Il avait conduit sans réfléchir, pied au plancher, la Bentley crachant du Queen à pleins poumons, les chansons se mélangeant allègrement dans un bordel sans nom. A l'arrière les plantes vertes tremblaient a en répandre leurs feuilles. Malgré la terreur provoqué par la vitesse et la voiture qui semblait sur le point de se disloquer sous l'effet de la vitesse et du son, elles étaient encore bien plus terrifiées par l'homme qui tentait de retenir sa rage. Chaque fibre végétale luttait pour resté attachées à sa voisine et pour surtout surtout ne pas jaunir, on n'y pense que trop peu mais les plantes aussi ont le mal des transports.
Imaginez être un être qui n'est pas né pour se déplacer, se retrouvant bombardé dans la campagne Londonienne par un fou furieux qui s'embrasait actuellement sous l'effet de la frustration. Imaginez que cette image ne soit pas une image et que enfermé dans ce bolide vrombissant vous commenciez à voir de petites braises tomber comme des missiles sur vos jolies feuilles. Bloqué dans votre immobilité, craignant qu'à chaque instant les yeux de serpent furieux ne se posent sur vous, alors que vous tentez d'éviter les flammèches tout en vous demandant si vomir dans votre propre pot ferait un bon compost.
On ne pense pas assez à la difficulté d'être un ficus dans la voiture d'un démon en colère.
Rampa bouillonnait, grommelant, sifflant, pestant entre ses dents. Il fini par écraser sans ménagement le frein de la Bentley tout en lâchant un juron. Il ne savait pas où il était, il s'en foutait. La voiture fumait dans son intégralité, ses phares clignotèrent péniblement comme pour se remettre de tant d'émotions.
- Émotion ?!
La voiture sembla se ratatiner.
- Ah qui tu parles d'émotions ?! Je ne veux plus entendre parler d'émotion ! Je ne veux d'ailleurs même plus entendre parler de parler !
Rampa s'éloigna d'un pas excédé et une large tache d'huile se forma sous la Bentley.
Qu'est ce qui lui avait pris, non de D... Merde ! Écouter des humains... Il avait vraiment vrillé ! Parler... Parler ! Avec cet imbécile d'ange borné ! Tout ça a cause de cet autre ange borné de Gabriel ! Pourquoi avait il fallu que dans son brouillard cosmique il vienne échouer précisément dans la librairie d'Aziraphale. Alors qu'ils pouvaient enfin espérer profiter d'un peu de calme,loin du ciel et de l'enfer, dans Leur camp. Les choses avaient commencé à se dessiner doucement et il ne s'imaginait pas revenir en arrière perdre son... meilleur ami.
Il souffla par le nez, oh et puis flûte, il l'avait dit Aziraphale n'était que son ami, un mec qui répondait un truc parfois drôle quand lui disait quelques choses d'intelligent. Voilà tout. Et il avait simplement paniqué en l'entendant parler de retourner au ciel. D'où ce geste... ineffable.
Il grogna et se pinça l'arrête du nez. Il n'était qu'un foutu démon après tout et même si voir Belzébuth chantonner son amour pour Gabriel l'avait légèrement questionné sur toutes ces notions qu'on lui avait bombardé sur les démons et leurs incapacités à ce lier aux autres par d'autres moyens que des menottes, liens en cuir, cordes...
Il aurait du avoir une paire de menottes avant d'entamer cette discussion avec l'angelot... Ça aurait été bien plus dans ses cordes, non dans ses attributions.
Il s'agaçait tout seul, son esprit alternant étrangement entre un profond agacement, un désespoir malvenu alors qu'une part de son essence profonde lui signifiait l'absence du plan terrestre de celle d'Aziraphale, des images de ce derniers rougissant et râlant les mains attachées au dessus de sa tête. Une migraine de tout les enfers menaçait de lui faire exploser la tête. Une odeur de porc grillé l'alerta sur le fait que sa colère semblait avoir embrasé ses cheveux.
Il claqua des doigts et eut une pensé amer lui rappelant le moyen âge, la dernière fois où ça lui était arrivé, et ce face à une ribambelle d'homme habillé de peau de bête qui en avait déduit le voyant recoiffé sa tignasse rousse après avoir éteint l'incendie sur son crâne, qu'il avait été baisé par le feu et que donc il devait être un démon, un sorcier, un mage ou tout autre chose qu'il fallait finir de brûler. Les humains... bonne réponse mauvaise déduction. Ces imbéciles avait fini brûlé sur un bûcher par d'autres de leurs semblable, enfin non.
Une main secourable était intervenu incitant l'un de leur bourreau a les abattre d'une flèche au lieu de les laissé couiner comme des saucisses sur un barbecue. Saleté d'ange et son regard réprobateur.
Il avait passé des années à remplir son rôle s'arrangeant pour le faire à la perfection tout en en faisant le minimum syndical. Ça avait toujours été dans sa nature, suivre aveuglément le mouvement, très peu pour lui, pouvoir savourer la vie tout en profitant allègrement de son statut de tentateur extrême, quel pied. Composé avec la nature angélique de son comparse n'avait donc pas été si compliqué, d'autant que son influence n'avait pas été veine. Aziraphale qui lui paraissait si droit si coincer à leur première rencontre alors qu'ils travaillaient encore tout deux pour Elle, l'avait surpris en offrant son épée de feu à Adam et Eve. Une gentillesse malvenue au pays des anges, une petite mutinerie qui lui avait fait se demander si en creusant un peu ce rondouillard petit personnage plein d'une bonhomie qui lui donnait envie de vomir ne pourrait pas devenir un allié de choix. Bien qu'elles ne relèvent majoritairement que de son innocence et de sa candeur les digressions commises par l'ange l'amusaient et l'arrangeaient. Et il avait reconnu dans ses actes ce même désir d'accomplir sa tâche... à sa façon.
Après tout, tout n'était qu'affaire d'interprétation ou de léger tour de passe passe. De petits miracles. Ils étaient bien partie pour créer leur camp, ni bien, ni mal, juste eux.
Oh et puis ça suffit ses états d'âmes ! il allait continuer, faire son camp à lui et ça irait bien comme ça ! Et dire qu'il s'était effondré alors qu'il pensait avoir perdu l'angelot et que maintenant celui ci ce détournait sans sourciller. Quel ingrat !
Excédé par la niaiserie de ses propres réflexions il parti en quête d'un pub quelconque qui pourrait lui prodiguer l'alcool dont il avait fortement besoin en cet instant.
L'ascenseur poursuivait son ascension et Aziraphale affichait toujours un pâle sourire, il sentait son estomac s'agiter furieusement, pas que les anges soient sujets naturellement aux troubles gastriques. Ces petits désagréments de mortel comme les anges disaient, leurs étaient inconnus puisqu'ils ne consommaient pas de nourriture humaine. le café allongé au lait d'avoine se rappela brusquement à son bon souvenir, c'était probablement le trait de sirop d'amande qui était de trop...
Rien à voir avec le trop pleins d'informations qui se bousculaient sans ménagement dans son esprit. Le trop pleins d'émotions qui l'avaient submergés en quelques minutes seulement, un vrai tsunami qui l'avait méticuleusement enseveli à la première vague, puis avait emmené au large ce qui restait de sa conscience en se retirant. Il commençait tout juste à réaliser. Il avait brisé son auréole, lui faisant craindre d'avoir déclenché une guerre qui s'était d'elle même avortée dans un commun accord que personne n'oserait avoué.
Il avait vu Gabriel revenir du pays de l'oublie et il avait été submergé par la force de l'étrange amour qui semblait le lier à Belzébuth. Il était resté perplexe comme tout les autres devant cet amour contre nature. La différence tenait aux petites étoiles qui s'étaient allumées dans ses yeux. Un souffle de tendresse et de respect qu'il n'avait jamais ressenti lui était venu.
Et puis l'arrivée de Métatron, qui l'avait, de justesse rattrapé d'une chute certaine, pour lui proposer de devenir Archange. Une joie telle qu'il se demandait s'il n'allait pas se désincarner l'avait envahi, et pourtant rien à voir avec ce qu'il allait suivre. Rampa pourrait le suivre, retrouver le ciel et son statut d'ange. Revenir à la création des étoiles. Tout aurait pu rentrer dans l'ordre, il se sentait scintiller et pousser des ailes alors qu'il avait la sensation de voler en direction du démon pour lui annoncer la nouvelle. (en même temps serait ci étrange? Il était un ange après tout peut être avait il réellement voleté, durant une seconde d'angoisse il se demanda ce qu'en penserait les autorités célestes, il allait encore recevoir un blâme de Gabriel... Gabriel... Gabriel n'était plu. L'autorité c'était lui, il pouvait bien voleter sous le nez de qui lui chantait finalement !). Tout à sa joie, persuadé de recevoir la gratitude de Rampa devant cette nouvelle qu'il pensait attendu depuis plus de 6000 ans, il était donc partie d'un pas guilleret annoncer la nouvelle au démon.
Et le refus de celui ci avait été comme une chute brutale. Il était naïf. Il ne s'y était pas attendu. Après tout pourquoi refuser ? C'était ce dont ils avaient toujours rêvé, leur camp à eux...
Il avait vu la douleur dans les yeux de Rampa sans la comprendre. Métatron avait il raison? Fallait t il toujours qu'il ait raison, qu'il soit récalcitrant simplement pour être celui qui avait raison? Il n'avait pas compris comment, en quelques secondes, les choses avaient pu s'effondrer. Il avait voulu le retenir, le convaincre. Et puis... Et puis, alors que sa joie se noyait dans cet abîme d'incompréhension, une émotion l'avait submergé, noyé. Elle ne venait pas de lui. Elle était si violente qu'elle l'empêchait presque de respirer. A moins que cela ne vienne des lèvres rageuses de Rampa pressées sur les siennes. Son corps tout entier c'était engourdi sous ce contact si inattendu. Alors qu'il prenait conscience de la chaleur du démon qui se pressait contre lui, l'enveloppait, le serrait à l'étouffer jusqu'au tréfonds de son essence angélique, une bataille fit brusquement rage en lui. Une violente pulsion le fit se saisir à son tour des épaules de Rampa partageant pendant une demie seconde cette étreinte interdite. Puis son esprit d'ange reprit le dessus le faisant relâcher son emprise. Dans le flot de ses propres émotions, il détectait celles de Rampa, tellement de colère, de désespoir, d'angoisse, de rage et un soupçon interdit, noir et luisant comme du pétrole, une sensation qui refuse de dire son nom. Sa part d'ange était en rage devant cette grossière tentative de le retenir, utiliser ainsi son influence tentatrice. Son petit cœur de chérubin à moitié humain lui sanglotait d'en avoir tant rêvé et si peu profité. Non ! Jamais, jamais il n'en avait rêvé !
- Je te pardonne...
Et en même temps. Qu'est ce que vous auriez dit vous à sa place ?
Au fond du gouffre, il avait regardé Rampa partir sans un regard en arrière.
Il lui avait fallu quelques secondes pour retrouver un semblant de contenance, creuser un peu plus en comprenant qu'il allait devoir quitter sa librairie chérie. Puis remonter en ce disant que c'était au mieux, que c'était ineffable. Que si c'était lui qui prenait la tête des affaires il pourrait réparer, réparer ce qui était cassé, même si c'était quelque chose qui était tombé de haut...
Il était parti d'un pas faussement assuré, se rassérénant en suivant le Métatron, ce demandant quel serait la prochaine étape du grand plan. Parce que oui, c'était le grand plan qui le rappelait aux cieux.
- Le second avènement.
Ah. Voilà, la réplique du tsunami qui le ramenait se noyer en pleine mer. Ses yeux se tournèrent désespérément vers l'extérieur de l'ascenseur et alors que les portes se fermaient, pendant une furtive seconde son regard s'accrocha à celui de Rampa qui le fixait adossé à la carrosserie luisante de sa Bentley. Une petite seconde durant laquelle il se vit se jeter hors de l'ascenseur. Son estomac s'agita, saloperie de sirop d'amande. Il avait l'impression qu'un serpent s'agitait en lui. Non pas un serpent !
Il ouvrit un œil. Dans ses souvenirs le monde était tout de même moins flou qu' a cet instant. Il leva péniblement la tête de son bras. Il était affalé sur une table d'un bistrot miteux à la décoration plus que passé. Un mec avec un hachoir de boucher le fixait. Il plissa les yeux, ayant l'étrange impression d'avoir déjà vu cette tête quelque part. En même temps beaucoup des têtes qu'ils avaient vu au cours de ces 6000 dernières années seraient ravies de le recroiser un hachoir à la main. Une mélodie jouait en fond sonore, et ça n'allait absolument pas avec le drame de la situation :
"like a rollercoaster"
Il était maudit... Pas encore cette foutue ritournelle.
Pourvu que l'autre taré ait la main ferme, que ça aille vite et qu'il n'ait pas a écouter une fois de plus cette mièvrerie. Et puis parce que bon, tuer au hachoir de boucher ne s'improvisait pas, il fallait du doigté, de l'audace. Il savait de quoi il parlait. A une époque ou il s'ennuyait il avait lui même formé un petit jeune plein d'enthousiasme et de créativité qui avait comme passion le fait de tuer des gens et la cuisine. Vous me direz que ça n'a pas grand rapport, comme passer le balais et le patin à glace. Personne n'aurait l'idée de combiner ses deux passions. Il en était de même pour ce jeune homme. N'empêche que ses tourtes à la viande avaient cartonnées.
Au bout de deux longues minutes il commença à s'impatienter, il avait eu le temps de divaguer et rien ne se passait. On pouvait être amateur mais il y avait des limites.
-Bon allé mon gars, tu frappes et on en parle plus. Alors si tu pouvait juste viser la carotide histoire que ça dure pas, parce que bon ça va faire de la paperasse alors si en plus faut chercher les morceaux...
-Tout va bien monsieur Rampa?
La face joviale d'un homme rougeaud apparut, elle aussi étrangement flou. Décidément quelqu'un avait du baisser la résolution. Il lui fallu quelques secondes de plus pour réaliser que l'homme au hachoirs n'avait visiblement pas bougé d'un pouce et que manifestement il était dépendant des bords du cadre qui contenait sa photo.
- Oh...
Rien de plus intelligent ne semblait en mesure de tracer le chemin entre son cerveau imbibé d'alcool et sa bouche.
L'alcool qui galopait dans ses veines foutait un bordel de tout les diables et il s'y connaissait. Il se redressa en poussant un grognement il aurait pu sans mal éjecté le trop pleins de poison qui parcourait son corps dans un hurlement de furie mais il n'en avait pas envie.
Il plissa les yeux pour que le patron du bar ne reste qu'une seule et unique personne.
-Monsieur Rampa?
- Ouais, ouais ça va, j'vais bien... Grommela-t-il.
Il tenta de se lever mais s'était trop demandé à son enveloppe charnelle qui s'écroula mollement sur la banquette défraîchie
Bordel que ces corps humains pouvait être encombrant parfois.
- On va devoir fermé monsieur Rampa. Je vous ai appelé un taxi il ne devrait plus tardé !
- Oh pas besoin de taxi, ça va j'vous dis !
Il grimaça faisant redescendre suffisamment son alcoolémie pour être un peu moins soumis à l'attraction terrestre qui semblait avoir pris une ampleur que personne ne lui demandait, mais assez pour rester dans un état cotonneux qui le tenait loin de tout questionnement concernant un imbécile d'ange. Cotonneux comme le petit corps doux de l'ange pressé contre le sien, cotonneux comme ses ailes blanches à vomir.
- Et merde...
Raté. Il réussi a se hisser tant bien que mal sur ses jambes et amorça un mouvement qui se voulait digne, mais qui était loin de l'être pour quitter le pub. Il claqua des doigts faisant apparaître une liasse de billet sur la table qu'il venait d'abandonner à regret et posait la main sur la porte au moment ou un éclair de lucidité le frappa.
- Au fait, j'suis où la?
Le patron dont le regard était rivé sur la montagne de billet représentant plus de deux fois la valeur totale de son bar lui répondit distraitement :
- Au Résurrectionniste à Édimbourg.
RE-merde.
L'ascenseur s'arrêta en douceur et les portes s'ouvrirent dans un bruit feutré "premier étage - paradis"
Son cœur se serra légèrement alors qu'il posait un pied au paradis. Lui qui pensait ne plus jamais pouvoir le faire ne ressentait pas l'immense joie, la plénitude et la sérénité des anges. Il se sentait plus comme un gros bourdon encombrant au milieu d'une ruche de délicates abeilles.
- Suis moi Aziraphale que je te montre ton bureau.
- Mon bureau ? Je vais avoir un bureau ?
Le vieil homme esquissa un sourire.
- Installe toi, mais ne perds pas de temps, dieu n'attend pas. On a perdu bien assez de temps avec les états d'âmes de Gabriel, il est temps que ce monde touche à sa fin.
Aziraphale se senti défaillir. Il resta figé écoutant les pas du Métatron s'éloigner. Qu'avait il fait?
Il claqua si fort la porte de la Bentley qu'il su qu'il n'aurait pas a pester pour que celle ci l'emmène loin de cet endroit sans qu'il eut à faire trop d'effort. Il ne garderait aucun souvenir de la route qui le séparait de Londres et il n'était même pas sure de ne pas s'être ré-endormit a peine le ronronnement du bolide lancé.
Ses pensées s'agitait tentant de passer au travers de l'épais nuage des vapeurs éthyliques.
"I'm no angel, I'm no savior and I've never been a saint
Well, I know I'm not the devil 'cause I still can feel the pain"
Qu'est ce que c'était encore que cette connerie. Il ouvrit brusquement les yeux essayant d'oublier le bleu des yeux d'Aziraphale qui le fixait avec un mélange d'incompréhension, de colère, de tristesse et d'une autre émotion, blanche, brûlante comme les rayons du soleil, tellement brûlante qu'elle semblait avoir fixé l'image de l'ange sur sa rétine. La Bentley était sagement garé le long de son immeuble et Freddy Mercurie chantonnait en sourdine. Il avait dû rêver.
- Non tu ne rêves pas Rampa, lui dis soudainement Freddy. Je m'essaye à de nouvelles choses, je regrette un peu d'avoir dû partir si tôt, tu sais y a quelques p'tits gars talentueux qui te plairait aujourd'hui !
Il jeta un regard furibond à l'autoradio et ravala sa salive alcoolisée.
Le démon sorti sans ménagement de la voiture et attrapa au passage ses deux cartons de plantes. Il jeta un regard distrait à l'immeuble. Shax ou pas Shax il en avait marre de vivre comme un clochard. Il poussa la porte de son immeuble et monta dans l'ascenseur. Arrivé devant la port de son appartement il eut un léger instant de flottement. Puis finalement il poussa la porte qui s'ouvrit sans résistance.
- Papa est rentré ! Lâcha-t-il d'une voix sarcastique.
Il ne savait pas à quoi s'attendre, mais il ne s'attendait certainement pas à ça. L'appartement était vide. Seul le mur du salon laissait deviner qu'il avait été occupé par une locataire qui ne semblait guère l'apprécier.
"Rampa tu ais more si tu te repointe en enfer"
Il haussa un sourcil fatigué.posa ses précieuses plante sur le plan de travail et huma l'air en grimaçant. La fragrance humide et fétide des démons flottait encore dans tout l'appartement et il faudrait sûrement des semaines avant de l'en chasser. Il traversa lourdement le salon vide et alla s'écrouler sur son lit. Rampa fut satisfait de constater que visiblement ses collaborateurs ne comprenaient toujours pas l'intérêt d'une bonne nuit que ce soit de quelques heures ou de quelques siècles. Les draps portait toujours son odeur épicée et chaude. Personne ne lui avait fait l'affront d'utiliser son lit en son absence. La dernière à avoir fait ça avait terminé dans un ours, et passer l'éternité à ce faire déchiqueter par un ours n'avait rien d'enviable. La leçon avait donc peut être été entendue par d'autres.
Son cerveau sombra sans lutter dans un sommeil peuplé d'ours s'emboîtant comme des poupées russes, cherchant à emboîter une petite forme à la tête bouclée qui geignait de manière indécente.
ça n'avait aucun sens. D'autant moins lorsque les boucles dorées virèrent au blanc pur et que l'ours se mua en serpent qui s'enroulait sans vergogne au tour du corps étrangement masculin. (Pourtant dans ses souvenirs c'était une fille.) LE seul lien était les soupirs voluptueux émis par la victime qui ne semblait pas réellement détester de sentir le serpent se frayer un chemin entre tout ses membres.
Il se réveilla avec un mal de crâne carabiné et une furieuse envie de revenir à sa forme originel de tentateur sans trop chercher à comprendre pourquoi.
Aziraphale était assis dans l'immense bureau blanc depuis une éternité. Il jetait des regards furtifs autours de lui, le bout des fesses à peine posé sur l'immense siège en cuir blanc qui trônait derrière le bureau de verre. Il avait l'impression de déranger. L'impression que l'immensité le fixait d'un regard sévère. La pièce blanche et froide n'avait rien à voir avec sa librairie bien aimée. Lui qui aspirait à la douceur et au confort dans un désordre étudié aurait voulu pouvoir se terrer dans un coin et disparaître. Mais il le savait même s'il s'était prostré dans un coin de la pièce il serait resté bien visible. Et probablement parfaitement ridicule.
- Aziraphale ! Qu'est ce que tu fais là ? Tonna la voix de Michaël.
- Je... et bien... a priori c'était le bureau de ... Gabriel.. et donc... et bien, hum, il semblerait que maintenant ce soit... Mon bureau ? Balbutia-t-il.
- Gabriel avait un bureau?
Il resta là, l'air déconcerté à fixer le visage sévère de Michaël.
- Peu importe ! Puisque tu reprends ses... fonctions, lâcha-t-elle d'un ton amer, il faut rattraper le retard accumulé en son absence.
Elle claqua des doigts et une lourde pile de dossier vint s'écraser sur le bureau transparent.
- Mais je croyais que tu avais géré l'intérim...
Elle lui jeta un regard glacial.
- Qu'est ce que tu crois ? Bien-sur que j'ai géré ! Mais certaines choses sont trop... ineffable.. Pour quelqu'un comme moi.
Elle lui lança un sourire sarcastique avant de tourner les talons et Aziraphale se demanda en fixant distraitement la pile de dossier si elle descendait siroter un thé avec Dagon. Ses prouesses d'esprits pourraient lui valoir de postuler comme remplaçante honoraire de Belzébuth maintenant que sa promotion au ciel avait été compromise.
Aziraphale secoua la tête et fronçant légèrement le nez se pencha sur les dizaines de parchemins qui menaçaient de se rependre au sol. Lui qui aimait tant la lecture n'était pas sûre d'apprécier celle ci. "Circulaire 107077 - " vraiment...
Il souffla par le nez et son esprit ce mit à vagabonder dans ses souvenirs du Ritz, il aurait tout donné pour un éclair au chocolat.
Avec un petit son feutré un téléphone ressemblant étrangement à celui de sa librairie apparu sur le bureau. Il le regarda sans comprendre et sursauta lorsqu'il ce mit à sonner.
- A... Allô ?
- Alan, pour vous servir, que puis je pour vous?
- Pardon ?
- Ici le Ritz, monsieur, que puis je pour vous?
Aziraphale resta bouche bée, cela ne se pouvait. !son regard erra autour de lui. A moins que...
- Je vous prendrais un éclair au chocolat...
Il hésita un moment avant de lâcher :
- Ainsi qu'un canard laqué à l'orange et une bouteille de château la Tour 1895.
- Bien monsieur, tout de suite monsieur Aziraphale.
L'homme raccrocha et l'ange resta interdit, ce demandant ce qui venait de se passer.
On frappa à la porte et un petit ange à l'air pincé entra portant un large plateau d'argent. Il le déposa sur le bureau sans un mot et lui jeta un regard légèrement courroucé.
- Qu'est ce que...
Sa phrase resta en suspend.
- Qui y a-t-il monsieur ? C'est bien ce que vous avez commandé?
- Monsieur ? oui bien-sur oui mais...
- Vous êtes le nouvel archange suprême et je suis l'ange de niveau 28 Ismaël, mon rôle est de répondre à vos demande.
- Oh !
Aziraphale ouvrit des yeux ronds.
-Je dois bien avouer que c'est la première fois que je dois faire entrer...
Ismaël jeta un regard dégoûté à la nourriture.
- Ce genre de... tentation humaine. Mais les temps changent n'est ce pas ?
Aziraphale lui adressa un faible sourire, un peu honteux d'étaler ainsi ses vices humains. Sur terre il parvenait a convaincre de la nécessiter de se fondre dans le paysage humain, après tout, ceux ci ne pouvait vivre sans ce nourrir, il aurait pu paraître étrange qu'il ne soit jamais vu se nourrissant de met terrestre. Bien-sur il vivait en semi autarcie dans sa librairie mais justement ses repas aux Ritz et ailleurs prouvait à tous qu'il était un "bon vivant". Cette expression lui plaisait bien. Très imagée.
- Bref demandé et vous serez exaucés. Lâcha Ismaël l'air de plus en plus renfrogné.
- Comment ça?
- Quoi que vous vouliez, demandez et... JE ferais mon boulot.
Ismaël leva les yeux au ciel. Il détestait changer de patron. Chaque fois annonçait l'arrivée de nouvelles bizarrerie. Les anges étaient des être pures mais surtout tordu. Il lui avait fallu tellement de temps pour s'habituer aux excentricité de Gabriel. Il se retrouvait sans cesse a devoir visiter des petites arrières boutiques poussiéreuses peuplés d'humains affublés de robe, de plumes et de paillettes et qui s'adressait à lui d'une voix bien trop grave de ce qu'il en avait saisit pour des gens portant des jupes si courtes. Tout ça pour ramener d'excentriques tenues que l'archange ne portait que quelques minutes avant d'en changer ou de ne plus rien porter que les plumes. Il ferma les yeux tentant d'effacer ce souvenir de sa mémoire qui malheureusement ne pouvait lui faire défaut. Il regrettait son premier patron. Bien qu'il ait été extrêmement bavard et curieux, c'était une personne juste et admirable. Quel dommage que les transferts inter service soit si compliqué. Et qu'il soit claustrophobe. On disait souvent qu'en bas la vue n'était pas ce qu'il y avait de plus charmante.
- Oh, vous savez, il ne faut pas ! Je peux me débrouiller moi même !
- Vous débrouillez vous même ? Vous n'y songé pas... Le retour du fils de dieu sur terre ne va pas ce faire tout seul. Vous savez ce qu'il lui ont fait ces crétins d'humains la dernières fois? Vous imaginez la dépense en parchemin que ça été ! Hors de question de revivre un tel fiasco ! Vous n'aurez plus à poser un pied sur terre avant que lui même n'y retourne. D'ici là, demandé et vous serez exaucé.
Sans lui laissé le temps de répondre Ismaël quitta la pièce d'un pas furibond.
- Ne plus poser un pied sur terre...
Son cœur se serra. Il se saisit de la bouteille de vin et se servit un verre miraculeusement apparu. Même s'il n'était pas privé de ses plaisirs terrestres le goût lui paraissait fade. Était ce dû à l'altitude ? ou à l'absence d'un certain démon affalé dans un siège en face de lui ? Il l'entendait presque "hey l'angelot mais quelle réussite ! Te voilà devenu un brave petit gratte papier, un rossignol en cage. Tu crois que les Rossignol en cage peuvent chanter s'ils n'ont jamais entendu leurs congénères chantés ?"
- ça s'est une bonne question grommela-t-il tout seul.
