Chapitre 41 : la chute de l'Empereur
Empire flottant, 22ème jour du Printemps…
Lest heurta une colonne de pierre avec une puissance effroyable, projeté par l'Empereur Ethelberd d'un simple revers de bras. Il glissa jusqu'au sol et vomit un flot de sang impressionnant. Il toussa en essuyant son menton, les yeux rivés sur son ennemi. Ethelberd était fort, si fort… trop fort, sans doute, toutes ses expériences, même inachevées à cet instant, avait fait de lui un homme supérieur à tout autre. Et pourtant, ça ne lui suffisait pas !
Lest poussa sur ses jambes pour se relever, mais un rayon de pouvoir à l'état pur le cloua à nouveau sur sa colonne, lui coupant le souffle.
_ Tu t'imaginais sincèrement pouvoir me vaincre, prince de Selphia ? C'est terriblement naïf. Tu dois lire vraiment trop de livres, il n'y a qu'eux pour raconter qu'un simple garçon humain puisse triompher qu'un dieu.
_ Vous… n'êtes pas… un dieu…
_ Simple question de temps.
Ethelberd agita la main et Lest eut l'impression d'entendre quelque chose craquer dans tout son corps, et une douleur intolérable fusa de ses côtes. Lorsque la pression se relâcha, il retomba sur le sol comme un pantin désarticulé, son sang se mêlant à celui de l'armée entière que l'Empereur avait décimée dans cette même salle, du même rouge sombre… Finalement, qu'ils soient ennemis ou non, ça n'avait pas d'importance, ils avaient tous le même sang d'un rouge indécent ; et Lest allait mourir tout comme eux.
Son regard flou accrocha un éclat de couleur plus clair. Il tendit une main tremblante et l'effleura des doigts. Le porte-bonheur que lui avait donné Vishnal… il lui avait promit de revenir…
_ Pardon, Vishnal… on dirait que je ne vais pas pouvoir tenir ma promesse… et te ramener ton porte-bonheur…
Il toussa et cracha du sang, la respiration sifflante. Des larmes se mirent à rouler sur ses joues sales, y traçant deux sillons.
Non.
Il ne voulait pas mourir. Pas ici, pas comme ça ! Il devait se relever et vaincre son ennemi, pour rentrer chez lui !
Le jeune homme referma sa main sur le porte-bonheur et serra les dents. Ça faisait mal, mais la douleur lui indiquait qu'il était toujours vivant, et c'était la seule chose qui comptait. Il se releva, toisant Ethelberd avec toute sa fureur de vivre, sa rage de vaincre.
_ Je ne pensais pas que tu survivrais aussi longtemps, tu es impressionnant… Mais ça ne va pas durer. Cette fois, tu ne te relèveras pas !
Ethelberd brandit ses mains vers le jeune homme et rassembla toute la puissance de son colossal pouvoir dans un rayon qui traversa toute la salle telle une lance mortelle. Lest l'observa, son regard s'agrandissant d'effroi.
La lance de pouvoir s'apprêtait à le toucher lorsqu'elle explosa soudainement.
Le jeune homme tendit la main et fut surprit de sentir un vent violent sur sa paume, bouclier impénétrable qui venait de lui sauver la vie.
Ethelberd plissa les yeux d'un air contrarié et tourna la tête vers son trône au-dessus duquel flottait Ventuswill. Mais le Dragon Divin ne se trouvait plus là, et avançait vers lui, toute sa puissance émanant de son frêle corps d'humaine.
Elle posa son étrange regard bleu sur Lest et joignit les mains sur sa poitrine.
_ Pardonne-moi d'avoir mit tant de temps à comprendre… mon rôle n'est pas de vivre avec vous… Mon rôle est de vivre pour vous !
Elle se tourna alors vers Ethelberd et lança toute la colère de ses vents contre lui, l'assaillant sans bouger elle-même. L'Empereur lutta contre sa puissance mais, aussi puissant soit-il, il n'était pas encore un dieu. Malgré tout le pouvoir qu'il avait amassé, malgré toutes les expériences qu'il avait menées, il n'était pas l'égal de la déesse face à lui, aussi puissante sous sa forme humaine qu'elle l'était sous son apparence draconnique, peut-être même plus encore. Il hurla de rage et se précipita vers la jeune fille vieille comme le monde, une lame de pouvoir brute entre les mains… et s'immobilisa.
Ventuswill n'avait eut qu'un claquement de doigt à faire pour le figer, un seul.
Lest regarda son ennemi stoppé par la divinité du vent et du temps et se releva, tirant de sa botte une dague sobre et élégante, à peine plus grande que sa main, avec une lame argentée gravée de runes anciennes. Un cadeau plus précieux que tous les autres, malgré sa simplicité.
Il s'avança vers l'Empereur et lui fit face, scrutant son regard brûlant de haine. Il ne trouva rien à lui dire, et ne fit pas l'effort de chercher, seul un imbécile le ferait, ou bien le héros d'un livre. Il n'était ni l'un ni l'autre, juste Lest. Sa lame étincela un bref instant avant de s'enfoncer dans la poitrine d'Ethelberd, en plein cœur. Lest l'en retira et Ventuswill relâcha son pouvoir. Ils regardèrent le corps de leur ennemi vaciller quelques interminables secondes avant de s'écrouler. La déesse s'approcha et posa sa main sur le front de son ennemi, désintégrant son corps en millions de particules noires comme la suie, les dispersant dans le vent.
Ethelberd n'était déjà rien de plus qu'un souvenir. Son armée anéantie par sa propre main ne déferlerait pas sur Selphia, son empire continuerait de voler indéfiniment dans le ciel comme un château de légende dont seuls quelques rêveurs se souviendraient de l'existence.
Ventuswill se releva et regarda Lest en souriant.
_ Rentrons chez nous.
_ Comment ?
Elle plissa ses yeux d'un air espiègle et, un instant plus tard, son énorme corps de dragon vert apparut.
_ Monte, je vais nous ramener.
Lest réalisa qu'hormis le sang sur ses vêtements, il n'y avait plus la moindre trace de blessures sur son corps. Et il ne ressentait plus la moindre douleur. La déesse lui adressa un clin d'œil et il la remercia d'un sourire. Il se hissa sur son dos écailleux et s'accrocha de son mieux lorsqu'elle battit de ses larges ailes pour s'élever. Elle creva le toit de la salle du trône, offrant le soleil et le vent comme dernier tombeau à une armée qui n'avait probablement jamais voulu véritablement se battre.
Le ciel était beau, bleu et limpide, l'air doux et rempli d'une douce odeur printanière mêlée aux premières effluves de l'Eté.
Les batailles étaient terminées, la paix ne serait pas éternelle, elle ne pourrait jamais l'être, mais elle était là, et il fallait la savourer.
_oOo_
Ville de Selphia…
Ce fut d'abord une vague rumeur courant dans les rues de la ville, un brise légère à peine perceptible. Puis plus forte, comme un vent de plus en plus vif. D'un même mouvement, les habitants de la ville qui ne s'y trouvaient pas déjà se dirigèrent vers la place principale, là où Frey avait déjà fait rassembler la quasi-totalité des soldats Sechs. Ils s'étaient rendus sans mal après la mort de Meryem.
Tous virent une massive silhouette obscurcir le ciel dans un bruit assourdissant de drap claquant au vent. A vrai dire, ce n'était pas un drap, mais deux ailes, immenses, battant fermement alors qu'un dragon aux écailles vertes se posait sur les gravats qui avaient été autrefois le palais royal.
_ Ventuswill…
_ Incroyable, elle est toujours vivante !
_ Vous avez vu ? On dirait qu'il y a quelqu'un sur son dos, non ?
_ Mais oui ! C'est…
_ LEST !
La foule se retrouva brutalement écartée par Vishnal, la fendant pour se précipiter vers le jeune homme glissant du dos de Ventuswill. Ses vêtements étaient lacérés, tachés de sang, carbonisé par endroit… mais il était indemne, vivant, et lorsque ses bras se refermèrent sur lui, chaud et fort… vivant !
Lest tira de ses vêtements abimés un morceau de tissu si maculé de sang que Vishnal peina à le reconnaitre.
_ Excuse-moi, ton porte-bonheur est…
_ Si tu savais comme je m'en fou !
Vishnal prit le visage de Lest entre ses mains et l'embrassa avec une passion désespérée, éperdue. Il avait eut si peur de ne jamais le revoir, et les regards de l'intégralité de la ville tournés vers eux étaient bien le cadet de ses soucis, à présent. Lest resserra son étreinte autour de ses épaules, répondant à son baiser avec fougue et soulagement.
Il était rentré chez lui.
_oOo_
Frey sourit en regardant son frère étreindre Vishnal, appuyée contre Dylas. Elle ne savait rien de la bataille qu'il venait de livrer, et ne savait même pas qu'il en avait livré une jusqu'à ce qu'elle le voit revenir couvert de sang, mais elle était sûre d'une chose : la guerre était terminée, enfin.
Elle croisa alors le regard de Ventuswill et le soutint, la défiant de dire quelque chose. La divinité parla néanmoins, relevant le défi d'une voix fatiguée mais déterminée, observant toute la ville, chaque habitant, et même chaque prisonnier.
_ L'Empereur Ethelberd est mort. Votre prince l'a vaincu. Vous êtes désormais libres. Cette ville est votre ville, à vous et à vous seuls. Le royaume de Norad vous a laissé tomber, vous a toujours considéré comme une simple barrière remplaçable. Il avait tord, et vous ne lui devez plus rien. Vous n'avez plus à vous plier à ses lois, à ses exigences, à son bon plaisir. A vous de bâtir votre avenir, de le choisir, de vivre par vous-même.
Ventuswill regarda les ruines sur lesquelles elle se tenait et soupira doucement.
_ Tu avais raison, Frey, elles sont tellement dépassées, ces lois… Peut-être avaient-elles une raison d'être quand elles ont étaient édictées, mais je ne crois pas que ce soit encore le cas. C'est bien qu'elles soient détruites, vous pourrez en écrire de nouvelles, propres à Selphia…
Frey sourit et inclina la tête, son regard remerciant la dragonne pour avoir prononcé ces mots devant la ville toute entière, pour que chacun sache que c'était un nouveau départ, à tout point de vue.
Frey s'avança vers le Dragon Divin et s'arrêta juste devant son museau.
_ Merci d'avoir ramené mon frère, je sais quel prix tu devras payer pour avoir quitté la ville, Venti.
_ Je ne l'ai pas quittée volontaire, Frey. J'ai tout fait pour rester et préserver ma vie, je ne mérite pas tes remerciements. Je n'ai comprit que trop tard mon rôle, que ce n'était pas à vous de vous sacrifier pour sauver ma vie, mais à moi de donner la mienne pour vous.
La princesse de Selphia la jaugea longuement du regard avant d'esquisser un sourire.
_ Alors tu es enfin digne d'être appelée déesse, Venti.
La divinité releva la tête et contempla sa ville. Elle ferma les yeux et relâcha tout ce qui restait de son pouvoir, bénissant cette terre qu'elle avait mit tant de temps à aimer, la fertilisant pour toutes les années à venir, aussi longues soient-elles. Elle leur offrit tout, et consuma ce qu'il lui restait pour les protéger, pour que plus jamais des individus mal intentionnés puissent s'infiltrer entre leurs murs, ou que des bombes venues du ciel détruisent tout ce qu'ils avaient construit.
_ Puissiez-vous tous être heureux. J'aurais souhaité vous connaitre, mais c'est mieux ainsi. Si je vous avais connus, je n'aurais pas put vous quitter, et de nouveaux Gardiens auraient été forcés de sacrifier leurs vies. Vivez à présent, c'est l'unique souhait que je formule pour votre ville. Vivez, aimez… n'est-ce pas la chose la plus essentielle en ce monde ?
Ventuswill s'étiola comme sous l'effet d'un souffle de vent, disparaissant comme elle aurait dû le faire bien des siècles plus tôt. Elle pensa aux Gardiens qui lui avaient permit de vivre jusqu'à ce jour, un monstre, un humain, une elfe, un homme-bête, toute la diversité de la vie. Elle pensa à tout ceux qui les avaient connus et les avaient perdus par sa faute. Elle espéra que ses dernières paroles leurs parviendrait, confiées au vent et au temps.
_ Merci… Je suis désolée…
_oOo_
_ Et maintenant, qu'est-ce qu'on fait ?
Lest regarda les habitants de sa ville sans relâcher la main de Vishnal. Ils s'interrogeaient, encore sous le coup de la disparition de Ventuswill après son ultime bénédiction, peut-être la seule qu'elle ait accordée au monde.
_ Vivons, aimons. Ventuswill a raison, c'est ce qu'il y a de plus important en ce monde. Nous avons assez souffert, assez haït, assez perdu. Reconstruisons notre ville, écrivons nos lois, replantons nos cultures, pleurons nos morts et célébrons nos vivants. Laissons la vie reprendre ses droits. N'oublions jamais ce qu'il s'est passé, parce que si l'on oublie, les mêmes erreurs se répéteront à l'avenir… nous sommes déjà capables de les répéter même en nous rappelant…
Et c'est ce qu'ils firent.
_oOo_
Les jours passèrent et, rapidement, les chantiers de reconstruction fleurirent dans toute la ville. Les soldats Sechs fais prisonniers avaient été réquisitionnés pour rebâtir ce qu'ils avaient contribué à détruire ; mais dans le fond, bien peu s'en plaignaient. Ils étaient nourris, logés et Lest leur avait promit de les renvoyer chez eux une fois les plus gros chantiers terminés. Ce dernier point les faisaient travailler ave un zèle excessif, mais après tant de temps loin des leurs, ils n'aspiraient qu'à retrouver leurs foyers.
Dans ces premiers jours, Lest s'attela à un chantier non moins épuisant, mais administratif. Il envoya un message au Grand Roi de Norad, l'informant de la disparition de son fils Arthur durant la prise de Selphia. Ni lui, ni Doug n'étaient revenus, pas plus que leur dirigeable. Lest s'en voulait, c'était lui qui les avait entrainés dans cette expédition funeste. Annoncer à un père que son fils était présumé mort n'était pas facile, surtout lorsqu'il fallait annoncer dans la même missive que Selphia faisait cession de Norad et déclarait son indépendance totale après un vote de chaque habitant qui n'avait laissé aucun doute quant à leur volonté de s'affranchir d'un pays qui n'avait pas levé le petit doigt pour les aider.
Lest ne doutait pas que le Grand Roi de Norad refuserait cette indépendance, sans comprendre que la ville ne lui laissait pas le choix.
Le jeune prince se renversa sur son siège en soupirant. Puisqu'il ne restait rien du palais, il travaillait dans le restaurant de Porcoline, dans le bureau que le cuisinier avait autrefois mit à disposition d'Arthur. La porte s'ouvrit doucement et Vishnal passa la tête par l'entrebâillement. Le majordome aidait essentiellement dans la pièce d'à côté à s'occuper des derniers blessés, tout en assistant Lest avec ses paperasses.
_ Lest, Arnaud vient de recevoir la réponse que tu attendais de Sechs.
_ J'espère que c'est une bonne nouvelle…
Vishnal sourit et entra, refermant la porte derrière lui. Il rejoignit son prince et lui tendit une lettre qui avait visiblement beaucoup voyagée, se postant derrière lui, les mains sur ses épaules nouées. Il aurait put lui reprocher de trop travailler, mais ça aurait été ironique de sa part, alors il ne dit rien.
_ Bon… Les nobles Sechs que j'ai contactés sont d'accord, difficilement, mais d'accord.
_ Alors nous allons conclure des accords commerciaux avec eux ?
_ Oui. C'est l'indifférence de Norad au dénuement de Sechs qui a provoqué cette guerre, alors je refuse de reproduire la même erreur. Nous ferons de notre mieux, et ne ferons de commerce qu'à hauteur de nos moyens, mais je pense que nous serons tous gagnant. Les terres de Selphia sont vastes et, grâce à Ventuswill, très fertiles. Nous essuierons quelques plâtres, d'un côté comme de l'autre, mais je pense que nous finirons par trouver notre équilibre. Les Sechs le comprennent.
_ Auront-ils un nouveau souverain ?
_ C'est en ça que les nobles n'arrivent pas à se mettre d'accord. Ils veulent tous leur part du gâteau. Ça ne tiendrait qu'à moi, je leur proposerais Arnaud. C'est un homme intelligent qui a à cœur de bien faire, qui aime son peuple et a apprit à respecter les autres. Mais Sechs n'est pas mon pays, et il ne m'appartient pas de décider à leur place. Je peux les aider, mais pas les materner. C'est au peuple d'un pays de décider dans quel pays il veut vivre, c'est donc aux Sechs d'assurer l'avenir de Sechs ; tout comme il appartient aux habitants de Selphia de décider des lois de leur ville.
_ En parlant de lois, l'établissement des nouvelles avance bien. Nous sommes d'accord pour que Selphia soit une ville cosmopolite et égalitaire, c'est bien beau sur le papier mais ça sera plus difficile à mettre en œuvre. Mais je suis confiant, nous avons tellement perdus qu'une vie est une vie, aujourd'hui, peu importe son espèce, sa durée de vie ou son penchant amoureux. Oural et Mistral sont à l'origine de ce dernier point, tu t'en doutes. Je l'aurais proposé, cela dit. Nous attaquerons la justice au prochain conseil, savoir les sanctions des criminels, des voleurs, des violeurs… ça sera un gros chantier.
_ Nous y arriverons… Je vais destituer Forte de ses fonctions.
Vishnal hocha la tête sans se laisser déconcentrer par ce changement de sujet. Forte s'était aliéné une bonne partie de la ville durant son occupation, elle qui n'avait rien fait. C'était à Arnaud qu'allait désormais l'affection des citoyens. Aucun n'oubliait qu'il les avait trahis, mais aucun n'oubliait non plus qu'il avait risqué sa vie pour eux. Ils ne pouvaient pas en dire autant de Forte. Elle qui avait été adulée ne pouvait plus marcher dans la rue sans se voir adresser des regards noirs et des doigts accusateurs, certains même allant jusqu'à l'insulter ou lui cracher au visage.
Lest reposa la réponse de Sechs sur le bureau et posa sa main sur celle de Vishnal toujours appuyée sur son épaule. Il leva les yeux vers lui et sourit.
Rien n'était encore parfait, mais la ville se remettait doucement ; et eux aussi. Le majordome se pencha et embrassa son prince avec douceur.
_oOo_
Forêt du Yokmir, 7ème jour de l'Eté…
Frey vérifia que les chaines retenant le tronc d'un arbre fraichement abattu étaient solidement arrimées à ce dernier, puis qu'elles étaient bien attachées au harnais de Dylas. Sous sa forme équine, il n'avait pas son pareil pour débarder du bois, bien plus intelligent qu'un simple cheval de trait. Ils travaillaient avec les bucherons et les autres débardeurs pour ramener des arbres en ville, où ils seraient utilisés pour rebâtir tout ce qui devait l'être.
_ Ça m'a l'air bon… on peut y aller, Dylas !
La princesse de Selphia empoigna une charrette sur laquelle étaient entassés des morceaux de bois plus petits qui serviraient au moins pour le chauffage et se mit en marche avec Dylas trainant le tronc derrière lui.
Ils approchaient de la porte de la ville gardée par Arnaud lorsqu'un appel fit pointer les oreilles de Dylas vers l'arrière. Frey se retourna et plissa les yeux. Elle les écarquilla finalement, laissant échapper sa charrette dont les poignées heurtèrent le sol avec un bruit sec.
Deux silhouettes sortaient des bois, appuyée l'une sur l'autre pour s'aider mutuellement à marcher. Leurs vêtements étaient sales, usés jusqu'à la trame, déchirés par endroit, leurs chaussures témoignaient d'une marche interminable depuis de longues, très longues journées… mais leurs sourires étaient de ceux qu'arbore un visage enfin de retour chez lui.
_ Impossible… Doug ! Arthur !
