Laura ferma son écran avec un soupir. La technologie et elle, ça faisait souvent deux. « Non! » Elle redressa son dos et rouvrit son écran. Elle n'allait pas s'avouer vaincu, ni maintenant ni jamais. Elle chercha encore une fois son document, sans succès. Pourquoi fallait-il que l'interface de cet ordinateur soit si différente de son mac? Elle y était habituée, maintenant. Ça lui avait pris assez de temps, merci! Ça faisait des années qu'elle avait l'ordinateur de la marque à la pomme. Il était devenu facile et familier. C'était d'ailleurs la seule marque d'électronique qu'elle n'avait jamais utilisé. Simon le lui avait offert pour ses 30ans, alors qu'elle n'était encore qu'un simple professeur. Tout cela lui semblait si loin désormais, comme une autre vie. Après tout, deux décades s'étaient écoulées depuis. Elle secoua la tête, rien ne servait de revivre le passé.

« Billy! » Son assistant entra aussitôt, toujours empressé de rendre service. Elle lui expliqua le problème et le laissa négocier avec le terminal. Dieu qu'elle haïssait les machines! Elle ricana en mettant la bouilloire en route: pourvu que l'ère des robots n'arrive pas avant plusieurs décennies, qu'elle soit trop vieille ou morte pour voir ça. Le jeune homme la regardait bizarrement, il avait du l'entendre grommeler. Elle lui fit signe de pas y prêter attention et versa l'eau désormais chaude dans deux tasses. Elle les porta jusqu'à son bureau et se pencha par dessus l'épaule de son assistant. « Alors? » Demanda-t-elle en prenant une gorgée de thé.

« Etes vous sure que vous avez enregistré le document, Madame? » Elle prit une profonde inspiration, refusant de lui parler méchamment. Bien sur qu'elle était sure! Ce n'était pas la premiere fois qu'elle tapait un rapport. Ah oui, mais si, c'était la premiere fois qu'elle le faisait avec cette maudite machine. Elle se contenta de hausser les épaules, elle savait reconnaître ses tords.

« Je vais faire un test. » Annonça Billy, pour lui même. Elle le regarde créer un document, inscrire quelques mots, enregistrer et fermer la page. Exactement le meme procédé qu'elle avait fait en avant midi.

« Ah! » Jubila-t-elle quand son acolyte ne parvint pas à localiser le-dit document. Donc, ce n'était pas elle. Elle s'était demandé un instant si elle ne commençait pas à devenir sénile mais non, c'était bel et bien le maudit ordinateur! Elle exultait. Dire que Richard avait suggéré qu'elle aille reprendre des cours d'informatique le matin même… L'idée de manquer une journée de travail, alors qu'elle dépassait déjà allègrement les 60h/semaine la terrifiait, tout comme l'idée d'être enfermée avec le petit jeune aux cheveux gras et à la forte odeur corporelle. Un frisson parcourut son dos et une vague de nausées la surprit. Elle devrait retaper tout son document mais au moins elle échappait à tout cela. Toujours voir le bon coté des choses. Elle remarqua alors que Billy parlait . Il fallait vraiment qu'elle arrête de divaguer. C'était vendredi soir, 19h passées et cet adorable jeune homme sacrifiait encore une fois sa soirée pour elle. Il fallait au moins que ce soit pour quelque chose. Elle lui demanda de répéter, lui promettant toute son attention. Quelqu'un allait venir ramasser l'ordinateur demain matin. Est ce qu'elle avait des informations confidentielles dedans? Elle n'était meme pas parvenu à enregistrer un banal ficher word… Est ce qu'elle était d'accord pour qu'il laisse la machine sur son bureau à lui, qui ne fermait pas à clefs? Elle y réfléchit un instant. L'ordinateur avait été payé par les contribuables et elle prenait cela au sérieux mais qui allait venir voler un ordinateur au ministère de l'éducation, un édifice ou il y avait à peu près autant d'ordinateurs que de gardes de sécurité? Elle autorisa son assistant à quitter pour le weekend et à laisser l'ordinateur en vue.

À 23h, elle finit enfin de retaper son rapport. Elle avait encore plusieurs feuilles de budget à revoir ainsi qu'un discours à prévoir. Elle décida d'amener le tout chez elle, elle travaillerait mieux à tête reposée et dans son canapé. Elle hésita un instant mais décida de ne pas empoter son portable avec elle, sachant qu'elle ne cesserait jamais de travailler sinon. Il serait prêt pour elle lundi matin et elle pouvait laisser une note pour Billy afin qu'il imprime les documents.