Le guitariste tendit une oreille très attentive vers ce bruit qui n'était pas loin d'une plainte. Il crut à un cauchemar et envisagea de se tourner vers son ami pour le réveiller au prochain couinement, mais d'autres sons plus nets se firent vite entendre, vocaux mais aussi corporels. Soudain, Richard comprit et écarquilla les yeux. Étant un homme, il aurait du reconnaître ces bruits plus tôt : Till était en train de se masturber. Et sans lui faire grâce de ses sensations ! Richard reconnut également des claquements dus à un lubrifiant. Bien qu'il s'abstint de l'interrompre, il savait que la petite activité nocturne de Till allait l'empêcher de se rendormir. Il le sentait, mais il savait aussi qu'il n'avait pas à déranger cet homme alors qu'il l'avait déjà interrompu dans son voyage tranquille. Par contre, l'amusement de Kruspe était en train de se muer en excitation sexuelle car son ami le croyant endormi, il marmonnait en se touchant. Le musicien referma les yeux et tenta alors de l'ignorer et de se vider la tête comme Till le lui avait appris, non sans mal dans ces circonstances.

Le lendemain, Richard émergea d'un bon sommeil mais n'ouvrit pas les yeux tout de suite. Il aperçut une légère éclaircie matinale au travers de ses paupières, bien que probablement atténuée par l'opacité de la tente. Étonné d'avoir pu passer une nuit en pleine nature, il se promit de remercier son ami pour ses conseils et sa compagnie rassurante. D'ailleurs, il resta sans faire de mouvement lorsqu'il sentit qu'une de ses mains était encore sur Till. "J'ai du me replaquer contre lui en dormant" pensa t-il, à l'aise. Cela lui arrivait très souvent lorsqu'il dormait avec une femme, Richard avait besoin de se sentir accompagné. Il remua légèrement sa main sur le ventre en pressant et caressant doucement la veste, par simple douceur matinale. Pourtant, un détail le laissa perplexe : sa main parut trop basse par rapport à leurs corps à tous les deux. Il décida d'ouvrir les yeux et réalisa avec horreur que ce n'était pas le ventre de Till. En effet, sa main n'était pas du tout dans la zone du tronc. Il l'avait posée sur le sexe de son ami pendant son sommeil. Il resta paralysé à cette vue. Pour en ajouter à sa confusion, il releva très lentement la tête pour vérifier que Till dormait, mais ce ne fut pas le cas. Il n'eut donc aucun espoir d'enlever sa main discrètement, d'autant que Lindemann le regardait. Évidemment ! Pourquoi espérer pouvoir être discret dans un moment aussi embarrassant ?

- Till !

Voyant toute sa vie défiler sous ses yeux, Richard devint rouge de la tête aux pieds. Il arracha sa main de là où elle se trouvait avant de se redresser vivement. Pire, il se demanda si l'érection sentie chez son ami était due à sa main dessus, ou bien si ses rêves y étaient pour quelque chose. Pourtant, Till resta calme.

- J'avais peur de te réveiller et que tu le prennes mal, je suis réveillé depuis au moins vingt minutes. Je pensais que tu finirais par bouger et que ta main glisserait, mais non. Mais tu sais, ce n'était pas désagréable pour moi... T'as du le sentir d'ailleurs ! Tu peux continuer, ça ne me dérange pas...

- Oh s'il te plait !

Le visage cramoisi, Richard ne sut plus quoi dire et l'aîné lui posa une main fraternelle dans les cheveux.

- On est entre hommes, Richard. Si tu veux un peu de franchise, qu'est-ce que tu crois que je fais quand je m'ennuie ici ?

Richard partagea un regard coquin avec lui mais demeura embarrassé. Cependant, il décida de retourner la taquinerie à son avantage afin de s'aider à reprendre contenance.

- Alors cette nuit, tu t'es subitement ennuyé.

Il afficha un sourire victorieux en se heurtant au silence. Sans rien assumer, Till se permit de jouer l'ignorant.

- Comment ça ?

- Ben oui, tu devais t'ennuyer pour passer par la case branlette !

Sachant qu'il était entièrement découvert, Lindemann tourna la tête à l'opposé en toussotant.

- Un petit plaisir de temps en temps, il n'y a pas de moment pour ça.

"Quelle pudeur ! T'as aucun regret en plus" pensa le guitariste en tournant la tête vers lui.

- Non, c'est sûr. Heureusement que j'ai pu me rendormir avant d'entendre le volcan entrer en éruption ! Ah ça te fait rire ?

Soudain, Richard tiqua et se mit à jeter des regards partout autour de lui. Voyant comme il s'agitait, l'aîné fronça les sourcils et l'arrêta d'un mouvement de la main, mais Richard s'expliqua :

- J'espère que tu as largué la sauce de ton côté et pas du mien.

Roulant des yeux, Till se rallongea sous l'absurdité de ses mots.

- Pour ton information, j'ai toujours des capotes sur moi alors je n'ai giclé d'aucun côté. Question d'hygiène, je ne me branle pas à nu dans ma tente. Mais là, il faudrait que tu arrêtes de parler de ça parce que tu m'as donné envie d'en réutiliser une.

Le soulagement que Richard avait commencé à ressentir laissa vite place à la surprise. Il tourna très lentement la tête vers lui.

- Tu insinues que je t'excite ? Enfin, plus que tu ne l'étais déjà ?

- D'abord tu me pelotes la bite et après tu me parles de branlette. Penses-y !

Richard grogna de se voir remémorer la première.

- Résultat, je suis prêt à remettre ça et même à tirer mon coup.

Faisant les gros yeux, Kruspe le pointa légèrement du doigt.

- Attends, tu es en train d'insinuer que tu veux me baiser là ?

- Pourquoi pas ? Il n'y a rien de vicelard là-dedans, c'est humain. Et puis tu serais toujours mon pote...

Richard fut troublé de voir à quel point le chanteur resta stoïque et à l'aise avec ses propres mots ainsi que leur impact sur lui, comme s'il évoquait la musique ou la famille.

- Tu n'as jamais eu envie de satisfaire tes pulsions avec la première personne à côté de toi ?

- Ça dépend ! Évidemment, ça change la donne si c'est une femme à côté. Mais ce n'est pas une raison pour se croire tout permis et vouloir sauter tout ce qui bouge.

- Rabat-joie !

Till plaqua sa tête sur ses bras en soupirant, réalisant qu'il allait trop loin avec son ami. Il ne lui avait jamais parlé ainsi, ni fait de tels sous-entendus. Il laissa le silence les mener au calme durant quelques secondes, puis s'excusa.

- Je suis désolé, ignore-moi. Quand je m'isole trop longtemps, il y a des moments où je ne suis plus vraiment le même. Je pense différemment, et je fais des choses que je ne ferais jamais d'ordinaire. Ou je dis des choses qui peuvent paraître tordues. Soit je suis normal, soit complètement dérangé. C'est juste que d'habitude, je suis seul alors il n'y a personne pour me le faire remarquer.

Acceptant ses excuses, Richard se replaça contre lui comme s'il venait de se réveiller. Surpris de sa réaction malgré ce qu'il venait de lui dire, Lindemann le regarda et le laissa faire.

- On a tous un côté dérangé qui sommeille en nous, ce n'est pas un drame ! dit Richard.

Il lui en donna la preuve à sa manière la seconde d'après en caressant son torse, aussi bien sur que sous les tissus. Till n'eut aucune réaction dissuasive, et Richard lui-même s'étonna de se sentir si aventureux. Mais il aimait bien ça et surtout, il tenait à ce que son ami ne se sente pas mal en sa présence. Alors autant se mettre à son niveau si cela pouvait le rendre plus communicatif avec Till durant son séjour. Après tout, tout cela n'était que le résultat de l'isolement. Till le regardait silencieusement dans son exploration, comme s'il se demandait si Richard était sûr de ce qu'il faisait. Il finit par se lécher la bouche en sentant le plus jeune s'allonger contre lui, juste sous son bras de façon à poursuivre ses gestes sans dérangement physique. Sous le t-shirt, Kruspe goûtait à une sensation inégalée dans sa vie. Il n'était pas homosexuel et pourtant, il aimait cela. La peau de Till était plus douce qu'elle ne le paraissait à l'œil. Alors pourquoi toucher un homme lui plaisait-il ? Parce que Till était réceptif ? Parce qu'ils étaient meilleurs amis ? Parce que Till avait sous-entendu être capable de le "baiser" parce qu'il l'avait excité ?

Après en avoir débattu dans sa tête, Richard admira sa stature en dépit de ses vêtements et de sa position allongée. Musclé, velu et chaud sous les tissus... Richard sentit son propre corps réagir et chercha davantage de sensations. Il passa au bas en glissant la main sur le membre caché de l'aîné, ce dernier étant très surpris par l'initiative. Richard remua la tête dans le cou de Till et commença à frotter sa main sur cette partie du corps. Remuant légèrement, le chanteur gémit inconsciemment et passa un bras derrière le cou de son guitariste. Richard commença à le sentir se toucher également et sut que s'arrêter maintenant serait égoïste de sa part. Il repassa une dernière fois sa main de haut en bas, avant de déboutonner le vêtement.

- Ri... Richard, ce n'est peut-être pas une bonne idée.

Le concerné regarda son ami dans les yeux, avant d'y voir du malaise. Souriant d'une façon mystérieuse, Kruspe lui murmura suavement :

- Je croyais que tu n'avais rien contre le plaisir solitaire.

Lindemann hocha la tête avant de sentir son membre pressé dans la main de Richard.

- Non, c'est vrai. Mais en général, c'est moi qui me branle. Si une personne se met à faire la travail à ma place, je vais avoir une chaude envie de la renverser, si tu vois ce que je veux dire.

Richard vit même très bien. En cas de seconde personne, Till passait cette fois par la case partie de jambes en l'air. Mais Richard eut une idée.

- Alors cette fois, c'est moi qui vais t'imposer une règle. La retenue ! Tu vas subir et laisser faire. Tu peux te toucher mais sans rien tenter en retour contre moi, tu restes allongé.

Frustré de se voir imposer des choses sous sa propre tente, Till haussa les sourcils en désespérant alors que l'autre homme rit. Le guitariste y vit là une abdication et après avoir entendu Till grommeler et prononcer à voix basse le mot "torture", il sourit et se repositionna de façon à abaisser sa main jusqu'à la hampe tendue dans le jean.

- Tu devrais dormir avec autre chose, ta peau ne respire pas là-dessous.

- N'empêche qu'un paquet bien emballé, tu as l'air d'aimer ça.

Cette fois, ils rigolèrent tous les deux.

- J'avoue que ça me plaît, sans trop savoir pourquoi.

Après un petit silence, Lindemann réfléchit.

- C'est de se retrouver entre hommes au milieu de nulle part. T'as vu "Le Secret de Brokeback Mountain" ?

Richard le pointa du doigt aussi vite qu'il eut un mouvement de recul.

- N'y pense même pas. En plus, ça ne fait qu'une nuit que je suis ici.

- Mais je plaisaaaante... viens par là !

Se moquant de lui, Till s'approcha et lui attrapa l'arrière de la tête avant de frotter son front contre le sien en le chatouillant. Écoutant son ami éclater de rire en gesticulant contre lui, il passa un long moment de purs et bons enfantillages avec lui. Il s'arrêta en repensant à la peur de Richard la veille et murmura :

- Au fait, et cette première nuit ? Si on excepte ma petite folie...

Kruspe se calma et reprit sa respiration avant de lui répondre.

- Franchement, ça a été. Tes exercices et tes conseils m'ont bien aidé pour passer la nuit, comme ta compagnie. Alors je te le rends à ma manière pour cette grosse envie que je constate en-dessous. J'irai nous servir un café après et on passera la matinée comme tu le décideras.

- D'accord ! Alors un bon lavement et après on ira chercher de la nourriture.

Cette fois, Richard se bloqua violemment, mais Till comprit pourquoi en voyant son visage. Après s'être ouvertement ri de lui, il lui secoua les épaules.

- Par lavement, je voulais dire lavage alors ne va pas imaginer le pire.

Soulagé, Kruspe laissa brusquement retomber sa tête sur sa poitrine. Mais alors que leurs regards se croisèrent avec un soupçon de vice, ils entendirent un petit éclat au dehors. Alors que Richard avait repris ses caresses, il stoppa et les deux se redressèrent immédiatement. C'était le même entendu durant la nuit et il mit son ami au courant, tout en le "grondant" de n'avoir pas pu le prévenir en temps réel puisqu'il était très occupé. Ne craignant rien le jour, il fut le premier à sortir de la tente, suivi de l'aîné qui n'avait pas envie qu'un étranger ne touche à ses affaires.

ooOOoo

À l'extérieur, leur frustration se mua en interrogation lorsqu'ils ne virent rien de différent par rapport à la veille. Aucun rôdeur en vue et rien n'avait bougé de place. Décidant de rester aux aguets, ils passèrent alors au café et s'installèrent sur le tronc pour le savourer.

Till termina le sien en premier, et proposa donc d'aller jeter un œil pendant que Richard terminerait son réveil fumeux. En réalité, Till savait que rien ne se passerait. Il était juste soucieux du bien-être de Richard, il voulait qu'il se sente en sécurité. Après tout, il en était de même pour le plus jeune, sinon il n'aurait jamais fait tout ce chemin pour le retrouver. Connaissant bien le coin, Till assura assez rapidement son tour de sécurité sans rien signaler de néfaste. Aucune activité considérable hormis quelques animaux se promenant. À son retour, Kruspe lui avait servi une seconde tasse.

- Merci vieux !

- Pas de quoi !

Till commença à le boire silencieusement à ses côtés en regardant le ciel changer de couleurs. Voyant son ami redresser son dos en tentant de se montrer discret, il eut une idée pour le mettre à l'aise. Il retourna dans la tente pour ramener une grande couverture très épaisse, afin de la disposer dans l'herbe. Ainsi, le guitariste pourrait à la fois boire et se rallonger s'il le souhaitait. La terre ici étant sèche, il n'y aurait aucun problème de souillure en s'asseyant dessus. À condition d'éviter les chaussures, ce qu'ils firent.

- Fallait pas, mec, merci. Au fait, tiens...

Richard lui tendit la clé de chez lui qu'il avait encore dans la poche. Ils laissèrent ensuite passer le temps tout en profitant de la vue alentour. Mais lorsque ce moment d'épanouissement s'acheva, celui à venir stressa légèrement Richard : le lavage à la rivière. Extrêmement pudique, ce dernier refusa au départ. Bien que l'aîné lui jura que s'il voulait ils pourraient le faire chacun leur tour, Kruspe refusa encore. Apparemment, ce n'était pas la présence de Till qu'il craignait, mais d'éventuels regards "extérieurs". Le tour de Lindemann dans les bois ne l'avait pas plus rassuré que ça. Till reporta alors son propre lavage et ils s'apprêtèrent pour aller en forêt. Néanmoins, il précisa à Richard qu'il n'aurait d'autre choix à leur retour que de passer par la rivière. Il ne fallait jamais négliger son hygiène en pleine nature.

- T'inquiète pas, je surveillerai. Mais je peux t'assurer que je n'ai vu personne.

Au moment du départ, Richard fixa son meilleur ami avec appréhension.

- Till, pourquoi tu prends ton arc ?

Un grand sourire aux lèvres, le colosse répondit :

- Il va falloir être silencieux parce que maintenant, mon cher Richard, nous allons chasser.

Il reprit doucement sa marche, laissant un Richard perplexe derrière lui.

- Euh...

Kruspe ne trouva pas ses mots, mais finit tout de même par le rejoindre. "Pourquoi pas ? Après tout, si on n'a rien trouvé après tous ces bruits au camp, c'est qu'il n'y a rien" pensa t-il.

Malheureusement, sa pensée - ou plutôt son envie - de ne rien voir partit en fumée. Après six minutes de marche silencieuse, un lièvre eut la malchance de sortir de son terrier pour partir à la recherche de nourriture. Till les avait amenés vers un endroit qu'il avait du repérer durant son petit tour. Alors que son instinct de chasseur se mit en marche, il demanda par des gestes à Richard de rester immobile et silencieux, puis il sortit lentement une flèche de son carquois. "Comment il se prend pour Robin des bois lui" pensa Richard, avant de rire un peu trop fort devant la concentration de Till. Le petit animal l'ayant entendu, il s'enfuit aussi rapidement que Till se retourna vers son ami.

- Tu plaisantes là ?

Richard sentit son heure sonner mais essaya de l'amadouer.

- Pardon Till ! Mais je t'ai vu avec ton arc et j'ai pensé à quelque chose qui m'a fait rire.

Agacé, Lindemann lui posa le haut de son arc sous le menton.

- Attends, tu comptes me la jouer à la Sissi ? Mon gars, je ne sais pas ce que tu veux avaler ce midi mais ne me prive pas de mon repas ou tu me le paieras.

Lorsqu'il y eut un petit bruissement de feuilles à peine audible derrière eux, Till sentit poindre une deuxième chance. Un autre lièvre, qu'il jugea comme étant d'une taille différente. Il jeta à Richard un regard qui lui fit comprendre ce qui l'attendait s'il recommençait son erreur. Puis il commença à pister le lièvre au loin pendant que le plus jeune resta sur place, fixant tristement l'animal. Alors que le chasseur le plaça dans son viseur en se léchant la lèvre, il attendit de voir si la pauvre bête était calme ou si elle les surveillait. Alors que sa flèche était sur le point d'être décochée...

- ATCHOUM !

Ce lièvre aussi partit en courant mais cette fois, il n'était pas près d'en revoir. Till ne put que faire les gros yeux en constatant que son estomac n'aurait pas droit à de la viande fraîche en présence de Kruspe. Alors que Till restait un peu trop immobile à son goût pour être rassurant, il "s'excusa" afin de l'amadouer encore une fois.

- Till ? Je ne l'ai pas fait exprès hein...

Sans pour autant le voir se retourner, il entendit :

- Richard !

- Oh oh ! murmura le concerné.

Il connaissait ce ton et opta pour la fuite à pleine vitesse en espérant ne pas être suivi. Malheureusement, il entendit Till le poursuivre tout en gagnant du terrain en raison des irrégularités liées au sol. En effet, le chanteur était mieux équipé et donc plus à l'aise que lui pour se déplacer dans la forêt. Il ne s'arrangea pour rattraper Richard qu'une fois au campement car par simple égard pour son dos, il préféra se retenir de la plaquer contre un arbre trop abîmé ou déformé.

Lorsqu'il arriva au camp, Richard se retourna rapidement et en voyant Till lui faire face avec un air menaçant, il eut un rire nerveux et se posa immédiatement sur la couverture que son ami avait posée au sol. Sans comprendre, ce dernier hocha la tête et Richard s'expliqua :

- On ne frappe pas un homme à terre, c'est lâche.

Effaré, Till fit tout de même un pas en avant pour lui faire peur, car ce fut la seule chose qui lui passa par la tête sur l'instant. Cette menace produisant l'effet escompté, cela obligea son ami à reculer jusqu'au tronc.

- Till ? Tu ne vas pas le faire ?

Partiellement vengé de voir sa peur, le chanteur serra le poing.

- Tu peux me dire comment tu survivrais si tu étais le dernier homme sur Terre ?

Surpris par cette question, Kruspe ne sut que répondre au départ. Il n'était pas végétarien mais compara ce fait avec ce qu'il venait d'empêcher.

- Alors là... pour être franc, je crois que je crèverais de faim ! admit t-il.

- Dois-je te rappeler que tu manges de la viande ?

- Je sais. Il faut croire que c'est dans ces moments-là qu'on réalise qu'on aime les bêtes. Je ne pourrais jamais en tuer moi-même, je ne veux pas avoir de sang sur mes mains. Ça ne te fait rien à toi ?

Ce fut au tour de Lindemann de garder le silence le temps de s'asseoir à côté de lui, où il ôta son bonnet beige en soupirant.

- Si, mais j'aime aussi la chasse. Je ne suis pas un boucher qui aime faire souffrir, je vise toujours de façon à tuer le plus rapidement possible. À chacune de mes escapades, je ne chasse qu'un seul animal. Si je le peux, parce que des fois il n'y en a pas. Et s'il y en a, ça m'arrive même de ne pas avoir de chance.

- Comme aujourd'hui, pas de chance.

Richard afficha un air satisfait sachant que c'était de sa faute, mais il sous-estima le calme de Till. Ce dernier s'était redressé de façon à le prévenir d'une "attaque" prochaine s'il continuait de le narguer. Pourtant le plus jeune se montra trop désinvolte et détaché.

- Richard, tu vas goûter au résultat de ta connerie.

- Mais tu as des boîtes, n'exagère pas ! insista le guitariste.

- J'ai le droit à un peu de chair fraîche de temps en temps. Et celle que j'aurai pu avoir, tu l'as faite fuir.

Richard laissa échapper un rire d'enfant. Lorsque son ami lui attrapa le col pour le faire taire, Kruspe se sentit comme un condamné à qui on laissait l'occasion de prononcer un dernier mot. Cela ne lui fit pas pour autant perdre son sourire narquois.

- Je m'en fous, j'ai sauvé une vie.

Blasé, Till ferma les yeux.

- Petit con, va falloir sauver la tienne maintenant.

Richard cessa de rire.

- Hein ?

Till se jeta sur lui en le renversant sur le sol, et l'immobilisa en lui grimpant dessus. Malgré la couverture, la tête de Richard toucha l'herbe et la terre. Momentanément grognon d'être ainsi sali, Richard se vengea en continuant de rire de la rancune de son meilleur ami. Mais Till trouva enfin sa vengeance : il redressa Richard et le conduisit à la rivière sans lui laisser son mot à dire. Le guitariste tenta de s'y soustraire par tous les moyens mais rien n'y fit. En à peine deux minutes, il grelottait déjà au bord de l'eau, dans le plus simple appareil et avec l'ordre d'utiliser tous l'équipement à ses pieds. Lindemann le retourna brusquement et savoura le profond malaise sur son visage, avant de lui écraser la joue avec un baiser.

- Mais Till, il fait froid...

Richard désespéra, debout et nu devant la rivière, les mains cachant son intimité.

- Il n'y a personne alors maintenant tu te laves. Ne fais pas la chiffe molle, c'est moins gênant que ça en a l'air.

Till conclut en lui mettant une claque sur les fesses.

- Arrête ça, Lindemann, je n'aime pas qu'on me touche le cul.

- Plus vite tu te laveras et plus vite tu te rhabilleras. Alors magne-toi ou je recommence.

Son ami entra assez difficilement dans l'eau mais eut le courage d'y rester. Till s'éloigna alors pour lui laisser son intimité, mais resta à vue au cas où. En effet, sous la paranoïa, Richard avait fini par approuver sa proposition. Bien qu'il savait ne pas être censé le faire, Till veillait sur lui en jetant un regard de temps et temps. Il eut raison de prendre cette initiative, car il remarqua que Richard avait du mal à se laver le haut du dos. Bien que faisant son possible, il était encore musclé mais avait pris un peu de poids avec l'âge. Il avait peur de faire des mouvements trop dangereux qui lui provoqueraient des problèmes pour jouer. Till l'entendit geindre à un certain moment et son bras revint rapidement vers l'avant, signe qu'il avait ressenti une gêne ou une douleur. Touché, Lindemann s'approcha doucement et ôta tous ses vêtements pour entrer dans l'eau. Après s'être approché de lui, il lui prit doucement les hanches. Bien que sursautant, le trouble prit vite le pas chez Richard.

- Shht... tout va bien. Donne-moi juste ton savon, je vais te nettoyer le dos ! murmura Till.

Bien que son ami hésita, il finit par le lui tendre, reconnaissant de son aide. Till s'occupa alors de lui savonner le dos et bien que Kruspe frissonna sous le premier contact, le fait de sentir ses doigts le parcourir en même temps l'aida à se sentir mieux. Sans oublier qu'il en ressentit un plaisir flagrant... très flagrant et qui le fit rougir. Heureusement pour lui, la rivière était suffisamment haute pour cacher son érection. Ceci fait, Lindemann lui conseilla de ne pas traîner et de vite se sécher pour s'habiller, afin de ne pas tomber malade. Puis il entama son propre lavage en mettant moins de temps, car étant habitué. Rejoignant son ami, il ne fut pas surpris de le trouver réfugié dans la tente pour s'habiller. Lorsqu'il y pénétra, essuyé mais en simple boxer et bermudas, Till lui fit un signe de la main.

- Merci Till, de m'avoir aidé.

- C'est normal.

Till enfila un t-shirt avant de se sécher correctement les cheveux, riant devant la lenteur de son ami. Richard demeurait méticuleux y compris en pleine nature. Une fois chaudement vêtus, ils s'allongèrent le temps que leur corps ne se remette à la bonne température. Lindemann ferma les yeux un instant, même lorsque son ami s'agita autour de lui. Lorsqu'il rouvrit les yeux, il tourna la tête vers Kruspe avant de froncer les sourcils.

- Non mais tu me cherches là ?

Richard éclata de rire en roulant sur le côté. Il n'avait rien trouvé de mieux à faire que de disposer neuf boîtes de conserve autour de la tête du chanteur.

- Alors choucroute ou fayots ?

- Tu sais quoi, Kruspe ? J'ai quand même de la barbaque à m'enfiler. Ce sera toi.

Le rire de l'autre homme s'arrêta instantanément et il tourna la tête vers lui. Mais trop tard ! Le chanteur le plaqua sur le dos et lui "passa dessus".

à suivre...