« Je connais un bar au bord du canal, un peu après Atwater. Ça te dit? » elle se sentit immédiatement soulagée et aussi reconnaissante. Il ne la poussait pas. Il respectait ses limites. Elle n'était plus habituée à ça, elle vivait depuis bien trop longtemps entourée de politiciens.

Ils reprirent leurs vélos et se dirigèrent tranquillement sur la piste cyclable. L'asphalte était encombré de marcheurs, joggers et d'enfants qui apprenaient à faire du vélo. L'ambiance invitait à la contemplation. Le temps semblait avoir ralenti et elle avait bien l'intention de profiter de chaque secondes. Elle suivait Bill, sans appréhension, sans attente. Elle profitait de chaque rayon de soleil, de chaque brise qui faisait danser ses cheveux et bien sûr de la vue sur son corps musclé.

Ils finirent par tourner sur une écluse et se trouvèrent devant un immense rack à vélo et un bar. Il rangea son vélo à la borne, elle attacha le sien du mieux qu'elle put. Il y avait foule, il fallait faire la queue pour rentrer. Elle reconnut l'enseigne mais dû avouer ne jamais y être allée. Il se moqua gentiment d'elle, c'est vrai que c'était une institution. Il la prit par la main et l'entraîna dans son sillage. La présence de cette foule la fit se raidir, il le sentit. Elle fit de son mieux pour le rassurer. Elle n'avait ni peur ni honte d'être vue en public avec lui, loin de là. Elle n'avait pas peur d'être reconnue. Non, juste elle aimait le calme et se sentait mal à l'aise dans ce genre d'environnement. C'était ironique pour la femme politique qu'elle était. Elle ne sût dire s'il la comprenait vraiment ou s'il était juste indulgent mais il sut lui donner le courage nécessaire pour avancer.

« Hey Commandant! » Le garde de sécurité leur faisait signe. Gênée, elle laissa son ami l'escorter jusqu'au bout de la file. Sans jamais lui lâcher la main, il discuta avec le jeune homme. Elle comprit que Bill avait été le supérieur du Vigile pendant de nombreuses années. Elle fut surprise de leur relation presque informelle. Elle ne s'attendait pas à ça de l'armée. Les deux hommes bavardèrent poliment jusqu'à ce que le groupe devant eux franchisse la porte et ils les suivirent. Encore une fois, il l'impressiona. Il aurait pu profiter de sa connaissance et les faire rentrer devant tout le monde mais ce n'était pas son genre. Il n'était pas du genre à profiter de son autorité. Elle trouvait que ça en disait beaucoup sur le genre d'homme qu'il était. A cet instant là, elle se sentit vraiment fière d'être à son bras.

Alors qu'ils attendaient pour commander au bar et qu'elle lui demandait conseils, ils n'eurent d'autre choix que de se rapprocher. Il passa un bras autour de sa taille, laissant sa main reposer sur l'os de sa hanche. Elle fit de même et s'étonna de voir à quel point ce genre d'étreinte lui apparaissait naturelle. Malgré son imposante stature, il était incroyablement invitant et confortable. Elle se serra un peu plus contre lui, cherchant son odeur et sa chaleur. Il lui sourit et déposa un baiser sur ses lèvres. Oh, elle pourrait vite s'habituer à cela. Une petite alarme raisonna dans sa tête, l'invitant à la prudence mais elle choisit de l'ignorer. Elle voulait profiter et, pour une fois, ne pas réfléchir.

Ils venaient de récupérer leurs boissons et s'avancerèrent vers une table quand elle entendit quelqu'un l'appeler. Elle ne le reconnut pas de suite. Il faut dire qu'elle était plus habituée à le voir en uniforme qu'en tenue de vélo. « Amiral Nagala. » salua-t-elle.

« Mme la Ministre, Bill. » leur souria-t-il en glissant son regard vers la main qui reposait encore sur sa hanche. « Je ne savais pas que vous vous connaissiez. » Elle sentit ses joues s'empourprer. Elle ne s'était pas affichée publiquement avec un homme depuis son mariage et à ce moment-là, elle était professeur.

« Salut Nick. » Salua-t-il. Il retira sa main de sa taille pour serrer celle de l'autre homme. «Laura, j'imagine que tu connais déjà mon boss. » il souriait, aucune trace d'embarras sur son visage.

« Oui, nous nous connaissions. C'est ma boss en ce moment! » rit le cycliste du dimanche. Il les observa un instant, alternant son regard entre la rousse et le brun. « J'aurais jamais pensé vous présenter mais vous faites un très beau couple. » elle pouvait entendre la sincérité dans sa voix et ça lui réchauffa le cœur. Deux enfants accoururent vers lui suivis par une petite femme brune. Il s'évertua à enfiler le casque sur la tête du plus jeune avant de fixer à nouveau son attention vers le couple. « Passez une bonne fin de week-end. Je vous vois tous les deux dans la semaine! »

Ils avaient enfin trouvé une table et un peu de quiétude pour profiter de leur bière. Laura n'était pas trop fan de ce genre de boisson mais Bill avait su la conseiller efficacement. Elle aimait le côté sucré et acidulé de l'abricot. Elle aimait surtout sa présence et sa conversation. Elle venait de découvrir qu'après presque 20 ans passés à monter les échelons dans l'armée de l'air, il avait décidé de quitter son poste de commandant pour enseigner. Grâce à ses connexions, il avait facilement décroché un poste à Caprica. Il voulait se rapprocher de son fils, avait-il expliqué. Elle sentait qu'il y avait quelque chose qui ne lui disait pas mais décida de ne pas pousser.

« Laura, qu'est ce qu'on fait là? » demanda-t-il après un moment de silence.

Elle le regarda un peu étonnée. Il avait le visage grave et sérieux soudainement. « On prend un verre, non? »

« Je veux dire entre nous deux. »

Oh oh, se dit-elle. Elle ne savait pas quoi dire. Elle ne savait encore moins ce qu'il voulait qu'elle dise. Il n'attendait sûrement pas une déclaration d'amour après 2 soirées. Elle hésita à mettre son masque de politicienne mais choisit l'honnêteté. Avec lui, elle voulait être Laura et ne pas jouer de rôle. « On passe du bon temps? » elle se demandait si le fait d'être tombé sur Nagala avait poussé son compagnon à l'interroger ou si c'était dans la nature des choses. Elle manquait cruellement d'expérience!

« Je suis d'accord. » il lui sourit et prit sa main à travers la table. « Je veux juste savoir ce que tu veux et ne pas me faire de fausses idées. »

Qu'est ce qu'elle voulait ? Elle le savait mais elle n'était pas sûre que de le dire à voix haute soit judicieux. Elle croisa son regard azur et décida de ne pas suivre son instinct. Elle lui devait la vérité, elle ne voulait pas le blesser. « Je... j'ai envie de légèreté. J'ai envie d'un compagnon avec qui aller dîner et passer du bon temps. Quelqu'un avec qui aller au cinéma et bruncher, quelqu'un avec qui ... avec qui passer l'été. »

« Avec qui passer l'été ? » demanda-t-il, la surprise et l'amusement clairs dans sa voix.

« Je sais pas. Il me semble que l'été c'est vraiment une période propice aux sorties et, hum, à passer du temps à deux sous les draps. » Ses joues la chauffaient. Il rit et elle sentit la tension se dissiper.

« Tu as raison. » Il fit tinter leurs verres. « À un été à deux! » proposa-t-il.

Elle se pencha vers lui et l'embrassa. Il goûtait encore la bière et quelque chose d'unique. Elle glissa ses doigts à la base de ses cheveux, au ras de la nuque. Elle fut surprise d'y trouver des cheveux doux et soyeux. De son autre main, elle encercla sa mâchoire, caressant la fine repousse de sa barbe.

Quand ils se séparèrent, à bout de souffle, surpris par l'intensité de leur échange, elle lui demanda: « Veux-tu venir chez moi? »