Chapitre XXXI

Le début de l'année commençait plutôt bien et la routine de la vie au château rassurait l'adolescent. Il savait qu'il y était en sécurité. Cependant, cela ne l'empêchait pas d'ouvrir chaque matin la Gazette du Sorcier avec une certaine appréhension. Les nouvelles étaient sombres, les Aurors traquaient toujours les mangemorts en liberté, mais aucune nouvelle de ceux enfermés à Azkaban.

En ayant assez de s'inquiéter pour un rien, l'héritier Nott tenta d'oublier la situation politique du pays et la position délicate dans laquelle celle-ci mettait sa famille, en se concentrant pleinement sur ses études, mais il fut vite ramené à la réalité par le comportement suspect d'un de ses camarades de dortoirs.

Depuis quelques temps, Drago Malefoy se comportait de manière étrange et semblait dépérir à vue d'œil. Repensant à ce que Blaise lui avait dit le jour de la rentrée, Théodore usa de toute sa discrétion et de son intelligence pour en savoir un peu plus. Un soir alors qu'il était monté avant tout le monde, il décida d'attendre que Malefoy vienne se coucher à son tour. Celui-ci montait toujours quelques minutes après lui…

Des bruits de pas se firent entendre dans l'escalier, et s'arrêtèrent devant la porte. Le jeune garçon attendit une bonne dizaine de minutes, feignant d'être plongé dans un livre, avant que son camarade ne pénètre dans la pièce. Un détail alerta Théodore. L'adolescent s'était déshabillé dans la salle de bain, ce qu'il n'avait jamais fait en cinq ans. Comprenant qu'il n'aurait pas d'autre choix s'il voulait découvrir la vérité, il se leva doucement de son lit et se dirigea vers celui de Malefoy :

-J'aimerai te demander quelque chose…

Il vit son camarade, lever les yeux vers lui, surpris. Celui-ci paraissait sur la défensive avant même que Théodore n'ait poser sa question, ce qui confirmait les hypothèses du jeune Nott :

-Viens en au fait, je suis fatigué…

-C'est vrai ce que Parkinson raconte à propos de ta possible implication dans les rangs du Seigneur des Ténèbres ?

-Tu ne tiens certainement pas ça de Parkinson…répondit Malefoy, le regard fuyant, faisant tout son possible pour éviter la conversation.

-Peu importe de qui je le tiens…

Un long silence s'installa quant au bout de quelques minutes Drago Malefoy fini par répondre d'une voix anormalement rauque :

-En quoi ça te regarde ?

-J'aimerai savoir à quoi je dois m'attendre lorsque mon tour viendra, si jamais il vient…Depuis combien de temps ?

-Depuis cet été…et si tu veux tout savoir je ne pense pas que tu l'intéresses, il recrute des partisans fiables et efficaces, je ne pense pas que tu fasses le poids répondit son camarade en retrouvant son habituel ton méprisant et hautain.

Cela fit ricaner Théodore qui rétorqua en gardant son calme :

-Tant mieux alors, mais je ne crois pas que ta famille puisse être considérée comme fiable et efficace…Ton père est à Azkaban tout comme le mien et je doute qu'un adolescent de seize ans puisse s'en sortir…

-Pour quels camps te bats-tu Nott ?

-Aucun des deux…Je me bats pour la survie…Sur ce, je vais me coucher…

Retournant silencieusement dans son lit, le jeune garçon passa une bonne partie de la nuit à cogiter. Malefoy lui avait assuré le contraire mais Théodore craignait pour sa liberté et encore plus pour sa vie et celle de son père. Le recrutement de Drago Malefoy dans les rangs du Seigneur des Ténèbres, semblait précipité et le jeune garçon était certain que cela avait un lien avec la catastrophe qui s'était déroulé au Ministère, et dont l'opération avait été dirigé par Lucius Malefoy. Tout cela ressemblait à une sorte de punition…

Epuisé et inquiet, il finit par s'endormir en espérant de toutes ses forces qu'il n'adviendrait pas la même chose de lui…

La conversation qu'il avait eu avec Malefoy le hanta de nombreuses semaines et cela se répercutait sur son moral et sa condition physique. Il dormait mal et avait perdu du poids, ce qui alarma son ami qui tira la sonnette d'alarme. Un soir alors qu'ils se trouvaient tous les deux dans la salle commune, son ami lui demanda d'un ton grave :

-Qu'est-ce qu'il se passe ? Je vois bien que quelque chose te préoccupe…

Théodore poussa un soupir. Il n'avait pas envie d'en parler mais savait pertinemment que son ami était tenace et qu'il ne lâcherait pas l'affaire.

-Tu avais raison pour Malefoy…

Blaise resta quelques secondes silencieux avant de déclarer :

-De toute façon on ne peut rien faire pour lui…

-Ce n'est pas pour lui que je m'inquiète…

-Je m'en doute bien, tu ne l'as jamais vraiment porté dans ton cœur de toute manière…La meilleure chose que tu puisses faire c'est de rester discret, il ne pourra pas t'atteindre tant que tu seras à Poudlard et pour l'instant ton père est en sécurité à Azkaban tenta de le rassurer son ami. Tu ne peux rien faire de plus, Théodore…

Le jeune Nott ne répondit pas, perdue dans ses sombres pensées.

-Vient me voir à l'entraînement demain, ça te sortira un peu…

Relevant la tête, il le questionna :

-Quel entraînement ?

-L'entraînement de Quidditch !

-Depuis quand tu es dans l'équipe ?

-Depuis que j'ai réussi les sélections…Je t'en ai parlé un million de fois mais tu ne m'écoutes jamais !

-Pardonne-moi j'avais complètement oublié…

Le lendemain après-midi, après avoir été un peu titillé par son ami, Théodore avait finalement accepté de se rendre au terrain de Quidditch pour voir l'équipe de Serpentard s'entraîner. La séance n'avait commencé que depuis dix minutes seulement, que déjà il s'ennuyait. Le Quidditch ne l'avait jamais particulièrement intéressé, il était bien plus heureux le nez dans ses bouquins !

Il se félicita d'ailleurs intérieurement d'avoir pensé à emporter le livre de potion qu'il avait emprunté à la bibliothèque deux jours plus tôt. Essayant de s'installer le plus confortablement possible dans les gradins de bois, le nez dans son écharpe (le temps s'était considérablement refroidi), l'adolescent était absorbé par un chapitre très intéressant concernant l'utilisation des minéraux dans les potions et ne faisait nullement attention au souafle et aux cognards qui volaient un peu partout dans les airs.

Une voix le fit soudain sursauter :

-Nott attention !

Relevant brusquement la tête, ses yeux s'écarquillèrent de terreur en voyant un cognard foncer droit sur lui. Il n'eut même pas le temps de l'éviter que celui-ci l'avait déjà frappé en pleine tête, le faisant lâcher son livre. Pendant un instant il ne vit, ne sentit et n'entendit plus rien, quand une atroce douleur se déclencha, le faisant hurler.

En état de choc et à deux doigts de la crise de panique, il ne fit même pas attention à son ami et aux autres membres de l'équipe qui s'était précipité vers lui.

-Il faut l'emmener à l'infirmerie immédiatement !

Soutenu par son ami et le capitaine de l'équipe, il fit le trajet jusqu'à l'infirmerie dans un état second. En voyant son état, l'infirmière poussa un cri, tandis que ses camarades l'allongeaient sur le lit le plus proche.

-Qu'est-ce qu'il s'est passé ? Questionna-t-elle.

-Il regardait simplement l'entraînement quand un cognard lui a foncé dessus à toute vitesse…répondit Blaise, la voix tremblante.

-Si les cognards se mettent maintenant à attaquer les spectateurs !

Théodore vit l'infirmière s'approcher et jeter un rapide coup d'œil à sa tête.

-C'est sérieux…

-Mais il va s'en sortir ?

-Bien évidemment, Monsieur Zabini ! Ca risque juste de prendre un peu de temps et d'être très douloureux. Il n'a pas perdu connaissance ?

-Je ne crois pas, j'ai simplement l'impression qu'il a mis un peu de temps à ressentir la douleur…

-Pas de vomissements ?

-Non plus…

Le jeune garçon avait suivi l'échange d'une oreille distraite et peinait à rester pleinement conscient de ce qui se passait autour de lui. Tandis que l'infirmière était partie chercher il ne savait quoi dans son bureau, il l'entendit hausser le ton sur son ami :

-Non, Monsieur Zabini, vous ne pouvez pas rester ! Votre camarade a besoin de soins et de repos ! Vous pourrez revenir demain quand il se sera un peu remis…

Théodore vit son ami quitter l'infirmerie à regret, tandis que Madame Pomfresh revenait avec son matériel. Le faisant se redresser et pencher un peu la tête, elle entreprit de nettoyer la plaie et ses cheveux englués de sang avec un linge humide puis de désinfecter celle-ci avec un liquide qui le brûla douloureusement et qui eut pour effet de le faire revenir pleinement à la réalité. L'adolescent avait pris sur lui, évitant de geindre et de pleurnicher lors des premiers soins, mais en voyant le linge imbibé de sang, il se mit à paniquer.

Au bord de l'évanouissement, il devint livide et se mit à hyperventiler.

-Ce n'est pas le moment de tourner de l'œil, Monsieur Nott !

Se sentant partir une seconde fois, il revint rapidement à lui lorsque l'infirmière lui appliqua du vinaigre sur les tempes.

-C'est mieux comme ça…gardez les yeux ouverts, je n'en ai pas pour longtemps…

-Qu'est-ce que vous allez me faire ? Questionna-t-il la voix tremblante.

-Je veux simplement refermer la plaie, mais je ne sais pas si j'y parviendrais seulement à l'aide de la magie…dit-elle en se saisissant de sa baguette.

Le jeune garçon, secoué de sanglots, se pencha une deuxième fois en avant mais fut réprimander gentiment par l'infirmière :

-Cessez vos pleurs, je n'arriverai pas à bien travailler sinon…

Théodore, s'exécuta docilement et parvient à retenir ses larmes et à rester immobile tandis qu'elle tentait de refermer la plaie à l'aide de sa baguette. L'adolescent ne ressentit aucune douleur, à part ne serait-ce qu'une sensation de chaleur et quelques picotements.

Observant le visage de la vieille femme, Théodore eu un mauvais pressentiment :

-Je suis désolée, mais je n'ai pas réussi à tout refermer, il vous faudra quelques points de suture…

-Qu'est-ce que c'est ? Demanda-t-il en pâlissant encore plus.

-C'est une technique de médecine moldu qui consiste à recoudre les plaies avec du fil et une aiguille.

Le jeune Nott poussa un gémissement en entendant ce qui l'attendait, tandis que Madame Pomfresh rassemblait son matériel. Fixant avec horreur le fil et l'aiguille qui allait servir à le recoudre, il se mit à trembler de tous ses membres. Geignant sans s'en rendre compte, Théodore s'attira une fois de plus les foudres de l'infirmière :

-Je ne vous fais pas mal pour l'instant ! Je vous applique simplement l'onguent qui vous servira d'anesthésiant…

Le simple fait d'effleurer sa tête lui faisait atrocement mal, il n'osait imaginer ce qu'il ressentirait lors des points de suture. Après avoir laissé l'onguent agir une dizaine de minute, l'infirmière lui recommanda :

-Détendez-vous et restez immobile, je n'en ai pas pour longtemps…

Obéissant du mieux qu'il le pouvait, Théodore ne put réprimer un couinement de douleur lorsqu'elle le piqua pour la première fois. L'adolescent s'en sortit finalement avec quatre points de sutures. Cependant, il eut l'agréable surprise de constater que l'anesthésiant atténuait remarquablement bien la douleur.

-Comment vous sentez-vous ? Lui demanda-t-elle en lui tendant un des pyjamas de l'école.

-Pas trop mal…murmura-t-il, n'ayant pas le courage de négocier sa sortie de l'infirmerie maintenant.

-Tant mieux, mais je préfère vous mettre en garde maintenant, l'onguent va simplement endormir la douleur quelques heures…Vous risquez de souffrir lorsque l'effet aura cesser…

Le jeune garçon poussa un soupir en se glissant sous les draps. Encore dans les vapes, il somnola jusqu'à l'heure du dîner et mangea de bon appétit, ce qui sembla rassurer l'infirmière sur son état.

L'adolescent dormait profondément, quand un goût immonde dans sa bouche et une sensation d'humidité le réveilla en sursaut. Ouvrant avec difficulté les yeux, Théodore comprit rapidement qu'il venait de se vomir dessus durant son sommeil. Alors qu'il s'apprêtait à appeler l'infirmière une vague de nausée le submergea et il eut juste le temps de se pencher sur le côté pour régurgiter tout son dîner. Le bruit de ses vomissements fit accourir Madame Pomfresh.

Celle-ci nettoya d'un coup de baguette le sol et les draps, puis entreprit de lui prendre ses constantes.

-Pas de fièvre mais votre tension est un peu basse…Je vais vérifier que la plaie ne s'est pas infectée…

A peine l'eut-elle touché, qu'il se mit à gémir douloureusement. L'anesthésiant venait de cesser de faire effet et la douleur s'était réveillée. Livide et tremblant, ne pouvant plus retenir ses larmes, l'adolescent songea qu'il était bien plus sensible à la douleur qu'il ne le pensait.

-Je suis désolée Monsieur Nott, mais je vais être dans l'obligation de venir vous réveiller toutes les trois heures pour voir si votre état n'empire pas…

La nuit fut pénible, les nausées avaient cessé mais son crâne était toujours douloureux et il n'était pas parvenu à se rendormir avant au moins 6 heures du matin. Vers 9 heures, la vieille femme vint lui apporter son petit déjeuner qu'il refusa, se sentant encore un peu nauséeux.

Le jeune homme se trouvait dans un état lamentable. Il était extrêmement pâle, et peinait à garder ses yeux ouverts qui en plus de cela le brûlait désagréablement à cause des larmes et du manque de sommeil. Après avoir examiné la suture, et lui avoir pris sa température et sa tension, Madame Pomfresh jeta un coup d'œil à ses yeux et le réprimanda en le voyant se les frotter :

-Ils vont vous faire encore plus mal si vous continuez…

Appliquant un linge humide sur ses paupières enflées, elle en profita également pour lui faire avaler une potion de sommeil.

-Je ne peux plus rien pour vous, il vous faudra simplement prendre votre mal en patience, Monsieur Nott…Lui intima-t-elle en le recouvrant de ses draps d'un geste maternel.

Au bout de quelques minutes, Théodore tomba profondément endormi. S'éveillant en milieu d'après-midi, il grimaça en constatant qu'une horrible migraine pointait le bout de son nez. Alors qu'il se frottait les yeux (n'écoutant pas les consignes de l'infirmière) il l'entendit dire à quelqu'un :

-Pas plus de cinq minutes, il a besoin de repos !

En apercevant son ami, une liasse de parchemin à la main, l'adolescent eu un faible sourire.

-Qu'est-ce qui te fais sourire ainsi ? De me voir ou c'est simplement parce que je t'apporte tes cours ? Le taquina Blaise.

-Mes cours bien évidemment ! répliqua Théodore sur le même ton.

-Tu as mauvaise mine…

-Qui est-ce qui a insisté pour que je vienne le voir à l'entraînement ?

-Je suis vraiment désolé…Je n'aurai jamais dû te forcer à venir…

-Tu n'y es pour rien, je ne t'en veux pas.

-Je ne peux pas rester plus longtemps ou Madame Pomfresh va me tuer sinon…lui dit son ami en lui tendant la liasse de parchemin.

Une fois son ami parti, Théodore se plongea dans les cours qu'il avait manqué, ne faisant pas attention à son mal de tête qui s'intensifiait. Le voyant à l'œuvre, l'infirmière lui retira les feuilles des mains en le réprimandant :

-Hors de question que vous mettiez le nez dans vos cours maintenant ! Il vous faut du repos !

-Mais je n'ai plus sommeil et je me sens mieux ! mentit-il.

-Cessez vos mensonges, ça ne fonctionne pas avec moi, Monsieur Nott…

Déçu, il se laissa retomber sur ses oreillers et passa la fin d'après-midi à fixer le plafond, en ronchonnant.