Assise contre un tronc de l'autre côté du lac, Madison observait de loin l'animation qui régnait autour de la maison de sa belle-sœur. Le soleil se couchait derrière la forêt, ses derniers rayons se reflétait sur l'eau. La jeune femme attrapa un petit caillou et le jeta. Il creva la surface de l'eau, fit quelques ronds puis tout se calma à nouveau. Madison n'avait pas cessé de pleurer depuis le début de la journée, tant qu'elle avait l'impression d'être totalement déshydratée. Elle avait beau essayer de penser à autre chose, elle ne parvenait à chasser de son esprit cette dernière image qu'elle avait de son grand frère en train d'agonir. Elle s'infligeait sans le vouloir cette torture difficilement supportable. Après le voyage de Steve, elle était restée seule presque tout le reste de la journée, mais en réalité, il y avait une personne avec qui elle aurait aimé la passer. Et cette personne, c'était Thor.

Seulement, l'unique moment où il avait eu l'occasion de se parler en tête à tête était lorsque l'asgardien était venu lui annoncer qu'il avait besoin de s'éloigner un moment, et qu'il partait explorer les confins de l'Univers en compagnie des gardiens de la Galaxie. Cela lui avait fait un sacré coup au moral, mais elle n'avait rien dit, à part « bon voyage » pour rester polie. Mais en réalité, elle avait eu envie de faire exploser toutes les émotions qui l'avaient traversé à l'instant où il lui avait annoncé qu'une fois de plus, il s'en allait en la laissant seule. Enfin, presque seule. Car elle ne l'était jamais vraiment.

–Maman ?

Elle se hâta de sécher ses larmes et tourna la tête, apercevant Arthur, dans son petit costume noir, s'approcher d'elle d'un pas hésitant. Elle tendit la main et il vint immédiatement se blottir dans ses bras, soulagé qu'elle ne le repousse pas. Chose qu'elle ne ferait jamais. Ils partagèrent une douce étreinte en profitant des derniers rayons du soleil. Madison se sentait si chanceuse d'avoir son fils à ses côtés, car à chaque fois qu'elle le voyait, elle avait l'impression que ses problèmes s'envolaient. Sauf aujourd'hui. La douleur demeurait bien trop intense pour disparaitre aussi facilement. Arthur s'écarta un peu d'elle afin de la regarder dans les yeux, et lorsqu'il vit une larme couler sur sa joue, il l'essuya avec précaution, ne comprenant pas vraiment pourquoi elle était aussi malheureuse. Elle feignit un sourire.

–Ne t'en fais pas, mon ange, ça va passer… J'ai juste… Besoin d'un peu de temps.

–De combien ?

–… Je n'en sais rien, Arthur…

Ils restèrent ainsi durant quelques instants, profitant du calme environnant pour mettre au repos leurs esprits.

–Maman a besoin de temps et… Elle a du travail à faire, ajouta-t-elle, son regard se perdant un peu dans le vide.

–C'est un travail différent d'aujourd'hui ? l'interrogea-t-il, ce à quoi elle acquiesça.

Son fils n'avait pas encore cinq ans mais il était très mature pour son âge, il comprenait vite. Elle ne savait absolument rien lui cacher. Elle lui avait toujours tout dit, toute la vérité. Cela ne changeait pas en ce jour funeste. L'enfant attrapa gentiment une de ses mèches et joua avec, ce qui fit sourire sa mère, plus sincèrement cette fois-ci.

–On peut aller se balader ce soir ? lui demanda-t-il.

–Et dis-moi, Arthur Leonard Stark, où voudrais-tu aller ? le questionna-t-elle finalement, influencée par l'entrain de son fils.

–La forêt ! affirma-t-il.

–Il y a beaucoup de forêt dans les environs… Mais c'est d'accord, souffla-t-elle en le serrant contre elle en soupirant.

–Je t'aime, maman.

Madison sentit son cœur chavirer à l'entente de ces quelques mots. C'était exactement ce qu'elle avait besoin d'entendre. Dans leur étreinte muette, elle observa le lac, songeant à un endroit où ils pourraient s'enfuir pour s'éloigner de toutes cette souffrance omniprésente, là où personne n'irait les chercher. Là où elle pourrait accomplir ce qu'elle avait à faire. Elle avait du pain sur la planche, mais elle préférait n'en informer personne, au risque de se faire réprimander, ou que quelqu'un cherche à l'en dissuader. Evidemment, la fuite n'était pas une solution. Elle ne se cacherait pas mais il était probable que les nouvelles qu'elle donnerait se fassent plus rare.

–Moi aussi, je t'aime.

Arthur était intelligent, il avait compris ce dont sa mère avait besoin. Du temps, et de l'espace. Il fallait impérativement que l'ancienne mutante fasse le point. Ni lui ni elle ne savait pour le moment combien de temps cela durerait. Quelques jours, des semaines, des mois ? La femme n'en avait encore aucune idée, mais son travail prendrait le temps qu'il faudrait. Elle n'avait plus de pouvoirs, mais elle ne comptait pas s'apitoyer sur son sort. Les gens se demanderaient sûrement ce qu'elle fabriquait, et pourquoi elle ne se manifestait plus aussi souvent, mais rien d'autre ne l'importait que leur bien-être, à elle et son fils. C'était décidé. Demain, Madison ferait en sortes que tout rentre dans l'ordre.