mes excuses. J'ai parlé trop vite. Puis-je savoir ce qu'il s'est passé exactement ?

Un récit concis mais complet de l'attaque lui fut fait.

Jörmungand se demanda s'il s'agissait simplement d'une coïncidence. Peut-être s'agissait-il de véritables brigands sans rapport avec l'empire. Ou bien, le message dont lui avait parlé Nasuada n'avait pas bien été décodé. Peut-être que l'empire voulait justement l'inverse la mort de Sardouin et la survie de Mérovitz.

Mais cela n'avait aucun sens.

Sardouin était un bon intendant mais il n'était pas essentiel. Il avait envoyé des rapports régulièrement donc sa mort n'empêchait nullement Orrin d'être informé des réserves sur lesquelles pouvait compter son royaume.

Et la loyauté de Mérovitz ne faisait aucun doute. Ou bien l'empire espérait qu'un marin ne dirige pas bien les hommes sur la terre ferme ? Mais il n'y avait nul besoin de donner des ordres spécifiques.

Mérovitz fut soigné grâce à un magicien qui accompagnait le sénéchal.

Malgré cette affaire, il fut chargé de continuer l'inspection des camps d'entraînement.

Le sénéchal donna à Jörmungand ordre de l'accompagner jusqu'à Abéron. Il n'avait pas apprécié du tout son intervention.

Orrin fut furieux que Nasuada ait envoyé une troupe sans l'en informer.

Nasuada répliqua qu'elle l'avait prévenu et lui avait donné connaissance du message codé.

Apparemment, les agents d'Orrin étaient encore à enquêter.

Des rumeurs coururent dans la capitale mais sans mention du message découvert par Trianna.

Certains Vardens ricanèrent en disant que les Surdans n'étaient même pas capables de faire face à des bandits.

Mais des Surdans s'interrogeaient sur la présence de Vardens juste après une attaque.

‒C'est tout de même bizarre, disaient-ils. Monseigneur le duc Mérovitz qui serait une force dans la guerre est à peine blessé. Et monseigneur le marquis Sardouin qui avait tenté de dissuader le roi d'entrer en guerre est tué. Et comme par hasard les Vardens étaient sur place et prétendent même nous défendre. Mais ce sont les seuls qui avaient intérêt à la mort du marquis.

Troublés, des buveurs répétaient ce petit discours avec force commentaires.

S'agissait-il d'un coup en traître des Vardens pour éliminer quelqu'un qui voulait éviter la guerre ou d'une simple attaque de bandits ?