Bonjour à toutes et à tous !
Saviez-vous que la vie de prof n'est pas une sinécure ? Entre le ministre qui décide de changer les règles du bac, alors que l'année a déjà commencé, le programme tellement chargé qu'on n'a pas le temps d'expliquer certaines bases, et les aléas qui font sauter une heure par ici, une heure par-là, je m'arrache les cheveux !
Sans parler du lever à 5h30 tous les matins pour prendre le TER, mais c'est une autre histoire.
Tout ça pour dire que les fanfictions sont devenues très secondaires dans ma vie, alors qu'elles étaient au premier plan pendant mon master. J'en suis la première attristée.
J'espère néanmoins que ce chapitre vous plaira.
Bonne lecture !
Harry ou de l'éducation
Où l'on va de Charybde en Scylla
Chapitre huit, deuxième partie
À nouveau la vie du petit Harry lui échappa. Mrs Hicks profita d'un moment d'inattention des autres pour le saisir par les épaules et transplaner.
Le hall du Congrès magique des États-Unis d'Amérique était impressionnant et régalien. Le sol était carrelé en mosaïques art nouveau qui montraient les scènes de l'histoire de la magie américaine, des sociétés amérindiennes précolombiennes jusqu'à la Première Guerre mondiale. Les murs portaient les représentations des symboles de la république magique. Des sorciers et des sorcières s'agitaient en tous sens, accomplissant des tâches importantes qui faisaient fonctionner leur monde.
Harry n'eut pas le temps de s'attarder à admirer les décorations. Mrs Hicks lui tenait fermement la main et le guida vers l'accueil où elle exigea d'être reçue immédiatement par le responsable du bureau des aurors.
On les fit passer de secrétariat en secrétariat jusqu'à un bureau où les attendait un gros monsieur armé d'une moustache touffue. Il ressemblait un peu à oncle Vernon, et Harry se rendit compte qu'il n'avait pas repensé à oncle Vernon, tante Petunia et Dudley depuis bien longtemps. Il se demanda s'il était possible de les oublier tout à fait.
Mrs Hicks raconta les événements récents au gros monsieur moustachu à l'air important, et celui-ci accorda que c'était très grave, très grave en effet. Il fallait réagir. Il fit venir d'autres personnes puis de nouvelles. Harry fut installé dans un coin et on lui donna ce qu'on avait sous la main pour l'occuper, un magazine de mode moldue et les crayons de couleur de son sac à dos que Mrs Hicks avait eu la présence d'esprit d'attraper.
Harry s'occupa donc tout en continuant d'écouter les discussions enflammées des adultes. Il avait compris que son papa était au Soudan. Il savait que c'était un pays qui n'était ni le Royaume-Uni, ni les États-Unis, mais il ne savait pas où exactement. Il était avec tonton Rhodey, ce qui le consolait un peu. Il ne savait pas où était sa maman et il s'inquiétait. Et si les messieurs en noir la trouvaient et lui faisaient du mal ?
Il avait aussi compris que la voisine aux cookies était Loki, même s'il ne comprenait pas pourquoi elle cachait son identité. Elle lui avait sauvé la vie à Greenwich et Harry savait que son frère Thor était un ami de son papa. Il s'inquiétait aussi pour Steve et pour Natasha. Apparemment, tout le monde était à leur poursuite.
Harry gribouillait des formes sur les photos des publicités du magazine. La dame qui posait pour vendre du parfum était désormais décorée de tatouages géométriques. Le garçon savait que ce n'était pas à lui d'aider les adultes. Depuis son apparition en pleine bataille, maman et papa avaient été très clairs. Même avec la meilleure volonté du monde, il n'était qu'un enfant et sa présence gênerait les adultes.
Mais Harry ne pouvait s'empêcher d'être très inquiet.
« Vous ne comprenez pas, s'impatienta Mrs Hicks. On ne parle pas seulement de Harry Potter, on parle du Statut du Secret ! Ces personnes n'auraient jamais dû pouvoir trouver ma maison sans aide magique ! »
Par un vieux réflexe qu'il avait lui aussi oublié, Harry se recroquevilla, mais aucun des adultes ne lui prêta d'attention. Il se demanda si Jasper allait bien, puis s'il était aussi un méchant. Il se sentait triste. Il ne voulait pas que Jasper fût un méchant.
Les adultes commencèrent à quitter le bureau pour s'affairer à régler la situation qui devait être réglée. Difficile de savoir ce qui n'allait pas quand personne ne vous l'expliquait. Même Mrs Hicks était occupée à quelque chose d'important. Elle donnait des ordres et des courriers à des gens qui allaient et venaient. Harry observa leur manège pendant un moment. L'un deux dit que la situation était pire qu'imaginée, tandis qu'un autre assura qu'un de leurs nombreux problèmes était résolu. Harry avait du mal à suivre.
Soudainement, il y eut beaucoup de cris et de coups de feu. Un homme en noir, le visage couvert et les cheveux longs, fit irruption dans la pièce. D'un seul coup de poing, il assomma le gros monsieur moustachu qui s'effondra sur Mrs Hicks. Déboussolée, la vieille dame ne put pas intervenir pour secourir Harry. L'homme en noir enfonça une aiguille sous sa peau, et sans attendre que l'enfant perde connaissance, il le lança sur une de ses épaules comme une vulgaire marchandise, et quitta le Ministère par là où il était entré : la porte principale. Il laissait derrière lui des dizaines de morts et de blessés.
Harry se réveilla complètement groggy, seul, dans une petite pièce qu'il aurait qualifiée de cellule s'il avait su utiliser le mot. Il était allongé sur un lit de camp, recouvert d'une fine couverture de mauvaise qualité, mais neuve. Dans un coin, il y avait un lavabo et des toilettes inadaptés pour un enfant. Les murs nus en béton et la porte blindée finirent de le terroriser.
Il ignora combien de temps il resta prostré, assoiffé et affamé, mais incapable de se décider à bouger. Enfin, il parvint à dérouler ses jambes ankylosées, et s'approcha du lavabo. Il y avait un gobelet en plastique à côté du robinet, et le petit garçon se servit un verre d'eau. Il but goulûment, une fois, deux fois, trois fois, avant d'assouvir sa soif. Puis, il retourna sur le lit.
Il n'y avait rien à faire dans la cellule. Harry essaya de fermer les yeux et d'apparaître ailleurs, dans sa chambre dans la tour Stark, mais rien ne se passa. Il se demanda s'il avait perdu ses pouvoirs magiques. Il espérait que non. Il s'assoupit plusieurs fois, jamais très longtemps. Dès qu'il fermait les yeux, il revoyait les images violentes dont il avait été le témoin, et tout se mélangeait avec ce qu'il avait vécu par le passé.
Il se réveilla en sursaut quand un lourd cliquetis se fit entendre. La porte de la cellule s'ouvrit et un homme entra. Il présentait bien, avec une tignasse bien entretenue — certainement quelques implants — des dents plus blanches que blanches, un costume taillé sur mesure et une confiance en soi étouffante.
« Bonjour, Harry, je suis Alexander Pierce.
— Bonjour, souffla Harry qui était terrorisé, mais poli.
— J'espère que tu ne t'es pas trop ennuyé ici depuis ton réveil. Tu dois avoir beaucoup de questions.
— On est où ? demanda aussitôt Harry qui avait retrouvé un morceau de son courage. Où sont mon papa et ma maman ? Est-ce que Mrs Hicks va bien ? Et Jasper ? Est-ce que c'est vous le méchant ? »
Pierce éclata d'un grand rire.
« Doucement fiston ! Je ne peux pas répondre à toutes les questions à la fois ! Je n'ai pas non plus dit que j'allais répondre tout court. Mais je suis d'humeur magnanime. Rogers et Romanoff ont été appréhendés, mon Soldat a fait un travail parfait en seulement quarante-huit heures, et nos préparations qui durent depuis deux ou trois siècles s'apprêtent à être couronnées de succès. Je peux bien répondre aux questions d'un môme. »
Harry n'était pas certain de tout comprendre, mais il en savait suffisamment pour percevoir que l'homme devant lui n'était pas son ami ni même son allié.
« Nous sommes à Washington D.C., dans les sous-sols d'une banque qui appartient, en secret, à Hydra. Tu vas y passer un peu de temps, mes scientifiques sont un peu occupés avec le Soldat, mais une fois le travail terminé et le Soldat remis en sommeil, ils pourront s'occuper de toi. »
La manière dont ce fut dit glaça les entrailles de Harry. Il devait s'enfuir le plus vite possible !
« Quant à ton papa et ta maman, ils sont persuadés que Jasper Sitwell est avec toi dans un endroit sûr en attendant de pouvoir se déplacer à nouveau en toute sécurité. Iron Man est très occupé à démanteler une base terroriste au Soudan avec Iron Patriot, il n'a pas le temps pour toi, et Potts est capitaine d'industrie, une femme très occupée. »
Harry avait appris une chose depuis que ses parents étaient entrés dans sa vie : ils n'étaient jamais trop occupés pour lui. Il pouvait leur demander de l'attention à n'importe quel moment, il avait toujours la priorité.
« C'est pas vrai ! s'exclama Harry.
— Bien sûr que c'est faux, répondit Pierce en se méprenant sur le cri du garçon. Sitwell est mort, tué par Loki. Bon, sois sage. De toute façon tu ne peux pas te téléporter ici, nous nous en sommes assurés. Bon séjour parmi nous ! »
Harry essaya vraiment très fort de ne pas pleurer, mais c'était difficile. Il se réfugia dans un coin de la pièce, face au mur et à moitié dissimulé par le lit de camp. Quelques heures plus tard, quelqu'un lui apporta à manger — une assiette de purée recomposée et des morceaux de saucisse industrielle — puis repartit sans un mot et à peine un regard. Incertain, le petit garçon attendit longtemps avant d'oser manger le repas. Ce n'était pas bon, il n'avait pas très faim de toute façon.
Harry finit par s'endormir d'épuisement sur le lit de camp inconfortable. À bien des égards, cela lui rappelait une autre vie, avant son papa et sa maman. Allait-on lui demander de faire le ménage ? De préparer les repas ? Dans son rêve, il entendait oncle Vernon dire « tu ne peux pas te téléporter ici » avant de lui coller une claque. Harry appelait son papa et sa maman et oncle Vernon ricanait « ils sont très occupés ».
L'enfant se réveilla en sursaut, déboussolé. Il lui fallut de longs instants pour se remémorer les événements de la veille. Personne n'était venu pour débarrasser le plateau-repas et Harry affamé mangea le reste de purée-saucisse figé et complètement froid.
Puis il attendit.
Et attendit.
Et il attendit encore.
Personne ne vint et la faim se fit sentir. Heureusement, Harry avait de quoi boire, mais cela ne remplaçait pas la nourriture. Lorsque la faim commença à être douloureuse, il essaya de communiquer à travers la porte. D'abord timidement, il finit par s'époumoner après ce qui lui semblait des heures, mais personne ne vint.
L'angoisse était terrible et la faim était plus terrible encore. Harry somnola un moment, se réveilla, somnola encore un peu. Régulièrement, il croyait entendre un bruit, tendait l'oreille et criait à l'aide malgré le silence pesant.
Avec horreur, il réalisa qu'on l'avait laissé là et oublié. C'était pire que tout ce qu'il avait vécu chez les Dursley. Vernon et Petunia n'oubliaient jamais sa présence et le faisaient savoir bruyamment. Ici, il était dans une cellule minuscule, silencieuse. Personne ne vérifiait par le soupirail s'il était bien là. Personne ne lui glissait un quignon de pain pour le dîner. Personne ne tapait sadiquement sur la porte pour signifier que le dehors lui était inaccessible.
Harry ne savait pas exactement ce que mourir signifiait, mais il avait conscience que c'était terrible et il en avait très peur.
Il prit son courage à deux mains et essaya d'ouvrir la porte. Il n'y avait pas de poignée de son côté, un indice fort pour lui faire comprendre qu'il n'avait aucune liberté ici. Néanmoins, depuis qu'il s'exerçait avec Mrs Hicks, il savait que la magie était capable de beaucoup de choses différentes. Naturellement, il était doué pour faire apparaître un champ de force autour de lui, que Mrs Hicks appelait un bouclier, comme celui de Captain America, mais doré et sphérique. Sa professeure lui avait expliqué que la téléportation, le transplanage était très dangereux et qu'il ne devait pas recommencer avant d'avoir eu des cours spécifiques. Néanmoins, Harry pensait que les situations d'urgence ne lui seraient pas reprochées. S'il parvenait à transplaner, ce qui semblait impossible dans la pièce où il était enfermé.
Harry avait tendance à se laisser envahir par ses émotions avant de réfléchir. Enfermé dans une petite pièce sans visite ni nourriture, il avait laissé la peur l'emporter, mais la faim le poussait à prendre plus de risques. Le monsieur n'avait rien dit à propos d'ouvrir les portes par magie.
Harry n'avait jamais jeté un tel sort. Il apprenait la magie sans baguette avec Mrs Hicks, mais il venait juste de commencer son apprentissage, et ils se concentraient sur ce qu'il savait déjà faire. Faire apparaître un bouclier défensif n'allait lui être d'aucun secours.
La faim, la peur et le sentiment d'urgence qui lui comprimait la poitrine empêchaient le garçon de penser profondément au problème, mais depuis qu'il était petit il avait acquis certains réflexes. Le sens de l'observation et un fort instinct de survie en étaient deux. La capacité à improviser dans une situation d'urgence en était une autre, cultivée par les activités extrascolaires de Calhoun.
Harry percevait sa magie comme si elle était une extension de ses doigts. En tout cas, il se l'imaginait ainsi. Le bouclier se formait quand il tendait les bras en avant pour empêcher un choc ou en se recroquevillant sur lui-même pour se protéger, et il était bien une extension sensible de son corps. Il imagina donc que le bouclier se transformait en corde.
Après plusieurs tentatives qui le laissèrent haletant et trempé de sueur, il parvint à faire entrer le bout de la corde dans la porte et chercha la serrure. Encore une fois, cela lui demanda du temps et une énergie qu'il n'avait plus. Des taches sombres apparaissaient dans son champ de vision et alors qu'il commençait à désespérer, il sentit quelque chose.
Avec un clac la porte s'entrouvrit.
Harry se figea, les yeux exorbités. Et s'il y avait des méchants derrière ? Si le monsieur revenait et lui faisait du mal ? Toute fatigue (presque) oubliée, il s'approcha de la porte, effrayé. Il l'ouvrit sans que rien ne l'en empêche. Derrière la porte, il y avait un couloir entièrement vide. Une caméra de surveillance était pointée sur la porte, mais aucun témoin lumineux ne lui donnait vie.
Prudemment, Harry se glissa hors de sa cellule. Devait-il aller vers la droite ? Vers la gauche ?
Avant qu'il ne puisse faire un choix, une voix se fit entendre derrière lui.
« Je savais que ta magie finirait par se manifester, dit Loki, fier de lui-même. »
Loki était habillé de la même façon que pendant la bataille de Greenwich. Intimidé, surpris et méfiant, Harry recula, mais il n'eut pas le temps de réagir lorsque Loki avança la main, l'attrapa par l'épaule et se téléporta.
