Bonsoir à tous,

C'est l'heure de la rentrée pour tout le monde, j'espère que la votre s'est bien passée.

On retrouve nos héroïnes pour un grand moment : le festival d'animation !

Bonne lecture !

F.


Il ne nous faut pas longtemps avant de trouver une occasion de se retrouver pour aller boire ce fameux verre. Avec le chaperonnage de Raven bien entendu, qui est ravie de la tournure que prennent les événements. Je crois qu'elle s'est réellement attachée à Lexa ces derniers temps, et que la réciproque est vraie. Je me prends à espérer, Lexa à mes côtés, une chance de rattraper le temps avec Lincoln, Octavia et les autres. C'est étrange comme parfois, on ne se rend pas compte des choses qui nous plombent le moral. Depuis le mariage, je me sens libre, j'envisage le futur sous un autre jour. Un jour plus ensoleillé.

Nous sommes installées au MacLaren avec Raven quand Lexa nous rejoint. Raven est en train de me harceler pour que je lui donne mes invitations pour le festival d'animation. Comme Lexa n'a pas l'air bien au courant, je lui fais un plaisir de lui parler de cet événement mondial qui a lieu tous les ans à Annecy. Les projections, les professionnels de l'animation, l'ambiance. C'est la première fois que je pourrais pleinement en profiter. Elle pose des questions, sur le festival, sur mon école, grâce à qui j'ai eu ces tickets, on a tellement de choses à se raconter. C'est quand elle m'avoue n'avoir jamais participé au festival que je manque m'étrangler avec ma bière. Comment est-ce possible ? Alors sans hésiter, je l'invite, quitte à me taper la compagnie de Raven, autant bien m'entourer.

— Ça commence lundi, si tu veux on peut y aller ensemble ?

— Je croyais que tu y allais avec Finn ?intervient Raven déconcertée.

Et flûte, pourquoi ne saisit-elle jamais une occasion de se taire ?

— Finn ? demande Lexa d'une voix incertaine

— Son petit ami, confirme Raven l'air fier d'elle.

Une image très nette de la tête de Raven écrasée sur la table se fraye un chemin dans mon esprit. J'envisage quelques secondes de réaliser ma vision. Il n'a jamais été question que Finn soit mon petit ami ! Je ne comprends pas pourquoi elle me sort une énormité pareille, et encore moins pourquoi elle le fait maintenant ! Je la hais ! Pour sa défense, je n'ai jamais mis les choses au clair avec elle, et en y réfléchissant, avec Finn non plus. Pourquoi je me mets dans des situations pareilles ? Lexa s'étouffe avec sa bière, et je deviens rouge, de gène et de colère.

— Ce n'est pas mon petit ami, Raven ! C'est un copain… Un bon copain.

Lexa acquiesce, pas sûre de savoir qui croire.

— Et il aimerait être plus qu'un bon copain ! Allez, avoue que toi aussi, tu aimerais bien tester la bête ! Depuis le temps que vous vous tournez autour.

Je vais la tuer. L'étrangler, la couper en petit morceau, et la faire disparaître dans le lac. Lexa se lève brusquement, marmonnant une piètre excuse à propos de Lincoln. Sans réfléchir, je me lance à sa poursuite, je ne peux pas la laisser partir là-dessus.

— Attends ! Ils passent « Princess Mononoké » lundi soir, sur l'étendue d'herbe près du lac… Tu viendras ?

Mes espoirs sont récompensés, je sais qu'elle va céder avant qu'elle ne prononce la prochaine phrase.

— À quelle heure ?

Κ∞Λ

Le vent balaye la grande étendue d'herbe qui compose le Pâquier. C'est rafraîchissant après cette chaude journée, mais le ciel se couvre légèrement, je frissonne un peu en sentant la température chuter progressivement. Monty et Harper sont en train d'étendre deux plaids sur le sol et Jasper ne devrait pas tarder à arriver avec le pique-nique. Plusieurs groupes se sont déjà formés sur la pelouse au bord du lac. Dans quelques heures, la foule l'aura totalement envahie, formant une marée humaine, tournée vers l'écran géant qui contraste avec la nature nous entourant.

Je n'ai qu'une hâte, c'est que Lexa arrive, elle m'a promis. Ma nervosité augmente au fur et à mesure que les heures s'écoulent dans une lenteur incroyable. Raven ne dit rien, mais elle a remarqué mon manège, mes coups d'œil incessants à mon téléphone, mes difficultés à me concentrer sur les conversations. Quand arrive dix heures, je guette son arrivée et soudain, elle est là, à la lisière de la marée d'humains entassés à même le sol. Comment ai-je fait pour la repérer aussi vite dans ce tumulte ? Je suis la première surprise. Il est impossible qu'elle nous trouve d'où elle est, dans cette foule compacte et avec cette pénombre. De plus, le film commence. Je lui envoie un message et elle s'avance aveuglément en suivant mes instructions.

J'ai tôt fait de l'intercepter, mais je me maudis d'être aussi tactile. Mes mains font ce qu'elles veulent et je me retrouve sans cesse dans des situations embarrassantes, comme là, avec Lexa dans mes bras, alors que j'avais seulement l'intention d'attirer son attention. Heureusement que Raven intervient, ça commençait à être gênant.

Après une rapide présentation au reste de la bande, on s'installe aussi confortablement que possible pour profiter du spectacle. Je crois que c'est foutu pour moi, car mes yeux n'ont de cesse d'aller se poser sur Lexa. Ses épaules tressautent à intervalles réguliers, elle a froid. Mon esprit commence à tergiverser si oui ou non, je suis censée aller la réchauffer et puis je me fais violence pour arrêter le cours de mes pensées, elle a froid.

Raven plisse les paupières en me couvant du regard, alors que je m'installe derrière Lexa. Je déroule la couverture étendue sur mes épaules pour l'emmitoufler, partageant ma chaleur. Sa réaction est immédiate, elle se détend et se laisse complètement aller sur moi. Si elle écoutait attentivement, je suis certaine qu'elle serait capable d'entendre mon cœur cogner de plus en plus fort contre ma cage thoracique. On pourrait croire qu'il essaye de se libérer de cette prison sinistre pour la rejoindre. Je tire sur la couverture, contractant mes mains sur l'étoffe rêche. Ça leur évite de partir en vadrouille, parce que je sens qu'elles en ont très envie. Saletés de mains, incapables de tenir en place.

Au prix d'un bel effort de concentration, j'arrive à ne pas provoquer de catastrophes le temps du film. Et quand le générique défile sur l'écran qui éclaire la pelouse, nous suivons la foule dans les rues inhabituellement bondées à cette heure tardive. Nous marchons côte à côte avec Lexa, nos mains se frôlant à chaque pas que nous faisons, créant un agréable mouvement de balancier. Jusqu'au moment où elle ouvre sa main, capturant la mienne au vol, faisant remonter la chair de poule le long de mon bras jusqu'à ma nuque. Je tourne la tête de l'autre côté, pour qu'elle ne soit pas témoin de mon sourire béat, qui malheureusement n'échappe pas à Raven, bien qu'elle soit à quelques pas devant nous. Depuis le début de la soirée, je sais qu'une longue et pénible discussion m'attend avec ma colocataire, je m'en suis tiré à trop bon compte jusqu'ici. Nous prenons juste un dernier verre au MacLaren avant de nous séparer. Raven a la gentillesse d'attendre que nous soyons rentrées, loin des oreilles indiscrètes, mais à peine la porte refermée, elle engage les hostilités.

— Ok, je comprends mieux pourquoi Finn a été relégué au second plan.

— Pardon ? Je ne vois pas…

— Ce petit sourire niais que tu as eu tout à l'heure, et ces yeux de merlan frit un peu plus tôt, je ne suis pas complètement débile.

Comment ça niait ? Je suis outrée.

— Je comprends mieux ta petite crise de jalousie l'autre fois. Tu aurais pu m'en parler franchement, Clarke. Je suis vexée ! Je sais garder un secret !

— Non, tu ne sais pas. Et puis ce n'est pas…

— C'est pas ce que je crois ? Tu me prends vraiment pour une débile ? Ou c'est toi qui as de la merde dans les yeux ? Ça crève les yeux que tu es amoureuse de cette fille, enfin, quand on te connaît suffisamment. J'aurais jamais cru voir ça un jour… Clarke Griffin, amoureuse. Je pensais que c'était pas ton truc d'être en couple, que ça t'intéressait pas. En fait, t'étais juste déjà amoureuse de quelqu'un.

— C'est pas aussi simple.

Ça m'énerve qu'elle pense m'avoir percée à jour ! Bon d'accord, elle a raison sur toute la ligne, excepté le truc sur la niaiserie. Et mes yeux n'ont rien de commun avec un poisson. Mais il n'y a pas que ça, je ne peux pas lui parler de mes visions, je n'en ai jamais parlé à personne et si je dois le faire un jour, ce sera à Lexa. Exclusivement à Lexa. La réalité me rattrape trop vite, si j'envisage de pousser notre relation au-delà de la case « meilleure amie », il faudra bien que je lui en parle, car je ne peux pas envisager d'entamer une relation avec elle en lui cachant quelque chose d'aussi important pour moi. Cette idée me déprime, elle va me prendre pour une folle. L'immensité de la tâche qui m'attend m'effraie, j'ai peur de la faire fuir, comme j'ai moi-même fui à l'époque. Ma vie a besoin d'un sacré ménage.

— L'amour c'est jamais simple. Mais je ne suis pas trop mauvaise à ce jeu, je parie que c'est réciproque et que tu ne risques pas grand-chose à te lancer. Mais avant, ce serait bien que tu parles à Finn, il se fait des films.

Un immense espoir grandit en moi, à l'idée que Lexa puisse partager mes sentiments. Sans un mot, j'acquiesce à la demande de Raven, un grand ménage, oui. Une chose à la fois, d'abord, mettre les choses au point avec Finn. Mes pensées sont toutes tournées vers Lexa lorsque je vais me coucher, je sais que je vais rêver d'elle.

Le claustra laisse entrer quelques rayons de soleil qui viennent frapper son corps, étendu sur une fourrure. Je ne vois que son dos, et ses cheveux. Mais je sais que c'est Lexa. Un tatouage part de sa nuque, parcourant l'intégralité de sa colonne vertébrale, jusqu'en bas, là où une couverture remonte juste assez, au-dessus du galbe de ses fesses. De mon doigt, je trace les cercles qui le composent, et les symboles qui les accompagnent. Elle se retourne, elle sourit. C'est rare. Elle est sublime. D'un mouvement souple, elle se redresse sur un coude et vient m'embrasser. Mon corps répond instinctivement à sa demande silencieuse, et je sens sa main glisser sur mon ventre, se frayant un chemin sous les draps qui me couvrent.

Je me réveille pantelante, dans un état d'excitation intense. Ce n'était pas un rêve finalement, mais pour une fois, pas de terreur suite à ma vision. Même dans ce monde affreux, elles arrivent à s'envoyer en l'air. Franchement, c'est dégueulasse, alors que moi, je suis là, désespérément seule dans mon lit. Et en plus, j'en suis la seule responsable. Je n'ai plus personne à blâmer. Je tente de calmer ma libido, mais dès que je ferme les yeux, je vois la guerrière, glisser sa main entre mes jambes. Enfin entre les jambes de l'autre. Alors je garde les yeux ouverts, et fixe ma porte. Rien de moins sexy qu'une porte.

Celle-ci s'ouvre lentement, deux yeux verts apparaissent et me scrutent depuis l'entrée de la chambre, Lexa a fait demi-tour, elle n'est pas rentrée chez elle. Un doigt sur les lèvres, elle m'invite au silence en se faufilant sous les draps, pressant son corps contre le mien. Il ne faut que quelques secondes pour que sa main trouve le chemin de mon intimité, et ne commence de lents vas et vient qui m'arrachent des vagues de plaisir. Je jouis en grognant son nom de manière inintelligible, les dents mordant dans ma main pour ne pas faire de bruit. Les murs ne sont pas épais. Je n'ai aucune envie que Raven en rajoute demain sur mon attirance pour Lexa. J'aurai eu tellement envie qu'elle soit vraiment là, et pas juste le produit de mon imagination. Parfois, la frustration devient trop forte et j'ai besoin de me décharger. Comme quand je rêve de sexe idyllique avec l'alter ego de Lexa.

Plus question de trouver le sommeil à présent. Il est plus de quatre heures. Avant d'y réfléchir, j'envoie un texto [Tu m'as manqué.]. Voilà, je l'ai dit. Je me tourne vers mon bureau et la chaise tournante sur laquelle traîne la vieille chemise de mon père, celle que je mets pour peindre et ne pas tacher mes habits. L'image très nette du tatouage avec les cercles me revient en mémoire. Ce serait dommage de louper une telle occasion, je m'installe tout en allumant la petite lampe à dessin, avant de noircir une nouvelle feuille de papier.

Κ∞Λ

Le jeudi soir, c'est un véritable dancefloor qui est installé sur le Pâquier, l'estrade du DJ remplace l'écran géant, laissant la place aux jeunes, qui délaissent pour l'occasion leurs traditionnelles soirées étudiantes. Raven n'a pas manqué d'y inviter Lexa et organise sa présoirée au MacLaren. Je ne sais pas ce qu'elle trouve à cette vieille rhumerie, transformé en restaurant et bar de nuit, peut-être le choix de bières pression, qui me paraît personnellement légèrement exagéré avec leurs 12 becs.

Je me prends plusieurs coups de coude tandis que je guette sans discrétion l'arrivée de Lexa. Monty, Jasper et Harper discutent joyeusement autour de la table, je ne sais même pas de quoi ils parlent et je ne fais même pas semblant de m'y intéresser. Je suis impatiente et nerveuse. Lexa n'a jamais répondu à mon message du lundi soir, je me torture à essayer d'interpréter ce silence radio. La porte s'ouvre enfin sur l'objet de mes pensées, flanqué de Luna et Bellamy. Mon cœur se met à galoper, c'est devenu une habitude depuis que j'ai revu Lexa. Si je veux être honnête, j'adore cette sensation de perdre tous mes moyens à chaque fois qu'elle entre dans la pièce. Elle porte un short noir très court et un top de couleur crème ultra décolleté, le tout sur un maillot de bain rouge. Oui, j'aime cet effet qu'elle a sur moi. Le problème interviendra plus tard, quand de toute évidence, je rentrerai seule et frustrée.

À peine installées, les conversations s'engagent entre les deux bandes d'amis et la serveuse vient compléter notre commande pour les nouveaux venus. Il n'est pas question d'arriver à la soirée avant que l'ambiance ne soit à son comble. Nous avons donc deux bonnes heures devant nous pour que tout le monde apprenne à se connaître et Lexa est tout contre moi. Peut-être qu'on pourrait en profiter pour se raconter un peu ce qu'il s'est passé ces cinq dernières années, de son côté comme du mien. Je ne connais toujours pas eu le fin mot de l'histoire sur sa rupture avec Costia.

Tout à coup, je m'interromps au milieu d'une phrase, là-bas, vers la porte, Finn vient de faire son entrée en me saluant joyeusement. Elle n'a pas osé ! Je fusille Raven du regard.

— C'est toi qui l'as invité ce soir ?

Question rhétorique. Elle se pousse pour que Finn s'incruste à mes côtés, passant un bras possessif autour de mes épaules. Je suis pétrifiée, en colère contre Raven, contre Finn qui se croit en terrain conquis, mais je ne le repousse pas. J'aurais dû l'appeler. J'ai laissé traîner cette histoire bien trop longtemps. Rien ne me sert jamais de leçon. Suis-je condamnée à répéter encore et encore les mêmes erreurs ? Je n'ose même plus regarder Lexa et préfère me perdre dans mon verre.

Ma stratégie se révèle extrêmement mauvaise. J'ai perdu le compte. Ce n'est jamais bon signe quand on est plus capable de dire combien de verre on a bu. Les autres se lèvent, je suppose qu'il est temps d'y aller, alors je les suis. Le sol bouge beaucoup, la tête me tourne et quelqu'un m'aide à marcher droit. Finn, bien sûr. Il m'agace de plus en plus dans son rôle de chevalier blanc, mais je n'ai absolument aucune raison de l'envoyer bouler. Pourtant, au moment où il tente de m'enlacer, la coupe est pleine.

— Pourquoi les hommes croient toujours qu'on a besoin d'un chevalier servant ? Merci Finn, mais je suis tout à fait capable de me débrouiller toute seule.

— Pas si j'en crois ta trajectoire.

— Lâche-moi les basques !

— Hey ! réplique-t-il, vexé, tandis que je me dégage de ses bras en fonçant dehors. J'ai besoin d'air. À peine quelques secondes plus tard, Finn me rattrape. Quel pot de colle !

— Quoi ? Tu peux pas me lâcher ?

— Excuse-moi, j'ai du mal à te suivre là…

— Justement ! Arrête de me suivre !

— C'est quoi ce plan ? Je croyais que nous…

Je me retourne en lui lançant un regard assassin. Je le défie silencieusement de terminer sa phrase, il n'y a pas de "nous" ! Je cherche la meilleure façon d'abréger ses souffrances et les miennes. Hors de question que je lui avoue être amoureuse de Lexa. La bonne nouvelle, c'est que je suis douée pour tergiverser. La mauvaise, c'est que je le suis beaucoup moins quand je suis saoule. Je sens mes lèvres et ma langue pâteuse chercher à former les mots.

— Je ne suis pas la fille que tu penses que je suis.

C'est nul, il grimace son incompréhension. Pourquoi j'ai bu autant ? Pourquoi je n'ai pas fait ça avant, à un moment où on aurait pu être que tous les deux ?

— Je ne suis pas intéressée.

— Tu avais l'air pourtant. Il n'y a pas si longtemps.

— Désolée. Je me suis trompée. Je… je ne veux pas… d'un petit ami.

Waouh, c'est laborieux, mes neurones tournent au ralenti, c'est moche. J'essaye de rester honnête, j'aimerais qu'à la fin de cette soirée, je n'aie pas perdu un ami. Voir deux, si je lui fais trop de mal, Raven risque de m'en vouloir. C'est trop. Je ne peux pas continuer.

— Je ne peux pas continuer cette conversation.

— Clairement, tu n'es pas en état. On en parlera une autre fois.

Un banc, une aubaine, j'ai besoin de m'asseoir. Je m'y affale sans lui répondre. Finn hésite, mais finit par disparaître de mon champ de vision, rendant ma respiration plus aisée. Ma tête échoue entre mes mains, ma vue se brouille légèrement.

J'ai l'impression qu'il s'écoule des heures avant que Lexa ne s'installe à mes côtés. En réalité, ça ne peut pas faire plus d'une minute ou deux. Il faut que je me calme, elle va vouloir des explications, mais étrangement, je me sens beaucoup plus disposée à les lui donner qu'à Finn.

— Ça va ?

— Oui, mieux. Merci.

— Tu veux en parler ?

Sa voix est douce, son aura m'enveloppe. Vouloir est un bien grand mot, mais je n'ai pas envie qu'elle continue à se poser des questions à propos de Finn. Elle ne mérite pas ça.

— Je ne savais pas qu'il serait là ce soir.

— Ça n'a pas l'air de te faire plaisir. Finn… C'est ?

— Et bien, c'est un ami de Raven. Quand on est revenues d'Australie, ils ont repris contact, et on s'est tout de suite bien entendus. Assez vite, j'ai compris qu'il attendait plus de notre relation. Je l'aime bien, on a flirté un peu.

— Et qu'est-ce qui a changé ?

Là, je bug, parce que la seule chose qui a changé, c'est le retour de Lexa dans ma vie, et avec elle, la certitude absolue que toute autre relation serait d'une cruelle insignifiance. Je cherche dans les réponses bateaux, mais « c'est pas toi, c'est moi » ne fera pas l'affaire.

—Rien… je ne suis juste pas sûr d'avoir les mêmes attentes que lui.

Voilà, simple, efficace. Elle hoche la tête. Je déteste lui mentir. C'était facile avant, des petits mensonges sans conséquences. Mais l'habitude est trop ancrée en moi, j'ai l'impression de ne plus pouvoir me sortir de la toile de mes mensonges. Et j'en viens à me détester pour ça. Lexa mérite quelqu'un de décent, et là, tout de suite, je ne suis pas sûre d'être qualifiée. Elle se lève en me tendant la main en invitation.

— Alors ? On y va à cette soirée mousse ?

Grâce à elle, je retrouve ma bonne humeur et me laisse traîner en direction de la musique. Les effets de l'alcool sont encore puissants, je redoute qu'ils ne retombent que tard dans la nuit. Mais j'ai mon ange gardien avec moi, alors je me laisse aller, mettant ma confiance entière en Lexa, qui je le sais, veillera sur moi. La piste de danse ressemble à un gros nuage, parfait pour aller danser avec un ange. Au milieu de toute cette mousse, nous retrouvons Lincoln et Octavia, qui sont venus de leur côté, et croisons les autres qui vont et viennent dans la foule. Je laisse la musique m'entraîner, un peu d'exercice me permettra d'évacuer mon ivresse. Une fois bien défoulés, nous nous dirigeons avec Luna, Jasper et Monty vers la plage située à quelques minutes à pieds d'ici. C'est plus calme, comparé à la musique tonitruante et aux cris de l'autre côté. Finn s'est finalement décidé à nous rejoindre, il boude. Je ne peux pas lui en vouloir, j'ai été odieuse avec lui. Mais quand il sort un pétard qu'il offre de partager avec Luna, je les rejoins, un signe de paix vers Finn, et j'avoue espérer profiter de l'effet apaisant de la drogue que je n'ai découverte que récemment grâce à Finn et Jasper qui sont de grands consommateurs. Je me laisse aller sur l'herbe, j'ai dessaoulé un peu, mais je suis encore loin de mon état normal.

Le bruit du moteur vrombissant à côté de nous ne suffit pas à me faire redescendre, il me faut un bon moment avant de réaliser qu'il se passe quelque chose d'anormal. Finn n'est plus assis à côté de moi, il est debout, un peu plus loin, en train de s'embrouiller avec un motard. Lexa les surveille, l'air tendu. Je me lève en même temps que Luna en me positionnant dos à elle, dans un mécanisme d'autodéfense. Sans avoir le temps de comprendre ce qu'il se passe, Lexa se retrouve aux prises avec deux agresseurs sortis de je ne sais où. Tout s'est passé si vite.

Le guerrier qui lui fait face porte sur son visage, les cicatrices qui atteste de son rang et de son clan. Azgeda est le plus cruel et le plus féroce des clans. Cet homme a tué les trois soldats envoyés pour me capturer, en trois mouvements. Lexa n'a aucune chance. La panique s'immisce en moi à mesure que le combat avance, et quand la lance s'abat en direction de sa tête, je manque m'effondrer d'horreur. Je ne peux pas la perdre !

La poigne sur mon bras m'entraîne malgré moi, je mets un pied devant l'autre machinalement pour ne pas tomber. Nous sommes au bord du lac, pas dans une arène sinistre et poussiéreuse. Lexa a gagné, je le sais. La drogue fait ressurgir mes visions, ça aussi je le sais. Je cours derrière Lexa, je ne sais pas pourquoi, mais je m'en fiche, je la suivrais en enfer. La musique tourne encore à plein régime, j'ai envie de danser encore.

— Allez, Lexa, on retourne danser !

Son mouvement de recul passe inaperçu, je ne suis pas totalement raccordée à la réalité. Moitié ici, et moitié là-bas. Je l'enlace, heureuse qu'elle ait gagné ce duel, heureuse d'être capable de la prendre dans mes bras. J'ai failli la perdre ce soir. Quelque part, je sais que je délire, qu'il ne s'agit pas de moi ni de Lexa. Pas vraiment. Mais cette sensation est forte, trop forte pour lutter. Mon esprit est affaibli par l'alcool et la drogue.

Mes bras se resserrent, comme un piège, autour de ma proie. Je ne rencontre pas de résistance, alors j'approche mes lèvres de sa bouche, je ne m'y attarde pas, bien plus intéressée par la courbe de sa mâchoire que je me retiens d'embrasser. Quand j'atteins ce point particulièrement sensible, sur la nuque, juste derrière le lobe de l'oreille, je réfrène mon impulsion avant que ma langue ne se mêle à la fête en pensant un bref instant pouvoir reprendre le contrôle de mon corps. C'est une erreur. L'instant d'après, ma bouche se retrouve à explorer la nuque de Lexa, m'ôtant définitivement toute chance de retour en arrière. Ma main longe la courbe de ses hanches, jusqu'à atteindre le haut de ses cuisses, juste là où son short s'arrête. Elle est à moi.

Et puis on m'arrache l'objet de mes désirs, la chaleur de son corps, la douceur de sa peau, l'odeur suave de son parfum. Ça fait mal. Et au cas où je n'ai pas bien compris qu'on me privait de ce que je désire le plus au monde, Lexa ajoute fermement :

— Clarke, non. Je te ramène.

Je prends quelques secondes pour remettre mon désir dans la cage de laquelle il n'aurait jamais dû sortir. Pas ici, pas comme ça. Je m'applique à me vider la tête pendant le trajet du retour. Surtout, ne pas penser à la main de Lexa dans la mienne, ne pas jouer de mes doigts dans sa paume délicate. Ne pas penser à ses lèvres charnues, son corps musclé, ses seins fermes.

Enfin ça, je n'en sais rien, je n'ai jamais eu l'occasion de les toucher. Et soudain, je n'ai plus qu'une seule obsession. Je me flagelle mentalement quand on rentre dans l'appartement, je suis une obsédée, je ne pense plus qu'à ses seins. J'ai besoin de me passer un peu d'eau sur le visage, alors je l'abandonne quelques minutes, le temps de reprendre mes esprits. La séparation me fait du bien, c'est beaucoup plus facile de penser quand elle ne m'expose pas son corps parfait sous les yeux. Je reviens dans le salon, un peu plus maître de moi-même.

— Il est tard, tu peux dormir ici si tu veux ?

— Le canapé est pris.

— Je ne pensais pas au canapé…

Je crois qu'il serait de mauvais ton de lui sortir un « en tout bien tout honneur » alors que je me jetais littéralement sur elle il y a encore quelques minutes. Je n'ai aucune attente particulière cependant, je me contenterais volontiers de juste dormir, avec elle à mes côtés, comme au bon vieux temps. Je n'ai juste pas envie qu'elle parte. Mais alors, vraiment, vraiment pas. Mais en serais-je capable ? Et elle ? Elle n'avait pas l'air si réticente sur la piste de danse tout à l'heure. Ça fait trop d'émotions pour une seule soirée. Heureusement, elle décline mon offre indécente, elle est plus forte que moi. Elle a toujours été plus forte. Mon corps n'en a pas encore assez et je m'avance vers elle. Pour l'enlacer ? Pour l'embrasser ? Je n'ai pas le temps d'y réfléchir, car elle se faufile hors de portée avant que je n'aie une chance de la toucher.

— Tu devrais aller te coucher Clarke. On s'appelle demain ?

Sans plus attendre, elle disparaît dans la cage d'escalier. Me laissant les bras ballants au milieu de mon salon.

— Vous devriez vraiment vous envoyer en l'air et mettre fin à cette tension de film à l'eau de rose.

Raven, évidemment, elle ne dort pas. Allongée sur le canapé, elle n'a rien loupé de la scène. Je me ménage une place sur les coussins de façon brutale. Elle grogne un peu devant mon manque de délicatesse.

— Ce n'est pas si simple.

— Oui, tu m'as déjà dit ça. Et je ne comprends toujours pas ce qu'il y a de compliqué. Tu l'aimes, elle t'aime très probablement, en tout cas la tension sexuelle entre vous est indéniable, ce qui est un bon début.

— Tu sais ce qu'il s'est passé entre elle et Costia ?

— Ce n'est pas à moi que tu dois poser cette question. Je n'arrive pas à croire que vous n'ayez même pas encore abordé le sujet ? C'est ça qui te bloque ?

— Non pas vraiment. Mais ça me travaille quand même.

La reine de l'esquive, reporter l'attention sur un problème qui n'en est pas un. Enfin quand même, j'aimerais avoir le fin mot de l'histoire. Je finis par rejoindre mon lit, après avoir avalé l'aspirine préparée par Lexa. J'entoure mon oreiller pour le serrer fort, j'ai besoin d'une présence. Juste avant de m'endormir, je me demande pourquoi Raven dort sur le canapé.