J'ai prévu cette histoire depuis un petit moment, alors malgré la fin de Retour aux Sources, je savais que je ne resterais pas inactive très longtemps et j'espère fort que ce sera pour votre plus grand plaisir !
Je vous présente donc, cette fois-ci, un Drarry. Il est un peu particulier, je vous l'accorde, puisque dans cette histoire Harry sera transformé en petit garçon. Pas d'inquiétude, il n'y a rien d'étrange. Certains passages le montre adolescent et c'est bien lors de ces passages que vous pourrez voir sa relation avec Draco. Je n'en dis pas plus et vous laisse découvrir ce que j'ai manigancé cette fois.
Même si on ne m'a jamais fait la remarque, je tiens juste à dire que, je sais que "Draco Malfoy" est la version anglaise de son nom. Je n'utilise que les noms français pour tout. Sauf pour lui, parce que je le trouve mieux dans sa version originale. C'est peut-être un peu bizarre, mais bon, au moins je ne mélange pas exagérément les noms des deux versions.
C'est tout pour moi !
Bonne lecture. (Et non, pas de prologue, on rentre tout de suite dans le vif du sujet).
PS : Aux craintifs de voir cette histoire inachevée, sachez qu'en plus de ne pas être mon genre de ne pas finir une histoire, l'écriture de celle-ci est entièrement achevée. Je travaille actuellement sur la réécriture qui est déjà bien avancée.
« J'en ai assez ».
Ces simples mots, à peine soufflés d'un ton las, résonnaient dans les oreilles de Draco. Il avait l'impression d'avoir mal entendu, et il l'espérait fortement. Il préférait honnêtement avoir mal entendu, ne voulant pas chercher de signification à ces paroles de peur de comprendre. Face à lui, Harry était appuyé contre le manteau en pierre finement sculpté de la cheminée. Son regard braqué sur le bois qui craquait, il laissait le ballet des flammes emportées ses pensées au loin. Ils s'étaient retrouvés dans la salle sur demande, pour discuter, parce qu'Harry l'avait voulu et qu'il finissait toujours par obtenir ce qu'il désirait. De Draco en tout cas.
- Et je peux savoir de quoi tu parles au juste ? S'agaça Draco.
La tension entre eux était palpable et étouffante. Draco sentait son sang battre dans ses tempes et une migraine pointer le bout de son nez. Depuis quelques mois, Harry et lui ne faisaient que se disputer, encore et encore, parfois en plein cours. Pour deux ennemis, ça n'était pas si étrange. Ils s'étaient détestés pendant si longtemps, or, quand ils avaient décidé de se mettre en couple, tout s'était apaisé. Et c'était devenu pire qu'avant. Il ne s'agissait plus de piques pour énerver l'autre et rire entre amis mais de vraies effusions de paroles ne visant qu'à être blessantes.
Harry inspira et expira lentement avant de délier sa langue, sans quitter le feu des yeux.
- De tout ça, confessa-t-il. De la guerre qui arrive, devoir mettre ma vie en danger et tuer Voldemort, la pression que Dumbledore me met et…
- Et moi, le coupa Draco. C'est ce que tu allais dire, non ?
Harry se mordit l'intérieur des lèvres, pour s'empêcher de les pincer et garder un visage le plus neutre possible. De toute façon, Draco avait déjà la réponse, il n'avait pas besoin d'y répondre.
- T'es un… Il n'y a même pas de mot ! S'emporta Draco. Laisse-moi deviner, je suis sur la liste pour la même raison que d'habitude ? Tu tiens vraiment à remettre ça sur le tapis ?
- C'est de ta faute ! S'écria Harry en se tournant vers lui, les traits crispés. Si tu arrivais à te rentrer dans le crâne que je ne veux pas, on n'en serait pas là !
- Oh pitié Potter, tu peux me dire en quoi c'est mal de vouloir, d'avoir envie, qu'on couche ensemble ? Parce que, franchement, je n'arrive pas à comprendre et tu t'obstines à ne rien vouloir dire ! Tu n'es même pas capable de me donner une seule raison.
- Je ne veux pas, c'est tout. Et toi tu me harcèles avec ça tous les jours. J'en ai marre.
Draco croisa les bras sur sa poitrine et le regarda quelques secondes avant de répondre sans hausser la voix.
- Et moi, j'en ai ma claque de ton attitude. À te regarder, on ne dirait pas que tu sors avec moi alors je me pose une question. Pourquoi on continue ? Explique-moi.
Déglutissant, Harry serra la mâchoire et retourna à son observation. Il le savait, ça ne ferait qu'ajouter à l'irritation de Draco mais il s'en fichait bien. Les bras ballants, il fixait le foyer. Sans qu'il ne comprenne bien pourquoi, cette vision et cette chaleur l'apaisait. Il avait envie de mettre sa main à l'intérieur, pour voir les flammes danser sur sa peau. C'était un beau spectacle qui l'empêchait de penser.
Après un long silence, il glissa une main dans la poche de sa robe et tâta la fiole qui s'y trouvait. Il enroula ses doigts autour et resserra le poing à s'en faire blanchir les phalanges. Caché par le vêtement, Draco ne le vit pas tirer l'objet et faire sauter le bouchon. Il était probablement bien trop intéressé par l'obtention de sa réponse pour faire attention à quoi que ce soit d'autre. Harry jeta un œil au liquide emprisonné par le verre et sentit son cœur se serrer douloureusement dans sa poitrine.
- Tu as raison, souffla-t-il, soudain bien plus calme. C'est stupide de continuer et je n'en ai plus envie. C'est pour ça que j'ai pris ma décision et ça m'est égal que tu ne comprennes pas.
Se pinçant l'arête du nez, Draco s'apprêtait à lui dire d'arrêter de jouer aux devinettes quand un mouvement capta son attention. Harry avait levé le bras et il voyait à présent la fiole, au creux de sa main, et le liquide brillant qu'elle contenait.
- Potter ? Fit-il, la respiration figée et les yeux bien ouverts. Qu'est-ce que tu fiches ?
- Ce sera plus simple, comme ça. Et j'aurais la paix, déclara Harry avant d'avaler la mixture cul-sec.
- Potter ? Harry !
Ce fut si rapide que Draco aurait du mal à décrire précisément la scène à l'aide de ses simples souvenirs. D'abord, la fiole avait glissé et s'était brisée au sol. Ensuite les jambes d'Harry avaient cédé sous son poids et il avait chuté en avant. La cape qu'il avait enfilée sur ses épaules pour se protéger du froid s'était détachée et était retombée sur son corps avant même que Draco ait pu l'atteindre.
- Harry ! Répéta-t-il en accourant vers lui, pris de panique, ne connaissant que bien trop la tête brûlée qui lui servait de petit-ami.
Draco s'agenouilla près de lui, et approcha une main tremblante. Il ne s'était quand même pas suicidé ? Pas comme ça, d'un coup et sous ses yeux ? Il l'appela encore une fois, dans un murmure chevrotant. Ses doigts rencontrèrent le tissu de sa cape et il l'agrippa, la gorge serrée, puis tira dessus. La peur de trouver un corps inerte s'envola comme une plume par un coup de vent, laissant place au choc et à l'incompréhension. Sous la cape, il y avait bien un corps. Mais ce n'était pas celui d'un adolescent de seize ans mort. C'était celui d'un petit garçon qui, au vu de sa poitrine se soulevant et s'abaissant au rythme de sa respiration, était endormi. Dégageant le front de l'enfant de grosses mèches de cheveux, il effleura la cicatrice en forme d'éclair. Il n'y avait aucun doute à avoir.
- Harry… ?
Posant sa main sur son épaule, Draco le tourna doucement vers lui. Les lunettes qui ornaient plus tôt le nez d'Harry étaient tombées près de sa tête et sa chemise, devenue trop grande, lui faisait office de robe.
- C'est quoi ce bordel, souffla Draco, se parlant à lui-même.
Il ne comprenait rien à la situation, même s'il s'évertuait à trouver une explication. Il ne savait pas comment son petit-ami avait pu rajeunir à ce point en si peu de temps. Reflétant la lumière dorée des flammes, les restes de la fiole brillaient un peu plus loin. Seule la partie la plus fragile, le goulot, s'était brisée en de nombreux éclats minuscules. Il ne savait pas ce que cela signifiait mais il connaissait une personne dans ce château qui pourrait le lui dire.
Sortant un mouchoir de sa poche, Draco ramassa la partie intacte de la fiole et l'emballa avant de la rangée. Hésitant une seconde, il finit par emmitoufler Harry dans les restes de ses vêtements et le hissa dans ses bras.
- Qu'est-ce que t'as encore fait…
Il recouvrit sa tête avec un pan de la cape, se disant dans un moment de lucidité qu'il ne valait mieux pas que quelqu'un le voit. Le survivant redevenu enfant, incapable de se battre, quelle meilleure opportunité pour le Seigneur des Ténèbres. Il n'osa pas imaginer ce qui arriverait si cette information tombait entre de mauvaises mains. Attrapant la cape d'invisibilité d'Harry juste avant de sortir, il se cacha dessous en priant pour que personne ne se rendre compte du subterfuge. Ouvrant la porte de la salle sur demande et vérifiant que le couloir était désert, il s'élança dans le château en direction des cachots.
Son cœur battait follement dans sa poitrine, il l'entendait presque, et chaque fois qu'il croisait le chemin d'un élève, ça ne faisait qu'empirer. Au fur et à mesure de son avancée, Draco ne put s'empêcher de jeter des coups d'œil au fardeau dans ses bras. C'était bien Harry, pas de doute, même s'il avait du mal à y croire. Sa cicatrice, ses cheveux et même les traits de son visage. Il fallait dire que Draco n'avait jamais pu oublier le visage d'Harry, le jour où il avait refusé sa poignée de main. C'était peut-être parce qu'il se souvenait du visage du garçon de onze ans qu'il était si sûr que le garçon dans ses bras était la même personne. Comment diable avait-il pu redevenir enfant ? Et pourquoi ?
Devant la porte des appartements de son parrain, Draco laissa tomber la cape au sol et martelas la porte en bois de sa seule main libre, abattant son poing aussi fort qu'il le pouvait. Les cours étaient finis et le dîner n'avait pas encore été servi alors il se trouvait sûrement ici. Il devait être là. Après un long moment sans réponse, Draco recommença, s'acharnant un peu plus et l'appelant. Il allait recommencer une troisième fois, submergé par son empressement et sa panique, mais la porte s'ouvrit à la volée au moment où il levait le bras, laissant apparaître un Severus Rogue loin d'être ravi qu'on le dérange.
- Quoi ? Cracha-t-il, à peine plus aimable qu'à l'ordinaire envers son filleul.
Draco le dépassa sans lui demander son avis et s'engouffra dans ses appartements. Il avança jusqu'à un vieux canapé pour y déposer Harry, les bras fatigués de l'avoir porté si longtemps. Severus leva les yeux au ciel et ramassa la cape avant de refermer sa porte. Un instant, il pria une force supérieure de l'empêcher de trucider l'adolescent. Il le rejoignit, lançant le vêtement sur le dossier du petit canapé.
- Je peux savoir ce que tu fais ici ? Demanda-t-il.
Il inspira un grand coup et se passa la langue sur les dents en le voyant tourner en rond. Draco finit par s'arrêter et se mettre face à lui. Il n'était pas moins agité pour autant.
- C'est… C'est Harry, dévoila-t-il.
- Tes histoires avec Potter ne me regardent pas. Et ça ne m'intéresse pas non plus.
- Ça n'a rien à voir.
Il se tourna à demi vers le sofa et pointa du doigt la forme allongée.
- C'est Harry.
Severus accorda un bref regard dans la direction et replongea dans les yeux de Draco.
- C'est un enfant.
- Je le sais, je ne suis pas idiot. Mais je te dis que cet enfant, c'est Harry. Attends.
Fouillant dans sa poche, Draco en sortit le mouchoir contenant la fiole et la tendit à son parrain.
- Il a bu ça avant juste avant de s'écrouler.
Curieux de comprendre, Severus fronça les sourcils et prit précautionneusement le paquet. L'ancien professeur de potion défit le nœud et inspecta brièvement ce qu'il contenait. Il lui faudrait analyser ça plus longuement pour émettre une quelconque hypothèse. Se dirigeant vers sa table de travail pour s'y mettre, il interrogea l'adolescent.
- Que s'est-il passé exactement ?
- On se disputait, pour changer, et il a dit quelque chose de bizarre avant de boire.
- Est-ce que tu te souviens de ce qu'il a dit ? Demanda Severus, se disant que ça pourrait l'aiguiller de connaître les intentions de Potter.
Il attrapa un morceau de parchemin, trempa une plume dans son encrier et commença à griffonner.
- Non, avoua Draco après réflexion. Peut-être. Je ne suis pas sûr.
- Essaie de t'en souvenir.
Soupirant, Draco s'imagina à nouveau dans la salle sur demande. Il fit travailler sa mémoire pour se remémorer au mieux leur conversation.
- Il a dit qu'il en avait assez, quelque chose comme ça.
- Tu sais de quoi il parlait ?
- De la guerre, du Seigneur des Ténèbres. Pourquoi ?
Continuant son expérimentation sur les restes de potions, Severus parcourut rapidement ses notes. Il réalisa alors que les vols commis dans sa réserve depuis quelques mois étaient l'œuvre de Potter. Appuyé sur ses mains, il regarda la potion changer de couleur après ses quelques ajouts. C'était peut-être une erreur mais… Passant le menton par-dessus son épaule, il s'adressa au tableau trônant au-dessus de la cheminée.
- Pouvez-vous aller voir Dumbledore et lui dire que je souhaite le voir d'urgence, s'il vous plait ?
Le portait le toisa longuement, émit un râle contrarié mais se leva, posant l'ouvrage qu'il lisait sur la table de jardin.
- Vous me revaudrez cela Severus, déclara-t-il avant de disparaître.
Draco attrapa la manche de son parrain et le tourna fermement vers lui, peu heureux de cette initiative.
- Je peux avoir une explication ? Exigea-t-il. On n'avait pas fini de s'engueuler.
Certes, il était inquiet de l'état dans lequel il avait trouvé Harry, mais il était toujours énervé et comptait bien finir cette conversation avortée. Severus s'accorda un coup d'œil au canapé. Pourquoi fallait-il que chaque acte irréfléchi de Potter ait des répercussions sur lui ?
- Est-ce que quelqu'un t'a vu l'amener ici ? Demanda Severus, ignorant momentanément la question de Draco. Est-ce que quelqu'un l'a vu ?
- Non. On peut remercier Potter Senior pour ça, répondit-il avec un geste bref en direction de la cape d'invisibilité.
Puis, après l'avoir dit, il se demanda si Severus était au courant qu'Harry la possédait. Il avait peut-être fait une bourde, mais tant pis, ce n'était pas le moment de s'inquiéter de ça.
- Maintenant, réponds-moi.
- Écoute, soupira Severus en cherchant ses mots. Je crois que…
Il fut coupé dans sa phrase lorsque sa porte s'ouvrit sur le directeur. Dumbledore entra dans la grande pièce et s'arrêta, surpris de voir le jeune Malfoy. Il fit pourtant abstraction de sa présence et se tourna vers son professeur.
- Pourquoi m'avoir fait venir, Severus ?
Serrant les dents, Draco garda le regard braqué sur le vieil homme. Il ne lui faisait pas confiance. Encore moins depuis qu'Harry avait exprimé ses sentiments à propos de tout ce qu'on lui demandait. Baissant les yeux vers Draco avant de revenir à Dumbledore, Severus prit son temps pour s'exprimer correctement.
- Il semblerait que monsieur Potter ait essayé de mettre fin à ses jours.
- Quoi ? Lâcha Draco sans s'en rendre compte. Non !
Il ne pouvait pas y croire. Même s'il avait eu peur de cette éventualité dans la salle sur demande, ça ne pouvait pas être vrai. Pourtant, c'était la première idée qui lui était venue, lorsqu'il était tombé et les mots qu'il lui avait dit juste avant sonnaient comme des mots d'adieux. Se passant une main sur sa barbe pour la lisser à peu près, Dumbledore observa Severus, les yeux légèrement plissés.
- Pourquoi aurait-il voulu faire une telle chose ? Dit-il finalement. Êtes-vous sûr de ce que vous avancez ?
- Mais parce qu'il en a marre ! Éclata Draco, foudroyant le directeur du regard sans même se préoccuper de ce que ça lui coûterait plus tard. De vous, de cette guerre, de n'être qu'un pion dans un plan macabre auquel il n'a jamais demandé à participer !
- Draco, ça suffit, ordonna Severus d'une voix dure en le faisant reculer pour mettre de la distance entre lui et Dumbledore.
- Comment tu veux que je me calme ? S'emporta-t-il en reportant sa colère sur son parrain. Tout notre monde ne fait que le traiter comme un animal destiné à l'abattoir depuis des années ! C'est qu'un gamin et vous voulez le sacrifier.
Dumbledore, toujours impassible, regarda Severus raisonné son filleul en se gardant bien d'intervenir. Il comprenait le point de vue du garçon, il n'avait pas tort, Harry n'était qu'un enfant, mais aussi triste que cela était, il n'avait pas le choix. C'était son destin. Harry était le seul espoir pour leur monde, le seul à pouvoir les sauver. Et Voldemort ne cesserait jamais de le traquer, lui, son seul échec. Lorsque la colère de Draco se limita aux traits de son visage et aux éclairs dans ses yeux, il présenta de vagues excuses, dont il ne pensait pas un mot, à son directeur.
- Severus, puis-je avoir de plus amples explications ? Réclama Dumbledore.
Le concerné jeta un rapide regard en direction de son filleul qui avait détourné son attention d'eux pour fixer le canapé. Il retint son soupir et plongea son regard dans celui du vieil homme.
- Il y a quelques minutes, Draco est venu me voir en me disant que Monsieur Potter était redevenu un jeune garçon. Il m'a également remis les restes d'une potion qu'il aurait bu juste avant que cela ne se produise.
Prenant une pause pour choisir correctement ses mots, il essaya également d'imaginer ce que Dumbledore voulait savoir.
- J'ai pu déduire certains ingrédients utilisés, ceux dérobés dans ma réserve.
- Donc Harry à lui-même concocté cette potion, comprit le directeur.
- Je pense qu'il souhaitait créer un philtre de mort. Mais au vu du résultat, quelque chose n'a pas dû être réalisé correctement et la potion a eu un effet tout autre.
- Où est-il ? Demanda Dumbledore, mettant le sujet de la potion à plus tard.
D'un mouvement de la main, Severus lui désigna le canapé. Dumbledore tourna sur lui-même et s'approcha avec la plus grande des précautions. Il se baissa à la hauteur de l'assise et souleva juste assez la cape qui recouvrait toujours la forme endormie pour distinguer son visage. Dumbledore n'avait aucun doute, il s'agissait bien d'Harry.
Stupéfiant, se dit-il dans un coin de sa tête.
Le petit dormait à poings fermés, l'un de ses pouces glissés dans sa bouche entrouverte. Fouillant dans sa mémoire, à la recherche des quelques souvenirs qu'il conservait de l'enfance d'Harry, il essaya d'estimer son âge. En tout cas, il était incontestable qu'il était redevenu très jeune. Se relevant en s'appuyant sur son genou pour s'aider, le vieil homme retourna auprès de Severus et Draco.
- Je crains qu'il ne soit réellement redevenu un petit garçon. Il ne semble pas avoir plus de quatre ou cinq ans.
Draco roula des yeux et retint de justesse son soupir. Ils n'avaient pas eu besoin de lui pour arriver à cette conclusion. Ce qui était important, c'était la suite des événements. Comme le moyen de rendre à Harry sa véritable apparence.
- Qu'allons-nous faire ? S'inquiéta Severus sans même chercher à se cacher. Et si le Seigneur des Ténèbres venait à le découvrir ?
- Je sais bien, déplora le directeur. Nous devons garder cette information secrète.
- Secrète ? Répéta Draco. Non, mais, vous plaisantez. Comment vous comptez garder ça secret dans un lieu abritant autant de monde ?!
- Draco a raison, la chose finira par se savoir, soutint Severus.
Dumbledore ne pouvait pas nier cette évidence. Un jour ou l'autre, quelqu'un finirait par voir Harry et accorder pleinement sa confiance en ces temps sombres devenaient difficile.
- Jusqu'à ce que l'on soit en capacité de rendre à Harry son âge réel, il faudra que nous prenions des mesures. Il ne pourra pas rester caché éternellement.
- Et que proposez-vous de faire pour lui ? Questionna Severus. Il me semble difficile de l'envoyer chez ses moldus. Sans compter qu'il y serait plus que vulnérable.
- Gardons-le au château, proposa le vieil homme. Il n'y a pas d'endroit plus sûr pour lui. Je vous en confie la responsabilité, Severus.
Écarquillant les yeux, Severus mit quelques secondes à se remettre les idées en place.
- Moi ? Vous plaisantez !
Il eut envie de s'emporter davantage lorsqu'il crut voir un léger sourire passer sur les lèvres du directeur.
- Je pense que vous êtes au contraire le mieux placé pour remplir cette tâche, répondit Dumbledore avec tout son sérieux. Et puis, vous pourrez ainsi avoir une place dans sa vie. Celle du fils de Lily.
Serrant les mâchoires ainsi que les poings, Severus s'empêcha de dire quoi que ce soit de plus. Il était agacé, et même outré, qu'il se serve d'elle pour le manipuler d'une façon aussi flagrante. Et le pire était sans doute que les pensées de Severus lui faisaient revivre cette horrible nuit. Il repensait aux cris et aux pleurs d'Harry, prisonnier de son berceau. Renonçant d'un soupir grossier, il essaya de relativiser. Peut-être qu'enfant, Harry ne lui rappellerait pas autant son crétin de père.
- Très bien ! Cracha-t-il pour la forme.
Dumbledore laissa un sourire victorieux décorer subtilement ses lèvres. Il se tourna ensuite vers Draco, puisque Severus lui déléguerait très probablement la tâche ou au moins le gros du travail, et il n'était pas assez idiot pour penser que Draco ne souhaiterait pas s'impliquer.
- Il y a certaines choses que vous devez connaître à propos d'Harry, déclara-t-il, attirant l'attention de l'adolescent.
En guise d'invitation à continuer, il haussa un sourcil, tandis que le second restait froncé.
- J'ai volontairement tu quelques informations. Severus, vous vous souvenez sans doute de la réaction de Lily lorsqu'elle a reçu sa lettre, ainsi que la réaction de sa sœur.
- Lily était ravie, répondit Severus. Sa sœur l'a traité de monstre.
- Elle n'a pas été plus tendre avec Harry au cours de sa vie, j'en ai peur. Ni elle, ni son mari, ni leur fils.
- Qu'est-ce que ça veut dire ? Demanda Draco, n'aimant vraiment pas ce qu'il pensait comprendre.
- Eh bien…
Mal à l'aise, Dumbledore pris quelques secondes pour mettre ses idées en ordre.
- Ses tuteurs avaient l'habitude de lui déléguer la plupart des tâches. Dans l'éventualité où notre jeune ami est entièrement redevenu enfant, et non pas seulement en apparence, son comportement pourrait s'apparenter à celui d'un elfe de maison.
La première chose que Draco eut envie de faire fut de frapper le directeur en plein visage. Ou alors de lui lancer le premier objet qui lui passerait sous la main. Lourd, de préférence. Ne souhaitant pas rester une seconde de plus en la compagnie d'un homme qui avait laissé un enfant endurer pareille vie, il partit veiller sur Harry. Il l'avait d'ailleurs vu s'agiter un peu plus tôt.
Dumbledore s'éclipsa quelques secondes plus tard, après avoir informé Severus qu'il ferait apporter un repas pour trois dans ses appartements et qu'il se pencherait sur le problème. Severus regarda le directeur partir avant de s'approcher de son filleul, agenouillé près d'Harry et caressant ses cheveux du bout des doigts.
- Tu es en colère, affirma Severus.
- Parce que tu ne l'es pas, toi ? Répliqua Draco sans même lui accorder un regard. Ce n'est qu'un connard qui a laissé un enfant se faire maltraiter pendant des années.
- Crois-tu vraiment qu'il avait le choix ? Ce qui nous pose problème aujourd'hui posait problème à l'époque. Harry est un enfant sans défense.
- Mais il n'y avait pas Voldemort, rétorqua Draco.
- Ça ne change rien. Un de ses partisans aurait fait le travail pour lui. Tu es le mieux placé pour savoir de quoi ils sont capables, ajouta Severus en pressant sa main sur l'épaule de Draco.
Il se baissa pour être à sa hauteur et le regarda, espérant obtenir ne serait-ce qu'un coup d'œil.
- Je comprends que tu sois furieux, mais il faut que tu te concentres sur ce qui est le plus important.
- Après tout ça, je trouve notre dispute tellement stupide, souffla Draco.
Il n'arrivait toujours pas à réaliser qu'il avait voulu en finir. Il n'arrivait même pas à croire que la simple idée qu'il serait mieux mort que vif lui ait traversé l'esprit. Posant sa tête près de celle du petit garçon, il le regarda dormir sans cesser de lui caresser les cheveux. Son cœur lui faisait horriblement mal. Il le sentait se serrer dans sa poitrine et ses yeux commençaient à le picoter. Harry avait voulu en finir et lui, il avait été bien trop préoccupé par ses propres problèmes pour se rendre compte de quoi que ce soit. Il avait été accaparé par toutes les petites choses qui l'énervaient chez lui, jusqu'à en oublier le plus important : son amour pour lui.
