Disclaimer : Cette histoire n'est que de la fiction.


Cela faisait maintenant douze jours que Till avait déserté de chez lui et personne n'avait de nouvelles. Apparemment, une violente dispute avec sa copine Tara l'avait poussé à partir sans prévenir personne et elle-même n'avait donné aucun détail, partie également ce jour-là. Depuis le mois dernier déjà, Till était teigneux et facile à provoquer alors que jamais il n'avait été comme ça. Mais cette fois, une rumeur courait dans son entourage selon laquelle il aurait porté la main sur elle. Cette rumeur, Richard en était furieux et comme remonter à la source était impossible, il avait décidé de partir à la recherche de son meilleur ami.

Par vengeance ou désintérêt, Tara avait laissé la clé sous le tapis du porche. Scandalisé alors que n'importe qui aurait pu cambrioler ou vandaliser la maison, Richard décida de la garder pour la rendre en main propre à Till. Il avait d'abord vérifié ses affaires personnelles, non sans se sentir coupable d'entrer dans son intimité pour y fouiller. Ses passeports étaient là, ses valises aussi et la plus grande partie de ses vêtements restait rangée. Richard savait de quelle façon Lindemann rangeait ses affaires. À en juger par celles manquantes, il avait pris de quoi tenir un long moment en pleine nature, loin des humains, du bruit et des conflits. En effet, le fond de son dressing était réservé à ses équipements de marche et de survie. Et plus rien ne s'y trouvait.

- Till, qu'est-ce que tu fabriques ? se questionna Richard.

Il décida par instinct protecteur d'envoyer un message à son ami.

- Salut mon frère ! Même si tu ne veux pas faire la causette, dis-moi au moins que tu vas bien. Ton absence inquiète tout le monde.

Ce fut volontairement court, mais il espéra ainsi qu'en ne le harcelant pas de questions dès le début, il réussirait à engager un peu la conversation. Peut-être même que son ami lui donnerait sa position plus tard ! Mais malgré le fait qu'il lui eut laissé du temps, il n'obtint aucune réponse. N'étant pas un aventurier ni un fanatique des espaces sauvages, Richard se força dans l'intérêt de son ami. Sans avoir le matériel adéquat, il décida d'aller explorer le plus proche territoire connu où Till se rendait durant les périodes difficiles de sa vie, afin de se recentrer sur lui-même. Au vu de la situation, il espéra que Till n'était pas retourné au Breitenberg comme il l'avait fait il y a longtemps. "Non, c'est trop loin de Berlin" pensa t-il avant de se souvenir d'un endroit en particulier.

Étant donné la distance séparant la civilisation de l'endroit ciblé, Richard dut repasser par chez lui pour prendre des provisions. En effet, trouver un point précis en pleine nature était une chose, mais retrouver un homme sur une étendue de plusieurs dizaines de kilomètres en était une autre. Surtout avec une route impraticable. Till aimait la nature alors le camping, la chasse et la pêche étaient des activités qui lui permettaient de se sentir vivant. À d'autres occasions, cet isolement lui apportait le calme et l'inspiration nécessaires lorsqu'il se remettait à écrire.

ooOOoo

Reconnaissant que son GPS lui eut permis de trouver le territoire, le plus dur resta à faire pour Kruspe. Montagne, forêt, rivière et plaine... Till avait vraiment tout ce qu'il lui fallait s'il était dans le coin. Il força sur sa vue afin de repérer n'importe quel véhicule tout-terrain à l'horizon. Après une heure à tourner en rond en gaspillant son carburant sans que cela ne porte ses fruits, Richard pensa à rentrer chez lui de peur de tomber à sec au milieu de nulle part. Mais alors qu'il balaya une dernière fois la zone, il émit un hoquet de surprise et de soulagement lorsqu'il aperçut le gros véhicule de son ami, garé à l'orée de la forêt. Il s'empressa de remonter dans sa voiture pour rejoindre le 4x4 mais une fois arrivé, il ne trouva ni Till ni ses affaires. La forêt étant petite, il décida d'attendre au cas où son ami serait parti chasser et longea la partie tournante de la forêt. Comme si la chance était avec lui, il y trouva son bivouac. Till étant un amoureux des immersions en pleine nature, cela n'avait rien d'un campement de fortune, d'autant qu'il en avait pour plusieurs jours.

Son meilleur ami était assis sur un tronc partiellement enterré, à boire ce qui semblait être un café vu le matériel au sol. Par habitude, il portait des vêtements discrets et adaptés à l'environnement. Un bonnet fauve, un bermuda camouflage par-dessus un legging thermique, ainsi qu'un épais blouson noir dissimulant probablement de quoi rester au chaud. Cependant, il était pieds nus. Peut-être venait-il de se réveiller ou bien aimait-il être ainsi ! Sans douceur, Till posa sa tasse et se leva en attrapant un sac sur sa droite, puis il s'éloigna jusqu'à disparaître de la vue de Richard. Ce dernier s'avança et en profita pour passer en revue l'attirail de camping de son ami.

La tente était encore plus grande qu'elle ne le paraissait de loin, et il avait tout pour être à l'aise à l'intérieur. Son arc ainsi que quelques couteaux de chasse étaient posés sur son sac de couchage, probablement laissés à portée de main au cas où il aurait besoin de s'en servir. L'épaisse couverture à côté devait être une sécurité en cas de froid intensif. Il y avait ensuite un réchaud pour les temps difficiles, avec un set d'ustensiles en inox emballé dans une mallette non fermée. Au fond trônaient deux grands sacs : le premier avec des vêtements et une bassine pour leur lavage, le second avec des provisions en boîtes, et pour finir quelques magazines masculins. À l'extérieur, il y avait son feu de camp et de quoi faire lui-même du café. "Franchement mon vieux, je t'admire" pensa Richard. Il savait à quel point Lindemann aimait la nature, mais de là à être si débrouillard et en confiance avec les éléments... Et ce ne fut pas fini.

Richard emprunta le même chemin que son ami afin de le retrouver, mais peut-être un peu trop tôt. En effet, il l'aperçut de dos et dans le plus simple appareil. Ses vêtements posés dans l'herbe, Till était tout simplement en train de braver le froid pour se laver au bord d'une rivière. Richard déglutit et devint aussi rouge que la peau de Till, bien sûr pour des raisons différentes. Malgré son âge, Till avait un corps magnifique et Richard en était intimidé. Malgré la température, le chanteur faisait ce qu'il fallait et prenait son temps pour se savonner sans trembler. Il semblait aussi à l'aise que sous sa propre douche, sans négliger aucune partie de son corps. Vraiment aucune ! Richard le constata lorsque la main de son ami nettoya une longue partie de son corps. Kruspe reconnut sans mal ce mouvement que tout homme pratiquait pour son lavage... ou pour autre chose. "Qu'est-ce que je fais ?" pensa t-il. Il venait de réaliser qu'il observait son meilleur ami en s'humidifiant les lèvres, alors que son bas-ventre était en train de prendre feu. Au moment où il songea à retourner au camp pour respecter l'intimité de l'autre homme, ce fut lui qui se tourna. Lorsque Till l'aperçut, il se figea tel un fauve apercevant sa future proie. Sans prononcer un mot, son regard suffit à convaincre Richard de ne pas prononcer un mot de travers. De peur de se faire reprocher d'avoir dérangé son séjour tranquille, Richard eut un sourire gêné et le salua de la main. Mais en voyant qu'il restait sans réaction, il s'inquiéta et fit un pas en avant.

- Mais bonjour à toi aussi !

Un autre pas en avant face à celui qui ne chercha même pas à se couvrir. De toute façon, son regard inquiéta tant le guitariste que sa nudité lui était maintenant égale.

- Si tu veux bien, ne me balance pas ton regard de chasseur parce que j'ai l'impression qu'il va falloir que je me mette à courir.

Le regard soudainement meurtrier de son ami l'obligea à déglutir.

- Ou alors si tu comptes me tuer, fais-le vite et sans douleur.

Alors qu'il s'attendit à être poursuivi par un Till dénudé et furieux, Richard fut estomaqué de le voir recommencer à se savonner sous ses yeux. Et pas n'importe quelles parties... le torse et le sexe, probablement pour lui faire comprendre qu'il n'aurait jamais du s'immiscer dans son intimité. Un peu trop lentement d'ailleurs. Après avoir ri en rougissant de nouveau, Richard lui fit un signe de la main et décida de retourner au camp pour l'attendre.

ooOOoo

Près de vingt minutes plus tard, Richard était assis sur le tronc près de la tente. Les yeux fermés, il était en train de savourer la chaleur du soleil sur son visage avec les bruits alentours. Il commençait à se rendre compte des raisons qui faisaient que Lindemann aimait tant la nature, grâce aux bienfaits apportés par celle-ci. Il ressentait cette plénitude que devait ressentir son ami. Lorsqu'il entendit des pas, il ouvrit les yeux mais ce fut une erreur car la clarté du ciel lui sauta violemment aux yeux. Il vit revenir son ami près du camp, à moitié revêtu seulement. Bien qu'il avait bon nombre de questions à lui poser, il évita de le harceler alors qu'il avait déjà interrompu sa recherche du bien-être. Il alla tout de même à sa rencontre pour le saluer, exprimant son soulagement de le revoir et faisant retomber la pression des derniers jours.

- Viens par ici ! murmura t-il en l'étreignant.

- Salut Reesh ! lui rendit Till.

Kruspe ressentit de nouveau cette peur liée à son ami et le serra encore plus fort, ce que Till sentit sans rien dire.

- Je t'en supplie, ne me refais plus un coup pareil.

Lorsque l'odeur du savon sauta au nez de Richard, il repensa sans le vouloir à la semi-nudité de l'autre homme contre lui. Il recula avant de laisser son regard s'attarder sur son torse, ce qui donna à Till l'occasion de l'embêter.

- Vu la façon dont tu rougis, ça n'a pas l'air de te déplaire.

Alors que son meilleur ami s'amusait de son embarras, Richard s'énerva et lui pinça un téton pour se venger.

- Aïe ! Petit con...

- Bien fait, fallait pas plaisanter avec ça. Je parlais de ta façon de disparaître des radars. J'ai eu très peur.

- Je crois être un adulte responsable, non ? Je n'ai à demander l'avis de personne pour découcher ou griller un fusible.

- Ça fait bien longtemps que tous tes fusibles sont grillés. Non mais c'est vrai, demande-toi au moins si ça ne va pas faire plus peur à certains qu'à d'autres.

Till regarda son ami, surpris de constater cette peur en question. Il savait se débrouiller en pleine nature, il l'avait prouvé il y a longtemps. Lorsqu'il interrogea son meilleur ami du regard, ce dernier répondit immédiatement :

- Je parle des conditions. Après ce que Tara a balancé sur ton compte...

Il échappa immédiatement à son regard avant de s'asseoir sur le tronc, refroidissant l'atmosphère. Alors c'était ça ? Pensait-il qu'un homme accusé pouvait disparaître dans le but d'en finir s'il était désespéré ou acculé ? Néanmoins, il resta silencieux et Till dut parler à sa place. Se posant à ses côtés, il perdit son regard sur les cendres.

- Tu ne me poses pas la question ?

- À propos de quoi ?

Ayant remarqué que le guitariste avait tendance à s'humidifier la bouche, Till lui tendit une gourde pleine d'eau posée à sa droite. Il était vrai que Richard avait fait une longue route pour le retrouver et avait besoin de s'hydrater.

- De si j'ai oui ou non cogné Tara !

Richard tiqua à ses mots. Avalant trop vite quelques gorgées de la gourde de son ami, il fit la grimace après s'être s'étouffé et toussa. Alors que Till lui tapa dans le dos, il répondit :

- Mmm... je ne demanderai pas ce que je sais déjà.

Hésitant, le chanteur tourna un regard triste dans sa direction, persuadé que Richard devait le pointer du doigt comme les autres. Pourtant, ce dernier sourit et lui ébouriffa les cheveux en lui passant une main dedans.

- Aussi chiantes qu'elles peuvent l'être de temps en temps, jamais de la vie tu ne lèveras la main sur une femme.

Voyant son ami lui envoyer un regard qui semblait à peine croire en sa confiance, Richard s'approcha entièrement de lui et lui passa les bras autour du cou.

- Tu es un homme bien.

Patientant pour contempler ne fut-ce qu'un sourire sur son visage, Richard changea de sujet et lui demanda de quelle façon il occupait ses journées lorsqu'il se coupait du monde.

- Tu es trop matérialiste, mon vieux. On dirait que tu ne serais plus rien sans ta guitare ! Crois-moi, il y a des tonnes de choses à vivre à l'état sauvage.

Till commença par lui faire un topo sur le matériel indispensable pour vivre en pleine nature : météo, soins, hygiène, alimentation, armes, sécurité, observation... tous les domaines furent abordés. Sur des terres à risques, il ne restait jamais longtemps au même endroit, étudiait les environs et faisait ce qu'il pouvait pour tenir les prédateurs à distance. Alors que Richard pensait que l'aîné devait s'ennuyer et rester sans rien faire par manque d'occupations, il resta bouche bée.

- Tu sais que je ne vais pas repartir si tu me le demandes, hein ?

Fixant son ami, Kruspe hocha la tête. Till était aussi têtu que lui et réagissait très mal lorsque quelqu'un s'immisçait dans ses activités, fut-il un enfant ou un ami. Alors soit il repartait seul maintenant et recommencerait à s'inquiéter une fois rentré, soit il restait avec lui malgré son manque d'affaires et d'expérience. Concernant la sécurité, il lui restait sa voiture et il demeurerait à l'intérieur pour dormir.

Cependant, Lindemann ne sembla pas enclin à le laisser faire lorsqu'il lui en parla.

- Richard, c'est dangereux de dormir dans une voiture. Tu ne peux pas bouger et les sièges sont durs. Je te rappelle que ton dos a tendance à faire des siennes, tu as besoin...

- Ça va, j'ai compris ! coupa Richard.

Till vit ses sourcils froncés et compatit. Il savait à quel point Richard était complexé par ses problèmes de dos. En tant que guitariste, il craignait que son mal ne l'handicape au point de ne plus pouvoir monter sur scène. Et Till le savait, Richard n'avait rien d'autre dans la vie que la guitare. Mais le point sensible étant touché, il rattrapa son ami au moment où il le vit repartir en direction de sa voiture.

- Mon vieux, attends ! Je n'ai pas évoqué tes douleurs pour te vexer ou te pousser à partir. Je ne plaisanterai jamais avec ça. Rick !

Il fit pivoter le plus jeune vers lui et constata qu'il évitait son regard, les lèvres serrées en regardant ailleurs.

- Tu peux rester avec moi, ta présence ne me dérangera jamais. Mais je ne veux pas que tu dormes dans ta voiture. Ma tente est assez grande pour accueillir quatre personnes alors tu ne vas pas me prendre de place.

Son ami ne répondit pas immédiatement. Il était en train de faire retomber la pression apportée par le mauvais sujet de discussion. Néanmoins, il répondit à la douce étreinte donnée par Till. Il lui donna ensuite un bisou sur le front avant de le ramener, lui servant un café.

- Je vais quand même finir de m'habiller ! dit Till.

Hochant la tête, Richard demanda non sans ironie :

- Tu as quoi de prévu pour cet après-midi ?

- Cet après-midi ? Il y aura un beau soleil mais je n'avais rien prévu avant ton arrivée. Alors aujourd'hui ce sera parlotte et relaxation, nous allons nous prélasser. Par contre, on bougera demain parce que je vais te faire visiter les environs. La forêt est plutôt petite mais tu as les montagnes, les plaines... et si on suit le petit chemin de terre par là-bas, ça passe entre les deux montagnes et mène à un très vieux village en ruines. Tu as un petit cours d'eau tout près, en plus de la rivière.

Impressionné, Richard retrouva le sourire. Till connaissait vraiment cet endroit par cœur et était comme chez lui, ce qui lui donna envie de le suivre.

- Ça marche !

- Tout d'abord, aucun portable pendant ton séjour. Cet après-midi, tu vas rester un peu allongé sans penser à rien. Strictement rien ! D'abord dans la tente, et ensuite au dehors. La tente c'est pour t'habituer à l'isolement et quand ce sera acquis, on le fera dehors. Ne t'en fais pas pour ton hygiène, j'ai un sac de couchage ou des couvertures. Je vais t'apprendre à te vider la tête, c'est le meilleur moyen de profiter de la nature. Parce que tu dois avoir la tête aussi pleine que tes...

- Pas un mot de plus !

Richard l'entendit rire après l'avoir coupé, sachant où cette conversation en serait arrivée avec lui. Il n'imposa aucune condition et lorsque vint le moment du déjeuner, il accepta de partager une conserve sans faire le difficile. Il voulait rester avec Till et ferait son possible pour ne pas le contrarier. Richard avait beau aimer cuisiner mais il n'était pas difficile en nourriture, et une boîte de temps en temps ne le dérangeait pas.

L'après-midi arriva aussi vite que le manque de loisirs se fit sentir pour Kruspe. Till lui donna chaque conseil à appliquer afin de se vider de toutes ses pensées négatives et envahissantes. Il lui enseigna ensuite plusieurs exercices de maîtrise de la respiration, y compris les anti-stress. Richard se sentit aussi secoué que vertigineux, signe que ces mouvements physiques effectués avec l'aide de son ami fonctionnaient. Ils restèrent assis sous la tente aussi silencieusement que possible. Rien d'extérieur à leur séjour ne fut évoqué : famille, travail, musique, fans... tout fut chassé de leur esprit. Lorsqu'il passèrent enfin au repos à l'extérieur, Richard se sentit si bien dans son corps et son esprit qu'il prit son meilleur ami dans ses bras pour le remercier. À la suite de ce même traitement en plein air, Till constata à quel point Richard semblait changé. Libéré des poids de la société et de sa vie personnelle. Sa démarche était plus lente, comme s'il craignait de faire un pas en avant au risque de "revenir en arrière". Till vint lui poser les mains sur les joues et le dévisagea doucement.

- J'ai l'impression d'être défoncé ! dit Richard en souriant.

Lui rendant son sourire, Lindemann répondit :

- C'est parce que tu te sens bien. Il faut veiller à rester comme ça et tu passeras le plus beau des séjours de détente. Viens, on va aller s'allonger un peu et essayer de dormir.

Alors que Richard n'avait jamais réussi à fermer un œil en plein jour, il y parvint sans problème. Cela lui permit de faire une petite sieste réparatrice aux côtés de son meilleur ami. Lorsqu'il se réveilla en milieu d'après-midi, il resta allongé le temps que Till ne se réveille aussi. Ceci fait, ils passèrent leur temps à discuter de ce que Till avait bien pu faire d'autre depuis son arrivée. Surtout, Richard voulut en savoir plus à propos de ses remèdes naturels contre les nerfs. Ils restèrent ainsi jusque dans la soirée. Après cela, ils dînèrent : une viande un peu trop fraîche pour avoir été rapportée de la ville. Puis vint l'heure d'aller se coucher, en tout cas pour Till. Sans pour autant prévoir de fermer les yeux tout de suite, Richard insista pour le rejoindre. Il n'osa pas le lui dire, mais il n'était pas rassuré à l'idée de rester seul dehors. Cependant, il put constater à quel point l'aîné était à l'aise dans ce monde. Il lui fallut moins d'un quart d'heure avant de se mettre à ronfler. Non seulement Richard mit près de deux heures, mais il perdit du temps à se perdre dans des pensées négatives en raison de leur isolement. En pleine nuit, Kruspe se réveilla en sursaut. Pensant qu'un animal rôdeur en était la cause, il se retrouva immobilisé et paniqua à cause de tous les bruits nocturnes. Il n'était pas comme Till, il en eut la preuve frappante en cet instant. L'autre homme dormait encore alors que lui n'allait plus fermer un œil. C'est alors qu'un claquement lointain semblable à une porte de voiture se fit entendre. Richard sursauta violemment et jura :

- Putain !

Il en réveilla Till, et alluma une petite lampe de poche. Ce dernier dut se montrer à la fois ferme et paternel pour lui montrer que rien ni personne ne rôdait autour d'eux. Mais voyant que Richard s'agitait de plus en plus violemment sous la peur, Till proposa de sortir afin qu'il revienne lui prouver qu'ils étaient seuls dans le coin. Doublement paniqué, Richard refusa. Lindemann décida alors de procéder avec des mots rassurants et vint se coller à lui.

- Tout va bien, on est seuls toi et moi. C'était un bruit proche, selon toi ?

Le plus jeune, tétanisé à l'idée de faire le moindre bruit, ne put que dire "non" avec la tête.

- Alors ce n'est rien. J'ai planqué quelques projecteurs automatiques qui s'allument dès que quelqu'un approche ma voiture, et tu vois bien qu'il fait toujours noir ! Ils ne se sont allumés qu'une seule fois depuis mon arrivée, et c'était à cause d'une biche. J'ai laissé une partie de mes ustensiles dehors et comme ils sont légers, il y en a peut-être un qui a bougé avec le vent, et c'est le bruit que tu as du entendre.

Souriant lorsque Kruspe accepta cette possibilité, Lindemann lui tapa doucement sur l'épaule.

- Tu n'es pas un homme de la nature.

Se sentant mieux, Richard retrouva le courage de s'exprimer.

- Ce n'est pas ça, mais la nuit... j'ai toujours eu peur. Quand je suis seul dehors la nuit et qu'il y a des bruits comme ça, je panique, chez moi aussi. Je ne peux même pas sortir mes poubelles si je les ai oubliées parce que les insectes font des bruits forts.

"Oui, et tu t'es senti seul puisque je dormais" pensa Till, compréhensif.

- Ça s'appelle la nature, mon vieux, ces petites bêtes ne font que mener leur propre vie. Allez, allonge-toi contre moi et fais un câlin à ton grand frère.

Richard s'exécuta tout en souriant légèrement.

- Fous-toi de moi, vas-y !

Il s'endormit plus facilement contre la présence imposante et rassurante du chanteur. Cette fois, son sommeil fut plus long et plus serein... jusqu'à ce qu'un autre bruit ne le réveille. Pour ce qu'il put entendre, quelque chose remuait et cela avait une respiration sifflante. "Reste calme, c'est juste un reflet de ton rêve parce que tu t'es réveillé trop vite" pensa Richard, dans le but de se rassurer. Pourtant, il entendit un son beaucoup plus net et qui le mit sur la voix. Une sorte de grognement, mais émanant de Till. Peut-être faisait-il un cauchemar ! Richard hésita quant à savoir s'il devait ou non le réveiller, puis le bruit changea et devint de moins en moins rassurant.

à suivre...