Chapitre XXI : Le procès d'Albus Perceval Wulfric Brian Dumbledore

Salazar la Langue-de-Serpent après avoir laissé la Suzeraine au sein de l'école la quitta. Salazar le Siffleur traversa les mers et trouva une sorcière, Sépora la Susurrante. Il la connut, ils eurent trois fils. Corvus l'Augure, Cypres l'Éveillé, Hyperion le Métamorphomage.

Page 4 du Codex de Serpentard


Médusa s'était réveillée très tôt ce matin-là. On lui avait répété ce qu'elle devait faire et ce qu'elle devait dire. Elle s'habilla de la longue robe bleu ciel au col sage que les elfes avaient laissés sur le lit. Elle s'observa en s'attachant les cheveux devant la glace, ainsi elle avait l'air innocente et sage. Mais c'était bien ce qu'elle était, n'est-ce pas ?

Pour ne pas répondre à cette question, elle saisit Echo occupé à dormir dans son panier et sortit.

Où allons-nous Maitresssse ? sifflota le petit reptile ravi qu'elle pense à s'occuper de lui.

—Voir une exécution, lui susurra Médusa qui ne pensait plus qu'à ça depuis des jours.

Si tout se passait bien comme lui avait dit son père et sa mère, tous ses tourments seraient terminés. Elle trouva justement sa mère dans le hall occupée à discuter avec Nagini en buvant sa potion fortifiante. Sa mère aussi était méconnaissable en ayant abandonné ses longues robes noires et ses jupons lâches pour une robe de sorcière cintrée à col bleu clair. Ses longs cheveux noirs étaient attachés en chignon complexe tandis qu'elle avait mit ses lunettes de soleil pour se protéger de la lumière. Habillées ainsi, Médusa trouva qu'elles se ressemblaient beaucoup.

—Tu es parfaite ma chérie, susurra sa mère en lui tendant un chocogrenouille. Mange. Nous risquons de devoir sauter la pause repas aujourd'hui.

—Bon courage, souffla Nagini qui restait avec Salazar au prieuré.

Son père parut depuis le grand escalier avec un air impassible. Nagini se tendit imperceptiblement et sa mère lui offrit un sourire enjoué.

—Quelle horrible journée en perspective…

—Pour une horrible personne, sourit son père en prenant le bras de sa mère d'un air complice.

Médusa comprit qu'ils avaient attendus cette journée depuis des années et frémissaient d'une excitation mauvaise. Elle les rejoignit en saluant Nagini. Dehors, ils croisèrent Salazar, assis sur une des statues de pierre de l'entrée en train de lire son carnet. Son jumeau leva les yeux vers elle sans expression. Depuis qu'il était rentré Sal agissait bizarrement avec elle, il était encore plus distant qu'à l'accoutumée.

—Tu devrais rentrer mon cœur, pépia leur mère d'un air guilleret. Il va faire froid aujourd'hui et tu es tout pâle. Nous serons de retour pour le dîner.

Elle se moquait presque de lui, et leur père n'eut qu'un reniflement dédaigneux. Ils transplanèrent peu après.

Le Département de la Justice Magique était situé au deuxième étage du Ministère de la Magie. Ils avaient transplané tôt dans la matinée mais le couloir menant à la salle d'audience était déjà rempli de sorciers et sorcières en robe rouge. C'était le Magenmagot au complet, présidé par le Ministre Ignatus Tuft. Ce dernier se dirigea vers son père et lui serra la main.

—Mr Jedusor, vous venez dans votre qualité de Directeur par intérim de l'école ?

—Le conseil de l'école m'a déjà nommé Directeur officiellement. Ma famille et moi-même avons notre témoignage à apporter à cette affaire.

Tuft prit l'air ennuyé. Il avait un visage gâble et peu avenant. Médusa lui trouva un air mou et idiot. On racontait qu'il était un des plus médiocres ministres que le gouvernement anglais ait portés mais personne n'osait trop le dire à haute car toutes les grandes familles sorcières le soutenaient. Le Ministre jeta un coup d'œil à Médusa et sa mère derrière son père.

—Mes hommages mes dames, dit-il vaguement en reportant ses yeux sur son interlocuteur. Sombre affaire, oui sombre affaire. Nous devrions en avoir bientôt terminé. Ce soir Dumbledore sera à Azkaban, j'en suis persuadé.

—Laissons à la justice faire son travail, tempéra son père en les conduisant vers les portes de la salle d'audience.

—Tuft est un imbécile, chuchota sa mère agacée quand ils se furent éloignés des oreilles indiscrètes.

—Un imbécile est manipulable, ce sont des vieux renards dont il faut se méfier.

Un autre homme les rejoignit, Médusa l'avait croisé une fois au Derby. Elle ignorait son nom, il était petit avec un petit menton pointu, Médusa le trouva assez insignifiant.

—Maitre Black, merci de vous être déplacé, ronronna sa mère en serrant la main de l'individu.

—J'ai été invité à juger Dumbledore auprès du Magenmagot, mais défendre la veuve et l'orphelin, est une de mes prédilections, assura Maitre Black d'un air pompeux.

Les portes de la salle d'audience s'ouvrirent et ils purent rentrer. Médusa s'installa entre son père et sa mère sur les bancs. En face, le Magenmagot prenait place sur l'estrade. Mr Black se mit non loin d'eux, et elle remarqua Mrs Burbage déjà assise car trop sévèrement blessée. Elle était pâle et de sa seule jambe restante, le venin des araignées l'avait rendue boiteuse. Tuft présidait la Haute Cour du Magenmagot. Il y avait quelques journalistes dans la salle, mais du reste, le huis clos avait été exigé par une part du Magenmagot encore fidèle à Dumbledore. De tout ce qu'il se passait en coulisse de ce jugement, rien n'échappait à son père qui lui en avait raconté la majorité. Mafalda Hopkrik, une grande sorcière au visage rond était justement très proche de Dumbledore dans sa qualité de Sous-Secrétaire d'État et abordait ce procès avec un air anxieux. Quand Tuft s'assit, ils purent s'asseoir dans un commun mouvement.

De là, des portes plus petites s'ouvrirent pour laisser passer Dumbledore. Il était serein et marchait librement entre deux aurors. Habillé d'une robe vert feuillage, le vieil homme paraissait étonnement tranquille en allant s'asseoir à son box des accusés face au ministre.

—En ce jour du 20 Mars 1967 la Haute Cour du Magenmagot se réunit pour le jugement solennel de l'un de nos membres. Le procès d'Albus Perceval Wulfric Brian Dumbledore pour faute grave et négligence qui suite à la décision du Conseil de l'Ecole a perdu son titre de Directeur. Vous comparaissez aujourd'hui pour vos fautes suite aux plaintes du Professeur Charity Burbage et du Conseil d'Administration de l'école, Mr Dumbledore, que plaidez-vous ?

—Coupable, fit joyeusement Dumbledore. Je suis en effet coupable des fautes dont on m'accuse et je souhaiterai m'en expliquer auprès de vous.

Près de Médusa, son père eut un petit ricanement moqueur dissimulé dans sa barbe. Dumbledore lui coula une œillade enjouée avant de porter son regard vers le Ministre.

—Vous avez choisi un Juriste Sorcier, au moins ? rit jaune Tuft, ou devrez vous vous défendre vous-même ?

Tuft n'utilisait pas un jargon d'homme de loi car c'était un investissement qu'il ne voulait pas mettre dans ce jugement, mais il n'avait pas tort. Médusa avait été passionnée par les cours d'histoire de droits donnés par Binns en deuxième année. Elle aimait beaucoup l'idée que les lois qu'ils avaient écrites au cours de leur histoire de sorcier leur permettent de mieux vivre. Bien souvent ce n'était pas le cas, alors une part d'elle espérait que si son père prenait le pouvoir grâce à ses plans, les lois du monde seraient peut-être un peu meilleures. En tous les cas, pour se défendre, Dumbledore avait besoin d'un Juriste ou bien se défendrait-il tout seul.

Au même moment les grandes portes de la salle de jugement s'ouvrirent pour laisser passer un grand sorcier. Il avait l'air sale, les cheveux grisâtres attachés en catogan à moitié défait et une barbe mal taillée. Il était dans une robe de sorcier couleur prune élimée et rapiécée qu'il avait assorti d'une cravate couleur olive. On aurait dit que c'était le seul vêtement neuf de sa garde-robe miséreuse et tâchée. Son entrée amena avec lui des effluves de bouc et d'alcool de mauvaise qualité un peu entêtants. Quand Dumbledore vit l'inconnu il parut aussi heureux que surpris de le voir et Médusa remarqua que leurs yeux étaient très semblables.

—Qui êtes-vous, vous ? grogna Tuft.

—Le Juriste représentant Mr Albus Perceval Wulfric Brian Dumbledore, fit l'inconnu d'une voix éraillée. Abelforth Dumbledore. Juste Abelforth car les autres prénoms étaient pris.

Il y eut un unanime mouvement interloqué dans la salle d'audience tandis Tuft fronçait les sourcils au dessus de son nez de rat.

—Le frère de l'accusé ? D'où êtes-vous juriste déjà ? Votre nom n'est jamais passé par l'Ecole du Magenmagot à ce que je sache.

Les hauts juges se tournèrent entre eux l'un vers l'autre pour commenter cette annonce à voix basse.

L'Ecole de Magistrature du Magenmagot était une formation d'un an que seuls certains sorciers tentaient, pour beaucoup les plus purs et les plus fortunés. Elle garantissait de fait une place pour siéger lors des audiences et c'était donc une assemblée de sorciers sang pur pour la plupart acquis à leur famille qui observait ce nouveau venu.

La Haute Juge Hopkrik prit la parole après avoir lu une note dans son dossier :

—Alors propriétaire du pub La Tête du Sanglier, vous avez passé votre soutenance magique par correspondance en 1944 grâce à l'Université Magique des Secondes Chances, fit-elle d'une voix un peu tremblante. De là, vous n'avez réclamé votre siège de Juriste qu'un an plus tard pour faire voter l'alinéa Ariana au code de régulation du secret magique.

Médusa ne connaissait pas l'alinéa dont la Juriste parlait, mais ce fait donnait à Abelforth Dumbledore toute la légitimité de représenter son frère quand bien même n'eut-il pas effectué le parcours « classique ».

—C'est exact, sous la direction de feue Willemina Tuft la mère de notre cher Ministre qui a tranché en faveur de l'ajout de cet alinéa. Pardonnez mon retard, fit tranquillement le Dumbledore. J'ignorais que l'heure du procès avait été avancée. Par un heureux hasard, je devais livrer un tonneau d'hydromel à l'un d'entre vous. Ne voyant personne venir j'ai compris qu'on avait essayé de me rouler.

Il ponctua son excuse d'un sourire aux dents noirâtres qui épouvanta Médusa et quelques membres du Magenmagot eurent le bon goût de paraître gênés. Dumbledore se pencha pour parler à son frère alors que Tuft un peu déboussolé s'éclaircissait la gorge. Ce que les deux frères se disaient ne devait pas être sympathique car on aurait pu croire que le cadet insultait son aîné.

—Si l'accusé Dumbledore accepte de se faire représenter par… vous, alors nous pouvons reprendre.

Dumbledore depuis son box d'accusé hocha tranquillement la tête.

Médusa remarqua que son père semblait tendu. L'apparente bonhommie de Dumbledore avait de quoi désarçonner plus d'un, Médusa vit que sa mère toisait le frère du directeur d'un regard à faire fuir les détraqueurs. Abelforth Dumbledore n'était pas une donnée prévue dans le procès et son père jaugeait le sorcier d'un air inquiétant en attendant la suite.

Les photos des différents blessés et dégâts de Poudlard prises furent présentés au Magenmagot, pendant que certains hauts mages lisaient les procès verbaux établis par les aurors.

L'énumération était longue et laborieuse, dans un jargon un peu obtus et Médusa se résolut à écouter car Tuft rappelait les derniers faits.

—…Enfin votre absence aura fait treize blessés et grièvement blessé votre collègue Mrs Burbage qui a accepté de se produire comme témoin. Vous aviez connaissance du danger de la présence d'acromentules au sein de la forêt sans agir en conséquence.

—Des barrières étaient posées pour protéger le château, objecta Abelforth. Le sortilège de Tout-Empêche, empêche les créatures non humaines ou humanoïdes d'entrer dans en endroit. Pour que le bouclier ait été brisé, il faut qu'un sortilège ait été lancé depuis l'intérieur du parc. Mon très cher frère et client n'étant pas présent physiquement comme vous l'avez pointé, ce n'est pas de sa faute si le charme a été percé.

—L'éloignement du directeur peut-il affaiblir les sortilèges ? demanda un gros sorcier à Dumbledore.

—Normalement non, fit l'ancien directeur en balayant la salle du regard.

À cette réponse, la greffière et sa plume de vérité conforme écrivirent férocement sur leur calepin et son père se tendit. Dumbledore regardait dans leur direction. Si la salle d'audience n'avait pas été remplie de témoin, sans doute que son géniteur aurait tué le directeur dans la seconde.

—Comme l'a expliqué mon client durant son procès verbal établi par les aurors, le transfert de ces araignées était prévu pour les vacances scolaires afin de ne pas mettre les élèves en danger. Le Magiezoologiste Newt Scamander pourra vous le confirmer, plusieurs autres sorciers s'étaient portés volontaires dans cette entreprise.

—Et où se trouvait Dumbledore ? interrogea une sorcière du Magenmagot.

—Appelé aux côtés des aurors suite à l'apparition de la marque de Grindelwald au dessus du Chemin de Traverse. Le directeur du QG des Aurors Sandor Rosier pourra témoigner pour vous également. En vain, Grindelwald était absent, pointa Abelforth. Des petits plaisantins ou une diversion ? Reconnaissez que c'est étrange comme les éléments s'alignent, alors que mon client est attiré ailleurs, les défenses du château sont percées de l'intérieur.

—Hypothétiquement percées de l'intérieur. Le rapport de Mr Rosier indique qu'aucune anomalie n'a été vraisemblablement trouvée. Et avez-vous un nom ou au moins un coupable ? Grindelwald ne peut pas excuser toutes les fautes de votre client, s'exaspéra Tuft.

—En effet, répondit le plus jeune des Dumbledore, j'en ai un. Le Professeur Tom Jedusor.

Son père s'y était attendu. Il offrit à l'assemblée un sourire.

—J'ai une toute autre version à proposer, fit son père tranquillement en se levant.

Le juriste Black se leva et traversa la salle d'audience jusqu'aux portes d'où émergèrent un sorcier. Il était un peu maigre et pâle avec de longs cheveux roux attachés en catogan. Ce visage Médusa le connaissait très bien.

—Fabian Prewett, le reconnut Mrs Hopkrik complètement tétanisée. Vous avez disparu pendant des années !

—Pour ma protection j'ai dû disparaître, articula difficilement le jeune homme qui prit ensuite l'air d'un comédien dans une pièce grotesque. Après que Dumbledore nous a forcé à enlever les jumeaux Jedusor mon frère et moi et a assassiné Gideon pour avoir échoué.

Dans le regard de Dumbledore il semblait y avoir toute la désolation du monde, le Magenmagot était au contraire survolté par ses révélations. Médusa vit tout l'effroi et la colère passant sur les visages des sorciers en robe rouge tandis qu'Abelforth Dumbledore fixait le sol d'un air furieux.

—Nous-N-Nous allons faire une courte pause, fit Tuft encore une fois un peu dépassé.

Assise entre ses parents, Médusa les vit sourire d'un air narquois et supérieur. Dans ce procès, ils ne faisaient que commencer à jouer, et avaient soigneusement placé toutes les pièces pour attenter à l'honneur et la réputation de Dumbledore avant de l'assassiner. C'était un spectacle inédit car elle allait être actrice cette fois. Elle n'avait qu'à se laisser porter et peut-être que cette noirceur dans son cœur s'en contenterait. Alors comme ses parents, elle afficha un petit sourire.

Après une courte pause, le procès reprit. Black était parti discuter avec Mrs Burbage et Prewett en compagnie de son père. Médusa imaginait que le choc et la colère avait incité la sorcière à porter plainte auprès de l'école et du Magenmagot et s'en contenta. Que cette idiote amie des moldus se soit laissée manipulée pour l'aider à se venger lui plaisait étonnement. Comme toutes choses simples, elles avaient une saveur particulière.

—La petite sang-de-bourbe s'est amourachée de ton père, caqueta sa mère en lui saisissant la main. Voilà qu'il a trouvé un nouveau jouet.

Effectivement Burbage fixait son père d'un air doux comme apaisée par ses paroles alors que dans le box des accusés les deux Dumbledore semblaient se disputer. Médusa récupéra sa main en jetant un regard farouche à sa génitrice.

—Le procès peut reprendre, Maitre Orion Black assurant en plus de la défense de Mrs Burbage et du Conseil de l'Ecole, la défense de la famille Jedusor. Mr Prewett, en tant que témoin clef dans l'affaire vous passez dès à présent.

Lentement Prewett s'avança vers le centre de la salle d'audience où un siège était apparu. Tuft jaugeait ce nouveau venu avec un intérêt à peine poli, tandis qu'Abelforth Dumbledore avait cessé de parlementer avec son frère.

—Avant toute chose, interpella Abelforth, nous devons être sûrs que Mr Prewett dit la vérité, compte tenu de son absence suspecte ces dix dernières années. Le Véritasserum doit être utilisé conformément à nos lois.

Médusa et ses parents n'étaient pas étonnés de cette demande, ils se doutaient qu'elle allait venir. Tuft se gratta l'arête du nez d'un geste peu élégant en cherchant à se rappeler la loi justifiant cette procédure. Mrs Hopkrik jeta un coup d'œil aux Dumbledore puis se pencha vers le Ministre d'un air irrité :

—La loi Lestrange concernant le Code de la Justice Magique. Si un témoin d'une affaire disparaît pendant une période plus de deux mois, le Véritasserum est l'outil utilisé pour garantir la transparence dans l'application du jugement.

—Alors faites, faites.

Un auror partit chercher le véritasserum, quand il revint avec un grand plateau et une carafe, Médusa trouva qu'il ressemblait un peu à Kingsley Shacklebolt en septième année à Gryffondor. Peut-être était-ce son père ? L'auror plaça le plateau et la carafe argentée face à Fabian Prewett. Ce dernier jeta un coup d'œil farouche dans leur direction et sa mère dut lui faire un geste encourageant car il prit le petit godet argenté tendu par l'auror. Les greffiers notaient cette information, tandis qu'Abelforth Dumbledore avait un air de pur contentement.

Quand Fabian déposa le godet argenté, Abelforth s'en saisit, le remplit et le porta à sa bouche sous leur regard stupéfait.

—Si quelqu'un doit dire la vérité dans ce procès, tout le monde doit la dire, fit Abelforth d'un air goguenard en reposant son godet comme un ivrogne.

Albus Dumbledore dans son boxe avait un petit sourire et c'est en voyant l'expression dangereuse de son père que Médusa comprit. Dumbledore aurait pu très bien se défendre tout seul pour ce que cela importait désormais. Il avait décidé de ne pas tenter de prendre la fuite et il avait choisi son frère pour le défendre. Un individu qui était inconnu à Tom Jedusor et fortement imprévisible.

Dumbledore n'avait pas dit son dernier mot, au petit sourire sec et pincé qu'il leur adressa. Sa mère marmonna quelque chose dans une langue que Médusa ne comprenait pas, tandis qu'Orion Black en contrebas demandait muettement s'il devait prendre une dose de Véritasserum à son tour. À cela, son père lui adressa un regard glacé et Black laissa là, le plateau et la carafe de Sérum de vérité.

—Nous en étions donc restés à votre arrivée, Mr Prewett. Après que le professeur Dumbledore ait accusé le professeur Jedusor, vous avez avoué la tentative d'enlèvement des enfants de Mr et Mrs Jedusor, résuma Tuft. Je laisse la parole au Juriste Dumbledore. Vous avez la parole Maître.

—C'est pour cette dernière phrase que j'ai dû apprendre nos lois de long en large, sourit Abelforth Dumbledore en se frappant les mains.

Il avait l'air d'un vieux roquet qui pour la première fois avait trouvé un os en caoutchouc à mordiller sur son chemin. Il appréhendait Prewett avec un petit sourire fait de dents noires et de barbe mal taillée pour voir sous quel angle attaquer.

—Déjà, nous allons commencer par votre identité et date de naissance pour nous assurer de l'efficacité du sérum.

—Fabian Collinus Prewett, répondit lentement l'interpellé en refusant de regarder les Dumbledore. Né le 3 Janvier 1939.

—Frère jumeau de Gideon Senerus Prewett tué en Février 1957 dans l'allée des Embrumes ?

—Oui.

Médusa savait très bien comment résister au Véritasserum, son père et sa mère le lui avaient appris et avaient sans doute donné des cours à Prewett. Il suffisait juste de répondre par de petites phrases pour dévier au mieux l'effet du sérum. On pouvait dire ce que l'on voulait si on était assez préparé, mais à certaines questions on ne pouvait cependant pas mentir si elles étaient trop imprévisibles. Et en voyant Abelforth Dumbledore gratter sa chevelure sale avec un sourire étrange, elle se dit que cet homme-là était justement très imprévisible.

Anxieuse, Médusa observa tous ces inconnus débattre :

—Vous avez été jusqu'ici porté disparu et déclaré mort après l'assassinat de votre jumeau. Où étiez-vous pendant tout ce temps ?

—Chez Mr et Mrs Jedusor, répondit d'une petite voix Prewett. Ils m'ont accueilli avec générosité malgré ce que j'avais fait.

—Parlons-en en de ce que vous avez fait, reprit Tuft alors que Maitre Black ricanait discrètement dans le col de sa robe de sorcier. Pouvez-vous nous en dire plus ? Le professeur Dumbledore alors directeur de Poudlard vous a commandité un enlèvement ?

—Oui. N-Nous venions de terminer nos études avec mon frère quand le professeur Dumbledore nous a parlé de son projet. Il n'avait pas confiance en le professeur Jedusor qui venait d'être engagé et nous a convaincus de l'aider. Selon lui, il était dangereux. Nous ne savions pas vraiment à quoi nous attendre, alors nous l'avons écouté. Nous avions confiance en Dumbledore. Quand nous avons compris que la mission qu'il nous confiait était d'enlever Médusa et Salazar Jedusor nous ne pouvions plus reculer. Ce… Ce jour là, Mrs Jedusor était seule avec ses enfants et ses elfes. Nous savions que c'était une cracmole, alors nous l'avons attaquée. Les elfes nous ont attaqués à leur tour, et tandis que Mrs Jedusor prenait la fuite Dumbledore a tué mon frère depuis un toit. Mrs Jedusor m'a emmené avec elle pour ma protection.

À côté de Médusa sa mère dissimulait à peine son petit roucoulement satisfait. Elle adorait que l'on parle d'elle et que l'on vente ses exploits. Là dessus, sa mère et son père étaient très proches et c'était peut-être bien sur ça que tenait leur mariage après toutes ces années.

Le Magenmagot en entier semblait pensif et les regards allaient de Dumbledore à Prewett. Abelforth se pencha vers son ainé pour commenter les révélations pendant que Maitre Black feignait de regarder ses ongles avec un ennui palpable. Les deux journalistes de la gazette avaient les yeux fiévreusement baissés sur leur parchemin.

—Vous êtes donc resté caché pendant presque dix années sans porter plainte contre mon client ? reprit Abelforth.

—Oui.

—Bien traité ?

—N-Oui.

Cette petite hésitation fit briller une étincelle dans le regard bleu électrique du plus jeune des Dumbledore. Derrière son brouillard de cheveux crasseux mal attachés, Médusa lui trouva l'air d'un vieux renard en chasse.

—Etes-vous sûr d'avoir vu Albus Dumbledore attaquer votre frère ?

—Non, répondit honnêtement le Prewett tétanisé avant de reprendre. Je n'ai pas eu le temps de le voir mais ce sont ce que Mrs Jedusor et ses elfes m'ont dit. Je-Je les crois. Ils ont été bons pour moi et m'ont protégé alors que je ne pouvais pas contacter mes proches. Ils ont été vraiment très bons pour moi, vraiment très bons.

—J'imagine. Êtes vous devenu l'amant de Mrs Jedusor ?

—Oui-N-

—Objection, éructa Orion Black en s'avançant. Cette question n'a aucun rapport avec l'affaire !

—Oh si, susurra Abelforth Dumbledore. Mais je vais demander à notre bienveillant auditoire d'attendre encore un peu. J'aimerai que Mrs Jedusor soit interrogée concernant notre affaire.

Sa mère s'était légèrement tendue sur son banc, son père essayait de garder un masque impassible. Médusa sentit très bien la colère noire qui commençait à monter entre eux.

—Nous parlons d'un cas grave de négligence ayant entraîné des coups et blessures au sein de notre prestigieuse école, nous parlons ensuite d'une affaire d'enlèvement et maintenant quoi, quelles affaires scabreuses allez vous déterrez ? intervint Tuft.

Quand on commence à creuser, on ne sait jamais ce que l'on va déterrer, fit tranquillement le plus jeune des Dumbledore.

Le Ministre Tuft semblait pour la première fois s'amuser depuis le début du procès. Il n'aimait pas Dumbledore comme bon nombre de personnes au Ministère et semblait trouver très intrigant de fouiller dans ses plus sombres secrets. Albus Dumbledore avait un air vaguement désintéressé, comme s'il se trouvait devant un tableau piteusement barbouillé et qu'il attendait le moment le plus adéquat pour s'épargner cette triste contemplation.

—J'appelle notre témoin, Mrs Jedusor, reprit Tuft après s'être mâchouillé la lèvre.

Quand sa mère se leva, elle jeta un coup d'œil farouche à son père. Ils échangèrent silencieusement pendant une demi seconde durant laquelle Médusa vit presque les traits de son géniteur s'étirer pour devenir ceux d'un serpent tant sa colère était grande. Il se recomposa une moue tranquille. Sa mère descendit gracieusement l'estrade pour aller s'asseoir sur le siège de témoin à côté de Prewett. Le godet de véritasserum lui fut présenté et elle le but cul sec avec assurance.

Médusa coula un regard vers son père, espérant comprendre le trouble de sa mère qui prenait place.

—Ta mère connaît ce Dumbledore, susurra-t-il d'un ton trop onctueux et doucereux pour ne pas annoncer une punition à venir.

Presque par réflexe, Médusa s'écarta mais son géniteur posa une main ferme et glaciale sur son épaule pour la maintenir en place.

—Présentez-vous, ordonna Tuft. Noms, date et lieu de naissance.

—Méroé Sara Jedusor née Gaunt-Apreti le 21 juin 1920 à Sarandë, Albanie.

—Pouvez-vous nous raconter cette journée de Février 1957 ? demanda Maitre Black.

On aurait dit que sa mère s'était préparée toute sa vie pour cette question. Dans sa robe bleu clair et avec son foulard couleur crème autour de son visage, elle était figure d'innocence tandis qu'elle débutait d'une voix douloureuse.

—Je devais aller faire une course pour ferrer mes sombrals… vous savez c'est si compliqué de trouver de bons artisans pour ne pas abîmer leurs sabots. Je savais qu'un ferrailleur se trouvait dans l'allée des embrumes. Ce jour-là là mes tendres chéris étaient un peu surexcités. Vous savez ce que c'est à cet âge-là, ils courent littéralement partout. J'ai décidé de les emmener avec moi pour les calmer. Après avoir réalisé ma course, j'ai vu deux ombres arriver vers moi. Ils ont essayé de m'arracher mon pauvre Salazar des bras. J'ai crié, et… notre elfe Manille s'est interposée. La pauvre petite créature s'est prise un sort de plein fouet et est morte sur le coup. J'ai pu prendre avec moi Salazar et Médusa tandis qu'un des hommes était abattu. J'ai vu Mr Prewett qui semblait en pleine détresse et je l'ai emmené avec moi alors que nous transplanions avec nos elfes.

Sa mère avait tiré un mouchoir en dentelle de sa robe bleue claire et y cachait la moitié de son visage comme une tragédienne un peu grotesque. Médusa n'avait jamais vu sa mère pleurer et doutait qu'elle en soit capable, mais le Magenmagot compatissait face aux demi mensonges de sa génitrice. Son père arborait un air satisfait dans les gradins.

—Pardonnez-moi de vous en demander davantage Mrs Jedusor, reprit Maitre Black d'une voix chagrinée, mais que s'est-il passé ensuite ?

—Quand nous sommes arrivés chez nous, mon mari a confronté Mr Prewett, nous nous sommes expliqués mais Mr Prewett ne parvenait pas à avouer qui l'avait envoyé et pourquoi. J'avoue alors l'avoir séduit pour obtenir cette information. Une mère et une épouse ferait bien des choses pour le bien de son foyer. Mon tendre époux était au courant et a approuvé mes actions.

—Pourquoi ne pas avoir tout de suite confronté Dumbledore à la justice ? releva Tuft.

—Parce qu'il nous faisait peur ! Mon mari enseignait à Poudlard depuis à peine un an et n'avait jamais été très proche du Directeur. Nous voulions savoir ses motivations pour nous attaquer alors que nous sommes innocents. Nous brûlions de colère tous les deux, mais nous nous sommes résolus à attendre afin de protéger nos enfants. Tom surveillait le directeur pour qu'il ne s'attaque pas aux élèves de Poudlard pendant que je surveillais nos jumeaux. Vous savez après cela, notre fils n'a plus été le même. Salazar a été complètement traumatisé par cette expérience.

—Effectivement, abonda Black. Votre jeune fils n'a pas pu se rendre à l'audience aujourd'hui du fait de ce traumatisme. Je n'ai pas d'autres questions à vous poser.

—La parole est donc à Maitre Dumbledore, releva Mrs Hopkrik.

—Vous êtes une descendante de la famille Gaunt, vous, une cracmole ? commença Abelforth mais il connaissait déjà la réponse.

—Oui.

—Objection, cette remarque n'a d'autres buts qu'insulter ma cliente ! fit Black.

—Je cherche juste à appréhender la situation pour que nous puissions ensuite tous la comprendre, siffla le Dumbledore. Cracmol n'est pas une insulte, c'est un état de fait.

—Poursuivez Maitre Dumbledore, fit Tuft.

—Cracmol ne veut pas dire sans magie. Ce qui définit l'existence des cracmols est leur incapacité à jeter un sortilège basique, mais tous ne sont pas dénués de pouvoirs. Ils sont capables de voir les détraqueurs ou encore les sombrals. Vous en faites l'élevage avec votre époux, n'est-ce pas ?

—Non. Je les élève seule.

Sa mère avait l'air encore plus tendue et Médusa se demanda comment elle connaissait Abelforth Dumbledore.

—Pouvons-nous savoir où vous voulez en venir, Maitre Dumbledore ? s'exaspéra Hopkrik.

—Ce que je veux dire, et ma question est la suivante, avez-vous attaqué Mr Gideon Prewett ?

—Non !

—L'avez-vous tué ?

—Non, se récria sa mère en prenant l'air choqué. Jamais je ne pourrais faire une telle chose. Enfin, c'est insensé.

—Je pense que si, vous êtes tout à fait à même de faire une telle chose Madame Jedusor. Voyez-vous, nous nous connaissons vous et moi. Nous nous sommes déjà croisés au Manoir Malefoy.

À cela, sa mère se figea et eut l'air sur le point d'adresser au Dumbledore un geste obscène. Albus Dumbledore observait cette scène là avec un air plus inquisiteur. Derrière ses lunettes en demi lunes, le vieux directeur semblait comprendre où son frère voulait aller dans cet interrogatoire et cela ne lui plaisait pas du tout. Un frisson d'inquiétude dévala l'échine de Médusa.

—Objection ! Que vous connaissiez ma cliente n'est pas un souci en soi, intervint Maitre Black. Allez-vous produire une défense suffisante à votre frère en dénigrant une mère et une épouse aimante par vos calomnies ?

—Je ne dénigre pas, j'essaie de vous expliquer quelque chose, éructa le Dumbledore qui commençait à s'énerver. Mr le Ministre, puis-je continuer ?

—Faites, faites.

—Vous savez, travailler dans un bar vous fait rencontrer bien des personnes et entendre bien des choses. Mon bar n'est certes pas de première jeunesse, mais on y entend des nouvelles fraîches et on s'y fait quelques contacts utiles. Je sais par exemple, Mrs Jedusor que vous portez le nom d'Apreti, un clan tzigane d'Albanie et que vous n'êtes pas aussi démunie que vous le prétendez. Je ne peux pas mentir moi aussi je suis sous Véritasserum. Il y a des mois de cela, Mr Malefoy m'a commandé un fut de mon meilleur hydromel à apporter chez lui. Comme j'aime être payé rubis sur l'ongle et ne pas me faire entourlouper, j'ai apporté ce fut à l'intérieur de la demeure de Mr Malefoy, escorté par son elfe. C'est là que j'ai vu les petits talents de gitane de Mrs Jedusor. Devant un petit auditoire conquis et transi Mrs Jedusor dansait sur un sombral dans le salon d'Abraxas Malefoy.

—Ce que fait Mrs Jedusor de son temps libre ne regarde qu'elle, intervint Orion Black d'un air paniqué en commençant à comprendre où il voulait en venir.

—Ce n'était pas une danse comme les autres, Maitre Black. Je me souviendrai toute ma vie de ce que j'ai vu, Mrs Jedusor ne dansait pas simplement sur l'animal, elle l'a tout simplement… englouti dans l'obscurité. Je n'avais vu qu'une seule fois ce type de pouvoir, et j'ai immédiatement su que même si Mrs Jedusor est une cracmole, elle est bien capable de magie. Méroé Jedusor est ce que l'on appelle une Sangsombre ou une Kali. Spero Patronum.

Il leva sa baguette vivement et un bouquetin argenté en jaillit pour foncer vers la Sangsombre. Elle poussa un cri aigu de peur et de douleur quand il faillit la percuter mais au dernier moment la forme argentée disparut. Les yeux de sa mère avaient viré au bleu limpide et sa peau brune grésillait comme brûlée.

La main de son père sur l'épaule de Médusa se serra si violemment qu'elle retint avec peine un petit gémissement. De sa place, Mrs Burbage leur jeta un coup d'œil plein d'incompréhension alors des murmures parcouraient les bancs des juges. La jeune fille observait sa mère lentement se relever avec une expression presque démoniaque, ses yeux s'assombrirent lentement. Si le maillet du ministre n'avait pas frappé sur son socle de bois pour réclamer du silence, elle aurait englouti le Dumbledore dans l'instant.

—Dumbledore ! siffla Tuft. Que veut dire ceci ? Vous attaquez un témoin en plein procès ? Comment osez-vous ?

—Ceci est la démonstration la plus limpide de ce que je vous disais à propos des Sangsombres.

—Qu'est-ce qu'une Sangsombre, Maitre Dumbledore ? demanda une jeune mage nommée Bones. En quoi les pouvoirs de Mrs Jedusor sont-ils liés aux crimes de votre client ?

—Abelforth, intervint Dumbledore depuis sa place comme pour raisonner son cadet. Ne parle pas de-

Mais ce dernier ne l'écoutait pas. Dans ses haillons, il prit une pose presque tragicomique exhalant d'autres odeurs exotiques et peu ragoutantes de sa robe élimée puis prit la parole :

—Il nous faudra remonter un peu dans le temps. Vous savez que les Dumbledore sont une vieille famille et en raison de notre ancienneté, certains pouvoirs ont pu passer dans notre lignée. Notre père en était persuadé et ce fut pour cette raison qu'il fit de la Mageugénisme, une ancienne discipline pratiquée par certaines non moins anciennes familles afin d'obtenir des enfants plus puissants. Salazar Serpentard aurait été un des premiers à s'intéresser à ce genre de propriété du sang. De là, nous sommes nés tour à tour, mon frère, moi même et ma sœur, Ariana. Chacun d'entre nous reçut des dons spécifiques légués par le sang et par la génétique.

—De quels dons parlez-vous ? quémanda Mrs Hopkrik perplexe.

—Certains enfants naissent Métamorphomages, d'autres Legilimens, d'autres ont juste une habilité avec la nature, d'autres encore sont justes de simples sorciers. À cette loterie du sang, il existe des pratiques pour s'assurer d'avoir des enfants pourvus de dons. Mon cher frère est-ce qu'on appelle un Feudenfer, un mage avec une très grande habilité avec le feu et la possibilité d'être écouté du Phénix. Une puissance hors norme qui peut rapidement monter à la tête, ce qui lui est arrivé je vous l'assure. Je n'ai par chance, hérité que de peu de pouvoir. Cela n'intéressait que peu notre géniteur, jusqu'à ce que naisse notre sœur, Ariana. Une sangsombre.

À cette dernière phrase, la salle d'audience se tendit et même Médusa sentit que son père s'était intéressé de près à ces révélations sans pour autant oublier sa colère brûlante.

—Notre mère Kendra avait du sang romani. À la naissance d'Ariana, elle n'avait jamais été aussi heureuse, chez elle on appelait les possesseurs de ces dons les kalis. Kali ou Sangsombre, nous n'étions pas préparés à ce genre de pouvoir. Nous avons eut de nombreux Sangsombre dans l'histoire de la Magie sans qu'ils ne soient pour autant appelés comme tel. Les Sangsombre sont l'obscurité elle même, ils ne peuvent survivre à une lumière trop prolongée, agonisent devant un patronus et jouissent dans la pénombre de l'hiver. Mais ils ne peuvent vivre seuls, ils ont besoin de vampiriser d'autres sorciers ou des moldus.

De son siège, sa mère était figée comme une statue de sel et semblait sur le point d'engloutir Dumbledore. Il fallut qu'elle jette un regard derrière elle à son époux pour s'éviter cette faute fatale.

—C'était ce que faisait Ariana depuis le plus jeune âge. Chaque geste de tendresse que nous lui donnions ou qu'elle nous donnait, une étreinte, un baiser sur le front nous vampirisait pour la rendre plus puissante. Elle s'en rendait compte, mais s'en moquait. Cela lui montait rapidement à la tête, comme l'ivresse. Après nous avoir retiré un peu de notre force, elle parvenait à nous faire oublier par de petits jeux dans l'obscurité. Elle mimait des formes dans les ombres, des danses dans les ténèbres. Mon frère Albus et mon père tentaient de réprimer ces crises, en vain. Les Sangsombres ne sont pas les sorciers les plus amicaux, ils sont même souvent attirés par la magie noire. Ariana n'a pas eut le temps de s'y intéresser. Comme je vous l'ai dit, les Sangsombres sont attirés par l'obscurité et par les gens… mauvais. C'est presqu'irrépressible chez eux ce besoin de chercher l'obscurité la plus noire et de la titiller chez certain.

« Un soir elle a quitté la maison dans notre dos et a rencontré ce groupe d'adolescents moldus. Ils ont pris peur de ses pouvoirs… et l'ont totalement détruite. De là sa magie a été totalement détraquée, elle est devenue Obscurial.

—D'où votre dévouement pour l'ajout de l'Alinéa Ariana concernant la scolarisation des Obscurials, comprit Mrs Hopkrik. Ce qui a permit depuis l'année dernière la scolarisation à Poudlard d'un Obscurial.

—Edward Lee, rajouta la sorcière Bones en lisant un dossier.

—C'est exact, fit le Dumbledore.

—Cette histoire est bien tragique, releva Tuft, mais quel est le rapport avec les Jedusor ?

—Si avez écouté avec attention cette histoire bien tragique, -fin de citation- alors certains d'entre vous commencent à comprendre. Mon frère et client a revu ses cauchemars de notre jeunesse dans cette famille et a souhaité intervenir. Méroé Jedusor est une créature de magie noire attirée par la magie noire. Le fait qu'elle ait pu créer une famille nous fait donc poser la question sur ce qu'elle est susceptible de faire aux siens et sur qui est réellement son compagnon Mr Jedusor.

—Co-Comment osez-vous ? éructa sa mère en prenant l'air scandalisée.

—Mrs Jedusor, se tourna alors vers elle Abelforth. Aimez-vous vos enfants et votre époux ?

—Non.

À cette réponse sèche, sa mère prit la mesure de ses révélations et tenta d'arrondir les angles devant le Magenmagot inquisiteur.

—Je ne peux pas éprouver d'amour… cela me détruirait. Mais il existe bien des nuances à ce sentiment et aucune d'entre elles ne vous concernent.

—J'aimerai que les choses soient aussi simples, Madame. Voilà la véritable utilité du véritassérum, on peut facilement outrepasser ses effets, mais il est une question à laquelle on ne peut mentir, c'est bien l'amour. Un sentiment que vous avez sans doute abandonné durant votre déportation avec votre clan.

Sa mère de nouveau se figea. Médusa remarqua que les traits olivâtres de sa peau s'étaient palis. Ses grands yeux noirs reflétaient quelque chose d'ancien et abîmé que la jeune fille n'avait jamais remarqué chez sa mère.

—Durant la Seconde Grande Guerre des Moldus, vous avez été envoyée dans les camps d'exterminations avec le reste de votre clan en raison de votre origine ? demanda le Dumbledore d'une voix un peu plus douce.

—Oui.

—Pour vous en sortir avez-vous attaqué des moldus ?

—Oui, mais… c'était de la légitime défense ! Les lois des sorciers le permettent ! Cela ne vous concerne pas !

Sa mère avait prit un étrange accent que Médusa n'avait jamais entendu dans la bouche de sa génitrice. Cette femme là, pour la première fois en plein désarroi lui parut être une totale inconnue.

—Comprenez bien cher auditoire, que du fait de ses pouvoirs, il est à craindre que le témoignage de Mr Prewett ne soit pas aussi véridique qu'il l'affirme s'il est justement devenu l'amant de Mrs Jedusor. Mr Jedusor a donc attiré à lui une créature attirée par la Magie la plus obscure et en tant que directeur de l'école Poudlard, mon frère ne devait pas prendre ses précautions ?

—Enlever des bambins n'est pas une précaution, c'est un crime, pointa Black.

—Pour les protéger. Lui et moi savons de quoi les Sangsombre sont capables pour l'avoir vu sur notre jeune sœur. Selon ses dires il voulait leur offrir un autre foyer, une erreur pleine de bonnes intentions reste une erreur, je vous l'accorde.

—Monsieur le Ministre, j'aimerai poser davantage de questions à Mrs Jedusor, intervint Black après avoir échangé un long regard avec le père de Médusa.

—Eh bien faites, nous reprendrons avec votre interrogatoire plus tard, lâcha Tuft en ne sachant plus vraiment où donner de la tête.

Abelforth Dumbledore s'écarta pour laisser passer Black devant lui. Son air de vieux renard ne s'était pas amoindri, mais il avait un pli d'inquiétude visible entre ses deux sourcils grisâtres. D'une certaine façon, il savait qu'en participant à ce procès il se condamnait aussi à mort et espérait bien faire tout son possible pour que le procès soit des plus retentissants.

—Mrs Jedusor, reprit Maitre Black. Je n'aurai pas l'indélicatesse de mon confrère, mais il faut que mes collègues comprennent votre posture. Pouvez-vous nous raconter la rencontre avec votre époux ?

Elle eut l'air d'hésiter un moment avant de répondre d'une voix presque atone.

—Après les camps. Nous- Je me cachais… je n'avais plus rien, plus de famille, plus rien. Ils étaient tous morts… quelque part je me serais laissée mourir aussi. Plus personne n'approchait les romnis, tout le monde voulait nous oublier. C'est lui qui m'a trouvé, d'une certaine façon il m'a sauvée. Lui aussi était orphelin, il n'avait rien. Il m'a sauvée en me donnant une famille. Je m'occupe des sombrals en leur prenant un peu de leur force, pour ne pas leur faire du mal à eux. Je prends de potions fortifiantes la journée mais vis beaucoup la nuit. Je suis loin de ma famille pour ne pas les blesser. J'avais besoin d'équilibre j'en ai trouvé ainsi.

—C'est vrai ce mensonge ? se moqua Abelforth.

—Maitre Dumbledore, si vous ne souhaitez pas être évacué sans délai, laissez parler Maitre Black, intervint une Haute Mage à côté de Tuft.

—Pouvons-nous savoir quel équilibre vous avez trouvé ? demanda justement Tuft.

—Mon époux me donne un peu de sa magie. Pas assez pour le blesser, mais assez pour que je discerne un peu de lumière dans l'obscurité.

Black de sa place échangea un regard avec son vrai Maitre à côté de Médusa. Son père ne comptait pas intervenir dans le procès, pas tout de suite. La réserve de Dumbledore qui était resté très silencieux l'intriguait et le faisait bouillonner. Comme des joueurs d'échec devant un échiquier d'empiècement de haine, ils se portaient sentencieusement des coups à distance.

—Nous avons en effet eut de nombreux Sangsombres dans notre histoire. Je me suis moi même intéressé à la discipline des sangs, comme bien des Black avant moi. Morgane la Fée en était une, et le duo qu'elle forma avec Merlin n'est-il pas la preuve qu'elle n'était pas une maléfique sorcière ? Merlin non plus n'était pas non plus un Mage Noir mais il pratiquait la magie noire. Mr et Mrs Jedusor ont su trouver le même équilibre.

—Le Professeur Jedusor se prend s'en doute pour Merlin, mais il n'en a clairement pas l'étoffe, grogna dans sa barbe Abelforth assez fort pour être entendus de tous.

L'ancien Directeur dans son box eut un petit gloussement qui glaça son père d'une colère si violente que Médusa crut qu'il allait incendier la salle.

—Assez, je fatigue de votre impertinence Dumbledore. Je propose que nous fassions une pause pour le déjeuner, finit par geindre Tuft. La séance reprendra à 13h, vous feriez mieux de vous calmer.

Ils se levèrent bien vite. Sans un mot, Médusa suivit son père qui happa sa mère, Prewett et Maitre Black derrière lui. Ils laissèrent le professeur Burbage complètement déboussolée par les enjeux de ce procès qui n'avaient plus rien à voir avec la sécurité des élèves ou encore ses propres meurtrissures. Les deux Dumbledore sortirent encadrés d'aurors par la porte opposée.

Toujours sans parler, Black les conduisit dans une petite salle à côté de la salle d'audience servant aux criminels et leur Juriste à s'entretenir avant leur audition. Son père insonorisa la pièce d'un revers de main avant d'éructer en fourchelangue.

Tu connaissais ce Dumbledore et tu ne me l'as pas dit ?

Je ne connaissais pas son nom ! Je l'ai vu quelques secondes à peine le temps que Malefoy le paye ! Bon sang, si tu dois t'en prendre à quelqu'un c'est plutôt à Malefoy qui fait rentrer chez lui n'importe qui ! répondit sa mère en sifflant.

Rassure-toi il sera puni comme il le mérite, siffla son mari d'une voix tranchante.

Devant ce concert de sifflement auquel il ne comprenait rien, Black était un peu pâle et tremblotant. Médusa baissait la tête, les mains dans les poches. Elle sentait Echo s'enrouler autour de son poignet d'un air inquiet. Prewett était dans un coin, les yeux servilement baissés, Médusa se demanda où il avait été caché pendant toutes ces années. Ses parents cessèrent leurs sifflements furieux puis se tournèrent vers Black dans un même mouvement lugubre.

—Dumbledore est déjà fichu, fit Black. Il faut contrebalancer ce que ce vieil ivrogne a révélé-

—Comment a-t-il pu être au courant de tout ça, éructa son père d'une colère glacée faisant frémir toute la pièce. Ce n'était pas sur moi que Dumbledore faisait des recherches, c'était sur toi, siffla-t-il en se retournant vers sa femme. Toi et ta manie de te donner en spectacle.

Ses yeux n'étaient plus que deux rubis de fureur et la petite salle composée d'une chaise et d'un bureau tremblait comme si un séisme violent s'était abattu sur le Ministère. Médusa comme sa mère n'en menaient pas large. Cette dernière s'était réfugiée dans un coin de la pièce presque cachée derrière Prewett qui tremblotait péniblement coincé derrière le bureau.

—Si le spectacle n'est pas à ton goût, vociféra sa mère, ce n'est pas de ma faute ! Tu as dit que la situation était sous contrôle, comment pouvais-je savoir que cet homme enquêtait sur moi ? Crois-tu que j'ai parlé à une seule personne de ce pays des camps ? Tu as toujours voulu te donner en spectacle toi aussi, montrer à quel point tu es meilleur que tous. Eh bien montre leur ! Montre leur à quel point tu es bon ! Ce que j'ai été obligée de dire… par Morgane, tu me le payeras !

—Lumos.

Son père éblouit le visage de sa mère d'un coup de baguette en poussant sans ménagement Prewett. Elle hurla de douleur car la pointe de la baguette n'était qu'à quelques centimètres de son œil.

Vas-tu te taire ? siffla-t-il en fourchelangue. Tu en as assez dit.

Il se détourna d'elle et elle retomba contre le mur comme une poupée de chiffon. Par un curieux désir d'échapper à son géniteur et par un peu de compassion, Médusa accourut vers elle. Sa mère saisit sa main, mais ne la prit pas pour se relever. Elle la sentit lui prendre un peu de son énergie et une sensation d'engourdissement lui saisit le bras. Médusa la retira vivement et siffla :

—Je t'avais dit de ne plus faire ça ! Tu veux que je te le susurre à l'oreille ?

—Silence ! ordonna son père d'une voix glacée.

Les deux femmes s'écartèrent en se toisant.

—Nous allons devoir contrattaquer. Le frère de Dumbledore ne l'aime pas. Je l'ai senti, ils se haïssent. Il n'est pas là uniquement pour essayer de sauver son frère, ni même pour nous attaquer… Il veut quelque chose de ce procès. Que dit exactement l'alinéa dont ils parlaient, Black ?

—L'alinéa Ariana du Code de Restriction Magique, fit Orion Black. Si un Obscurus est déclaré chez un jeune sorcier ou une jeune sorcière, il est du devoir de la communauté magique de tenter de lui garantir des soins et une éducation afin de garder le Secret. Jusqu'ici il n'avait jamais été appliqué, les Obscurials sont tellement rares.

—Abelforth Dumbledore a été a serpentard, il n'est pas complètement stupide pour ignorer que son frère est mort. Il espère gagner quelque chose dans ce procès… pensa son père à voix haute.

Médusa savait que leurs lois étaient souvent écrites sur un système de jurisprudence. Souvent, les différents problèmes du monde magiques, que ce soit les crimes ou l'usage de magie hors de contrôle posaient des questions morales et éthiques à leur gouvernement. Des décisions étaient rendues lors de jugements qui ensuite aboutissaient à des lois. Médusa et son père semblèrent réaliser la même chose au même moment. Abelforth Dumbledore était peut-être là pour plaider pour sa loi et si le sujet touchait trop aux Obscurials, Edward Daniel Lee allait inévitablement arriver dans la plaidoirie. Et là, son père pourrait effectivement se retrouver en mauvaise posture en raison du serment inviolable qu'il avait fait.

—S'il souhaite modifier la loi, nous serons peut-être en accord lui et moi, susurra-t-il. Retiens bien Orion, le nom d'Edward Lee ne doit plus intervenir dans ce jugement. Il faut en finir au plus vite. Après Burbage, Médusa sera interrogée puis viendra Dumbledore. Arrange-toi pour me laisser parler le plus longtemps possible quand viendra mon tour. Médusa, voici ton oncle Fabian, il t'a vue grandir, invente-toi le reste.

Le rouquin en fond de la pièce était cajolé par sa mère avec une expression piteuse. Médusa le trouva bien triste et sa bourrelle s'écarta de lui avec satisfaction.

—Je veux la tête d'Abelforth Dumbledore en parure de mur, souffla-t-elle durement.

Tom Jedusor se tourna vers sa femme et lui offrit un sourire glacé.

—Je ne suis même plus sûr de te laisser le corps de Dumbledore après tes frasques, siffla-t-il en retour.

—Tu as voulu l'humilier avant de le tuer ce vieux cinglé, voilà qu'il nous fait la même chose mais tu as trop d'égo pour le voir !

D'un revers de main il la gifla. Sa mère éclata de rire. Médusa et les deux autres hommes de la pièce se figèrent de terreur. L'aura de la pièce était si froide qu'ils crurent être avalés dans un abysse glacé.

—À la moldue, cousin ? caqueta-t-elle l'œil noir. Les nazis frappaient plus forts !

Vous trois, dehors, siffla son père sans les regarder.

Sachant très bien que c'était la solution la plus sage, ils sortirent comme des pantins un peu désarticulés, leurs muscles exposés au froid étaient comme atrophiés. Médusa remarqua qu'elle tremblait et tenta de cacher son état. Quand la porte se ferma magiquement derrière eux dans un claquement glacial, Médusa s'adossa au mur. Elle n'entendait pas ce qu'il se passait derrière la cloison de pierre noire et ne préférait pas y penser. Ses parents pouvaient rarement passer plus de quelques minutes ensembles sans s'écharper et ne se voyaient que quand l'un avait quelque chose à demander à l'autre. Quelque part Abelforth Dumbledore avait raison, on était bien avec les Sangsombres précisément quand on se tenait éloignés d'eux.

À ses côtés, Maitre Black avait allumé sa pipe et fumait tranquillement, peu ennuyé par ce qu'il se passait derrière le mur. Fabian Prewett était dans un coin, les yeux fermés essayant de respirer calmement, comme un supplicié priant pour que sa misère se termine.

—C'est interdit de fumer ici, non ?

Allons, à quelqu'un de mon rang on ne refuse plus rien.

Il eut un petit gloussement avant d'enchaîner.

—Vous savez Miss Jedusor, il y a quelques années, la vision de votre père ne m'intéressait que de façon lointaine. C'était un camarade de classe, tout simplement… mais j'ai su ensuite su voir comment subtilement, il a su nous aider à construire lentement un monde meilleur. D'autres changements doivent arriver prochainement mais pour cela, nous devons retourner la situation en notre faveur. Votre père a un plan pour contrer Abelforth, il me semble. Il y a-t-il autre chose que je dois savoir concernant l'affaire Rosier ?

Médusa se glaça un peu plus.

—Si les Dumbledore en parlent, que ferez-vous ?

—Je nierai, Mère m'a fait répéter.

—Parfait. Attention au vieil ivrogne. Il tentera les coups bas. Gardez votre calme. Vous êtes une victime je le sais, nous le savons, mais la réputation de la Famille Rosier ne doit pas être entachée.

—Je sais, murmura-t-elle les dents serrées.

On le lui avait assez répété, ensuite elle pourrait se venger personnellement de Perceval. Son père le lui avait promis, aujourd'hui elle avait juste à voir les Dumbledore être traînés dans la boue.

La porte s'ouvrit derrière eux. Sa mère sortit la première. Médusa remarqua que ses yeux étaient alors bleus glacés, elle ne voyait plus rien et tituba presque sur le chemin avant de s'habituer à la faible lumière du couloir. À l'entrée, son père semblait attendre quelque chose :

Pardon Maitre, murmura-t-elle finalement et cela eut l'air de lui arracher la gorge.

Il s'en contenta et se tourna vers Mr Black qui rangeait sa pipe laissant un léger filet de fumée monter lentement vers le plafond de pierre noire.

—Après vous, Maitre, susurra son père au juriste avec un léger éclat rouge dans le regard.

Le Black un peu tremblant s'exécuta pour partir, emmenant Prewett pour lui faire les dernières recommandations s'il était de nouveau interrogé.

—Je compte sur toi, Médusa.

Sur ces paroles, il rejoignit les deux hommes au bout du couloir.

—Mère, que sont les camps ?

Sa mère n'avait pas bougé, elle baissa ses yeux redevenus noirs sur Médusa et siffla :

—Mange, nous avons encore à faire.

Elle sortit de la poche de sa robe deux autres chocogrenouilles puis partit. Alors la jeune fille se mit à sa poursuite sans oser poser davantage de questions. Ils entrèrent dans la salle d'audience avec quelques minutes d'avance, les Dumbledore n'étaient pas réapparut. Black et son père discutaient à voix basse avec toujours Mr Prewett attendant d'un air soumit non loin. Médusa alla s'asseoir auprès de Charity Burbage qui avait été totalement ignorée jusqu'ici.

—Vous avez pu manger professeur Burbage ? demanda-t-elle.

—Les elfes de l'école m'ont fait un sandwich à emporter. Je te remercie, Médusa, murmura la jeune femme.

Mrs Burbage était une sorcière en fin de vingtaine qui avait été très jolie, aujourd'hui elle n'était plus que l'ombre d'elle même.

—J'avais compris que Dumbledore surveillait votre famille, reprit la professeure d'une petite voix. Je ne pensais pas qu'il avait été aussi loin. C'est monstrueux ce qu'il a tenté de vous faire.

Médusa hocha la tête alors qu'au même moment le Magenmagot rentrait dans la salle d'audience. Les Dumbledore parurent à leur tour sans leur jeter un coup d'œil. Elle se leva et enfourna son chocogrenouille dans sa bouche. Mr Prewett alla se placer à côté d'elle sur le banc des témoins. Il parut aussi incommodé par l'odeur de chocolat que s'il s'était trouvé devant une bouse de dragon et eut l'air de se retenir de vomir. Les effets du Véritasserum avaient eut le temps de se dissiper, Médusa était curieuse de savoir ce que cet homme terrorisé avait négocié pour participer à ce procès. Si ce n'était pas sa vie, c'était celle de sa famille.

—Nous pouvons reprendre, entama Ignatus Tuft en leur permettant de s'asseoir après s'être lui même installé. Mrs Burbage je vous invite à venir témoigner.

Orion Black en ayant du mal à cacher un vague air de dédain, aida la sorcière à se rendre au siège de témoin. Le véritasserum ne lui fut pas présenté comme les faits étaient très récents.

Tuft lui posa quelques questions et tour à tour les deux juristes l'interrogèrent. Black lui faisait dire qu'elle avait eut confiance en Dumbledore et qu'aujourd'hui elle était lourdement handicapée, chose qui aurait pu arriver aux élèves, Ludo Verpey ayant perdu deux doigts suite à l'incident.

—Si le professeur Jedusor ne m'avait pas sauvée, j'aurais été dévorée par les créatures, conclut-elle finalement d'une voix douloureuse.

Elle jeta ensuite un regard hargneux au vieux directeur qui se contentait de gentiment sourire.

—Voyez encore une fois, malgré les calomnies préférées par les Dumbledore à quel point la réactivité du professeur Jedusor a permit d'éviter une situation catastrophique, ronronna Black et de nombreux membres du Magenmagot parurent approuver. Je n'ai pas d'autres questions.

Abelforth Dumbledore échangea quelque chose avec son frère puis laissa tomber l'interrogatoire.

—J'appelle maintenant Miss Jedusor, souffla le Ministre d'une voix molle comme s'il était en pleine digestion d'un copieux déjeuner.

Quand Black eut ramené Burbage à sa place, Médusa se leva. Elle caressa la tête d'Echo dans sa poche du bout de l'ongle pour se donner du courage tandis qu'elle s'asseyait sur le siège de témoin. De là, elle était pile en face d'Albus Dumbledore.

—Miss Jedusor est encore une sorcière de Premier Cycle, nous pouvons nous passer du véritassérum, souffla Black.

—Compte tenu de la gravité et de l'ancienneté de l'affaire, Miss Jedusor aura besoin d'un peu de sérum, contra Mrs Hopkrik. Si elle n'était qu'une enfant, certains souvenirs clés pourront être dévoilés ainsi.

—J'accorde l'utilisation de véritassérum, finit par lâcher Tuft impatiemment.

Médusa s'y était attendu et prit le godet que l'auror qui ressemblait à Kingsley lui tendit. Le breuvage n'avait aucun goût comme c'était le cas pour cette potion. Elle attendit que le Ministre parle, l'ancien directeur lui, avait les yeux baissés sur ses longs doigts :

—Rappelez nous votre identité, ordonna-t-il.

—Médusa Antigonia Jedusor née le 21 Décembre 1951, sœur de Salazar Atchel Jedusor.

—Je vous remercie et je laisse la parole à Maitre Black.

—Miss Jedusor, fit le Juriste d'un ton calme. Confirmez-vous la version décrite par Mr Prewett et votre mère ?

—Oui, fit-elle rapidement. J'étais petite mais je m'en souviens encore, deux hommes nous ont sauté dessus quand nous étions avec maman. Ils voulaient nous tirer vers une ruelle et transplaner. Salazar a lâché la main de notre mère et Manille a attaqué Mr Gideon Prewett. Après ça, il y a eut un rayon venu du ciel qui a frappé Manille et Mr Prewett alors nous avons fuit avec maman. De là, Oncle Fabian est parti avec nous jusqu'à la maison.

Elle ponctua sa déclaration d'un petit sourire de circonstance à cet inconnu qui prétendait avoir vécu avec eux ces dix dernières années. Comme un cheval bien entraîné, il répondit à ce sourire d'une mimique un poil plus grotesque.

—Quelles ont été vos relations avec le professeur Dumbledore depuis que vous êtes rentrée à Poudlard avec votre jumeau ?

—Distantes, murmura Médusa. Le professeur Dumbledore essayait de nous parler, si cela arrivait je prévenais notre père, ensuite il se tenait calme pendant plusieurs mois. J'avoue avoir eut peur dans ce château avec lui, mais je faisais confiance à nos parents car la vérité serait dévoilée.

—Je vous remercie Miss, pas d'autres questions.

Sa langue la picotait légèrement sous le coup de ce demi mensonge, mais Médusa parvint à passer outre. Ce fut alors à Maitre Dumbledore de s'avancer sur ses vieilles cannes qui pointaient par à-coup de sa robe élimée.

—Miss Jedusor…

Il prit l'air en pleine réflexion et Médusa se tendit, craignant la question qui allait venir. Dumbledore avait prévenu son frère qu'elle était légilimens et ce dernier gardait les yeux tranquillement baissés sur son sourire en coin.

—Déjà, est-ce que vous allez bien ?

—Non.

La réponse sortit rapidement et Médusa savait qu'elle ne mentait pas, même sans sérum. Perplexe et désarçonnée, Médusa essaya de dire quelque chose mais le plus jeune des Dumbledore la coupa :

—Il était important de commencer par là, car il me semble que vous n'allez pas très bien justement et que personne ne semble s'en être inquiété.

—Objection, éructa Black, les jugements de valeur de cet homme n'ont aucune pertinence présentement.

—Rejetée, grogna Tuft. L'état moral de cette jeune fille aura pu être touché par ce qu'à fait l'accusé Dumbledore par le passé et par les évènements qu'elle a vécu durant l'attaque d'Acromentules. Mais soyez plus concis, Maitre, la journée a été longue et j'aimerai rapidement en finir.

Quelques membres du Magenmagot eurent le bon goût d'être un peu irrités de cette remarque mais d'autres parurent approuver. Le Dumbledore leur présenta un vague sourire d'excuse aux dents noirâtres avant d'enchaîner :

—Le professeur Dumbledore a-t-il tenté de s'expliquer auprès de vous et votre frère à Poudlard ?

—Oui, mais comme je vous l'ai dit, nous n'avons jamais parlé plus de quelques secondes. Nous nous tenions loin de lui.

—Que vous a-t-il dit exactement ?

—Qu'il avait voulu nous sauver ou je ne sais plus quelle autre bêtise. Nous aider sans doute.

—Pensez-vous qu'il aurait pu vous aider ? Avez-vous besoin d'aide ?

—Bien sûr que non, s'exaspéra-t-elle et sa langue crépita davantage.

Abelforth Dumbledore était assez proche pour qu'elle sente son odeur de vieil homme sale et cela lui fit malgré elle froncer le nez de dégoût. Derrière son frère, son ancien directeur la regardait cette fois droit dans les yeux avec beaucoup de compassion. Cela la glaça de colère mais le juriste reprit.

—Vos parents n'ont jamais été violents avec vous ? Vous avez sans doute déjà vu les pouvoirs de votre mère, n'est-ce pas ?

—Jamais. Les pouvoirs qu'elle a, elle ne les utilise pas sur nous, mentit-elle en sentant sa langue la brûler un peu plus fort.

Elle déglutit discrètement.

—Pourquoi êtes-vous venue ici aujourd'hui Miss ?

—Pour que le professeur Dumbledore ne fasse plus de mal à d'autres enfants.

—L'avez vous déjà vu faire du mal à d'autres enfants dans l'école ou ailleurs ?

—Non, murmura-t-elle. Mon instinct de survie me souffle souvent de ne pas trop suivre le vieux cinglé qui a essayé de m'enlever, termina-t-elle ensuite plus acide.

À cela, Abelforth gloussa, et pendant une seconde leurs regards se croisèrent. Il parut lui faire un clin d'œil complice et mental. Médusa avait ses parents dans son dos, elle ignorait leur expression mais pouvait presque sentir leur aura glacée derrière elle.

—Miss Jedusor, s'il vous plait, recommanda Amelia Bones d'un ton doux, un peu de respect au sein de cet hémicycle.

—Mon client est-il venu vous voir peu de temps avant son renvoi ?

—Non.

—Vraiment ? N'a-t-il pas essayé de vous aider ?

—Pour ce que vaut son aide.

—Je suis bien d'accord, mais vous reconnaissez qu'il a essayé de vous aider ?

—Non, siffla-t-elle car ce n'était pas un mensonge. Il n'a jamais essayé de nous aider. Jamais. Si c'est ce qu'il dit, je ne le crois pas.

Dumbledore face à elle la regardait d'un air énigmatique. Médusa ne parvenait pas à lire dans son esprit mais cet air là l'agaça au plus haut point. Les yeux bleus face à elle semblaient envahis de pitié et de compassion et c'était quelque chose qu'elle voulait à jamais voir disparaître de la surface de la terre car cela déclencha une brûlure si cuisante en elle qu'elle eut envie de hurler de rage.

—Vous désirez l'entendre s'expliquer, abonda le plus jeune des Dumbledore.

—Je veux entendre la vérité, siffla-t-elle rudement. Nous offrir un foyer que nous avions déjà ? Que vouliez-vous ?!

Comme un automate, Albus Dumbledore se leva devant l'assemblée et lâcha dans un petit sourire :

—Il est vrai que j'avais un intérêt à vous soustraire à vos parents. Compte tenu de la puissance de vos géniteurs, j'avais repéré chez vous deux un potentiel. J'espérais vous guider dans la bonne direction pour ne pas vous laisser envahir par cette puissance comme je l'ai été. Je ne me suis pas trompé, vous deux avez des dons puissants.

—Mr Dumbledore, veuillez vous rasseoir. Vous n'avez pas été interrogé, s'exclama Tuft.

—Mon client était sous l'emprise du don de Miss Jedusor. Celle-ci a aussi des dons. Elle est capable d'assujettir ceux qu'elle regarde trop longtemps.

—C'est faux, je n'ai pas utilisé-

—Vous reconnaissez que vous avez un don ? Qu'il peut maitriser certaines personnes ?

—… N-Oui.

Médusa se mordit la langue et Abelforth Dumbledore se retourna vers le Magenmagot d'un air victorieux.

—Entendez-moi, quand je dis que le Mageugénisme peut être à double tranchant. Si les dons obtenus par Miss Jedusor ne sont pas le fruit du hasard, ce genre de pratique est à déconseiller ardemment. Certains pouvoirs peuvent être dangereux entre de mauvaises mains. Miss Jedusor est une Susurrante, capable de murmurer des ordres à quiconque croise son regard, parfois même sans en avoir conscience. Un pouvoir ancien et dangereux. Nos pouvoirs de sorciers sont une bénédiction mais utilisés à mauvais escient une malédiction. C'est ce que mon frère a cru percevoir au sein de cette famille d'où sa décision d'agir. J'aimerai interroger mon client désormais. Je n'ai plus d'autres questions à poser à Miss Jedusor.

Le Ministre hocha la tête et les Hauts Juges du Magenmagot chuchotèrent entre eux, quand Médusa retourna à sa place elle vit l'air sans expression de son père. Il ressemblait à une statue de marbre et ne la regardait même plus, ses yeux noirs exclusivement portés sur Dumbledore. Médusa alla s'asseoir auprès de Charity qui derrière ses cicatrices lui offrit un petit sourire réconfortant.

Dumbledore prit le godet de véritasserum sur le plateau argenté et le but avec engouement avant de le reposer délicatement de ses longs doigts noueux.

—La parole passe d'abord à Maitre Black. Maitre, l'accusé Dumbledore est à vous.

—Merci Mr le Ministre. Le professeur Jedusor incarne en tout point l'excellence de part son parcours, il est un des plus jeune professeur à avoir jamais enseigné à Poudlard. En quoi a-t-il mérité vos soupçons ?

—Je ne nie pas les talents de Tom, dit doucement Dumbledore. J'ai simplement été jeune moi aussi et je connais les vices de l'arrogance. Tom m'a toujours semblé suspicieux pour son attrait pour la magie noire.

—Est-ce que le moindre incident a pu lui être reproché ?

—Oui, murmura Dumbledore en pinçant les lèvres. Il a convaincu Mr Lee, le jeune Obscurial de suivre ses propres traitements. Je vous suggère de lui demander en quoi ils consistent, Mr Black.

Black se força à garder un visage impassible et le père de Médusa levait un sourcil. À ses côtés, son épouse était silencieuse, confinée dans l'obscurité.

—Il y a-t-il eut des incidents notables avec cet Obscurial depuis ?

—Non, murmura Dumbledore lentement.

—Ce qui doit agréablement vous changer, se moqua Black. Comment décririez-vous Tom Jedusor auprès des étudiants de Poudlard ?

—Assez distant, sauf chez certains pour qui il voyait un certain potentiel. Je pense qu'il leur donne quelques cours particulier dont le contenu me pose question.

—Avez-vous eut à vous en plaindre ? Le professeur Jedusor est dans son droit de vouloir faire progresser quelques élèves. Vous avez donc décidé d'enlever des enfants sur une simple suspicion ?

—Je voyais le potentiel des dons de Salazar et Médusa Jedusor. Je craignais qu'une telle puissance soit dangereuse entre les mains de Mr Jedusor, j'ai donc pris cette décision. Mr Prewett est décédé et Fabian a subi beaucoup de tourments par ma faute. Je suis coupable d'enlèvement, chers collègues du Magenmagot, -bien que je ne doute pas qu'avant la fin de la journée je perdrai mon poste- mais pour les protéger. Je ne tolérerai jamais que du mal soit fait à mes étudiants ou à des enfants.

—Ma question est la suivante alors, pensez-vous que votre négligence manifeste et vos bonnes intentions n'ont pas fait suffisamment de mal ?

—Objection, intervint Abelforth. Cette remarque semble faire établir une volonté de blesser, mon client était occupé à chercher Grindel-

—Rejetée, répondez Dumbledore.

—J'ai essayé de faire de mon mieux, murmura-t-il.

—Mrs Burbage et vos élèves s'en souviendront j'en suis certain. J'en ai terminé Mr le Ministre.

Ce fut à Abelforth d'interroger son client devant le Magenmagot. Il y avait toujours la même étrange tension entre eux. On aurait dit que l'aîné demandait silencieusement à son cadet de ne pas faire une regrettable erreur.

—Niez-vous être à l'origine du meurtre de Gidéon Prewett ?

—Tout à fait, approuva Dumbledore. Je n'aurai jamais tué ce garçon. Je n'ai hélas, pas vu exactement ce qu'il s'est passé. Alors que je les surveillais depuis le toit de Barjow et Beurk, je me trouvais dans un angle mort par rapport à la ruelle. Mrs Jedusor se trouvait proche de Gidéon. Il y a eut un grand flash noir et Mrs Jedusor s'éloignait à la suite de ses enfants et ses elfes poursuivie par Fabian. Le temps que je les rejoigne en contrebas, ils avaient disparu et le corps de Gidéon gisait au sol.

—Avez-vous essayé de rechercher Fabian Prewett ?

—Bien entendu. J'étais très proche d'eux, c'étaient de brillants jeunes hommes. Mais il avait littéralement disparu.

Fabian tremblait de tout son corps à ces propos et semblait en hypoglycémie. Médusa lui proposa un chocogrenouille autant par malice que par curiosité. L'air dégoûté et terrifié de Prewett devant la grenouille de chocolat ne lui procura pas beaucoup de satisfaction. Elle le rangea dans sa poche et l'homme tenta de se reprendre.

—Pensez-vous que le professeur Jedusor représente un danger ?

—Oui. J'espérais convaincre Mr Rosier de jeter un coup d'œil aux activités du Derby d'Epsom mais par un malheureux ou malheureux jeu du sort Grindelwald s'y est attaqué.

Dumbledore leur adressa un petit clin d'œil. Médusa n'osa même pas jeter un coup d'œil à son père un peu plus haut sur les bancs.

—Vous n'avez donc aucune preuve, pointa Tuft. Rien. Vous attaquez une famille sur de simples suspicions et du fait de votre histoire ? Passez à votre plaidoirie Maitre Dumbledore. Après tout ce que nous avons entendu, je pense que nous sommes à même de prendre notre décision.

Les deux Dumbledore parurent encore se disputer en chuchotant. Le plus jeune des deux frères agissait avec une sorte de contraste d'espoir et de désespoir. Il releva le nez peu gracieusement puis revint vers le centre de l'hémicycle.

—Très bien, fit le Dumbledore élimé. J'ai conscience après toutes ces révélations que les fautes de mon frère et client sont nombreuses. Comprenez qu'elles ont été commises par arrogance mais aussi par une volonté de ne pas voir se répéter les souffrances de notre jeunesse. Les dons comme les pouvoirs d'un sorcier peuvent être dangereux car ils peuvent être inattendus et incontrôlables. Miss et Mrs Jedusor vous l'ont montré un peu plus tôt. Mon client a essayé maladroitement de protéger ces enfants, bien qu'on ne lui ait rien demandé je vous l'accorde là aussi. Peut-être que les Jedusor sont une parfaite petite famille, où il fait bon vivre. Peut-être. Le cœur du problème est que pour que plus jamais de telles erreurs de jugement n'arrivent, nous devons penser à revoir notre Code de restriction magique.

« L'interdiction du Mageugénisme doit être promulgué car ce sont des pratiques dangereuses pour la morale, l'éthique et pour les enfants qui en découlent. Ce Code est là aussi pour protéger les jeunes sorciers, non ? Mon frère ne peut éviter sa peine, mais au moins que nous puissions par la suite protéger les futures générations de sorciers. Le hasard se charge des dons, pas les mélanges. Je vous remercie.

—Maitre Black, souhaitez-vous ajouter quelque chose ?

—Avant toute chose, mon client souhaiterait s'exprimer.

À ce moment là son père se leva calmement en ayant revêtu son air charmeur. Médusa savait que dans ses moments là il était aussi dangereux qu'un Basilic car il déployait un charme étrange qui pouvait envoûter n'importe qui de faible d'esprit d'un simple regard.

—Mr Jedusor, vous êtes resté bien silencieux depuis le début de ce procès, nota Mrs Hopkrik qui sans doute espérait toujours un dénouement heureux pour Dumbledore.

—En effet, j'ai souhaité laisser les miens expliquer ce qu'ils avaient vécu car c'était là quelque chose de nécessaire, autant par pudeur que par un désir d'approcher au plus près de la vérité. Voyez-vous le professeur Dumbledore et moi même ne nous sommes jamais appréciés, et quand le professeur Dippet m'a engagé j'espérais entretenir avec lui des rapports professionnels. Cet espoir était peut-être dû à la naïveté de ma jeunesse et cela a failli me coûter les miens. Mais en dépit de nos différends, ce sont deux visions qui nous opposent. Nous pourrions même dire deux écoles. Mr Dumbledore me reproche d'utiliser la magie noire mais c'est précisément ce qui a permis à ma femme de survivre pendant toutes ces années en dépit de son don. Sans doute serait-elle morte comme tous les jeunes sorciers possédant des épiphénomènes de magie, sans un accompagnement adéquat, j'entends. Les dons ne sont un problème que lorsque l'on en fait une malédiction. C'est comme cela que les Dumbledore envisagent les choses, comme une malédiction, pas moi. Je pense que savoir les comprendre et savoir les maitriser serait bénéfique pour le monde sorcier puisque comme vous l'avez dit, Maitre Dumbledore les dons sont aussi une variable du hasard. Tout comme naissent des sorciers nés moldus, naissent de nombreux talents, ils ne sont qu'une résultante de la magie même.

Abelforth Dumbledore observait son opposant avec un œil critique et farouche. Avec ses airs de sans abris, Médusa crut qu'il allait lui cracher au visage. Derrière Dumbledore n'accordait aucun regard à son ancien élève et manifestait un intérêt poli à la greffière en pleine concentration assise non loin de son box.

—Mon approche de la magie permet justement de comprendre ces pouvoirs. C'est de la magie même, et comment pourrions-nous réprimer quelque chose d'inné ? Les sorciers naissent avec c'est ainsi et c'est le sens même de la magie. Il n'existe pas de magie blanche ou magie noire, il n'existe que la puissance. Il existe en revanche de bonnes actions et de mauvaises et je ne doute pas que l'ancien professeur Dumbledore vous aura montré que même la magie censément la plus pure ne s'épargne pas d'actes douteux. À la puissance répond la puissance, et certains sorciers sont capables de la maîtriser. Dumbledore ne semble pas faire parti de cette catégorie car avec ce choix, il aurait pu sauver sa sœur.

L'œil d'Abelforth vira au rouge et il sortit vivement sa baguette comme pour lui jeter un maléfice. Plusieurs membres du Magenmagot l'arrêtèrent à temps d'un commun mouvement en l'immobilisant d'un sort et le père de Médusa enchaina :

—Après avoir perdu son fils Croyance devenu Obscurial, Abelforth Dumbledore a passé cet alinéa et je comprends sa volonté. La puissance hors norme de ce fils illégitime a plusieurs fois causé du tort au Secret Magique par le passé. J'aimerai proposer une autre solution au dilemme qui nous est posé. Les dons et la magie étant innées, nous pouvons l'encadrer, par des personnes aptes à les contrôler, si leur magie… déraille.

—Vous proposez un système de Tuteur et Tutelle, demanda Amelia Bones en fronçant les sourcils d'un air un peu inquiet. Un sorcier ou une sorcière chargé de s'occuper de cas problématiques ?

Abelforth Dumbledore fut relâché du sortilège et un auror vint s'approcher de lui pour le tirer vers un banc. Le cadet des Dumbledore tremblait de rage.

—En effet. Si le Conseil de l'Ecole, si Mrs Burbage et ma famille ont participé à ce procès n'est-ce pas in fine pour la protection des enfants de l'école ? Les Obscurials et possesseurs de dons doivent être encadrés pour le plus grand bien.

Dumbledore qui avait toujours gardé ce petit air tranquille et détaché était pour la première fois très pâle. On aurait dit qu'il venait de prendre vingt ans d'un coup, et enfin il daigna lever les yeux vers son ancien élève. Ils s'affrontèrent silencieusement pendant quelques secondes pendant que Tuft semblait réfléchir malgré la difficulté de l'exercice chez lui. Certains membres du Mangemagot étaient très intrigués et intéressés par cette proposition.

—Nous avons déjà utilisé ce genre de principe par le passé, mais pour des cas exceptionnels ! se récria Hopkrik un peu paniquée.

—Selon le code de Régulation Magique, la communauté magique doit donner ressources et assistance à tout jeune sorcier, sans compter l'alinéa Ariana. Le Professeur Jedusor a montré qu'il était possible de maîtriser et soigner les tourments que peuvent causer la magie, intervint Maitre Black de sa voix pompeuse. Évoluons dans notre façon d'envisager les choses. C'est cela le progrès.

—Je vois, murmura le Ministre. Je vous remercie messieurs. La Haute Cour va maintenant se retirer pour délibérer.

Les Hauts Mages quittèrent leur tribune en petits pas pressés dans leur robe rouge. Médusa eut l'image des colonies de gendarmes qu'elle trouvait avec Salazar près de racines des arbres dans leur jardin quand ils étaient enfants. L'issue était scellée, elle le savait. Pour autant, les propos de son père et maitre Black avaient fait déclencher quelque chose de froid en elle. Sa mère dans les gradins bouillait de colère, ses yeux étaient presque totalement noirs dans l'obscurité. Même Charity à ses côtés semblait contrariée.

Les deux Dumbledore n'avaient pas bougé, encadrés par leurs aurors, ils parlaient à voix basse. Cette fois les deux se disputaient clairement et le plus vieux était terriblement en colère. Médusa n'avait jamais vu ses traits aussi furieux. Ainsi, il était effectivement très impressionnant et n'avait plus rien à voir avec son allure habituelle de gentil directeur. Voir ce masque tomber lui plut et son père observait cela avec un ricanement envers Black.

La Haute Cour parut et tous se relevèrent lentement.

Quand Tuft se fut installé, il lut une note de son dossier d'une voix pataude, comme s'il avait du mal à déchiffrer ce que ses jurés avaient décidé.

—La Haute Cour du Magenmagot déclare l'accusé Albus Perceval Wilfric Brian Dumbledore coupable de tous les chefs d'accusation dont ceux de meurtre et tentative d'enlèvement et le condamne à une peine de perpétuité incompressible dans la prison d'Azkaban. Son siège au sein de la chambre du Mangemagot ainsi que tous ses titres honorifiques lui sont retirés séance tenante. Mr Fabian Prewett repart libre de sa position particulière de témoin clé. La Haute Cour examinera prochainement un projet de loi suivant l'Alinéa Ariana concernant l'application de tutelles. Emmenez le prisonnier.

—Non ! hurla Abelforth oubliant toute décence. Ne soyez pas complètement stupide, vous irez à l'encontre des droits des sorciers avec cette loi !

—Je te l'avais dit, soupira Dumbledore alors qu'il se laissait escorter par les deux aurors.

—Pour l'heure je n'attends que mon dîner et mon lit. La commission siègera bientôt, si vous souhaitez vous joindre aux débats vous êtes le bienvenus, répondit Tuft moqueur en se levant. Si vous ne vous faites pas incarcérer avant.

Dumbledore était trainé vers l'extérieur. Il était toujours aussi calme, comme si cela ne le regardait plus. Avait-il abandonné ? Se savait-il déjà mort ? Médusa l'ignorait, mais elle se rendit compte que le verdict ne lui avait rien fait. Elle ne ressentait ni bonheur, ni colère, ni rien.

Comme un automate, elle se leva pendant que Maitre Black allait aider Mrs Burbage à sortir de la pièce. Sa mère descendait de l'estrade avec la même expression bouleversée qu'elle avait eut quand Dumbledore lui avait parlé de son passé.

Le procès était terminé, mais en échangeant un regard pour la première fois elles partagèrent quelque chose. Un sentiment bien plus pesant que cette austère et sombre salle d'audience. Ce qu'il venait de se passer était grave.

« Quand ils commencent à nous faire des statuts particuliers, c'est là que les ennuis commencent, Médusa. »

Sa mère l'avait pensé avant de se recomposer une moue la plus neutre possible et terminer sa descente de l'escalier. L'autre Dumbledore avait débarrassé le plancher, la jeune fille lui souhaitait d'avoir déjà fait sa valise, car il était désormais tout en haut de la liste de ses parents. Médusa vit que son père discutait avec Tuft près de la sortie, les deux journalistes de la Gazette à leurs côtés.

—Tuft est tellement médiocre qu'il tient la Gazette sous sa coupe pour cacher la plupart de ses frasques, susurra sa mère. Ils sont en train de discuter de ce qui sera révélé dans l'édition de demain.

Médusa songea que le pire ne serait pas révélé entre les pages de ce journal si puritain, mais que le pire était à venir. Ils finirent de discuter et son père les interpella. Elles le rejoignirent. Fabian Prewett attendait près de l'entrée quand un vieil homme roux aux traits assez semblable au jeune homme débarqua.

—Mafalda m'a envoyé un message… Fabian… C'est toi ?

—Allez rejoindre votre père, Mr Prewett, vous avez été si longtemps séparés.

—Merci professeur Jedusor, ânonna le rouquin en lui serrant la main les yeux baissés.

De là il se jeta dans les bras de son père tandis qu'une grande femme blonde au cou très long et une autre rouquine un peu boulotte se jetaient dans les bras des deux roux. Médusa la reconnut alors qu'elle s'éloignait avec sa famille, c'était Molly Prewett.

—Je pensais ne jamais te revoir, pleura la jeune fille contre son ainé. Tu-tu-tu vas- b-b-bien ?

—Oui, Momo, je vais bien, soupira Fabian en la serrant contre lui de toutes ses forces. Pardon, pardon, pardon.

Le pere de Médusa n'avait pas décroché un mot alors que sa mère ruminait silencieusement sa colère. Après tout ce qu'il s'était passé aujourd'hui, elle n'avait qu'une envie, dormir pour ne se réveiller que des mois plus tard. Peut-être qu'enfin la situation lui paraîtrait claire.

—J'ai dû réparer vos frasques, souffla-t-il irrité tandis qu'il leur avait saisit le bras à toutes les deux.

—Je m'étonne toujours de ce que tu appelles réparer, mon amour.

Médusa aurait juré voir les yeux de son géniteur devenir incandescent alors qu'il les faisait transplaner. Au moment où les pieds de Médusa et sa mère heurtèrent le sol, elles eurent le commun réflexe de s'écarter du mage noir à côté d'elles. Sa mère avait arraché une épingle de son chignon et la planta furieusement dans la paume de son mari qui eut un sifflement. Il s'arracha l'épingle de la main brutalement, aussi surpris que rageur de cette attaque sournoise.

Gadzo Dilo ! gronda-t-elle.

Méroé partit ensuite en furie dans l'obscurité du marais. Médusa se précipita à l'intérieur. Il voulait les punir toutes les deux pour avoir révélé certaines choses durant le procès et aurait à choisir. Il préféra partir à la poursuite de sa femme et se changea en brume noire et épaisse dans un hurlement de rage.

Médusa courut vers sa chambre sans s'arrêter, s'y enferma et jeta un sort sur la porte pour se protéger. Elle doutait que les sortilèges pourraient tenir longtemps mais c'était mieux que rien.

Elle se retourna, à peine calmée pendant que le cri de rage de son père envahissait la maison en écho puis elle vit Salazar sur son lit.

Ils se saluèrent sans se parler. Médusa se précipita vers le lit pour serrer son jumeau dans ses bras. Le cri de rage de son père continuait tandis qu'ils entendaient les gloussements en écho de leur mère dans la maison. Ils frissonnèrent de concert et s'écartèrent. Echo vint délicatement s'enrouler au creux du poignet de Salazar pour se calmer. Il avait senti le trouble des humains autour de lui toute la journée et ne comprenait rien à la situation. Médusa n'avait pas de mots pour la lui expliquer. Sal semblait le sentir en caressant précautionneusement du bout des doigts le petit reptile.

—Comment ça s'est passé ?

—Très mal, Sal. Il va se passer quelque chose d'horrible et j'y ai participé, avoua-t-elle.

Il y eut un bruit de casse et le cri d'un elfe torturé sans doute parce qu'il se trouvait sur le chemin. Une seconde ils entendirent la silhouette de leur père passer devant la porte et s'y arrêter, ils se figèrent anxieusement. Il finit par partir en jetant un sortilège rageur quand le gloussement de leur mère se fit entendre au fond des marais. En pleine nuit, dans ce marais maudit leur mère était assez puissante pour continuer ce genre de jeu un moment. Il fallait attendre de voir qui abandonnerait le premier mais Médusa n'avait aucun doute sur l'identité du vainqueur de leurs « chamailleries ».

Salazar lui envoyait plein de pensées diffuses et éparses, parmi elles beaucoup de tristesse et de colère, mais surtout une myriade de pensées en arborescence sur sa culpabilité.

—Je t'ai caché ce que Percy m'a fait, tu ne pouvais pas savoir, murmura-t-elle. Personne ne doit savoir.

—Pourquoi ?

Médusa le détesta presque de poser ce genre de question.

—Parce que j'aurais dû pouvoir l'arrêter, cria-t-elle. J'aurai dû faire quelque chose, le voir venir, non ? Pardon… Pardon, je ne voulais pas te crier dessus.

Son frère la regardait d'un air catastrophé. Il comprit son besoin avant même qu'elle ne se formule clairement dans sa tête. Il la prit plus fermement dans les bras. Il n'était pas souvent à l'aise avec les contacts physiques mais entre eux c'était naturel, comme un moyen de se protéger l'un l'autre.

Cela ne répondait pas à sa question, mais cela étouffait un peu ce vide qu'elle ressentait en elle. Sal sentait une odeur de pins et de chèvrefeuille, elle se laissa bercer par ses bras en désirant tout oublier.

Ils entendirent leur père hurler et leur mère ricaner dans les ténèbres mais pour le moment, ils étaient seuls tous les deux, ils étaient bien.

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Et voici la suite ! Merci à Elaia pour sa correction et désolée pour le retard de post, j'étais en plein déménagement cogné à une vilaine grippe donc je n'avais vraiment pas la tête à poster. les prochains chapitres seront plus réguliers et à l'heure.

J'espère que ce chapitre vous a plu, on se retrouve la semaine prochaine pour la suite !