Bientôt la fin de la fic. Je vais poster les chapitres restants dans la foulée.
Bonne lecture !
Chapitre 21 : Vivre ou mourir
La réunion de crise de l'Enclave terminée, Alec et Magnus s'isolèrent dans leur chambre de la maison des Penhallow. Les nouvelles n'étaient pas bonnes. La quasi-totalité des instituts avait subi une attaque. Celui de New York avait été vidé par précaution, mais une attaque sur Alicante pesait sur les chasseurs d'ombres comme une épée de Damoclès. Alec s'apprêtait à changer de vêtements quand il ressentit soudain une douleur intense.
– Alec, ça va ? s'inquiéta le sorcier.
– Jace… Va chercher Jace, grimaça Alec en se tenant le côté.
Magnus sortit immédiatement de la pièce. Alec s'assit difficilement sur le lit et souleva sa chemise en grimaçant. Sa crainte se confirma, sa rune de Parabataï s'estompait. Il le savait, cela ne pouvait vouloir dire qu'une seule chose. Son cœur se serra, la douleur s'intensifia jusqu'à devenir intolérable. C'était comme si on lui transperçait la poitrine. À cet instant, Magnus arriva en trombe.
– Il n'est pas dans sa chambre, Clary non plus, annonça le sorcier en se ruant auprès de son compagnon. Que se passe-t-il, Alec ? Réponds-moi !
Le jeune Lightwood repris son souffle difficilement.
– C'est Jace… dit-il d'une voix presque inaudible. Il lui est arrivé quelque chose, Magnus, c'est grave… cette fois, c'est très grave. Je crois qu'il… je crois qu'il est mort.
Pour confirmer ses propos, il montra sa rune de parabataï au sorcier. Le symbole magique n'était presque plus visible. Sous leurs yeux interdits, il disparut même complètement, laissant une légère cicatrice blanche. Un silence pesant s'installa. Magnus pris Alec dans ses bras. Choqué, ce dernier resta muet.
– Je peux essayer de le localiser, d'accord ? On va découvrir ce qui est arrivé, je te le promets !
Alec acquiesça légèrement de la tête.
Alors que le sorcier commençait son sort de localisation, une sirène annonciatrice de malheur retentit dans toute la ville. Alicante, la cité imprenable des Chasseurs d'Ombres, était attaquée. Magnus tira le rideau et s'aperçut avec horreur de la gravité de la situation. Plusieurs incendies s'étaient déclarés et les tours d'Adamas, qui protégeaient la ville, ne fonctionnaient plus. Le ciel était sombre à cause des hordes de démons ailés qui semaient déjà mort et désolation. Les cris des habitants se mêlaient aux explosions dans toute la ville.
– Par l'Ange, les démons nous attaquent ! dit Alec, dans le dos du sorcier.
– Va voir tes parents, et ne fais rien d'idiot pendant mon absence, d'accord ?
– Mais… Où vas-tu ? s'étonna Alec.
– Voir Ragnor. Il faut faire vite j'ai peut-être une idée, mais je n'y arriverai pas tout seul. Fais-moi confiance !
– D'accord, fit Alec, avant d'embrasser le sorcier. Je t'aime, sois prudent.
Magnus sourit.
– Je le serais, ne t'inquiète pas.
Sur ces mots, le sorcier ouvrit un portail et Alec quitta la chambre pour rejoindre ses parents au salon.
– Ah ! Alec, te voilà, lui dit son père en le voyant. Nous t'attendions, mais… Jace et Clary ne sont pas avec toi ?
– Heu… Ils arrivent, ils nous rejoindront. Ne perdons pas de temps, éluda-t-il.
Le groupe rejoignit l'armurerie où les soldats se préparaient à la grande bataille. La plupart des Nephilims avait reçu la rune d'alliance de Clary, certains avec scepticisme, d'autres avec espoir. L'ambiance était étrange. Tant de créatures obscures mélangées aux Chasseurs d'Ombres : c'était pour le moins inédit. La nouvelle meute de Luke était là au grand complet et Raphaël avait répondu présent avec tous les vampires qu'il avait pu convaincre, même Meliorn était venu pour prêter main forte avec ses meilleurs soldats.
Lorsque tous les combattants eurent reçu la rune, les groupes se formèrent et se dispersèrent dans la ville. Isabelle, jusque-là assez discrète, se rapprocha de son frère.
– Où est Magnus, s'enquit-elle, en lui adressant un coup de coude.
– Je ne sais pas. Il avait un truc important à faire, il ne devrait plus tarder, répondit Alec d'une voix hésitante.
Il fit une pause avant de reprendre.
– Tu as des nouvelles de Jace ou Clary ?
Sa sœur le regarda, étonnée.
– Tu as dit à papa qu'ils nous rejoignaient…
– J'ai menti, la coupa-t-il.
– Oh !
– Ça va aller, ne t'en fais pas pour eux, se reprit l'ainé des Lightwood.
Isabelle lui sourit, mais l'inquiétude se lisait sur son visage. À cet instant, une voix derrière eux les fit sursauter.
– Attention !
Alec fut le plus rapide à réagir et eut juste le temps de se jeter sur sa sœur, pour éviter la boule de feu qui fonçait sur eux. Ils furent projetés quelques mètres plus loin par le souffle de l'impact.
– Tu n'es pas blessée ?
– Non, je vais bien, souffla-t-elle en époussetant son pantalon. Merci.
– On reste ensemble, d'accord ? ajouta-t-il d'une voix posée mais ferme, tout en dégainant son épée séraphique.
Sa sœur fit de même avec son fouet en électrum puis, dans une parfaite synchronisation, ils foncèrent vers la horde de démons qui venait d'apparaître au coin de la rue.
L'air chargé de cendres était devenu irrespirable. De nombreuses maisons étaient en flamme quand elles n'étaient pas déjà totalement en ruine. Les créatures ailées étaient si nombreuses dans le ciel que cela créait l'effet d'un essaim, occultant le soleil. Les cris des habitants se mêlaient aux hurlements sinistres des démons.
Les différents groupes de combattants s'organisaient tant bien que mal. Il y avait déjà de nombreuses victimes à déplorer, surtout dans la population non combattante. Les personnes trop âgées ou les enfants de moins de 12 ans avaient été amenées dans les cachots souterrains de la Garde, dans l'espoir incertain que cela suffise à les protéger.
Dans un premier temps, la principale menace vint du ciel. Plusieurs espèces de démons ailés planaient au-dessus de la ville. Il y en avait de toutes les tailles, bien que certains fussent insignifiants, ils partageaient tous un point commun : leur désir de destruction. Alec, dont les connaissances en démonologie n'étaient plus à prouver, identifia rapidement les deux plus dangereux.
– Regarde, un démon vétis, dit-il en pointant du doigt une silhouette massive. Ils aiment ce qui brille, on pourrait les attirer avec ça.
Il désigna sa lame séraphique. Sa sœur opina de la tête. Le démon vétis était énorme, il ressemblait vaguement à un dragon à la peau grisâtre. Ses petits yeux rouges tels deux rubis, lui permettaient de voir aussi bien de jour comme de nuit. Sa tête osseuse se terminait par un long museau muni d'une gueule aux dents nombreuses et acérées comme des rasoirs. L'ainé des Lightwood brandit son arme vers le ciel et l'activa :
– Hadraniel !
L'épée se mit à briller d'un éclat pur et intense qui attira instantanément l'attention du démon vétis. Il sembla hésiter un bref instant, l'air propulsé par ses deux paires d'ailes balayant la rue où se trouvaient Alec et Isabelle puis il fonça sur sa cible. Bien que massif et agile en vol, le vétis n'était pas très futé. Le combat fut bref : Isabelle claqua son fouet d'un geste assuré sur le cou de la bête avant qu'il n'atteigne son frère. Alec exécuta une roulade parfaite pour passer sous le démon, juste avant qu'il ne s'écrase au sol, déséquilibré. De nouveau sur ses pieds, le jeune Lightwood utilisa sa nouvelle magie afin d'immobiliser le démon juste assez longtemps pour lui asséner le coup fatal. De l'ichor noir et visqueux jaillit de la blessure quand il retira sa lame. La bête poussa un grognement rauque, se transforma en une fumée noire et sinistre, puis disparut, regagnant la dimension infernale.
Alec félicita sa sœur et fut surpris par un bruit d'applaudissement dans son dos. Il se retourna, prêt à se battre, mais ses traits s'adoucir de soulagement quand il reconnut Magnus.
– Quelle superbe prestation ! dit le sorcier, amusé, en tapant dans ses mains. Je vois que tu n'as eu aucun mal à te faire à ma magie.
Alec rougit légèrement et se gratta l'arrière de la tête, un peu gêné.
– Je pourrais m'y habituer ! répondit-il alors.
Le sorcier repris son air sérieux et sembla même inquiet.
– Lilith n'a pas fait dans la dentelle cette fois, dit-il en regardant autour de lui. Nous devrions rejoindre les autres.
Les Lightwood acquiescèrent. Le groupe de Chasseurs d'Ombres mené par Robert était en plein combat à une centaine de mètre d'eux. Le trio vint en renfort et ils maitrisèrent sans grandes difficultés les quelques démons présents. Pourtant, le combat semblait sans fin. De plus en plus de démons apparaissaient, grouillant sur les murs des maisons en feu. Il était d'ailleurs très difficile de respirer tant l'air était saturé de cendres et empestait l'ichor démoniaque. Les Nephilims n'étaient pas une race qui abandonne facilement : ils continuèrent donc, inlassablement, à lutter contre les intrus qui profanaient leur belle cité. Le groupe réussit à avancer jusqu'à la grande place où régnait le chaos le plus complet. Des corps de Nephilims et de Créatures Obscures jonchaient le sol par centaines. Alec serra les poings pour retenir ses larmes devant ce triste spectacle. Il sentit la main compatissante de Magnus serrer son épaule et rassembla son courage.
– Jusqu'à la mort ? dit-il en plantant son regard océan dans celui du sorcier.
– Jusqu'à la mort, confirma Magnus, en esquissant un sourire sans joie.
Alec s'empara alors de son arc et décocha une salve de flèches en direction du ciel, tandis que sa sœur s'occupait des démons au sol. Un cri strident retentit soudain. Il semblait venir d'un toit, à quelques mètres d'eux.
– Regardez ! hurla Alec à ses amis. Une hydre !
Robert se plaça devant son fils et le repoussa fermement en arrière, dans un geste protecteur.
– On s'en occupe, d'accord ? dit-il, en lui jetant un bref regard.
Alec n'avait pas le cœur à se sentir offusqué et recula. Ce n'était pas le moment pour discuter les ordres de son père, car l'énorme démon vint atterrir près d'eux d'un battement d'aile. Un frisson parcourut le dos d'Alec, lorsque ses multiples têtes se redressèrent.
L'hydre avait quatre énormes pattes pourvues de griffes crochues et une longue queue hérissée d'épines remplies de venin. La créature n'avança pas, elle semblait trépigner d'impatience, comme si quelque chose l'empêchait de se ruer sur le groupe de combattants. La tension était palpable, personne n'osait bouger. Robert Lightwood, les doigts crispés sur la poignée de son épée, hésitait à lancer l'assaut, quand un nuage de fumée noire se détacha du démon ailé pour se matérialiser en une forme vaguement humaine.
– Lilith…, souffla Magnus, alors que la silhouette n'était pas encore reconnaissable.
Alec se raidit. Il savait que le sorcier avait vu juste, il le sentait au fond de lui. Il percevait le pouvoir du démon qui avançait vers eux.
– Magnus Bane ! s'exclama finalement la démone, qui avait maintenant forme humaine, excepté pour ses yeux d'un noir profond et sans pupille. Tu es vraiment difficile à trouver ! Aurais-tu peur de moi ?
Le sorcier s'avança, sans toutefois dépasser Robert.
– Je suis là, dit-il sans trembler. Pourquoi aurais-je peur ? Je suis le Grand Sorcier de Brooklyn !
Sa décontraction feinte ne dupa nullement la démone.
– Nous avons quelque chose à régler toi et moi, tu t'en souviens ? susurra-t-elle d'une voix mielleuse.
Le sorcier perdit son sourire. Lilith leva la main et l'hydre déposa une de ses têtes contre la paume tendue, pour que la démone la caresse comme s'il s'agissait d'un chien.
– Tue-les tous ! Mais ne touche pas au sorcier, ordonna-t-elle alors. Bane est à moi !
L'énorme dragon s'agita. Bien qu'aveugle, l'hydre fonça vers le groupe grâce à son odorat, balançant ses têtes dans toutes les directions.
– Sois prudent, d'accord ? implora Magnus, en prenant Alec dans ses bras. Je ne pourrais plus utiliser mes boucliers si je me bats contre elle.
Alec acquiesça de la tête, puis il rejoignit sa famille pour combattre la bête.
Magnus, lui, s'avança vers Lilith. Il fit claquer ses doigts pour faire apparaître des étincelles bleues au creux de ses paumes, qui se transformèrent rapidement en flammes puis en boules de feu miroitant.
– Ce combat s'annonce intéressant, dit Lilith, en faisant apparaitre à son tour une sphère d'énergie dans sa main. Je sens qu'il y a quelque chose de différent chez toi.
– Tu parles de ça, j'imagine ! répondit Magnus, en dévoilant son bras.
La démone fit la grimace. Elle ne s'attendait visiblement pas à voir des runes angéliques sur le corps d'un sorcier.
– Sacrilège ! hurla-t-elle avant de lancer sa magie sur Magnus.
Le sorcier évita facilement l'attaque et répondit aussitôt en lâchant ses deux projectiles l'un après l'autre. La démone les esquiva de justesse, surprise par la vitesse et la précision de son adversaire. Elle marmonna ce qui ressemblait à une insulte dans une langue démoniaque que Magnus ne reconnut pas. Ils échangèrent ainsi coup sur coup, jusqu'au moment où le sorcier sentit ses forces l'abandonner. Malgré les runes Nephilim qui lui donnaient une endurance accrue, sa magie s'épuisait inévitablement. Il tenta de gagner du temps mais Lilith s'en rendit compte.
– Alors petit sorcier, on commence à manquer de jus ? railla-t-elle.
Alec, qui surveillait son compagnon du coin de l'œil, l'interpella.
– Magnus, attrape ça !
Il prit d'un geste vif son poignard séraphique et l'activa avant de le lancer vers le sorcier qui le saisit d'une main. L'arme était légère et parfaitement équilibrée. Le sorcier retrouva le sourire et tint la démone en joue.
– Tu penses que le combat au corps à corps sera plus à ton avantage ? se moqua Lilith. Comme tu voudras…
Sur ces mots, elle fit apparaitre une longue épée noire dans sa main, et donna le premier coup.
Le combat sembla durer une éternité pour Magnus. La démone ne montrait aucun signe de fatigue, contrairement à lui, qui peinait à reprendre son souffle.
– Tu m'ennuies, grogna-t-elle, sur un ton las.
– Tu peux toujours rentrer à Edom avec tes petits amis ! rétorqua le sorcier sans se démonter.
L'insolence de Magnus la fit trembler de rage.
– Tu vas me le payer, Bane ! cracha-t-elle. Cette fois, tu ne vas pas t'en tirer !
Une pluie de météores de magie noire s'abattit alors sur le sorcier qui les esquiva difficilement. Malheureusement, la démone avait une idée derrière la tête, cette attaque n'était qu'une diversion. Quand Magnus s'en aperçut, il était trop tard : une boule de ténèbres d'où sortaient des éclairs rouges et blancs filait vers Alec. Il tenta de projeter un bouclier pour protéger le jeune homme, en vain. Impuissant, le sorcier tomba à genoux, mais Robert, lui, réussit à s'interposer juste à temps pour sauver son fils. Il prit de plein fouet l'attaque de Lilith, avant de s'écrouler dans les bras d'Alec.
– C'était entre toi et moi ! rugit le sorcier. Pourquoi t'en prendre à eux ?
La démone se mit à rire.
– Tu es bien naïf pour un sorcier de 400 ans, Bane ! Tu pensais vraiment que moi, Lilith, un démon supérieur et Reine d'Edom, j'allais me battre à la loyale ? Dois-je te rappeler que les démons n'ont pas d'honneur ? Rien ne compte pour nous à part la destruction.
Magnus essaya de se relever, mais Lilith l'en empêcha, écrasant sa botte sur le torse du sorcier pour le maintenir plaqué au sol.
– J'ai peut-être manqué ton insignifiant petit Chasseur d'Ombre, ajouta-t-elle d'une voix cruelle, mais… (Elle jeta un regard aux Lightwood) j'y gagne peut-être au change finalement. De toute façon, ça n'a pas d'importance, vu que vous allez tous mourir dans très peu de temps. Lorsque votre misérable espèce sera rayée de la carte, je pourrais enfin déverser mes Ténèbres sur la Terre et en devenir la reine.
Magnus grimaça, impuissant. Puis, tout s'enchaîna très vite : Lilith, épée à la main, l'attrapa par le cou et le souleva comme s'il ne pesait rien. Le sorcier était incapable de bouger le moindre muscle, il entendit juste Alec prononcer son prénom d'une voix déchirée par le chagrin. Il n'avait plus la force de lutter, son esprit se brouillait déjà. Il vit la démone lever son épée, la lame en obsidienne lisse et brillante, prête à le transpercer sans pitié, puis ferma les yeux, résigné. Il entendit à peine les mots dénués d'émotion de Lilith :
– Adieu, Magnus Bane ! susurra-t-elle à son oreille, juste avant d'abaisser son bras.
La douleur ne vint pas. Un hoquet de surprise sortit de la gorge de la démone. Magnus ouvrit un œil, l'épée avait disparu et les traits de Lilith exprimaient un mélange de colère et de peur. Une voix caverneuse retentit alors, répondant aux interrogations du sorcier quant au changement d'attitude de la démone. Une voix qu'il reconnut aussitôt, distillant en lui un nouvel espoir teinté d'amertume.
– STOP ! tonna la voix provenant du tourbillon de cendres et de fumée qui était apparu derrière Magnus. Personne ne touche à mon fils ! Retourne d'où tu viens, Démone !
Magnus sentit la prise autour de son cou se desserrer instantanément, puis il tomba au sol alors qu'un épais tourbillon de fumée noire remplaçait la démone, avant de disparaître totalement. Il fallut quelques secondes au sorcier pour se relever et reprendre son souffle. Il massa sa gorge endolorie et fit face au nouveau venu, qui avait maintenant forme humaine.
– Père, bienvenue à Alicante, dit-il d'un air faussement désinvolte.
L'homme était grand et mince et élégamment vêtu d'un costume blanc dont les boutons de manchettes étaient en argent. Le teint pâle de son visage osseux et marqué par le temps inspirait le respect, tout comme la couronne de fil barbelé rouge-sang qu'il portait sur sa chevelure noire. Son regard mordoré se posa sur Magnus, qui baissa la tête, en soupirant.
– Vous aviez dit ne pas vouloir m'aider à bannir Lilith, ajouta Magnus d'une voix monocorde. Pourquoi avoir changé d'avis ?
– Je n'ai pas changé d'avis, fils, répondit-il.
Le démon enfouit ses mains dans les poches de son pantalon, et jeta un regard aux alentours.
– Pourquoi m'avoir sauvé alors ?
Magnus était perdu.
– Je ne l'ai pas fait de bonté de cœur, tu t'imagines bien ! répliqua Asmodeus. Pour être honnête avec toi, je cherchais justement un moyen de me débarrasser de Lilith. Elle est vraiment insupportable, je n'en pouvais plus de la voir à Edom.
– Maintenant que tu es là, tu peux surement renvoyer les démons, non ? glissa Magnus, d'une voix hésitante.
Le démon hocha la tête, un sourire en coin étira ses lèvres.
– Bien sûr que je le peux, je suis leur Maître. (Il claqua des doigts) Voilà, c'est fait, affirma-t-il.
En effet, partout dans la cité, les démons encore vivants disparaissaient dans des nuages de fumée noire. Même l'énorme Hydre, dont deux têtes avaient été tranchées, se dématérialisa sous les yeux des Lightwood et de leurs alliés. Le ciel retrouva petit à petit sa véritable couleur et Magnus sentit à nouveau la chaleur du soleil sur son visage. Une clameur monta doucement de tous les coins de la ville. Cette fois, c'était bien des cris de joie. Les survivants se prenaient dans les bras et laissaient éclater leur soulagement.
– À présent, tu as une dette envers moi, fiston ! ajouta Asmodeus.
Magnus se renfrogna. Il se doutait bien que son père ne s'était pas déplacé par amour filial.
– Que veux-tu ? demanda-t-il sèchement.
Son père arbora un large sourire et ouvrit les bras, paumes vers le ciel.
– Je veux ce que j'ai toujours voulu, voyons ! Que mon fils règne à mes côtés. Ce n'est pas cher payé quand je vois l'état de la ville. Sans mon aide, Lilith vous aurait tué, toi et tes amis, et aurait rasé cette cité en moins d'une heure.
Magnus se pinça l'arête du nez en prenant une grande inspiration. Il ferma les yeux, puis répondit en pesant chaque mot.
– Non merci, Père. J'aime ma vie sur Terre. (Il ne put s'empêcher de jeter un regard vers Alec.) Je préfère la deuxième option.
Asmodeus afficha une moue contrariée, mais n'insista pas.
– Soit ! Mais, je ne te cache pas que tu me déçois beaucoup, je pensais que tu aurais plus d'ambition que ça. Si tu as fait ton choix, je prendrais ton immortalité en paiement.
– Allons-y, finissons-en ! répondit Magnus, en soupirant.
Alec, qui n'avait entendu que des bribes de leur conversation, se redressa quand il discerna le mot « immortalité ». Il venait de perdre son père, il était hors de question pour lui de perdre aussi Magnus.
– Non, attends ! Qu'est-ce que tu fais ? dit-il en faisant un pas vers le sorcier, mais ce dernier le stoppa net, d'un signe de la main.
– Ne t'inquiète pas, Alec, dit Magnus avec un sourire qu'il voulait rassurant. Ça va aller.
Alec obéit et resta en retrait.
– Je suis prêt, fais ce que tu as à faire, dit Magnus, dont le sourire s'était fané.
– Bien, que le spectacle commence ! lança Asmodeus, d'une voix forte, de sorte que tout le monde l'entende.
Il disparut d'un coup dans une brume noire et épaisse, un concentré de ténèbres qui dressa les poils des Chasseurs d'Ombres présents. Le nuage de fumée tournoya sur lui-même et se rétracta avant de foncer sur Magnus, qui resta impassible. Le sorcier fut enveloppé par les ténèbres et les absorba en une fraction de seconde, rendant ses yeux mordorés entièrement noirs comme de l'onyx. Sa tête bascula en arrière, ses iris reprirent leur couleur et se mirent à briller intensément, puis il cracha la fumée qui reprit forme humaine.
– Nous sommes quitte à présent, dit Asmodeus. Ne m'invoque plus jamais !
Le démon claqua des doigts et regagna sa dimension. Alec se précipita vers Magnus pour s'assurer qu'il allait bien. Ce dernier semblait avoir repris ses esprits. Il remua les doigts, faisant apparaître de légères volutes de magie aux reflets turquoise.
– Est-ce que ça va ? s'inquiéta le jeune Lightwood.
– On dirait que oui, répondit Magnus, dont les traits se détendaient déjà.
– Tu ne vas pas te transformer en poussière, ou…
Le sorcier l'interrompit d'un doigt sur les lèvres.
– Alec, je vais bien. Je suis toujours un sorcier, comme tu peux le voir. Même si je vais devoir m'y faire, je préfère être mortel que mort empalé par une harpie démoniaque ou passer l'éternité en Enfer, plaisanta Magnus, dans un demi-sourire.
Son doigt glissa sur la joue d'Alec, qu'il caressa du pouce. Un masque de tristesse se posa sur son visage et l'étincelle qui brillait dans son regarde félin s'éteignit.
– Je suis tellement désolé pour ton père, Alexander, je…
Alec attira le sorcier contre lui et le serra de toutes ses forces, laissant enfin son chagrin s'exprimer. Il s'était contenu jusque-là, pour sa mère et sa sœur, mais dans les bras du sorcier, il laissa couler ses larmes.
L'heure n'était pas encore au deuil, cette bataille était une victoire, mais le prix payé était lourd, et Jonathan représentait toujours une grande menace. Les Lightwood n'étaient pas les seuls à avoir perdu quelqu'un, les corps des défunts furent amenés dans les salles mortuaires de la Garde. Après le départ forcé de Lilith, l'inquisitrice Penhallow regroupa ses troupes pour les féliciter, mais aussi leur rappeler que la guerre n'était pas terminée.
– Nous ne devons pas oublier que notre principal ennemi est toujours vivant, dit-elle sur un ton solennel. Jonathan Morgenstern a juré de nous détruire jusqu'au dernier, et il le fera si on lui en laisse l'occasion. Restons sur nos gardes, mes amis ! Nous ne savons pas de quelle armée il dispose, nous devons nous tenir prêts. Je…
Jia fut brusquement interrompit par un brouhaha cadencé semblant venir de la rue commerçante à sa gauche, puis une voix, que tous reconnurent, retentit à travers la fumée.
– Il semblerait que l'on parle de moi !
Jonathan émergea de l'obscurité de la ruelle. Tout de noir vêtu, ses cheveux argentés brillaient au soleil. Il était suivi par une armée de Chasseurs d'Ombres en tenue noire et rouge. Il s'arrêta à une vingtaine de mètres de l'inquisitrice, et reprit la parole :
– Je n'ai pas besoin de Lilith pour en finir avec l'Enclave et tous ceux qui la suivent aveuglément, dit Jonathan d'un ton cinglant. Ouvrez les yeux ! Ceux qui me rejoindront, auront la vie sauve. C'est votre dernière chance.
Un murmure indigné se propagea parmi les combattants. Les rangs se serrèrent derrière l'inquisitrice, en guise de réponse.
Un masque de colère se posa sur le visage de Jonathan. La défection de Lilith était déjà un coup dur pour lui, son plan s'effritait de plus en plus. La mort de Jace n'était pas suffisante, il voulait que tous ceux qui ne lui voueraient pas allégeance meurent.
– Très bien, comme vous voudrez…, reprit-il la mâchoire serrée, puis il leva son épée. À l'attaque !
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Hébétée, Clary regarda Jonathan et Simon s'éloigner, puis disparaître par un portail. Elle se retrouva seule, avec le corps de Jace sur les genoux et sa souffrance. Il ne bougeait plus mais elle ne voulait pas y croire. En larmes, elle le secoua en lui implorant de se réveiller. Elle resta ainsi prostrée pendant un long moment, qui lui parut une éternité. Puis, ayant épuisé toutes les larmes de son corps, elle pensa à sa famille, à ses amis, à Simon. Elle devait sauver Simon, pour que Jace ne soit pas mort en vain. Elle lui devait au moins ça.
Clary rassembla son courage et essuya ses joues d'un revers de manche. Elle posa délicatement la tête de Jace sur le sol et se remit sur ses pieds. Elle vit alors la fumée au-dessus d'Alicante. Sa famille et ses amis avaient besoin d'elle, elle inspira profondément et fit ses adieux à Jace, en déposant un dernier baiser sur ses lèvres.
J'espère que ce chapitre vous a plu.
Laissez une petite review si c'est le cas.
à bientôt pour la suite
- ly
