Petit mot de l'auteure : ce texte a été écrit pour la 164e nuit du FoF sur le thème "effronté"

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Pour la centième fois de la journée, je regardais Meg d'un air désespéré.

- Tu ne peux pas gagner, soufflais-je.

Pour la centième fois de la journée, ma jeune amie me regarda avec son plus bel air effronté.

- On parie ?

C'était tentant. Terriblement tentant, même. Dans ma jeunesse, je n'aurais pas hésité un seul instant à accepter sa proposition ; l'occasion d'humilier un opposant et de lui arracher légalement quelque chose était trop belle. Malheureusement pour moi, et de la plus étrange des manières, Meg était devenue... une amie. Ainsi, même si j'étais redevenu le grand, le superbe, le magnifique, le... bref, même si j'étais redevenu Apollon, je n'avais pas envie de réduire son moral en miette. De ce fait, je me contentais d'essayer de la raisonner.

- Meg. Déjà quand j'étais Lecter tu n'avais aucune chance. Alors maintenant...

Meg fronça les sourcils. Un instant, je crus avoir gagné.

C'était bien mal la connaître.

- En fait, dit-elle après une profonde réflexion, t'as peur.

Oui, peur de te ridiculiser, aurais-je dû répondre. Néanmoins, si mon voyage sur Terre avait oublié de m'apprendre quelque chose, c'était la maturité. Je fonçais donc tout droit dans le piège grossier qu'elle m'avait tissé.

- Mais pas du tout ! protestais-je alors avec une grande mauvaise foi. Puisque c'est ça, tu vas être servie !

Je sortis alors ma plus belle flûte.

- CHIRON !

Le vieil entraîneur sursauta. Non pas qu'il ait eu peur de moi ; simplement, il semblait assez dégoûté de voir que contrairement à ce qu'il avait espéré, mon échange avec Meg ne m'avait pas fait oublier sa présence. Il me lança un regard désespéré, comme s'il m'implorait de le laisser en dehors de tout ça. Ce qui était idiot, n'est-ce pas ? N'importe qui aurait été honoré de me voir exercer mes talents artistiques.

- Tu vas être le juge de ce duel, déclarais-je avec entrain.

- Je n'avais pas signé pour ça... murmura le centaure.

Je décidais de faire comme si je ne l'avais pas entendu pour mieux pour concentrer sur Meg. Elle aussi avait dégainé une flûte, celle que je lui avait offert pour son anniversaire. À cette époque, je pensais agir en bon ami. Désormais, je comprenais que j'avais signé ma fin. Car dès que Meg porta l'instrument à ses lèvres et que la première note en jaillit, je compris que même si j'emporterais ce défi haut la main, je n'en resterait pas moins perdant.

Les sons que Meg produisaient étaient trop horribles pour que quiconque ressorte vainqueur de cet affrontement.

Je pris alors une décision d'une grande maturité : je choisis la fuite. Tant pis si Meg pensait à tort avoir gagné ce duel.

Mes tympans étaient bien trop précieux pour être réduits en charpie par l'absence totale de talent de ma meilleure amie.