(Légère) référence à Kaamelott et à Lullaby/Zelda et Time/Link d'Ocarina of Time.
Mardi prochain (le 26), je posterai le premier chapitre du Sicktember de cette année :3 Mais comme je le rédige toujours, le rythme sera moins soutenu.
Bonne lecture !
— Arrête ça, tu vas finir par atteindre l'os.
Lavio lui attrapa la main dont il rongeait les ongles assidument, la piégeant entre les siennes.
L'unique signe de son inquiétude se traduisait par des sourcils froncés et cette ride si particulière que Link tenta d'effacer de ses doigts libres.
Blottis l'un contre l'autre dans un fauteuil, ils essayaient de se rassurer mutuellement, sous l'observation préoccupée de Zelda, assis en face d'elle.
Dans d'autres circonstances, elle les taquinerait, les harcèlerait de questions pour en savoir plus sur l'état de leur relation, s'amusant de l'humeur orageuse de son frère ou des rougissements de Lavio.
Mais aucun d'eux trois n'était d'humeur à sourire, actuellement.
— Votre majesté, votre altesse royale ?
Les concernés sautèrent sur leurs pieds pour faire face au médecin, se tordant les mains avec angoisse.
— Tout va bien, ce n'est pas trop alarmant, les rassura-t-il avec son sourire bienveillant. Un simple rhume, associé à une légère sinusite. Ça peut paraître impressionnant, mais c'est assez bénin.
À cette nouvelle, ils lâchèrent tous les trois un soupir particulièrement audible et Zelda se rassit, les genoux tremblants.
— Par contre, je ne vous cache pas que dû à son grand âge, la santé de dame Impa est à surveiller plus étroitement. Elle se doit tout particulièrement de se reposer et de réaliser le moins d'effort possible.
— Impa ? Notre Impa ? Se reposer ? répéta moqueusement Link. Enfin, docteur, vous la connaissez mieux que nous, le seul moyen pour y parvenir, ce serait de l'assommer !
Loin de s'en offusquer, le médecin sourit à son tour.
— L'option lui a déjà été proposé, après qu'elle m'ait menacé, quand je lui ai annoncé qu'elle devait garder le lit. Qu'elle fasse seulement mine de vouloir sortir de sa chambre et nous l'attacherons au lit.
Un petit rire allégea l'atmosphère et il les quitta après une rapide courbette, rejoignant l'aile médicale.
Laissés tous les trois, les trois jeunes adultes se détendirent, échangeant des regards hésitants.
— Vous devriez y aller, les poussa Lavio. Elle doit être en train de fulminer à l'heure actuelle.
— Tu as bien saisi son caractère, s'égaya la reine. Joins-toi à nous, ça lui fera plaisir de te voir.
Soudainement bien timide, l'ambassadeur secoua la tête, poussant les jumeaux en direction de la chambre de leur nourrice.
— Allez-y, je vous attends là.
Ils s'entreregardèrent puis Lavio, puis haussèrent les épaules, rentrant dans la pièce d'un pas incertain, ce qui provoqua un sourire chez le lolien, amusé par leur soudaine attitude enfantine. À les voir agir ainsi, il n'avait aucune difficulté à les imaginer avec dix ans de moins, s'aventurant dans les couloirs froids du château !
S'installant plus confortablement dans le même fauteuil que plus tôt, mais en y étant cette fois son seul occupant, il prit son mal en patience, admirant la décoration qui l'entourait.
Du côté des bessons, ils ne purent empêcher leur curiosité supplanter leur inquiétude, alors qu'ils découvraient à quoi ressemblaient les appartements de leur nourrice, où jamais ils n'avaient mis les pieds !
N'importe quelle nourrice royale aurait une chambre modeste, non loin de la nurserie, mais tout ici prouvait l'affection portée par la reine Zelda, responsable de la renaissance du royaume et de sa famille gouvernante, puis de ses successeurs. Meubles, portraits, armes, décoration en général, tout était le fruit d'années de labeur à élever les sales gosses amenés à hériter de la couronne.
Lâchant la main de son aîné - qu'elle avait attrapé lorsqu'ils avaient passé le pas de la porte, puis caché parmi les plis de sa jupe - Zelda courut jusqu'au tableau le plus abîmé et resta en admiration devant. Quand Link la rejoignit, elle tira sa manche et indiqua du doigt la femme aux couleurs passées.
— C'est elle ! C'est la grande reine !
Au vu des symboles, c'était sans doute une peinture commandée pour un éventuel mariage, mais on pouvait reconnaître le coup de pinceau comme assez réaliste, comparé aux autres représentations affichées dans le royaume. Sa seule présence ici le prouvait, d'ailleurs.
Conscient de toute l'admiration que sa sœur lui vouait, il la laissa l'admirer à loisir, patientant. Il aperçut le vague croquis d'un enfant hylien aux cheveux blonds et aux yeux bleus, aux joues encore rondes, accompagné d'une fée bleue. Sans doute un relief du passé de la Sheikah.
Une fois que sa cadette eut finie de se recueillir, il l'invita à poursuivre son avancée, reprenant sa main dans la sienne, et toqua à la porte de ce qui devait être la chambre de la femme âgée, attendant sa permission pour entrer.
— Vous deux, soupira-t-elle. J'aurais dû m'en douter ! Je suis très contagieuse, ne restez pas là.
La voix assez faible, mais surtout étouffée et nasillarde, les figea sur place.
Impa était le seul repère stable de leurs vies mouvementées. Un roc derrière lequel ils s'étaient cachés bien des fois pour affronter les multiples tempêtes, auquel la jeune princesse s'était agrippée lors des nuits les plus sombres de son existence. Mais elle était aussi celle qui les berçait, qui les avait consolé, essuyé yeux humides et genoux écorchés, leur avait offert un amour maternel qui en aurait rendu plus d'un jaloux.
Pour tout avouer, elle était l'unique souvenir qu'il gardait de son enfance, avant de se retrouver à vivre avec son oncle. S'il n'y avait pas eu les portraits royaux, jamais il n'aurait su à quoi ressemblaient ses parents biologiques.
Alors, la voir aussi diminuée, toute petite au milieu de ce lit bien trop grand, étouffée par l'édredon épais… Il ne fut pas nécessaire aux jumeaux d'utiliser la télépathie pour savoir qu'ils avaient ressentis la même chose. Jamais l'ancienne combattante ne leur avait paru aussi frêle !
Ils se lâchèrent la main et coururent presque jusqu'à la couche, l'escaladant et encadrant leur nourrice, lui attrapant chacun une main qu'ils serrèrent selon leurs niveaux d'inquiétudes.
Zelda faillit bien la lui broyer.
— Comment ai-je pu croire un instant que vous alliez m'obéir, pour une fois ? soupira dramatiquement la malade.
Ils gloussèrent comme les enfants qu'ils avaient pu être, absolument pas repentants pour leur mauvais carafon.
— C'est comme ça que tu nous aimes, chantonna la reine.
— Difficile de le nier, petit papillon. Mais je vous aime encore plus quand vous êtes en bonne santé et que vous suivez des instructions aussi simples que celles-ci.
Link les observait interagir, un peu envieux de la complicité qu'elles partageaient et dont il était exclu pour une raison aussi stupide qu'une idiote de prophétie obscure qui avait forcé leur séparation à un âge tendre.
Mais il sentait aussi la pression de la main sèche aux nombreuses cales et cicatrices - rappels de ses faits d'armes - aux articulations noueuses et aux taches de sénescences - marques de l'âge - tel un souvenir tangible de l'affection qu'elle lui portait tout autant. Après tout, elle avait tout autant veillé sur ses nuits de sommeil agité, avait aussi accouru à ses pleurs déchirants, lui avait lu tout autant d'histoires, l'avait pris dans ses bras, l'avait bercé… Spirituellement, ils étaient tous deux ses enfants, et peu importe si ce n'était pas son sang qui coulait dans leurs veines ou que le petit prince leur avait été arraché pendant presque dix ans, c'est ainsi qu'elle les appelait dans le secret de son esprit.
Quand Lavio décida que ça commençait à faire un peu long et qu'il toqua à son tour à la porte de la femme âgée, il fut le spectateur d'une scène si adorable qu'il regretta de ne pouvoir immortaliser.
En effet, ni Link ni sa sœur n'avait lâché prise et s'étaient allongés aux côtés de leur nourrice, tous trois ayant sombré dans le sommeil.
C'était contraire à bien des protocoles et sans doute même à la bienséance, mais il décida de ne réveiller personne et de les recouvrir de l'édredon. Peu importe le temps que ça leur prendrait pour reprendre conscience, ils avaient tout le temps qu'ils voulaient devant eux !
En sortant, il interpella un serviteur, lui demandant que personne ne vienne troubler la quiétude des lieux, puis quitta le château avec un sourire attendri aux lèvres.
— ATCHAAAA !
— J'arrive.
Son locataire surgit de la cuisine avec une casserole bouillonnante qu'il déposa délicatement sur le protège-plat avant d'y ajouter quelques gouttes d'huiles essentielles.
— M'approche pas avec ton truc.
Link pouvait gronder autant qu'il voulait, ses menaces tombaient à plat avec son visage rougi, ses tentatives de prononciation mises en échec par son nez congestionné et sa gorge à vif. Bref, il avait l'air pitoyable et devait ne pas se sentir mieux car il se laissait totalement bichonner par son fiancé sans se plaindre une seule fois. Ou il avait compris que son état était de sa faute.
— Mets la serviette.
— Naaan.
Lavio se contenta de le fixer d'une manière neutre et il s'empressa de se couvrir comme demandé et se pencha en avant, pendant que l'eau était placée en-dessous, l'embuant efficacement.
Il se redressa à un moment mais une main intransigeante le remit en place.
— Mais t'avais dit jusqu'à ce que ça pique ! se débattit-il.
— C'est moi qui dis quand ça pique.
Défait, il abandonna la bataille et se contenta de prendre de longues inspirations, appréciant intérieurement le recul de ses maux de tête et l'amélioration de ses capacités respiratoires. Son monde n'était plus qu'un nuage de buée à la senteur végétale, mais il faisait confiance à son ami pour surveiller ses arrières quand lui-même ne pouvait le faire.
S'il avait l'intention de lui confier son futur, il pouvait bien lui confier son présent !
Mais pour le moment, il apprécierait beaucoup ne pas être malencontreusement brûlé…
— ATCHAAAA !
Loués soient les réflexes fulgurants de Lavio !
De son côté, Zelda profitait des attentions de sa nourrices qui s'était remise un peu avant qu'elle-même ne succombe au rhume à son tour, la laissant la dorloter comme lors des épisodes de maladies infantiles.
Hélas pour ses envies de traîner au lit, elle avait aussi un royaume à gérer et même la goutte au nez et la vue trouble, elle se devait d'abattre la même somme de travail qu'à son habitude afin de ne subir aucun ralentissement malencontreux.
Mais Impa était guérie et à ses côtés, alors elle pouvait bien sacrifier le reste de son confort.
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