Hello !

Me revoilà avec un nouveau chapitre. Merci beaucoup pour vos commentaires ! C'est super gentil !

La suite de l'histoire se situe au niveau de l'épisode « entité », à la fin de saison 4. Certains événements ont été modifiés pour les besoins de l'histoire.

Bonne lecture à tous !

11

Sam serra d'un air décidé les lacets de ses rangers et se regarda dans le miroir.

C'était sa première mission off world depuis la naissance de Grâce et son retour de congé maternité.

Elle avait retrouvé la ligne et, grâce aux entraînements avec Teal'c, elle se sentait incroyablement en forme, abstraction faite de ce douloureux pincement au cœur qui ne la quittait pas.

Sam inspira profondément pour chasser la vague d'angoisse qui menaçait de l'envahir chaque fois qu'elle se revoyait déposer sa fille à la crèche de la base ce matin.

En fait, Grâce s'était très rapidement habituée et au bout de deux jours d'adaptation, elle ne pleurait déjà plus lorsque sa mère la quittait. Il faut dire que Janet se faisait un plaisir de passer voir l'enfant dès qu'elle avait un moment de libre… Cette assurance permettait à Sam de travailler plus sereinement au labo.

Mais aujourd'hui, elle allait repasser la porte des Etoiles pour la première fois.

Et être à quelques niveaux sous son bébé et à des milliers de kilomètres, ce n'était pas tout à fait pareil…

Pourtant, Sam avait conscience que si elle ne remettait pas immédiatement le pied à l'étrier, elle ne repartirait plus jamais en mission.

On toqua à la porte du vestiaire et Sam lança :

– Entrez !

Jack passa la tête dans l'entrebâillement pour s'assurer qu'elle était seule.

– Je suis prête, lui dit-elle avant même qu'il ne pose la question.

Il la toisa lentement, ses prunelles chocolat ne laissant rien transparaître de ses pensées puis, il s'écarta et lui tint la porte ouverte pour qu'elle quitte le vestiaire.

Avec un soupir, Sam le précéda vers la salle de contrôle.

– Tu sais que tu n'as qu'un mot à dire… murmura Jack, se mettant à sa hauteur pour éviter d'être entendu.

– Je vais bien.

– Je sais que tu vas bien, ce n'est pas la question, souffla-t-il.

Elle s'arrêta et lui fit face. Jack évita un instant son regard bleu si intense mais finit par lever les yeux. Elle le fixait d'un air résolu, même s'il savait que son cœur de maman tremblait dans sa cage thoracique.

Elle était forte. Il avait vu sa résistance à la douleur et même à la torture mais, là, c'était différent. C'était son bébé. Pourtant, elle était décidée à ne rien laisser tomber. Elle voulait tout. Et quelque part, quand il la voyait aussi déterminée, Jack se disait qu'elle avait raison.

Avec un bref soupir, il hocha la tête, vaincu :

– Euh… Ouais. On ferait mieux d'y aller, le Général nous attend pour lancer la sonde.

Sam s'installa à son poste et vérifia une dernière fois les données du MALP tandis que Walter entrait les coordonnées de P9C-372.

La Porte s'ouvrit en projetant son vortex instable et Sam se surprit à l'admirer.

Un petit frisson d'excitation la traversa.

Cela faisait vraiment trop longtemps !

– Paré au lancement de la sonde ! lança-t-elle.

Si les résultats étaient positifs, SG1 serait en train d'explorer ce nouveau monde dans moins d'une heure.

La sonde passa la porte et se rematérialisa de l'autre côté.

Derrière Sam, Daniel, Teal'c et Jack guettaient les premières images.

– Vous êtes tendu ? demanda Jack, étonné de l'attitude étonnamment crispée du Jaffa.

– Oui, vous paraissez soucieux, ajouta Daniel, soudain inquiet.

– Je ne suis pas tendu ou soucieux mais perplexe, répondit Teal'c.

– Pourquoi ? questionna Daniel.

– Les coordonnées de cette planète proviennent d'un des registres des Anciens.

Jack répondit par une moue, montrant clairement son peu d'intérêt pour la chose.

Les premières images de la sonde apparurent à l'écran et Daniel examina les arches qui se dressaient aux abords de la Porte.

– Cela ne ressemble à rien de ce qu'on connaît des Anciens. Architecture, technologie… C'est une tout autre culture…

Voyant l'air dépité de l'archéologue, Sam proposa :

– Mais, ce qu'on voit a peut-être été bâti après le départ des Anciens…

Le Général Hammond, qui venait d'arriver, jeta un œil aux images et demanda à Teal'c :

– Ça vous dit quelque chose ces édifices ?

– Rien du tout, j'en ai peur, répondit Teal'c tout en examinant les structures étranges en demi-lunes qui défilaient sur l'écran.

– C'est le décor d'Alien, déclara tranquillement Jack.

Il y eut comme un flottement dans la salle de contrôle et, face au regard perplexe de son équipe, il haussa les épaules et ajouta :

– Il y a un peu de ça, non ?

Un éclair subit frappa la sonde qui se mit alors à décoller du sol.

– Qu'est-ce qu'il se passe ? s'étonna Hammond.

– La sonde vole… Je crois… déclara Sam, jetant un regard indécis à Harriman.

– Elle n'a pas été conçue pour ça… grommela Jack.

– Eh bien, maintenant, elle vole, s'amusa Daniel.

– Ça serait sympa de m'informer de temps en temps, râla le Colonel.

– J'ai l'impression qu'on ne la contrôle plus, constata platement Teal'c.

– Vérifiez si elle répond toujours aux commandes, demanda Sam à Walter.

L'image se coupa brutalement mais la connexion avec la planète n'était pas interrompue.

– On capte une onde de fréquence élevée. Je crois qu'on devrait refermer le vortex et analyser cette sonde avant de poursuivre, conseilla Sam.

– Oui, entendu. Coupez la liaison, ordonna Hammond.

Comme en réponse à son ordre, des éclairs se mirent à jaillir des consoles et à rebondir sur toutes les surfaces.

– On a un problème de transformateur ! On est en surtension ! hurla Sam.

– Fermez l'iris ! ordonna Jack.

– Je ne peux rien faire, répondit Walter.

– Passez en manuel ! lui cria Sam tout en s'efforçant de récupérer le contrôle de la Porte.

Walter n'eut pas le temps de répondre qu'il était projeté en arrière par une brusque décharge. Il tomba lourdement de sa chaise et demeura au sol, inconscient.

Un nouvel arc électrique d'une rare violence traversa le clavier et brûla Sam à la main, l'obligeant à reculer tandis que l'énergie se propageait à travers tous les ordinateurs et ricochait, faisant griller les panneaux de contrôle.

– Je coupe au disjoncteur ! déclara Jack.

– Oui, répondit Hammond tout en examinant la main de Sam. Votre main, ça va ?

– Ce n'est rien, murmura-t-elle malgré la douleur.

Teal'c emboîta le pas de Jack jusqu'à la salle d'embarquement et, malgré le danger, tous deux parvinrent à abaisser les leviers du disjoncteur, coupant le courant dans toute la base et refermant enfin le vortex.

– Le court-circuit a carbonisé la moitié de nos terminaux, constata Sam après un bref passage à l'infirmerie pour soigner sa blessure.

– Quelle qu'elle soit, cette chose doit être neutralisée au plus vite, ordonna le Général.

Mais, tandis que Siler et Sam se mettaient à l'œuvre pour tenter de remettre le système en service, la forme de vie alien se mit à scanner les données des ordinateurs et à apprendre.

°O°O°O°O°

Jack trouva ça plutôt amusant lorsque l'entité se manifesta la première fois via la caméra de surveillance de la salle de briefing. Il s'agitait pour obliger la créature à suivre ses mouvements tandis que derrière lui, Daniel et Sam discouraient sur le potentiel que pouvait avoir une communication avec cette « chose ».

– Je crois qu'elle m'aime bien… blagua Jack.

Le Général Hammond leva les yeux au ciel. De son côté, il était plutôt désireux de se débarrasser de cet intrus pour sortir la base de la quarantaine dans laquelle cette entité les avait plongés. Il n'avait pas vraiment envie de jouer à chat avec cette créature.

Sam était plutôt de l'avis de Daniel. La créature paraissait douée de raison. À première vue, elle voulait les étudier et cherchait à entrer en communication avec eux.

– Nous pouvons déjà établir que ça fonctionne comme un programme informatique très envahissant mais aussi complexe qu'un brin d'ADN et que ça se développe et exige de plus en plus de mémoire, expliqua Sam.

Tant que cette chose n'avait pas un serpent dans la tête, ça ne dérangeait pas vraiment Jack…

– Débarrassez-moi de ça ! trancha finalement le Général, agacé par l'invasion de ce parasite plutôt encombrant qui risquait d'échapper à leur contrôle.

Daniel afficha une mine aussi déçue que contrariée Sam se contenta d'un simple :

– À vos ordres, mon Général.

Sage décision… Cela ne semblait pas être le moment de contrarier ce bon vieux Georges, songea Jack.

Tandis que Sam et Siler rebranchaient les ordinateurs et se préparaient à écraser tous les fichiers existants afin de restaurer le système à l'aide de la sauvegarde, Jack murmura à Sam :

– Je vais faire un saut à la garderie. Avec le courant réduit à l'éclairage d'urgence, les enfants doivent être effrayés.

– Bonne idée ! Embrasse-la pour moi, tu veux ?

Jack serra discrètement l'épaule de sa femme et prit l'escalier, en direction des étages supérieurs.

Lorsqu'il entra dans la garderie, les enfants pleuraient, reniflaient et le personnel semblait dépassé par les événements.

– Ah ! Colonel O'Neill ! s'exclama une des nounous en le reconnaissant. Savez-vous ce qui se passe ? Est-ce que la lumière va bientôt revenir ?

– Ils y travaillent. Ne vous inquiétez pas. Il n'y a pas de danger, tout est sous contrôle.

Il chercha des yeux le berceau de sa fille.

– Je peux ? demanda-t-il à la jeune femme qui se penchait pour prendre aux bras un petit garçon de deux ans, en larmes.

– Bien sûr, Monsieur !

Jack se pencha au-dessus de sa fille : Grâce avait les yeux grands ouverts et scrutait le plafond d'un air un peu inquiet. Le Colonel ne put empêcher un immense sourire de fleurir sur ses lèvres tandis qu'il contemplait sa petite merveille.

Le reconnaissant, Grâce tendit ses petits bras vers lui, ses doigts minuscules griffant l'air comme si elle cherchait à l'agripper.

– Viens-là ma princesse ! lui murmura Jack en la prenant délicatement dans ses bras.

Grâce roucoula et le fixa avec un regard aussi intense et déstabilisant que celui de Sam.

Elle tenait vraiment de sa mère… Il allait avoir du mal à garder les garçons à distance lorsqu'elle serait adolescente…

Il déposa un petit baiser sur le front de l'enfant, à la lisière de ses cheveux blonds puis il chercha du regard un endroit où s'asseoir, un peu à l'écart du vacarme de la crèche.

Il dénicha un fauteuil dans l'espace « sieste » et s'installa pour une pause tendresse avec sa fille.

– Maman est occupée à réparer des tas de machines mais, elle pense très fort à toi quand même, tu sais, lui expliqua Jack tandis que l'enfant l'observait avec la plus grande attention tout en jouant avec ses mains.

Grâce gazouilla en saisissant le rabat de la poche du treillis de Jack, tirant dessus avec une force surprenante. Amusé, le Colonel effleura du bout des doigts la courbe douce de sa joue, le velours soyeux du duvet sur son crâne, le renflement exquis de ses lèvres en bouton de rose.

Intriguée, Grâce téta son doigt durant une minute avant de le relâcher.

Manifestement, elle préférait le sein de sa mère…

Fredonnant doucement, le Colonel se mit à bercer l'enfant dans la pénombre des éclairages de secours et, quelques minutes plus tard, Grâce dormait à poings fermés dans ses bras.

Après un dernier baiser, Jack reposa sa fille dans son berceau et quitta la nurserie.

Lorsqu'il émergea au 28e niveau, le Général Hammond l'avisa que le reste de l'équipe et Siler étaient en route pour la réserve. Manifestement, l'entité faisait de la résistance.

Sam et Jack s'immobilisèrent en arrivant au fond de la réserve lorsque la lueur de leurs torches laissa apparaître l'étendue des dégâts.

Un monceau de matériaux, unités centrales, un MALP et d'autres machines étaient reliées par un enchevêtrement de câbles au réseau électrique de secours. Sur un moniteur, des lignes de code défilaient comme si la créature scannait, apprenait et continuait d'étendre ses programmes à toutes les surfaces accessibles.

– C'est quoi ce souk ? s'exclama Jack stupéfait.

– Aucune idée. Quand le programme alien s'est vu coupé de son environnement, il en a recréé un, souffla Sam en balayant l'ensemble complexe avec sa lampe.

– Apparemment il s'est trouvé du courant en se branchant sur l'éclairage de secours, constata Teal'c.

– On dirait qu'il s'est construit une unité centrale… souffla Sam, fascinée.

– Une unité centrale ? questionna Jack, perdu.

– Il lui faut beaucoup de place mémoire pour exister. Il colonise tout l'espace disponible.

Jack décrocha le téléphone le plus proche pour alerter le Général de la situation.

– Mon Général, j'ai besoin d'un lance-flamme à la réserve.

– J'arrive, répondit Hammond.

Ce dernier ne tarda pas à arriver et à constater lui aussi l'étendue des dégâts.

– Notre petit ami s'est construit un nid, lui indiqua Jack.

– En une nuit ?

Le Général semblait estomaqué… et inquiet.

– Moi je serai d'avis de tout nettoyer au lance-flamme mais, ces deux-là veulent lui parler, déclara Jack en désignant Daniel et Sam.

– Il tente juste de survivre, expliqua Daniel.

– Nous avons été dans la même position des dizaines de fois, sur une planète hostile, à lutter pour notre survie, plaida Sam.

– Est-ce qu'il peut sortir d'ici ? demanda Hammond.

– Non, il est isolé du reste de la base. On peut le tuer simplement en coupant le fil qui le relie au courant, expliqua Sam en désignant le bloc électrique.

L'entité fit soudain apparaître la fiche militaire de Sam sur un moniteur présent dans l'amoncèlement de câbles et de machines.

– Elle cherche à communiquer… dit Daniel.

– On dirait, oui. Et elle a prévu une interface, dit Sam en désignant le clavier sous l'écran.

– Parlez-lui, accepta Hammond.

Méfiant, Jack saisit une énorme pince coupante et la positionna sur le câble reliant l'entité à l'éclairage de secours.

Un peu rassurée par la présence de Jack à ses côtés, Sam s'approcha du clavier et pianota :

« Quel but poursuivez-vous ? »

Après un instant de latence, la créature répondit :

« Et vous ? »

Jack sentit un frisson désagréable parcourir son dos. On aurait dit que l'entité avait vu et compris ce qu'il envisageait de faire avec la pince…

Mais comment était-ce possible ? Ce n'était qu'une machine après tout ! Comment pouvait-elle décoder et anticiper les intentions humaines ?

Sam jeta un coup d'œil vers son mari, lui signifiant qu'elle aussi trouvait cela étrange. La question semblait bien plus faire référence à ce que Jack s'apprêtait à faire avec sa pince qu'à l'objectif poursuivi par le SGC lors de son incursion sur P9C-372…

Daniel, néanmoins, se voulut rassurant et l'incita à continuer. Sam répondit donc aussi innocemment que possible :

« Nous sommes des explorateurs »

Mais son doigt se figea sur le « S » final et l'écran se remplit du même caractère.

Daniel, Jack et Hammond la fixèrent avec incompréhension durant de longues secondes avant que Jack ne réalise que quelque chose n'allait pas.

– Sam ! hurla-t-il.

D'un coup sec, il coupa le câble, plongeant l'étrange amalgame de technologie dans le noir.

Sam retomba inerte au sol.

Une fois à l'infirmerie, Janet brancha Sam aux moniteurs : pas de pouls.

– Réglez le défibrillateur à 100 ! Vite ! ordonna-t-elle.

Jack, qui avait suivi le brancard avec la peur au ventre, sentit son propre cœur se serrer à lui faire mal. Le cauchemar se répétait. Une boule atroce lui nouait l'estomac depuis la seconde où il avait vu Sam perdre connaissance et où il avait compris que cette entité lui avait fait du mal.

Elle l'avait piégée pour qu'elle accepte d'approcher du clavier. Elle les avait tous bernés avec son apparente innocence.

Le Dr Fraiser s'apprêtait à défibriller Sam lorsqu'un rythme réapparut sur le scope.

– Attendez ! Le rythme cardiaque est normal.

Malheureusement, Janet aperçut aussi autre chose sur les écrans de contrôle qui suivaient les signes vitaux de Sam.

Avec une terreur palpable dans la voix, elle déclara :

– Colonel ! Vous voyez cette courbe, c'est celle de l'onde qui a pénétré l'ordinateur. Elle est dans son corps…

– Vous voulez dire que cette chose est dans la tête de Sam ? demanda-t-il, pas certain d'avoir bien compris.

– Le signal le plus faible, ce sont les ondes cérébrales de Sam et là, c'est l'entité, montra Janet sur l'EEG.

Le second signal était fort et clair. Il semblait dominer et occulter les ondes cérébrales de Sam, comme si elle était dans le coma. Ou pire.

Jack déglutit avec peine. C'était comme lorsque Jolinar avait pris possession du corps et de l'esprit de Sam.

Ça recommençait.

Jack se ravisa : finalement, cette chose ne valait pas mieux que les Goa'ulds !

Il se laissa tomber lourdement sur une chaise, à côté du lit médicalisé de Sam. Sa femme était toujours inconsciente mais il s'accrochait à l'espoir qu'elle aurait la force de chasser cette créature de son esprit, de lui résister.

Tandis que Janet appelait le Général pour le tenir informé, Jack enfouit son visage dans ses mains et s'efforça de calmer les battements désordonnés de son cœur et de réfréner les bouffées d'angoisse qui menaçaient de l'ensevelir.

Un long moment avait dû passer car, lorsqu'une main amicale se posa sur son épaule, Jack sursauta. Il avait mal à la nuque d'être resté prostré dans cette position inconfortable.

Avec une grimace, il leva les yeux vers Daniel. Son ami lui sourit tristement, comme pour l'encourager à tenir le coup et Jack apprécia l'intention.

Daniel était tellement doué pour comprendre le mal-être des gens. Il avait toujours le bon mot ou le geste qu'il fallait. Il s'en voulut de ne pas avoir su en faire autant pour lui lorsque Sha're était morte. Jack savait que Sam avait été présente pour leur ami, lui apportant ce réconfort silencieux et doux qu'il lui connaissait si bien. Mais ça n'enlevait rien au fait que Jack, lui, avait été le dernier des lâches. Le deuil de son ami réveillait en lui trop d'ombres et de mauvais souvenirs… Et la vérité, c'était qu'il craignait de se laisser emporter par le chagrin et de sombrer, au lieu de lui apporter une aide dans ce moment difficile.

– La crèche va bientôt fermer, annonça Daniel.

Jack soupira, déchiré entre l'idée de quitter le chevet de Sam et le devoir d'aller s'occuper de leur fille.

Une nouvelle bouffée d'angoisse l'assaillit alors qu'il se demandait comment il ferait face si Sam venait à mourir…

Sam ne s'était jamais vraiment remise de la mort de sa mère. Il ne pouvait pas arriver la même chose à Grâce.

C'était inconcevable !

Et si Grâce en venait à le détester comme Sam avait détesté Jacob… Si elle le jugeait responsable de ce qui était arrivé à sa mère… Après tout, il ne s'était pas opposé à la tentative de communication avec l'entité alors qu'il pressentait que quelque chose clochait. Il aurait dû le voir venir… Il aurait dû être plus vigilant.

Elle était sous ses ordres.

Et elle était sa femme.

Il devait la protéger et il avait failli.

La panique et la culpabilité étaient si envahissantes que Jack ne parvenait plus à respirer normalement ou à penser. Il avait l'impression qu'un éléphant avait pris ses quartiers sur sa poitrine et, durant un moment, il se demanda même s'il n'était pas en train de faire une crise cardiaque.

– Si vous voulez, je peux m'occuper de Grâce cette nuit, proposa gentiment Daniel. Comme ça, vous pourrez rester ici avec Sam.

Jack écarquilla les yeux, ému par la proposition et l'anxiété reflua un peu en lui, le libérant assez pour qu'il puisse répondre :

– Je ne crois pas qu'on ait prévu suffisamment de lait et de couches dans son sac mais…

Il sortit de sa poche une clé et la tendit à Daniel :

– Vous pouvez vous installer à la maison, comme ça elle aura toutes ses affaires et pourra dormir dans son lit.

Daniel approuva et prit les clés.

– Bonne idée. Teal'c a proposé de venir aussi. Comme ça, si Grâce pleure, l'un de nous deux au moins l'entendra, plaisanta l'archéologue.

– Merci, Danny… souffla Jack. Vous feriez un super parrain, vous savez ?

Daniel parut ému et bredouilla un remerciement.

Il faudrait qu'il en parle à Sam… songea Jack. Oui, quand elle se réveillerait, il lui parlerait de cette question. Leur fille avait besoin d'un parrain et d'une marraine pour s'occuper d'elle… juste au cas où…

Daniel arriva parmi les derniers à la crèche.

– Dr Jackson ? lui demanda une des nounous.

– Je viens chercher Grâce O'Neill.

– Oh ? Son père ne m'a pas prévenue…

– Il y a eu un accident. Le Major Carter est à l'infirmerie. Vous pouvez appeler le Général pour vous en assurer, lui répondit Daniel.

L'immense silhouette de Teal'c apparut derrière Daniel.

– Y a-t-il un problème, Daniel Jackson ?

– Non, tout va bien, Teal'c.

La nounou jeta un coup d'œil vers le Jaffa et finit par acquiescer. Tout le monde au SGC connaissait la mythique équipe SG1. Si deux de ses membres se tenaient là pour récupérer l'enfant des O'Neill, c'est que quelque chose de vraiment grave avait dû se produire.

– Je vais la chercher, répondit la jeune femme avec un sourire.

Elle revint quelques minutes plus tard avec le bébé et un gros sac à langer.

Teal'c se saisit du bagage tandis que Daniel prenait l'enfant et l'installait dans son cosy. La fillette gazouilla en le reconnaissant et la jeune nounou fut rassurée.

Daniel perdit au moins dix minutes à attacher le cosy dans la voiture, sous le regard perplexe de Teal'c qui, manifestement, ne comprenait pas l'intérêt d'une telle entreprise.

Il se gara dans l'allée de la maison de Jack et Sam et Teal'c leur ouvrit la porte. Daniel soupira. Entrer chez leurs amis en leur absence était étrange. C'était un peu comme violer leur intimité. Les pièces étaient étonnamment silencieuses, les couloirs déserts et pourtant, la présence de Sam et Jack était partout. Dans les manteaux accrochés dans l'entrée, dans la vaisselle qui s'égouttait à côté de l'évier, dans les jouets et les peluches qui trônaient un peu partout dans la maison.

Daniel n'eut cependant pas le loisir de s'appesantir sur la question : Grâce se mit à pleurer. Elle avait faim.

– Je vais faire chauffer son biberon, déclara Daniel. Teal'c, vous la surveillez.

Il déposa Grâce dans son cosy sur la table basse et Teal'c s'installa sur le canapé face à l'enfant.

Le Jaffa inclina le berceau pour que la fillette le voit et, attrapant un doudou abandonné sur le sofa, il le tendit à l'enfant en le secouant doucement. Grâce cessa de pleurer le temps d'un hoquet curieux puis, recommença à s'égosiller.

Par bonheur, Daniel revint au bout de quelques minutes avec un biberon dans les mains.

Avant de le donner au bébé, il fit couler une goutte de lait sur le dessus de sa main.

Teal'c haussa un sourcil.

– Que faites-vous Daniel Jackson ?

– Eh bien, je teste la température du lait. Pourquoi ?

Teal'c soupira.

– Quelle étrange rituel…

Daniel sourit, amusé par les remarques décalées de son ami.

– Je suppose que vous savez donner le biberon ? demanda Daniel.

– Qu'est-ce qui vous fait supposer une telle chose ? s'étonna Teal'c.

– Eh bien… Vous avez un fils…

– Sur Chulak, ce sont les femmes qui s'occupent de nourrir les enfants. Pas les guerriers.

– Hum… Oui. Évidemment.

Daniel détacha Grâce et la prit dans ses bras, la calant confortablement contre lui avant de saisir le biberon et de le lui donner. Teal'c observa son ami avec attention avant de demander au bout de quelques minutes :

– Puis-je essayer, Daniel Jackson ?

– Avec plaisir !

Daniel retira le biberon des lèvres de Grâce qui se remit à pleurer et transféra l'enfant dans le giron du Jaffa. Teal'c guida la tétine entre les lèvres de l'enfant qui s'en saisit et recommença à boire goulûment.

Lorsqu'elle eut terminé, Daniel la reprit et marcha un peu avec elle dans ses bras pour la bercer. Mais, Grâce s'était remise à pleurer et semblait inconsolable.

Daniel lui donna un bain, tenta de l'amuser avec les jouets présents dans la salle de bain et la changea sans que l'enfant ne cesse de hurler.

Lorsqu'il revint dans le salon, il avait l'impression d'être à moitié sourd.

– Je crois que la nuit va être longue… souffla-t-il.