Avant-propos

Bouh; je me suis (encore) faite plaquer ce soir.

J'ai le moral dans les chaussettes; le sentiment que ça n'ira jamais, que cette quête des homme est sans fin et sans issue

Alors, j'ai cherché: qu'est-ce qui me ferait du bien? Des amis et du chocolat, certes. Mais surtout: écrire. Plus qu'écrire: publier. Partager. Créer du lien. C'est la meilleure manière je crois, je faire d'une mauvaise expérience quelque chose d'enrichissant.

Alors voici une histoire sans prétention: un conte moral qui j'espère, fera réfléchir les Loups et les Petits Chaperons Rouges équanimement.


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Chapitre Premier

Qui sème le vent…

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RENART ET HERSENT

Ville d'Osaka
Kansai - Japon

Vendredi 21 janvier
8h00

Pluie

Le soleil s'est levé sur un ciel maussade. Gris, froid : l'astre jaune décida donc de retourner se cacher sous un tricot de nuage – et tant pis pour les autres.

Son vêtement d'air et d'éther l'engonce un peu : il est serré. Le froid, l'humidité l'ont fait rétrécir au lavage céleste…Alors au travers de ce paquet ennuagé, le seigneur soleil se met à suer : les gouttes filtrées par les nimbus ne manquent pas de s'abattre en pluie sur la terre, où elles se mêlent à l'immaculée rosée verglacée du matin.

Il fait frais. A l'instar du soleil, personne ne veut quitter son duvet. Les araignées s'emberlificotent chaudement au creux de leurs toiles d'argent, les fleurs gardent leurs pétales bien serrées sur le moelleux de leur pollen, et les écureuils rabattent sur leurs oreilles leur magnifique queue touffue et épaisse.

De concert, le vivant voyant l'humeur du monde ambiant décide de consacrer cette journée au repos.

Le vivant…oui, mais point les humains.

Ah, les humains ! Quels drôles de petits bipèdes incomplets…La nature souvent contemple leurs aventures, avec un tendre dédain. Voilà de petits polissons : toujours une affaire en cours, toujours une ride au coin de la pensée : ils ne savent pas, eux, rester sages et reposés sur terre.

Notre histoire pourrait donner raison à ces commérages de ménage, que sont les commentaires muets des animaux, des plantes et des éléments. Elle est un brin moralisatrice, et en même temps assez drôle, pour qui aime rire au dépend des méchants.

Observons donc sous cette voûte, dans un morceau de pays, une grande maison japonaise pourvue de tout le « confort » moderne.

Dans une des nombreuses chambres de cette demeure cossue, un petit sapiens s'éveille, se frotte les yeux. Enfin, petit…C'est selon : c'est un jeune homme d'une vingtaine d'année, splendide dans la force son âge.

Cet être encore sans douceur bâilla ostensiblement, sans aucune élégance ni souci de l'être. Il passa sa main dans ses courts cheveux pourpres. A cette occasion, il eut le déplaisir de constater que sa coupe flamboyante - légendaire - s'était aplatie, ayant pâtie de la nuit agitée dont il émergeait. Oui, quelle nuit de rouerie, pensa-t-il laissant un sourire machiavélique glisser le long de lèvres qu'il avait très fines et très rouges.

Il jeta un coup d'œil à sa droite. Parmi les draps défaits et les oreillers éparpillés de l'immense lit qu'il occupait, il distingua une petite forme encore être endormie.

Et qui n'aurait définitivement plus dû se trouver là depuis des heures, grinça le garçon avec mécontentement.

Sans aucun signe avant coureur, mais qui décrit assez bien sa faiblesse de caractère, il se saisit d'un oreiller qui traînait là et l'abattit sans ménagement sur la silhouette immobile, tout en articulant mélodieusement :

-Hey ! On se lève maintenant !

La jeune fille – car c'en était une - fut déboussolée par un tel réveil. Elle se redressa avec une certaine précipitation – avec trop de précipitation. Paniquée, empêtrée, elle s'était emmêlée dans les draps avant de tomber avec un bruit mat et sourd sur la descente de lit.

Le garçon leva les yeux aux ciels, soupirant. Mais qu'est-ce qui lui avait fichu une potiche pareille…

(On peut légitimement se demander si son attitude ne faisait pas de lui un poticheau, mais c'est un autre débat.)

Au sol, son invitée émit un gémissement de douleur – quoique le maître des lieux fut quant à lui ravi de retrouver l'usage exclusif de son matelas. D'ailleurs, il s'enfonça plus confortablement dans celui-ci.

Sa compagne se releva, frictionnant la peau là où elle avait eu mal, murmurant des malédictions envers ce qu'elle pensait être « la maladresse» du garçon.

Ce dernier l'observa se mettre sur pied. Il en profita pour la jauger d'un mouvement oculaire complaisant, presque paresseux. Des cheveux noir-bleus noués en couettes, de splendides yeux sombres et un sourire mutin…

Enfin un « sourire mutin », sauf ce matin. Porshe n'était pas le moins du monde heureuse d'avoir été tirée de sa torpeur par ce moyen pour le moins discourtois. Croisant les bras sur sa chemise de nuit à motif d'oursons, elle harangua son hôte avec humeur :

-Bonjour à toi aussi ! Et merci pour ce lever plein de courtoisie…C'est comme ça que tu traites tout le monde ?

Maugréant, elle voulu se réinstaller au bord du matelas mais fut stoppée net dans son élan par un mouvement du menton de son interlocuteur.

Porsche lui renvoya un regard pour le moins surpris, tandis qu'il reprenait d'un ton calme mais impérieux :

-Derrière cette porte se trouve un employé de la maison. Il pourvoira à tout ce que tu estimeras nécessaire : douche, petit-déjeuner, transport jusqu'à l'université au besoin…Tu n'as qu'à demander.

Nouveau bâillement, monstrueux.

-Oh, et la robe que tu portais hier était affreuse. Essaie de te couvrir le visage avec un châle en quittant la maison : je ne voudrais pas attenter à ma réputation les voisins diraient du mal de moi s'ils pensaient que mes invitées étaient toutes des dépravées en guenilles.

La jeune fille rougit à la fois sous la colère et sous l'insulte.

-Tu ne veux quand même pas dire…

-C'était sympa de faire ta connaissance. Mais c'est fini, l'accord que nous avons conclu hier ne tient plus. Maintenant, je ne veux plus te voir.

-Je pensais…

Ignorant superbement cette tentative de dialogue, le goujat se leva et se dirigea vers la salle de bain adjacente à sa chambre, laissant bouillir de rage de nouvelle-future-ex-copine.

-Espèce de malotru en tutu, souffla néanmoins la concernée, se dirigeant mécontente vers la sortie.

Ce matin là, Porshe se rendit à une réunion du club des vitriers, qu'elle administrait partiellement sous la tutelle du Professeur Foxy. La plupart de ses amis étaient issus de ce cercle, aussi lorsqu'elle leur conta cette mésaventure, ils entreprirent de la couvrir d'affection et lui proposèrent de sortir, pour la divertir.

Ce qui fut ce que l'on appelle communément, une « fausse-bonne-idée ».

Ayant toute latitude pour s'épancher sur les épaules de ses amis au sujet de l'humiliation cuisante qu'elle venait de subir, Porshe s'en donna à cœur joie le midi à la cafétéria, et le soir au café.

A cœur joie, et bruyamment.

En un clin d'œil, la rumeur se répandit comme une traînée de poudre : le week-end durant, toute l'université cancana à ce sujet.

C'était ce qu'avait voulu Porshe : qu'on l'entendît le plus largement possible. D'ailleurs, personne ne vint à elle pour se moquer, ou la blâmer, au contraire. Les filles étaient pétries de compassion à son encontre, et les garçons se bousculaient dans son sillage, la couvrant de fleurs et de peluches afin de lui faire oublier son malheur.

Dans ce déferlement d'affection, les commentaires continuaient d'aller bon train. Qui l'eût cru ? Porsche Porchedy, artisan aux doigts de fées, petite chipie mesquine et insaisissable, inénarrable briseuse de cœur venait de se faire briser le sien par Eustass Kidd, renard roublard le plus redoutable de son temps.


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LE CENACLE
(ENTRE RUBEMPRE ET D'ARTHEZ)

Université de Grand-Sekaï
Salle estudiantine au troisième étage

Lundi 24 janvier
12h00

Nuageux

-« Il semblerait que cet ignoble coureur de jupon ait encore fait une victime parmi les innocentes fleurs qu'abrite notre pourtant si bien réputée Université Grand-Sekaï Osaka.

Pour ceux qui auraient passé les vingt dernières années de leur vie en Laponie septentrionale – et au fond il n'y a rien de mal à cela -, sachez que Eustass est l'archétype de ce que nous appelons classiquement un S-A-L-A-U-D.

(C'est-à-dire une personne méprisable, dénuée de toute moralité.)

Ce Môsieur qui pense que ses boucles d'oreilles en or donnent de la valeur à sa personne , a entrepris dès son entrée même dans notre beau Collège Universitaire d'y semer l'anarchie par ses multiples incitations à la débauche et par le dévergondage moral massif auquel il s'est livré - pour rappel, consulter nos archives en suivant la note page 15, «Mlle Hina prise sur le fait ».

Il est aujourd'hui plus connu de « Don Juan des mers la bassesse», ou encore « Capitaine des couards ».

Nonobstant son attachement au club de voile jamais démenti … - suite page 5 ».

-Ha ha Eustass, tu t'es encore bien fait descendre!

- De qui est signé cet article…ha j'en étais sûr, encore ce journaliste…Une chose est sûre : en battant Porsche à son propre jeu, tu ne t'es pas attiré la sympathie de la rédaction du Morgan Times Eustass-ya…

-La ferme Law ! Fais-moi voir ça !

Trafalgar répondit à son homologue par un geste obscène rehaussé d'un regard moqueur. Evidemment, ce double outrage eut pour effet d'agacer prodigieusement son compère qui se jeta sans ménagement sur Law pour entamer une dispute.

-Ha ha ha! S'esclaffait un jeune homme aux cheveux noirs nonchalamment étendu sur un banc. Regardes la tête que tu t'trimballes sur la photo qu'ils ont mis en couverture ! Elle était où ta célèbre coupe de punk à l'époque ?

-Tu cherches les embrouilles toi aussi, Mugiwara ? Gronda Eustass, toujours aux prises avec Law.

-Quand tu veux ! Répondit avec fougue et détermination le brun, envoyant valdinguer le plat de nouille auprès duquel il était auparavant occupé. Aouch ! C'était pour quoi ça, Hawkins ?

-Restes à ta place, animal primitif, répliqua du ton calme qui lui était coutumier ledit Basil, récupérant le livre qu'il avait lancé à la tête d'un Monkey D. beaucoup trop échauffé à son goût.

Loin d'obtenir l'effet escompté, l'intervention d'Hawkins n'avait fait que rediriger l'animosité de Monkey-D.-Luffy-Mugiwara-trop-de-noms-pour-ne-pas-frôler-le-Gary-Sue vers sa personne.

Pendant ce temps, Kidd continuait de poursuivre Trafalgar en proférant nombre d'insanités choquantes pour vos pieuses oreilles.

C'est alors qu'une intervention divine les calma.

(Et tous ceux qui pensaient voir surgir Baggy seront déçus.)

-Ohayo, tout le monde ! Qui veut une bouteille de lait ?

Les quatre garçons se figèrent, mais ils ne furent pas les seuls : tous les autres étudiants alentours retinrent leur souffle, subjugués.

C'est ainsi qu'Eustass demeura les mains serrées autour du cou de Trafalgar, qui avait agrippé à pleines poignées les cheveux rouges du « Captain ». Luffy avait interrompu son élan contre Basil – son poing toujours dressé témoignait de la violence de ses intentions. Seul Basil, d'ailleurs, avait l'air parfaitement calme – occupé il est vrai, à chercher dans son livre la page que son altercation avec Luffy lui avait fait perdre.

Le temps s'était arrêté autour de la gracieuse Boa Hancock. Quoique vêtue de l'uniforme de l'université – qu'elle avait raccommodé à son goût – elle rayonnait de beauté et de majesté. En un clin d'œil, garçons et filles se ruèrent autour du petit chariot qu'elle poussait. Semblant réclamer une saine dose de calcium, tous n'avaient en réalité qu'un but : admirer et se faire apprécier de ce visage harmonieux, dont on savait pourtant qu'il pouvait se montrer si, tellement cruel…

Imaginez bien la scène, mais n'omettez pas d'y ajouter un détail troublant qui doit capter notre attention.

Voyez : tandis que la majorité des étudiants se font une joie de s'approcher au plus près d'Hancock, un être seul fait exception dans cette pièce - peut-être même dans toute cette galaxie.

Monkey D. Luffy.

A l'entrée de Boa, son visage était demeuré interdit. Puis, une larme de sueur avait glissé le long de sa tempe. Bientôt, ce fut son corps tout entier qu'il sentit transpirer à grosses gouttes inquiètes. Il jeta un regard désespéré à gauche…puis à droite…Mais pas de sortie. Avec un peu de chance, elle ne le remarquerait p-…

-Ah, Luffy-san 3 !

S'était-elle téléportée ? Comment expliquer autrement qu'elle se fût extraite à une telle vitesse de la foule compacte qui la serrait ? Hancock agitait sous le nez de Luffy un petit panier en osier, au fond duquel étaient entreposées, sur une serviette de coton mauve, de petites bouteilles de verres renfermant le bon foin transmuté.

-Hancock-san, salua tranquillement Trafalgar, toujours prompt à la politesse.

Il fut bien le seul : Kidd s'en était retourné fulminant à la lecture de l'article l'incriminant, tandis que Basil observait avec un intérêt presque scientifique la scène qui se déroulait sous ses yeux.

-Hé…euh…salut Hammock.

La jeune femme en face de lui ne sembla pas s'émouvoir de cette mauvaise prononciation, au contraire : ce fut son tour de rougir.

-Luffy-san ! Je me demandais…

-Allez, à plus tout le monde !

En un bond, le brun avait fendu la foule et avait détalé à toute vitesse coiffant Boa au poteau.

-Ce crétin, soupira Kidd en levant les yeux au ciel.

-Luffy, résuma Hawkins tournant nonchalamment une page.

Sans donner d'explications plus avant, suivons ce sage mouvement du doigt et passons à la scène suivante.


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LILIPUT

Université de Grand-Sekaï
Club de voile

Lundi 10 avril
12h00

Turbulences

Quelques mois ont passés. Eustass avait continué de vivre selon sa coutume: un quotidien studieux et séducteur, flambeur flamboyant et méprisant. Il passait autant de temps à rire qu'à se battre avec ses amis. Ses parents ne prêtaient toujours pas plus attention à lui que s'il était un pan de mur (mais il trouvait que c'était très bien comme ça).

La saison avait changé: l'air d'avril était chargé de parfums. Le vent avait une parure fleurie et une traîne rose: le temps des sakuras était revenu, et avec lui celui des doux soirs passés sur le bord de la mer.

Ou au beau milieu des flots: paré de pied en cap pour le large, Eustass profite de l'annulation d'un cours pour aller au port, à l'endroit où se situe le club de voile de l'université - qui est aussi son centre de gravitation, son coeur névralgique.

Aussi loin qu'il se souvienne, Kidd a toujours voulu être sur l'eau. Dès qu'il en a eu l'opportunité, il s'est familiarisé avec l'élément marin: cours de natation, aviron, promenade en barque, en bateau...Lorsqu'il a atteint l'âge, il a demandé à ses parents de lui acheter sa première voile: depuis, il n'avait cessé de progresser et rêvait de devenir le marin le plus habile, le plus rapide du pays.

Il était prêt à profiter du soleil et du zénith pour se perdre dans les effluves iodés de la mer du Japon. Sur l'embarcadère, il s'affairait autour d'une corde un peu réticente. Sur le point de dénouer le tout, il sursauta: au loin, quelque part sur le port, quelqu'un l'halpagait.

- Nomdediouss ! Eustass ! EUSTASS ! Faut absolument que tu viennes voir ce que Jewelry vient de déposer !

Il grogna, et marmonna pour lui-même:

-Qu'est-ce qu'il y a encore? Ca ne se voit pas, que je vais bientôt prendre le large ?

Joignant le geste à la parole, déterminé d'échapper à des importuns, il prit son élan et sauta sur son petit ponton à petons joins. Il agrippa une corde, tendit une voile, et ça y est: le voilà parti.

Lorsqu'il est sur son zodiaque, Eustass ne pense plus à rien. C'est la seule activité qui lui procurât jamais bien-être, détente: en un mot, bonheur. Il aime ses amis (bien qu'il se fût dix fois coupé la langue plutôt que de l'admettre à haute voix), mais la sensation que lui procurait la navigation était ineffable.

Sur son bateau, il se sentait libre. Libre d'être lui-même: extatique, excessif, exagéré, extraverti. Mais aussi: doux, rêveur, méancolique, pensif. Il peut laisser son âme se déployer et tomber le masque qu'il porte en permanence, et qui parfois lui pèse.

D'ailleurs, c'est un marin hors pair, un compétiteur acharné. Tous les ans avec ses camarades d'université, ils se chamaillent le titre de "Roi des pirates" lors de la course de fin de cycle. Inévitablement, c'est Luffy qui gagne: mais Eustass n'en démord pas, il finira par le mettre sur la touche un jour, il en est certain.

Reposé, rafraîchit, il dirige son bateau vers la terre ferme. Là, il constate que Bonney, le seul capitaine féminin parmi les équipes de course à la voile, est en grands conciliabules avec son meilleur ami: Killer.

Posant pied à terre, il remarqua que l'instructeur, Silvers Rayleigh, se tordait de rire en lisant ce qui semblait être le journal de l'université.

Il fronça les sourcils. Il ne savait pas pourquoi, mais il avait un mauvais pressentiment. Il secoua la tête, et se força à se concentrer sur le groupe de jeunes gens vers lequel il se dirigeait: "supernovae" des mers, passionés de voiles - quelques chose entre des camarade fidèles et des rivaux sans merci.

-Hé Killer! Je te cherchais tout à l'heure, Hawkins a dit que tu venais d'écoper d'un devoir supplémentaire...

Il devina la grimace sous le masque de Killer.

-M'en parle pas: j'ai encore eu une crise de fou rire pendant le cours de O'tsuru. Tu sais à quel point elle est inflexible sur la discipline - mais c'est plus fort que moi, quand ça me prend il n'y a rien à faire...juste à laisser couler.

Eustass hocha la tête: chacun ses .S., ceux de Killer ne le faisaient pas rire du tout, au contraire: il était impitoyable envers quiconque se moquait de lui.

A côté d'eux, Bonney trépignait, frappant le sol de la pointe de ses bottes hautes. Visiblement, elle trépignait d'impatience de leur apprendre quelque chose. Eustass vit qu'elle aussi, était munie du journal de l'université. De nouveau, il fronça les sourcils.

-Qu'est-ce qu'il t'arrive, Jewelry? Tu tires une drôle de tronche. Je veux dire, plus drôle que d'habitude.

Elle le gratifia d'une grimace enfantine (dont elle seule avait le secret), ce qui déclencha un autre fou rire de Killer.

-Bakaaaa s'insurgea-t-elle, tu n'as pas lu le Morgan Times récemment?

-Pas besoin, répliqua-t-il agacé. Law s'est chargé de me faire la lecture du dernier article à charge contre moi de cette...de ce...Fourras? Fouget?

-Fude, corrigea Bonney. Eh bien, ça n'a pas l'air de te remuer plus que ça. Tu sais que ça pourrait nuire à ton dossier à moyen-terme, toutes ses histoires de filles?

-Il s'agit de relations privées nouées entre adultes majeurs responsables et strictement consentants, répliqua Kidd avec une froideur extrême. C'est le vingt-et-unième siècle, s'il y en a qui sont restés coincés au Moyen-âge sur des questions de morale, ça les regarde.

Bonney hocha la tête, sceptique.

-Moi je crois que tu as peur de t'attacher, et qu'un jour tes habitudes vont te jouer un bien vilain tour. Ce n'est pas bien de faire miroiter aux jeunes filles monts et merveilles, pour transformer le conte et fées en cauchemar une fois que ton apétit est rassasié.

-Mêle-toi de tes fesses! rugit Kidd.

-Je crois, intervint Killer en pacificateur, je crois que ce que Jewelry essaie de te dire Eustass, c'est qu'un jour où l'autre, il y aura peut-être quelqu'un qui voudra se venger.

-Je ne comprends pas ce que vous voulez dire l'un et l'autre: je crois que vous êtes à côté de la plaque. Et je commence à me demander si ce journal n'y est pas pour quelque chose. Fais voir, Killer.

Ce fut au tour de Killer de se dandiner sur place, visiblement gêné.

-Euh...Eustass? Si je te donne le journal est-ce que...est-ce que tu me promets de ne pas t'énerver et tout casser dans les vestiaires?

-Oui, pas comme la fois où tu as encore perdu contre Luffy...souffla Bonney du coin des lèvres.

(Ce qui lui vallut un regard assassin de la part de Kidd. Mais enfin elle ne dit rien de mal: la vérité est parfois aussi tranchante et douloureuse qu'une lame de sabre - c'est tout.)

-Je n'ai pas cinq ans, se contenta-t-il de répondre. Allez, amène.

A contrecoeur, Killer lui tendit la feuille de papier.

Eustass n'eut pas besoin de chercher: en couverture, son nom (qui faisait les gros titres) lui sauta aux yeux:

"LE CAPTAIN KIDD DANS LA TOURMENTE: le réquisitoire de la communauté Otaku contre un infâme manipulateur narcissique"

Ca donnait le ton. Kidd était sidéré - il se demandait quelle pouvait bien être la signification de cet article. Une plaisanterie de mauvais goût? Une farce du club de voile pour son anniversaire? Médusé, déconnecté du réel, il continua de lire l'édito - son cerveau butant hébété sur chaque nouveau paragraphe à charge.

Eustass Kidd. Ces kanjis, chers lecteurs, vous disent certainement quelque chose. Briseur de cœur, il est. Et, par les cheveux du grand Pope, briseur de cœur il ne le restera pas !

Le samedi 8 avril au soir, parmi les fleurs de cerisier épanouies, ce fils de Cognard a encore frappé. Tel un fauve à l'affût, il a repéré et traqué une nouvelle proie. Le schéma classique, bien connu d'entre tous, s'est ensuite déroulé. Le criminel a eu le même mode opératoire sur la forme et dans le fond. Tel Light Yagami cherchant à berner L par ses multiples astuces, digne du suppôt d'Alucard Van Helsing qu'il est.

Soupirs, rougissements, cajoleries et compliments, cadeaux couteux, virées en voiture de luxe, restaurants hors de prix : tout a été bon pour piéger sa malheureuse victime. Pour la berner, en lui démontrant qu'il n'était pas l'homme que les rumeurs voulaient bien dépeindre.

Elle ne se rendait pas compte qu'elle était elle-même victime en cet instant de l'illusion. Elle lui accorda le bénéfice du doute, et se mit à le juger en fonction de ce qu'elle avait sous les yeux, malgré les avertissements de ses amis.

Permettez-moi d'éclater d'un rire sardonique ici.

Ce monstre d'égoïsme que Ganondorf lui-même ne renierait pas, a, malgré toutes les précautions prises par les filles, joué la carte du « Don Juan » une fois de plus.

Il a de nouveau brisé un cœur. Cependant, force est de constater que c'est là le cœur de trop.

On ne s'en prend pas aux Otakus impunément.

Et quand on l'attaque, l'Empire informatique contre attaque. Nous défendrons l'honneur de notre championne internationale de Tekken Online, Lilith Vegapunk, coûte que coûte. Vous lisez bien. Quel qu'en soit le prix, Captain Kidd, tu vas payer.

Tout ce qui reluit n'est pas d'or, tout ce qui erre n'est pas perdu. Les geeks forment un bloc à part, certes, mais nous restons compacts et soudés. Et la philosophie de notre belle et grande famille, nous oblige à laver cet affront, pour l'obliger à comprendre que ce n'est pas parce qu'on est riche que tout nous est permis.

Qu'on se le dise. Il sera notre Sephiroth Hôjo, nous serons son Cloud Striff.

Bowser des cœurs, gare à tes fesses !

Signé : le collectif des Otakus de Grand Line, représenté par son Webmaster FUDE.

Le journal lui tomba des mains, tandis qu'il chutait des nues. La guerre était bel et bien déclarée: et ses ennuis ne faisaient que commencer...


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To be continued