Titre : Le pouvoir des mots

Auteur : Lady Zalia

Disclaimers : L'univers de Harry Potter ne m'appartient bien évidemment pas, ni celui des mythes de Cthulhu. Il s'agit d'une fanfiction cross-over Harry Potter / Mythes de Cthulhu, mais il n'est ABSOLUMENT PAS nécessaire de connaître ni Lovecraft ou ni Cthulhu pour lire l'histoire. J'ai simplement utilisé certaines mécaniques et créatures propres aux mythes. Ceci est avant tout une fanfiction en plusieurs chapitres qui aura pour pairing et sujet principal [Voldemort-Harry]. Je suis incapable de vous en estimer la longueur actuellement.

Rating M. Genre : Aventure, Romance mais aussi Mystère et Suspense. Warning : Mort probable de personnages secondaires (et généralement antipathiques). Mais pour ceux qui me connaissent, je ne tue pas mes chouchous.😉 Un peu de Angst à certains moments mais rien de trop méchant.

Comme d'habitude, je tâcherai au maximum de conserver un caractère cohérent à la fois pour Voldy et Harry. Donc pas de mage noir dégoulinant de mièvrerie qui se rachète soudain une conscience en découvrant le grand amour et pas de Harry soudainement frappé d'amnésie sélective sur les massacres perpétrés par Voldemort. Cependant l'histoire sera un peu plus légère que dans Trahis-moi pour survivre ou Dans la gueule du serpent car leur relation sera moins déséquilibrée / malsaine.

Postulat de départ : [UA] L'histoire se passe en 2010. Il n'y a jamais eu de prophétie. Voldemort a progressivement accru son pouvoir et sème la terreur en Grande-Bretagne tandis que Dumbledore continue de protéger Poudlard. Harry a été élevé par sa mère, Lily Potter, suite à l'assassinat de James Potter pour s'être opposé à Voldemort. Après une scolarité sans heurt, il décide d'ouvrir une librairie de contes pour moldus et sorciers.


Chapitre 1

Harry sortit de la zone destinée à accueillir les Portoloins internationaux et se présenta immédiatement au guichet face à lui, un parchemin à la main. La sorcière parcourut le justificatif du regard et lui offrit un sourire avenant en découvrant sa nationalité britannique.

- Bonjour monsieur Potter, bon retour au pays. Vous venez d'Allemagne, n'est-ce pas ? Quel était l'objet de votre voyage ? Avez-vous quelque chose à déclarer ?

Le brun lui offrit un sourire amusé et rajusta ses lunettes sur son nez. Il voyageait fréquemment et était habitué à ces procédures. En réalité, il avait parcouru presque tous les pays d'Europe de l'Est avant de prendre un Portoloin depuis l'Allemagne, mais comme toujours, il valait mieux faire profil bas pour éviter les problèmes...

- Il s'agissait d'un voyage professionnel. Je suis libraire spécialiste en livres pour enfants et je n'ai rien d'illégal sur moi.

Il posa sa sacoche sur le comptoir préposé à cet effet et l'ouvrit largement, dévoilant une bonne centaine de volumes écrits dans différentes langues allant du norvégien au serbo-croate. Tous étaient pourvus de larges illustrations colorées et l'agent du ministère arbora brièvement un regard incrédule avant de sortir un détecteur de magie noire. Elle le passa au-dessus du sac puis le long de son corps avant de hocher la tête.

- Très bien, tout est en ordre, vous pouvez y aller.

Harry sortit une petite carte de sa poche et la tendit à la sorcière.

- Si jamais vous avez des enfants, n'hésitez pas à venir faire un tour. Ma boutique se trouve à Godric's Hollow. Elle s'appelle "La malle aux contes", vous la reconnaîtrez facilement.

Il la salua ensuite d'un signe de la main avant de s'avancer dans l'immense atrium pavé de briques noires. Par réflexe, il catapulta une Mornille dans la fontaine de la Fraternité magique, et la statue de sorcier souleva son chapeau pour le remercier.

Puis il s'engagea en direction d'une zone de transplanage et se concentra brièvement vers sa destination, à savoir Godric's Hollow. Il était assez tard et la nuit était déjà tombée, mais plutôt que de rentrer chez lui, il se dirigea d'un pas décidé vers une autre maison située tout au bout du village.

Ignorant la petite cloche accrochée à proximité du portillon, il sauta par-dessus le muret de pierres et pénétra dans la maison sans même frapper à la porte.

- Maman, je suis rentré !

L'entrée donnait sur un couloir au bout duquel se trouvait la cuisine d'où une odeur appétissante s'échappait. Une femme aux longs cheveux roux se trouvait devant un fourneau, occupée à préparer le repas, cependant elle lâcha immédiatement sa cuillère en bois pour venir le serrer dans ses bras.

- Harry, mon chéri ! Ton absence m'a semblé si longue !

Ses mains plaquées de chaque côté de ses joues, elle l'incita à baisser la tête avant de déposer un baiser sur son front. Puis elle le relâcha et s'éloigna d'un pas pour l'observer des pieds à la tête avec un œil critique.

- Tu as maigri... Et tu as encore une nouvelle cicatrice ! Mais comment peux-tu revenir à chaque fois esquinté de tes voyages ? Tu es libraire, par Merlin !

Le sorcier brun détourna le regard, mais son sourire espiègle ne mentait pas.

- C'est pas ma faute... Il y avait ce sorcier qui maltraitait un hippogriffe sous mes yeux, je n'ai pas pu m'empêcher...

- Ne me dis pas que tu t'es encore battu contre des braconniers !?

Ce n'était même pas une question, car elle connaissait déjà la réponse. Lily Potter avait haussé le ton, les mains sur les hanches. Finalement elle força son fils à tourner la tête, examinant la nouvelle estafilade qui longeait sa mâchoire mal rasée, avant de pousser un profond soupir tandis que ce dernier essayait de se justifier.

- M'enfin je n'allais tout de même pas rester sans bouger ! Il est hors de question que je laisse quelqu'un faire du mal à un être sans défense devant moi. Cette créature n'avait rien demandé...

Déjà, sa mère s'était détournée, jetant un sort en direction de la cuisine pour empêcher le repas de brûler. Harry massa distraitement sa nuque et se débarrassa de son manteau avant de s'asseoir sur une chaise. Il alla piocher assiettes et couverts dans le buffet puis attira une Bièraubeurre d'un Accio tandis que Lily le rejoignait, une marmite fumante entre les mains.

Elle le servit un peu brutalement avant de s'asseoir à son tour, son beau visage marqué par la mélancolie.

- Harry, je te l'ai déjà dit, à force de vouloir jouer aux justiciers, tu vas finir par attirer l'attention de gens dangereux...

- Ce ne sont que quelques braconniers polonais...

- Laisse-moi finir. Je sais que ton tempérament... est le même que celui de ton père. Lui non plus ne pouvait pas se taire devant une injustice. À cette époque, nous faisions partie du groupe de résistance mené par Albus Dumbledore...

- L'Ordre du Phénix.

Instinctivement, le jeune homme se tourna vers le mur où était accroché une photo en noir et blanc. Elle représentait un groupe de sorciers aux visages souriants. Il les connaissait tous, au moins de nom. Il avait entendu cette histoire des centaines de fois. Lily Potter suivit son regard et se perdit quelques secondes dans la contemplation de ce cliché qu'elle voyait pourtant tous les jours.

- Oui. Nous luttions activement contre Tu-Sais-Qui. James et Sirius prenaient beaucoup de risques pour contrecarrer ses plans. Nous pensions pouvoir le vaincre... Mais aujourd'hui presque trente ans sont passés. Alors que la plupart de nos alliés sont morts, lui se trouve au sommet de son pouvoir et le nombre de ses partisans ne cesse de croître.

- Je sais, maman. Et comme je te l'ai déjà dit, je ne compte PAS m'engager dans la résistance.

- J'espère bien ! J'ai déjà perdu tant d'êtres chers dans cette lutte sans espoir... Je ne survivrais pas si tu devais disparaître. J'imagine que Dumbledore a encore essayé de te recruter ?

Harry avait commencé à dévorer son plat avec appétit, cependant il ne dissimula pas la grimace que lui arrachait systématiquement le nom du directeur de Poudlard.

- Ouai, il est venu juste avant mon départ... Ce vieux bouc ne sait pas quand s'arrêter. Il reste toujours à l'abri derrière les murs de l'école et envoie toujours les autres faire le sale boulot. J'ai beau haïr Malefoy et sa bande, je t'ai promis de ne pas m'en mêler et c'est ce que je fais. Au Royaume-Uni, je suis un respectable vendeur de livres pour enfants parfaitement inoffensif. D'ailleurs, changeons de sujet. Tout s'est bien passé pendant mon absence ?

Chaque fois qu'il partait en voyage pour récolter de nouvelles histoires, c'était sa mère qui tenait sa boutique. Elle hocha la tête, le sourire revenu sur ses lèvres.

- Oui, ça ne me dérange pas de te remplacer. Tes petits clients sont adorables. Mais maintenant que tu as une clientèle fidèle, tu pourrais te permettre d'embaucher quelqu'un.

Il haussa les épaules avec une moue dubitative.

- Mouai, je n'en ai pas envie plus que ça. Tu sais que je préfère travailler seul. Et comme on ne peut jamais savoir à qui se fier, je ne veux pas prendre de risque.

- Mais tu n'aurais pas quelqu'un parmi tes connaissances de Gryffondor ?

Harry pointa une fourchette accusatrice en direction de sa mère.

- Je n'ai pas que des amis à Gryffondor, je te ferais dire. Et ce n'est pas parce qu'ils étaient à Gryffondor qu'ils sont forcément fiables.

Il secoua la tête, se gardant bien de prononcer à voix haute le nom auquel il pensait. Peter Pettigrow, le traître, le seul dont le visage ait été méticuleusement effacé de toutes les photos. Lily leva les mains pour se dédouaner.

- Je sais, je sais, il y a la petite Luna Lovegood qui était à Serdaigle. Mais Neville et Hermione, que font-ils ?

Neville était son ami d'enfance, quant à Hermione, il s'était rapproché d'elle à force de fréquenter la bibliothèque de Poudlard. Harry eut un sourire en pensant à eux. Il avait hâte de les revoir.
- M'man, je t'ai déjà dit que Neville avait son propre commerce d'herboriste maintenant ! Hermione est médicomage à Sainte-Mangouste, elle a à peine le temps de s'offrir du temps libre. Et j'ai beau adorer Luna, elle est si tête-en-l'air qu'elle abandonnerait la boutique à n'importe quelle heure pour aller attraper des papillons. Mais j'y réfléchirai... plus tard.

Il adorait sa mère, mais elle avait tendance à oublier que lui et ses amis grandissaient. Il termina son assiette en quelques bouchées supplémentaires et tapa des pieds de satisfaction en voyant une tarte à la mélasse léviter jusqu'à la table. Bon, finalement il appréciait aussi que certaines choses ne changent pas...

Une fois leur repas ingurgité, et le dessert savouré avec un plein mug de thé, les deux derniers Potter s'installèrent devant la cheminée du salon, et Harry raconta une partie de son voyage à sa mère. Il avait d'abord pris un bateau pour la Norvège avant de voyager jusqu'en Russie. De là, il avait longé la côte à travers les pays Baltes puis était descendu découvrir les pays du Sud de l'Europe comme la Roumanie et la Bulgarie, dans lesquels il n'était jamais allé. Enfin, il était remonté vers l'Allemagne en passant par la Serbie, la Hongrie, l'Autriche et la Tchéquie. Un vaste circuit qui lui avait permis de récolter des centaines de nouveaux contes qu'il allait pouvoir traduire, adapter et illustrer pour les enfants, sorciers comme moldus qui fréquentaient sa boutique.

Malgré la fatigue due à son voyage, il ne tarissait pas de détails sur toutes les histoires qu'il avait découvertes, si bien qu'il quitta la maison de sa mère aux alentours de minuit, les yeux à moitié fermés et la démarche hésitante. Une chance qu'il n'ait pas besoin de transplaner pour rejoindre son domicile !

Harry habitait un appartement situé au-dessus de sa boutique, presque au beau milieu de Godric's Hollow. Il n'était pas très grand, mais c'était bien suffisant pour lui tout seul. La porte d'entrée débouchait directement dans son salon, encore encombré par son matériel de travail, et Harry parcourut la pièce avec la satisfaction d'être de retour chez lui. Il déposa immédiatement sa sacoche sur le sol mais ne songea pas une seule seconde à en ranger le contenu. Le lendemain était un dimanche, il aurait bien le temps de s'en occuper. Pour l'heure, il avait un besoin urgent de sommeil.

Il jeta son manteau et son écharpe sur la chaise la plus proche et se traîna jusqu'à son lit avant de s'y laisser tomber. Assis sur le rebord, il retira ses chaussures puis ses vêtements et avisa d'un œil la distance jusqu'à sa salle de bain. Peut-être pourrait-il utiliser son balai magique pour la parcourir ?

Finalement, il trouva la force de rejoindre le lavabo, mais il se contenta de se brosser les dents avant d'enfin se coucher, accédant en un instant à un repos bien mérité.

***/+/***

Le lendemain matin, Harry fut réveillé par un rayon de soleil en plein sur son visage, aux alentours de 9h. Il n'avait pas pris la peine de fermer les volets la veille et la lumière du jour avait envahi sa chambre, mettant en évidence le bazar qui y régnait.

Le jeune sorcier poussa un grognement en listant mentalement tout ce qu'il devait réaliser dans la journée, et se leva de son lit après avoir conclu qu'il n'aurait jamais le temps de tout faire.

Il prit tout d'abord une bonne douche, savourant l'eau chaude sur sa peau. Durant son périple, il n'avait pas toujours pu profiter du confort de la vie moderne, et il avait beau adorer voyager, il était bien content de retrouver son appartement.

Une fois habillé de vêtements propres et confortables, il rejoignit son salon aussi désordonné que sa chambre. Il fusilla du regard les piles de livres et de parchemins, ainsi que les plumes éparpillés çà et là, comme si elles avaient pu se ranger toutes seules. Si seulement il maîtrisait les informulés, il aurait pu jeter des sorts tout en déjeunant, malheureusement il n'en avait jamais été capable d'en réussir un seul, comme si sa magie avait un blocage de ce côté-là...

Avec un soupir, il mit sa bouilloire sur le feu puis fouilla dans ses placards à la recherche d'une boîte de biscuits. Il allait falloir qu'il transplane jusqu'à Londres à un moment dans la journée pour trouver un épicier moldu qui soit ouvert le dimanche, histoire de se procurer le minimum...

Il dénicha finalement un paquet de shortbreads encore intact, qu'il grignota avec un mug rempli de thé noir.

Une fois convenablement sustenté, il se tourna enfin vers son sac. Outre ses courses, il devait ranger sur une étagère tous les grimoires de contes encore non traduits et faire un inventaire de toutes ses fournitures. Il avait besoin de parchemin et de papier moldu, de racheter une boîte d'aquarelle et une autre de crayons de couleurs, mais aussi de compter combien il lui restait d'argent. Gringotts était fermée le dimanche et il avait prévu d'ouvrir boutique lundi. Il ne voulait pas encore déranger sa mère pour cela...

Après de longues minutes de rangement, le capharnaüm de son salon avait laissé place à un espace de travail convenable. Ses dictionnaires avaient retrouvé leur bibliothèque, ses croquis et esquisses avaient été ordonnés dans un porte-vue, et toutes ses affaires de voyage étaient retournées à leurs placards.

Harry avait allumé un bon feu dans sa cheminée et il décida de s'installer à son bureau pour travailler sur l'un des contes qu'il devait traduire : Il s'agissait d'une histoire norvégienne qui portait le nom de "Kvitebjørn kong Valemon" et racontait les aventures d'une princesse amoureuse d'un roi transformé en ours par une méchante sorcière.

La plupart des contes donnaient le mauvais rôle aux sorciers, et le brun décida de changer un peu l'histoire : Il dota donc la princesse de pouvoirs magiques pour faire d'elle une gentille sorcière née parmi les moldus.

La traduction lui prit plusieurs heures et lorsqu'il releva enfin la tête de son travail, le mouvement lui provoqua un craquement au niveau de sa nuque. Il grimaça brièvement et regarda autour de lui tout en s'étirant.

Une chouette fauve était installée sur un perchoir non loin de là, et Harry écarquilla les yeux en l'apercevant. Il s'empressa de se lever de sa chaise pour aller la dorloter.

- Hey, salut Frigg ! Comment vas-tu, ma belle ? Tu m'as manqué !

Il remplit sa mangeoire et son abreuvoir tandis que la chouette hululait joyeusement. C'était Lily Potter qui en prenait soin durant ses voyages et sa présence signifiait que la sorcière avait dû passer au cours de la journée pour la lui ramener.

Le Gryffondor eut un sourire en comprenant qu'il avait tout bonnement ignoré la présence de sa mère tant il avait été absorbé par son travail. Heureusement, elle le connaissait bien, et il savait qu'elle n'en prenait plus ombrage depuis longtemps.

D'instinct, il se dirigea dans la cuisine pour trouver une petite cocotte en fonte entourée d'un sort de stase. Comme il fallait s'y attendre, elle avait aussi prévu qu'il ne prendrait guère le temps de cuisiner...

Il se servit une généreuse part de Shepherd's Pie qu'il dégusta avant de nettoyer sa vaisselle de quelques Recurvite. Puis il enfila un manteau et quitta son appartement, un sac sans fond accroché en bandoulière autour de torse.

Il transplana jusqu'à la cour arrière du Chaudron Baveur et salua le patron du pub.

- Salut Tom ! Je ne reste pas, j'ai des courses à faire chez les moldus. Je te laisse quelques cartes sur le bar !

Le patron lui rendit son signe de la main et Harry s'empressa de passer le pas de la porte pour rejoindre Charing Cross Road.

Bien qu'il soit issu de deux parents sorciers, il n'ignorait pas que sa mère était née-moldue, car elle l'avait fréquemment emmené dans le monde moldu pour parfaire sa culture. Il savait ainsi parfaitement comment utiliser le métro ou payer en Livres Sterling et ce fut sans hésitation qu'il pénétra dans la première épicerie trouvée pour faire ses emplettes.

Il acheta une douzaine d'œufs, du bacon, des saucisses, du pain de mie, quelques tomates fraîches, du cheddar et une boîte de champignons. Ce serait bien suffisant pour tenir jusqu'à lundi soir... Il acheta aussi un exemplaire du Times et une fois sorti, utilisa la première impasse hors de vue pour transplaner jusqu'à chez lui.

Depuis la fin de ses études à Poudlard, il avait pris l'habitude de consulter la presse moldue pour y chercher les traces des méfaits de Voldemort et de ses fidèles. Même s'il ne comptait pas prendre part à la lutte, il aimait tout de même se tenir informé.

Il était désormais presque de notoriété publique que la Gazette du Sorcier était sous influence, tant elle censurait toutes les informations en lien avec le mage noir, ne couvrant généralement que les incidents les plus flagrants. Les journaux moldus, au contraire, n'étaient jamais avares en "faits divers", les interprétant tantôt comme des événements inexpliqués, tantôt comme des catastrophes naturelles. Harry avait ainsi appris à lire entre les lignes, et il eut une grimace en tombant sur un article qui parlait d'un "séisme meurtrier à Blackpool".

Blackpool était une ville balnéaire du nord-ouest, aussi populaire parmi les moldus que parmi les sorciers, et si la Gazette n'en avait pas parlé, c'était qu'il y avait anguille sous roche. Le "tremblement de terre" avait été si puissant qu'il avait tordu la célèbre Blackpool Tower et provoqué la fermeture de plusieurs casinos et de son parc d'attractions.

Harry poussa un soupir à faire s'écrouler un mur et jeta le journal à travers son salon en un geste dégoûté. Manifestement, la situation n'avait en rien évolué pendant son voyage...

Désireux de se changer les idées, il entama une nouvelle traduction et lorsqu'il eut terminé son travail, la nuit était tombée.

Il se prépara un rapide plateau-repas, puis il s'installa confortablement sur son canapé, sa télécommande dans une main et sa fourchette dans l'autre. C'était l'une des raisons qui l'avaient mené à choisir Godric's Hollow comme lieu de résidence. La coexistence de sorciers et de moldus dans ce village semi-magique lui permettait de profiter aussi bien du confort de la magie que de la technologie moderne et après en avoir bénéficié toute son enfance, il n'avait aucune envie d'y renoncer.

Il grignota ainsi en parcourant les films et séries proposées par sa télévision avant de s'arrêter sur une série policière classique mais néanmoins distrayante. Les divertissements moldus avaient au moins ça de bien que leurs intrigues ne pouvaient pas être résolues par quelques coups de baguette, ce qui rendait les films et séries nettement plus intéressants que les histoires sorcières.

Lorsqu'il était enfant, sa mère lui racontait une histoire chaque soir avant de s'endormir, et en arrivant à Poudlard, il avait été sidéré en apprenant que la plupart de ses camarades n'en connaissaient pas la moitié. C'est comme cela qu'il avait eu l'idée d'ouvrir sa boutique de contes. Il traduisait, adaptait et illustrait des contes venant de tous les pays du monde, tant pour les sorciers que pour les moldus.

Sa mère lui avait permis de piocher dans la fortune familiale pour acheter son local, et si les débuts avaient été un peu lents, désormais il s'était fait une petite réputation.

***/+/***

Le lundi matin, Harry sauta hors de son lit avec enthousiasme malgré le ciel nocturne. Cela faisait longtemps qu'il n'était pas retourné dans sa boutique et il était heureux de la retrouver.
Il se prépara un plein mug de thé accompagné d'un solide petit-déjeuner composé d'œufs au plat, de bacon et de cheddar fondu sur des tartines beurrées. Puis il remplit un thermos pour sa boutique et sortit quelques traductions à faire pour l'occuper au cas où les clients se feraient attendre. Une fois son repas ingurgité et convenablement apprêté, il descendit au rez-de-chaussée. Il pouvait pénétrer dans sa boutique directement depuis une porte arrière et il prit quelques secondes pour contempler les lieux.

La librairie n'était pas très profonde, mais elle prenait place sur deux niveaux. Le rez-de-chaussée comportait le comptoir avec sa caisse enregistreuse, ainsi qu'un bureau pour travailler, plusieurs étagères et un escalier. Les clients pouvaient ainsi accéder à la mezzanine, garnie d'autres étagères mais aussi de poufs confortables où des lecteurs pouvaient s'asseoir à loisir.

Les murs étaient décorés de licornes, de fées, de niffleurs et autres créatures fantastiques représentées en carton coloré, tandis que la large et haute vitrine offraient suffisamment de luminosité pour lire sans se fatiguer. Au plafond, Harry avait peint une voûte céleste dont chaque étoile diffusait une petite lumière, quant au rez-de-chaussée, il était éclairé par une multitude d'ampoules électriques disséminées çà et là.

Il adorait l'ambiance dans sa boutique et dès le rideau levé, il s'installa à son bureau avec quelques feuilles de parchemins pour y faire des esquisses d'illustrations. Il se servait généralement de crayon pour faire des ombrages et d'aquarelle pour les couleurs, préférant la variété des outils moldus pour ses dessins. C'était sa mère qui lui avait donné le goût pour les arts graphiques dès son plus jeune âge, alors qu'elle réalisait des schémas de plantes pour illustrer des grimoires de potions et de botanique.

Alors qu'il était pleinement concentré sur son dessin, le carillon de la porte d'entrée le fit tout d'un coup relever la tête. Un client venait d'entrer et il s'agissait d'une sorcière à en juger par ses vêtements.

Il se leva pour l'accueillir et tiqua une seconde en reconnaissant la personne qu'il avait devant les yeux. Il s'agissait de Narcissa Malefoy. Il l'avait déjà croisée à King Cross, alors qu'elle venait conduire et chercher Drago sur le quai du Poudlard Express. Il n'aurait jamais imaginé voir l'aristocrate venir chercher un livre de conte, même si, à en écouter les rumeurs, son camarade avait eu un fils quelques années plus tôt.

Il recomposa néanmoins un sourire commercial et fit quelques pas pour venir à sa rencontre.

- Bonjour Lady Malefoy. Bienvenue dans ma boutique. Que puis-je pour vous ?

La sorcière ne se dérida pas, mais elle ne semblait pour une fois par indisposée par une odeur nauséabonde et Harry prit cela comme un signe encourageant.

- Monsieur Potter. On m'a dit que vous étiez le meilleur artisan en livres reliés. J'espère que cette réputation n'est pas usurpée. Je voudrais vous faire une première commande pour juger de votre talent, et si je suis satisfaite de vos services, je referai appel à vous pour une création plus ambitieuse.

- Euh, merci, je suis flatté. J'espère en revanche que vous savez que ma spécialité sont les contes. Cela dit, je peux faire des versions personnalisées sur demande...

Narcissa Malefoy pinça les lèvres et regarda autour d'elle avec un œil critique.

- Tout à fait, c'est exactement ce que je veux. Connaissez-vous le conte "Les sept corbeaux" ? C'est un conte français, mais il existe une version sorcière transmise au sein de la famille Black. Je vous ai ramené ce vieux grimoire et j'aimerais que vous en fassiez une version traduite en anglais, reliée de cuir de Veaudelune noir et à la tranche argentée. Je porterai une grande attention à la qualité des illustrations et de la traduction mais je peux vous payer grassement si le résultat est à la hauteur de mes espérances.

Harry s'inclina brièvement, cette fois bien plus assuré quant à la suite de la conversation.

- Je vais m'appliquer pour respecter tous vos critères. Je peux vous le faire avant Noël. Revenez à la fin de la semaine et votre commande sera prête.

- Très bien, nous verrons alors ce que vous valez. Au revoir.

Le Gryffondor nota avec attention les différentes exigences de sa cliente pour être certain de ne pas les oublier. Habituellement, il demandait de payer une partie au moment de la commande, mais la mère de Drago avait quitté la boutique avant même qu'il n'ait eu le temps de le préciser. De toute façon, la famille Malefoy n'était pas bien difficile à trouver...

Il soupira et se mit immédiatement à parcourir le fameux conte. Il connaissait la rumeur qui faisait de cette famille de fervents partisans de Voldemort, et en temps normal, il aurait peut-être réfléchi à deux fois avant d'accepter une commande de leur part. Cependant, il avait besoin d'accroître sa réputation, et pour une fois qu'il avait un client de la haute société, il aurait été bête de s'en priver pour une simple histoire d'allégeance... Par ailleurs, il avait toujours été attiré par les challenges, et le défi que lui proposait Lady Malefoy avait attisé sa fierté. S'il pouvait faire reconnaître son talent aux yeux de ces Sang Pur prétentieux, alors même les collectionneurs les plus exigeants seraient à sa portée.

Il avait déjà lu la version moldue et il l'avait traduite et illustrée par le passé, cependant la version sorcière comportait quelques différences, et il se sentit inspiré par cette commande inhabituelle. Désireux de donner son maximum, il s'attela à rédiger une nouvelle traduction, s'attachant à conserver l'élégance et la poésie de la langue d'origine.

Au cours de la journée, il fut interrompu par plusieurs clients, mais aucun d'entre eux ne lui fit de commande particulière, et lorsque l'heure de fermeture arriva, il était parvenu à terminer la traduction.

Il avait besoin de faire des courses et il s'empressa de baisser le rideau dès 18h pour ne pas perdre de temps.

Première étape : Gringotts. Il transplana depuis la ruelle derrière sa boutique et réapparu immédiatement au Chemin de Traverse. Noël approchait et la rue était bondée de sorciers et sorcières occupés à acheter leurs cadeaux. L'ambiance aurait pu être joyeuse s'il n'y avait de fréquents rappels du climat angoissant qui régnait au sein du Royaume Uni depuis plusieurs décennies.

Des affiches en noir et blanc étaient accrochées par endroits, soit pour signaler une disparition de personne, soit pour informer de l'identité d'un Mangemort suspecté.

Certaines boutiques étaient fermées, parfois à la va-vite, comme si leur propriétaire avait dû fuir en urgence ; et les gens ne s'arrêtaient guère pour discuter, préférant faire leurs achats en toute hâte avant de transplaner.

Harry slaloma entre les passants pour rejoindre le majestueux bâtiment tenu par les gobelins, d'où il tira de l'argent sorcier qu'il convertit pour moitié en argent moldu. Puis il alla chez Scribbulus pour acheter du cuir noir de Veaudelune, différentes qualités de parchemin, de nouvelles plumes et de l'encre. Il enfourna ses achats dans sa sacoche enchantée puis s'empressa de rejoindre le Londres moldu pour faire le reste de ses emplettes.

Au moins ici l'ambiance était plus légère, car malgré les fréquents "incidents", les moldus étaient inconscients de la menace que représentaient Voldemort et ses adeptes.

Harry ralentis le pas, portant un regard émerveillé aux décorations lumineuses qui surplombaient les rues. Des haut-parleurs diffusaient une musique de fête et les passants arboraient pour la plupart des mines réjouies.

C'était dans ces moments-là qu'il était le plus heureux de sa double culture de Sang Mêlé. Au moins il pouvait se réfugier parmi les moldus pour oublier un instant le régime de terreur dû à l'horrible mage noir qui lui avait pris son père et son parrain...

Il flâna durant une bonne demi-heure avant de se rendre au grand magasin Paperchase sur Oxford Street. Il devait se fournir en papier, crayons, pinceaux, boîtes d'aquarelles et matériaux de calligraphie et de reliure tels que la colle neutre et la poudre d'argent. Enfin, il alla jusqu'à un supermarché pour faire le plein de denrées alimentaires de toutes sortes avant de transplaner à l'abri des regards.

De retour chez lui, il s'installa immédiatement dans sa cuisine pour se préparer à manger tout en réfléchissant à ce qu'il allait faire durant la période de Noël. Il voulait profiter des dimanches à venir pour revoir tous ses amis et sans doute prendre quelques jours de congés le lendemain du réveillon et du nouvel an.

Il avait voyagé plus d'un mois et il voulait revoir Neville, Hermione, Luna, Hagrid et Remus, ne serait-ce que pour prendre de leurs nouvelles. Il avait pensé à eux et avait hâte de voir leur réaction quand il allait leur offrir leurs cadeaux respectifs. En Bulgarie, il avait trouvé des graines d'une variété de plante qui ne poussait nulle part ailleurs, et il avait immédiatement pensé à Neville. Pour Luna, il avait acheté en Suède une sorte d'étrange écureuil empaillé qu'on lui avait vendu comme un spécimen de "Ratatosk", créature propre à la mythologie scandinave. Pour Hermione, il avait obtenu un vieux grimoire de médicomagie traditionnelle russe qu'il comptait traduire avant de lui offrir. Pour Hagrid il s'était procuré en Roumanie des gants adaptés à la taille du demi-géant et faits d'un cuir ignifugé et résistant aux crocs et aux griffes. Et pour Remus, il avait profité de son séjour en Finlande pour compiler différents contes où le héros était un lycanthrope, afin d'en faire un recueil. De ce que Harry avait pu comprendre, les finlandais étaient bien plus ouverts sur les métamorphes qu'en Angleterre. Ceux-ci étaient considérés avec beaucoup de respect dans la société finlandaise, ce qui expliquait leur représentation positive dans la littérature. Pour sa mère enfin, il avait trouvé un magnifique collier en Sibérie, dont le pendentif était fait d'un cristal de neige préservé et agrandi magiquement.

Après dîner, il mit cette fois en route sa platine pour écouter son vinyle préféré, puis il commença à travailler sur des nouvelles illustrations pour le conte des sept corbeaux. L'histoire parlait d'une famille composée de sept garçons : Arcturus, Cygnus, Icarus, Noctus, Perseus, Regulus et Sirius, ainsi que d'une petite fille : Lucida. Tous avaient les cheveux d'un noir d'ébène et une peau blanche comme la neige.

Le jour de la naissance de la petite fille, la mère avait perdu beaucoup de sang, et le père envoya ses enfants chercher une potion de soin auprès du guérisseur, mais sur le trajet, les garçons jouèrent et se chamaillèrent tant et si bien qu'ils brisèrent la fiole de guérison. Le père furieux, leur jeta un mauvais sort, les transformant tous les sept en corbeaux pour les punir. Cependant, à peine avait-il achevé sa métamorphose que les garçons s'étaient envolés par la fenêtre ouverte.

La petite fille grandit bien, et devint belle et intelligente. Un jour, elle surprit sa mère en train de contempler un tableau représentant sept petits garçons, et en interrogeant leur vieil elfe de maison, elle découvrit l'horrible vérité.

Bien décidée à libérer ses frères du maléfice, elle quitta elle aussi le domicile familial, avec sa baguette pour seul bagage. Elle marcha longtemps et dû traverser plusieurs épreuves jusqu'à arriver au pays des étoiles où s'étaient réfugiés ses frères. Elle croisa alors un centaure qui lui dit que ses frères vivaient dans la montagne de verre, et que pour les obliger à reprendre forme humaine, il faudrait leur faire boire une potion à base de Polygonum, d'ailes de fées et de queues de cerises. Lucida récupéra et coupa les ingrédients puis brassa la potion en quantité suffisante pour ses 7 frères. Arrivée devant la montagne de verre, elle réussit à entrer dans la demeure et découvrit une salle à manger avec un couvert posé pour 7 personnes. Elle fit disparaître le contenu de chaque gobelet avant de le remplacer par la potion, puis elle se cacha sous la table. Lorsque les 7 corbeaux vinrent manger, Lucida attendit patiemment que chacun d'entre eux reprenne forme humaine avant de sortir de sa cachette. Les 7 frères furent fous de joie de la revoir après tant d'années et tous purent rentrer à la maison.

Harry choisit de dessiner les paysages à l'aquarelle et les personnages à l'encre de Chine. Puis il rajouta quelques ombrages à l'aide d'un discret lavis noisette, et des étoiles à la peinture blanche.

Sa première illustration terminée, il la mit à sécher avant de rejoindre son lit, fourbu mais satisfait de sa journée.

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Harry Potter ouvrit les yeux sur le plafond blanc de sa chambre, les joues encore incandescentes de sa précédente vision. Il venait de faire un rêve érotique particulièrement réaliste, et il pinça sa lèvre inférieure entre ses dents en effleurant sa verge dressée à travers son caleçon. Cela faisait bien trop longtemps qu'il n'avait pas eu de petit ami et son corps le lui faisait ressentir...

Il ferma les yeux pour se replonger dans ses souvenirs. Son amant onirique avait les cheveux bruns, mi-longs et ondulés ; un visage fin et glabre à la peau pâle... Il visualisa ses longs doigts autour de son sexe, ses lèvres sur sa gorge...

Quelques longues secondes plus tard, il obtint la libération, se répandant dans son sous-vêtement avec un soupir de soulagement.

Il resta quelques minutes, immobile, profitant de la brève brume qui accompagnait son orgasme pour réfléchir à sa vie sentimentale. Il avait bien eu plusieurs histoires et plans cul depuis la prise de conscience de son orientation sexuelle mais jusqu'à présent, il n'était jamais tombé sur quelqu'un qui lui fasse envisager une relation durable. Il faut dire qu'il ne cherchait pas vraiment, plus intéressé par une affinité spirituelle que physique. Il voulait quelqu'un de cultivé, d'intelligent, quelqu'un qui partage son amour pour la lecture et les voyages.

Par exemple, il était sorti avec Cedric Diggory, un joueur de Quidditch de Poufsouffle, du temps de sa scolarité, cependant il s'était rapidement rendu compte que le sport était bien leur seul centre d'intérêt commun. Contrairement à ce qu'il avait prétendu à sa mère, il s'était aussi rapproché de Drago Malefoy en dernière année, et avait même couché avec lui. Le Serpentard avait été un agréable plan cul, mais passé le goût de la transgression, ils avaient rapidement mis fin à leur relation.

Parmi ses camarades, seuls Neville, Hermione et Luna étaient au courant. Il ne s'était jamais senti suffisamment proche des autres Gryffondors pour le leur révéler, et du reste il considérait que cela ne regardait que lui. Il n'avait jamais fait son coming-out à sa mère, et il ne se sentait pas encore prêt à le faire... Il savait qu'elle nourrissait l'espoir de reformer la famille Potter, cependant ce n'était pas vraiment dans ses projets et il ne savait pas comment elle allait réagir en l'apprenant.

Il secoua la tête et chassa de son esprit ses espoirs de romantisme. Pour les avoir fréquentés 7 ans durant, il savait déjà qu'il n'y avait aucun sorcier de sa tranche d'âge qui correspondait à ses critères, et il ne s'imaginait pas se mettre en couple avec quelqu'un de beaucoup plus jeune que lui. Bien sûr, il y avait aussi la possibilité qu'il rencontre un sorcier étranger, ou quelqu'un de plus âgé, mais il n'avait qu'assez peu d'espoir. Sans doute allait-il continuer de fréquenter les clubs gays moldus pendant encore un moment...

Après un rapide petit-déjeuner, il rejoignit sa boutique, continuant de travailler sur les illustrations du conte pour Lady Malefoy tout en attendant les clients. La journée fut calme, et il put créer trois nouveaux dessins dans le même style que le premier. Cependant, alors qu'il s'apprêtait à fermer, deux personnes entrèrent simultanément, et Harry vit le piège se refermer sur lui avec la subtilité d'un Pansedefer ukrainien s'écrasant sur sa proie.

Les deux nouveaux arrivants étaient des sorciers, et le Gryffondor savait par avance qu'ils n'étaient pas venus pour acheter des contes. Il s'agissait de Remus Lupin et Albus Dumbledore, et s'il était heureux de revoir son parrain de substitution, il l'était nettement moins de la présence du directeur de Poudlard.

Il pouvait déjà imaginer comment cela allait se terminer, néanmoins il fit comme si de rien n'était, saluant les deux hommes avait une jovialité feinte.

- Bonsoir messieurs ! Je m'apprêtais à fermer, mais je peux peut-être vous aider ?

Ce fut Remus qui s'avança en premier avec un large sourire, sans doute inconscient de la manipulation de Dumbledore.

- Harry ! Lily m'a appris hier que tu étais rentré de ton voyage !

Malgré son air éternellement fatigué, ses yeux verts étaient empreints de bienveillance, et Harry n'hésita pas bien longtemps avant de le serrer dans ses bras.

- Content de te revoir, Remus, tu m'as manqué ! Le voyage était génial, mais ça fait du bien de rentrer chez soi.

Le lycanthrope répondit à son étreinte avant de reculer d'un pas pour l'observer, et le libraire n'eut aucun mal à anticiper quelle remarque allait immanquablement survenir.

- Tu as fait un sacré périple, et tu as encore récolté une nouvelle cicatrice. Ta mère m'avait invité à dîner hier soir, elle en a profité pour me raconter tes dernières aventures. Elle ne peut s'empêcher de s'inquiéter de tous les risques que tu peux prendre, mais je sais que c'est plus fort que toi. Tu ressembles tellement à James... le goût de l'adrénaline, c'est quelque chose que tu as dans le sang.

Harry ne put s'empêcher de se dire que venir avec Dumbledore pour le dévoyer était une bien méchante façon de remercier Lily Potter pour son amitié. Cependant il se contenta de hausser les épaules avec un air affable.

- Je suis intervenu pour empêcher une injustice, mais je ne suis pas un héros et je n'ai aucune envie de ressembler à Maugrey Fol Œil. Ce n'était qu'une petite rixe contre quelques braconniers. Ma seule préoccupation est la littérature jeunesse, tu devrais le savoir.

Le vieux directeur de Poudlard s'avança alors, comme s'il était parfaitement naturel qu'il s'incruste dans leur discussion.

- Allons, Harry, cette vie te convient-elle vraiment ? Tu n'es pas un de ces froussards qui se terrent à l'entente du nom de Voldemort, je t'ai vu aller au-devant de mille dangers du temps de ta scolarité. Je pensais... j'espérais ardemment que tu nous rejoindrais. L'Ordre a besoin de gens comme toi, qui n'hésitent pas à s'opposer contre l'oppression.

Le Gryffondor serra les poings, débattant avec l'envie grandissante d'éjecter le vieux sorcier hors de sa boutique.

- Vous-Savez-Qui m'a déjà pris suffisamment d'êtres chers pour être conscient de sa dangerosité. Je ne suis pas naïf au point de m'engager dans un combat perdu d'avance. Trouvez-vous d'autres recrues, professeur.

Il avait tenté de transmettre toute son animosité et son mépris à travers son titre, mais le directeur de Poudlard lui offrit son insupportable sourire paternaliste en guise de réponse.

- Inutile d'être sur la défensive, Harry, je n'ai jamais forcé personne à faire partie de l'Ordre... Je suis persuadé que tu finiras par comprendre la nécessité de résister malgré les risques. Abandonner la lutte, c'est lui offrir la voie royale jusqu'au ministère. C'est grâce à nos efforts qu'il reste dans l'ombre, car il sait que s'il se montrait à visage découvert, sa marge de manœuvre serait bien plus restreinte.

Harry haussa les épaules, mâchoire serrée.

- Dans l'ombre ou au grand jour, quelle différence ? La Gazette est à ses ordres, tout comme le Ministre et la plupart des directeurs de départements. J'imagine que pour vous, son identité réelle n'est pas un mystère, n'est-ce pas ?

- En effet, je l'ai connu lorsqu'il n'était qu'un enfant entrant en première année. J'étais loin d'imaginer ce qu'il deviendrait par la suite.

- Alors pourquoi ne pas le pourchasser ? On dit que vous êtes la seule personne qu'il craigne. Attrapez-le donc, puisque vous êtes si perspicace ! Vous envoyez toujours les autres combattre en votre nom, mais au final vous ne vous salissez jamais les mains vous-même !

Ça y était, il avait lâché ce qu'il avait sur le cœur. Sa mère lui aurait sans doute reproché son ton vindicatif, mais il s'en moquait. Voldemort avait peut-être tué Sirius et son père, mais c'était pour Dumbledore qu'ils étaient en mission, et pour lui, le vieux sorcier était tout aussi responsable.

Son interlocuteur accusa le coup sans changer d'expression pour autant, au contraire de Remus qui sembla aussi choqué que s'il venait de recevoir une gifle.

- Harry, comment peux-tu tenir de tels propos ?! L'Ordre ne serait rien sans Dumbledore !

Ce dernier leva une main pour l'interrompre.

- Il est normal qu'il pense cela. Après tout, il a eu une scolarité paisible. Voldemort n'a jamais tenté de s'attaquer à Poudlard et certains ont tendance à dire que je me cache derrière ses murs. Mais Harry, songe donc à ce qui arriverait si je quittais l'école ? Resterait-il un seul endroit pour grandir en sécurité ? En protégeant Poudlard, je m'efforce d'offrir un refuge pour tous les jeunes sorciers de Grande-Bretagne. Je permets aux nouvelles générations d'acquérir les connaissances nécessaires à leur survie malgré les dangers de notre monde. Est-ce donc cela que tu me reproches ?

Harry se détourna et serra les dents, conscient d'avoir perdu cette manche. Il savait que céder à la colère devant Dumbledore avait été une erreur mais il était trop tard pour effacer ses propos.

- Si Vous-Savez-Qui était vaincu, plus personne n'aurait à vivre dans la peur et Poudlard n'aurait plus besoin d'être un refuge pour grandir en sécurité. Vous n'êtes pas éternel, professeur. Si vous ne faites rien, tout sera fini à votre mort.

- Oh je l'affronterai, soit-en sûr ! Mais je ne suis pas tout puissant. Seul, je ne peux rien faire contre son armée. C'est pour cela que j'ai besoin de sorciers talentueux à mes côtés... des sorciers comme toi. Mais bon, je sens bien que ce n'est pas ce soir que nous te convaincrons. Nous allons te laisser à tes livres. À bientôt, Harry.

- Ni aujourd'hui ni jamais, Dumbledore. Inutile de revenir. Remus, en revanche tu sais que tu es toujours le bienvenu. Mais la prochaine fois, épargne-moi ton prosélytisme. J'ai promis à ma mère que je ne m'engagerai pas dans la rébellion et je compte m'y tenir. Pour ma part, mon seul souhait est de promouvoir la culture et la tolérance à travers mes contes, et je m'en tiendrai à ça. Sur ce, je vous souhaite une bonne soirée messieurs.

Il descendit les stores de part et d'autre de la porte de deux "Descendo" lancés successivement, en un signe clair de son intention de fermer boutique. Puis il éteignit les lumières d'un "Nox", et lorsqu'il se retourna, les deux sorciers avaient transplanés, pour son plus grand soulagement. Il baissa alors le rideau au niveau de sa porte et soupira longuement en contemplant sa boutique à présent plongée dans les ténèbres et le silence.

Bien que Dumbledore ne représente aucun danger en soit, il se sentait toujours étrangement tendu après ses visites, comme si ses tentatives de le recruter avaient aspiré son énergie.

À ses yeux, l'Ordre du Phénix avait tout d'une secte, avec Dumbledore en guise de gourou. Tous ceux qui en faisaient partie vénéraient le sorcier comme s'il était une sorte de génie bienfaiteur et omniscient, pour le plus grand énervement de Harry qui ne voyait en lui qu'un vieillard manipulateur et égoïste.

La porte de son arrière-boutique donnait directement sur le couloir de son immeuble et il verrouilla les lieux d'un Colloportus puis monta les escaliers jusqu'à son appartement.

Il savait par avance que Dumbledore reviendrait à la charge tôt ou tard. Il recherchait désespérément de nouveaux adeptes pour sa croisade suicidaire, et sa technique préférée était de jouer sur le désir de revanche de ceux qui avaient déjà soufferts à cause du mage noir.

Ayant perdu son père et son parrain, Harry était une cible de choix à ses yeux. Sans doute était-il incapable de comprendre pourquoi le Gryffondor ne s'était pas lancé dans une vendetta dès sa sortie de Poudlard...

Une fois chez lui, il sortit une Bièraubeurre de son frigo et s'installa devant son chevalet pour continuer ses illustrations. Peindre lui changea efficacement les idées et à la fin de la soirée, il avait sauté l'heure du repas mais était satisfait de son travail.

Désormais, il n'avait plus qu'à les laisser sécher, puis coudre les feuillets de parchemin entre eux avant de coller le cartonnage qui servirait de support à la couverture en cuir. Une fois entièrement assemblé, le livre devrait reposer sous une lourde presse avant d'être marqué et incrusté d'argent.

Pour réaliser ses éditions particulières, Harry utilisait un mélange de techniques moldues et sorcières pour s'assurer de la solidité du livre et de la souplesse de ses pages.

Il serait terminé pile à temps pour la prochaine visite de Lady Malefoy, et il avait hâte de voir sa réaction. Outre la fierté de réaliser un ouvrage d'art pour des clients prestigieux, il ne pouvait s'empêcher de se dire qu'en démontrant ses talents auprès de Mangemorts présumés, il s'assurait peut-être une certaine protection...

***/+/***

Le reste de la semaine se déroula sans incident notable et Harry put terminer sa commande particulière dans les temps impartis. Le petit livret était élégant et il avait utilisé sa meilleure plume de calligraphie pour en tracer le texte d'une encre vert-sombre. Il y avait 4 illustrations au total, plus une lettrine enluminée qu'il avait rajoutée au début de l'histoire.

Lady Malefoy ne lui avait pas parlé de budget mais il était de notoriété publique que leur clan roulait sur l'or. Il n'avait donc pas fait d'économie sur les matériaux et avait fixé le prix à 25 Gallions, ce qui était en soit une très belle somme pour un simple livre de conte.

Sa commanditaire se présenta le samedi matin, cependant elle n'était pas seule. Elle était accompagnée par une sorcière brune aux longs cheveux bouclés. Malgré leur différence capillaire, les deux sorcières se ressemblaient physiquement et bien qu'il ne connaisse pas son identité, Harry devina qu'il devait s'agir de la sœur de Lady Malefoy.

Les deux sorcières se dirigèrent immédiatement vers son comptoir avec un air de propriétaire, et le libraire loua le fait qu'aucun client moldu ne soit présent.

- Bonjour mesdames. Lady Malefoy, votre commande est prête. J'ai préparé un coffret cadeau mais je ne l'ai pas fermé. Je me suis dit que vous voudriez l'inspecter avant tout.

Il alla immédiatement jusqu'à son arrière-boutique et se saisit d'un coffret en carton noir serti de papier de soie argenté. Le livre reposait en son sein et il le présenta aussitôt à sa cliente avec un sourire assuré.

Immédiatement, l'exclamation étonnée que laissa échapper l'aristocrate l'informa de son succès mieux que des mots. Les deux sorcières restèrent un instant fascinées par l'ouvrage, tournant lentement ses pages avant de relever leurs yeux de sa direction. Ce fut Lady Malefoy qui prit la parole en premier.

- Et bien, monsieur Potter, je dois avouer que je suis agréablement étonnée par la qualité de votre travail. Le texte ressemble presque mot pour mot à celui que récitait notre vieil elfe de maison, et les illustrations sont magnifiques. À travers le choix des couleurs, vous avez su retranscrire les affinités de notre famille.

Harry sourit largement et inclina brièvement la tête, sortant depuis un tiroir le manuscrit que lui avait remis la sorcière au moment de sa commande.

- Je vous remercie, j'en suis heureux. Je vous rends votre original. J'ai utilisé comme demandé un cuir de Veaudelune et un parchemin de la meilleure qualité possible. J'y ai aussi adjoint un ruban de satin vert pourvu d'une plume de corbeau ciselée en argent en guise de marque-page. Le prix est fixé à 25 Gallions.

Lady Malefoy déposa 30 Gallions sur son comptoir tandis que sa sœur commençait à parcourir les étagères du regard.

- Voici votre argent, et ne songez pas une seule seconde à me rembourser la différence. Parlons maintenant de ma véritable commande. On m'a rapporté que vous parliez de nombreuses langues ?

Le Gryffondor rangea les pièces d'or dans le tiroir de sa caisse avant de lever le menton avec fierté.

- En effet. Je sais parler, lire et écrire suédois, russe, allemand, roumain et français couramment. J'ai encore quelques difficultés avec le serbo-croate et l'arménien pour ce qui est de l'écriture, mais je peux sans problème réaliser une traduction si le vocabulaire n'est pas trop spécifique. Alors dites-moi ce que vous souhaitez et je vous dirai si je peux le réaliser ou non.

La seconde sorcière s'était à nouveau tournée vers lui et son sourire provoqua chez Harry un bref frisson d'effroi.

- Vous êtes un Sang Mêlé, n'est-ce pas, monsieur Potter ?

Il fit la moue et plissa les yeux.

- Sang Mêlé et fier de l'être, mais je ne vois pas le rapport.

Les lèvres de la brune se tordirent en une grimace de dégoût.

- Fier ? C'est ridicule. Cela dit, un talent tel que le vôtre ne devrait pas être employé qu'à traduire des contes pour enfants. Vous pourriez gagner bien plus en travaillant sur des grimoires de magie, par exemple.

Harry secoua immédiatement la tête.

- Je suis désolé, mais je ne produis que des œuvres de fiction. À mes yeux, le plaisir que je prends à traduire et illustrer des contes pour enfants est préférable à une pile de Gallions obtenus en faisant une tâche pénible.

Les deux sorcières se regardèrent avec un air de connivence avant de lui offrir un sourire empreint d'un mépris à peine dissimulé. Ce fut Lady Malefoy qui reprit la parole.

- Je vois. C'est fort dommage. Moi qui voulais vous commander la traduction d'un grimoire unique en son genre. Il est écrit en plusieurs langues d'Europe de l'Est et je peinais à trouver quelqu'un de suffisamment talentueux pour traduire l'ensemble... Je vous laisse mes coordonnées, envoyez-nous donc un hibou si vous changez d'avis.

Les deux sorcières disparurent sans autre forme de politesse et Harry jeta le petit morceau de parchemin dans un tiroir de son bureau. Il doutait avoir jamais envie de rappeler ces deux sorcières hautaines, et regrettait même d'avoir fait autant d'efforts pour le conte, cependant quelque chose, peut-être un étrange instinct, l'empêchait de détruire immédiatement les coordonnées de Manoir Malefoy.

Qui sait, peut-être un jour en aurait-il besoin...


Fin du chapitre 1

Alors, ça vous hype ? Une petite review pour votre auteur ? 😜

Voldy va apparaître au prochain chapitre qui lui sera exclusivement consacré, ensuite on alternera les points de vue en fonction des paragraphes. Rendez-vous dans une à deux semaines maximum pour la suite !