Chapitre 18 :
Transunivers
Ce fut beaucoup plus rapidement qu'il ne l'aurait voulu que Harias dû retourner sur son vaisseau, laissant son amant à regret. Chris l'avait accompagné jusqu'au quai où il retrouva les membres de son équipage revenant aussi. Et eux aussi semblaient avoir du mal à lâcher leur famille, ce qu'il comprenait aisément. En tant que capitaine, il prit donc les choses en main, saluant une dernière fois son amiral avant de s'en séparer et de donner l'ordre à son équipage d'embarquer sur la navette, rappelant que le dernier tiers de leurs camarades attendait aussi avec impatience de voir leur famille. Tous obtempérèrent sans protester et bientôt, ils furent de retour sur le Discovery, laissant le dernier groupe partir en permission. Ce fut immédiatement que Harias se remit au travail, accueillant avec joie Khan téléporté depuis son centre de détention où il n'avait causé aucun problème. Mais il semblait de mauvaise humeur, ce qu'il comprit facilement. Il retrouva ensuite Saru, écoutant son rapport sur ce qu'il s'était passé en son absence. Très vite, il vit aussi Stamets débouler dans son bureau, l'air surexcité, l'amusant un peu :
- Capitaine ! appela-t-il en entrant. Enfin vous êtes là.
- Je suis là lieutenant commander, s'amusa-t-il. Vous ai-je tant manqué ? rit-il.
- Je n'irai pas jusque là, répondit-il léger. Puis-je vous parler en tête à tête à propos de mon projet ? demanda-t-il avec un coup d'œil pour Khan.
Bien sûr, si Khan l'accompagnait partout et avait entendu de vagues allusions au projet du moteur sporique, la chose était encore totalement secrète pour lui. Et si une partie de l'équipage connaissait l'existence de ce moteur, ses spécifications et l'avancement de son perfectionnement étaient secrets en dehors de quelques membres d'équipages.
- Khan, pouvez-vous nous laisser un moment, pria-t-il doucement.
L'augmenté acquiesça froidement et s'en alla, sachant parfaitement que de nombreux projets du vaisseau lui étaient interdits d'accès. La porte se referma et Harias invita le scientifique à s'installer face à lui, ce qu'il fit rapidement.
- Je vous écoute. Avez-vous avancé sur l'identification d'un navigateur potentiel ?
- Non, grimaça-t-il. Comme nous l'avions estimé, l'intelligence et les capacités cérébrales nécessaires pour être ce navigateur sont très élevées. S'il ne s'agissait que de se déplacer via le réseau pour un être, comme le tardigrade, les exigences seraient moindres mais pour piloter un vaisseau comme le Discovery dans le réseau, il faut beaucoup plus. Il faut au moins un niveau d'intelligence humaine et une configuration cérébrale équivalente.
- Ce n'est pas une surprise, mais ce n'est pas le seul problème. Sinon, nous aurions pléthore de candidats.
- Le problème est qu'aucune espèce potentiellement en capacité de servir de navigateur n'a le lien nécessaire avec le réseau. Le tardigrade avait une correspondance génétique avec les spores qui lui permettait de communiquer avec elles. Une communication indispensable pour voyager dans le réseau sans se perdre. Cet impératif élimine tout les candidats de la liste.
- Sauf moi.
- Sauf vous grâce à votre capacité à communiquer par l'énergie et plus généralement, à communiquer avec tout ce qui vit. Mais là encore, cette capacité est unique et aucune espèce connue n'a quelque chose d'approchant.
- Mais vous avez une idée n'est-ce pas ? releva-t-il.
- Oui. Nous avons élaboré une… une thérapie génique pour reproduire le transfert de gène que le tardigrade avait lui même utilisé. Cela pourrait donner à un humain admettons, cette capacité à communiquer avec les spores et à servir de navigateur.
- Les manipulations génétiques sont interdites lieutenant, posa-t-il calmement. Je pense que vous le savez.
- Oui mais il semble que ce soit le seul moyen.
- Il n'y a jamais qu'un seul moyen. Il faut juste chercher davantage.
- Capitaine…
- Je comprend votre empressement monsieur Stamets. Ce projet est l'œuvre de votre vie mais la manipulation génétique n'est pas une chose à prendre à la légère. Premièrement, c'est interdit par la loi pour une très bonne raison. Deuxièmement, croyez en mon expérience, manipuler la vie et son évolution n'est pas une chose à la porté des espèces vivantes même les plus intelligentes. Seule la nature peut faire cela correctement sans causer de dégâts. Nous n'avons aucune idée des effets que cette thérapie génique pourrait avoir sur une personne. D'autant plus que vous êtes bien placé pour savoir que nous effleurons à peine la surface au sujet des spores, du réseau et de tout ce qui le concerne. Nous sommes très loin d'en savoir assez pour mener une telle expérience avec des risques mesurées. Vous pouvez éventuellement travailler sur une interface génétique pour essayer de créer un lien mais pas de manipulation génétique. Sous aucun prétexte. Est-ce clair ?
- Oui capitaine, approuva-t-il malgré sa déception.
- Cela étant dit. J'ai eu assez de temps pour me familiariser avec les spores et grâce au tardigrade, j'ai terminé de comprendre comment communiquer avec elles. Nous allons pouvoir commencer à tester et à faire quelques expériences. Laissons le reste de l'équipage profiter de sa permission puis nous repartirons nous isoler dans un recoin perdu pour travailler en toute confidentialité. Nous essaierons une nouvelle alerte noire et je servirai de navigateur.
- Vous êtes sûr que c'est sans danger pour vous capitaine ?
- Certain. J'ai parfaitement saisi comment cela fonctionne maintenant ainsi que la manière de communiquer avec le réseau. Nous commencerons par des destinations que je connais et dont je connais le chemin pour que je termine de me familiariser vraiment avec le réseau. Puis nous pourrons tester d'autres choses. Vous pourrez ainsi faire des relevés et tenter d'apprendre comment communiquer avec le réseau sans moi et sans lien génétique. Voyez ça comme l'apprentissage d'une nouvelle langue puisque qu'au fond, c'est cela. C'est ce que j'ai fait bien que de manière bien plus facile et rapide que pour vous, j'ai appris à parler avec le réseau. Vous pouvez le faire aussi j'en suis certain.
- Je vais le faire, assura-t-il l'air encouragé.
- J'ai cependant une demande. Comme je l'ai déjà dit, je ne peux pas passer mon temps dans le cube de réaction pour les sauts sporiques. Ma place est sur la passerelle surtout pour ce genre d'expérience. J'ai cependant un esprit parfaitement adéquat pour les liens neuraux et énergétiques. Tentez de me faire une interface pour me connecter à distance au cube, depuis la passerelle, via l'ordinateur peut-être. Que je puisse envoyer mon énergie directement dans le cube.
- On va se pencher là dessus. Cela ne devrait pas être très compliqué avec vos capacités, s'amusa-t-il.
- Faîte cela. Dans une semaine, nous repartons et nous nous concentrerons un peu plus sur le moteur sporique. Si je parviens à l'utiliser avec le Discovery, cela vous permettra certainement d'avancer dans vos recherches.
- Assurément, sourit-il. Je vais m'y remettre alors. Capitaine, salua-t-il en se levant.
- Bonne journée lieutenant commander. Et pas de thérapie génique, insista-t-il.
- Oui capitaine, assura-t-il.
Il repartit et Khan revint une seconde plus tard, se remettant au travail avec lui. Une semaine plus tard, la totalité de l'équipage était de retour à bord et le Discovery se vit réassigner une mission de recherche scientifique de six mois. Durant la semaine, Stamets avait rapidement mis au point l'interface qu'il lui avait demandé. Elle prenait la forme d'anneaux sombres où des capsules de spores étaient enfermées. Des anneaux qu'il pouvait glisser sur ses cornes. Ils avaient eu l'occasion de les tester et ce fut sans mal que Harias put se connecter au cube et aux spores qu'on y relâchait pour les sauts, y étendant son énergie. Lorsqu'ils repartirent, ils étaient donc prêt à passer à l'étape supérieure avec le moteur sporique. Harias commença par mener le Discovery dans une zone déserte éloignée, stationnant le temps de remettre tout le monde au travail normalement, de faire le tour du vaisseau, des projets pour s'assurer que tout était en ordre. Quelques jours plus tard, ils avaient programmé leur premier saut. Stamets l'avait rejoint sur la passerelle pour l'analyser pendant la manœuvre, comme le docteur Culber soucieux de la santé de son capitaine dans cette expérience. Khan était présent, regardant cela avec curiosité. Harias fit activer l'intercom général :
- Votre attention s'il vous plaît, ici le capitaine Harias. Le Discovery se prépare à mener une nouvelle tentative d'alerte noire. Je serai le navigateur. Cette fois, nous savons comment faire grâce à l'analyse du tardigrade et des données du Glenn. Je vous demande à tous de vous préparer. Nous allons tenter un petit saut pour commencer et si cela fonctionne comme nous nous y attendons, nous tenterons un saut sur une distance bien plus longue. Je vous remercie. Alerte noire, ordonna-t-il ensuite.
Immédiatement, la lumière changea sur la passerelle et Harias activa l'interface qu'il portait sur ses cornes d'une simple impulsion d'énergie alors que l'alarme raisonnait. Il se connecta sans mal au cube que le cadet Tilly devait charger en spore tout en suivant la manœuvre de là bas. Ce fut rapidement le cas et il entra en contact avec les spores l'accueillant toujours aussi joyeusement depuis qu'ils avaient fait connaissance. Ce fut sans mal qu'il entra en contact avec elles, se connectant au vaisseau grâce au cube et à ses dons comme il le faisait souvent pour bien d'autres choses. Une seconde et le système du moteur sporique se mit en route, les sections de la soucoupe se mettant à tourner rapidement. Encore une seconde et ils partaient dans le réseau pour un voyage éclair. Il fut assurément le seul à pouvoir voir leur passage dans le Réseau mais ce fut absolument magnifique pour lui. Un monde de lumière et de vie incroyable s'étendant au-delà de l'univers. Cela sauta à ses sens pendant la fraction de seconde où il s'y trouva et il se jura de venir visiter un peu plus plus tard. Cette fois, ce fut sans aucun mal et sans aucun incident que le Discovery ressortit aux coordonnées exactes qui avaient été prévues, en douceur, un instant de silence pantois s'installant sur la passerelle avant que Saru ne le brise :
- Coordonnées d'arrivées confirmées et exactes au centimètre près. Le saut a réussi. Félicitation capitaine, fit-il joyeusement.
Tous suivirent d'ailleurs sur la passerelle, ravis alors qu'il s'agissait là de la première réussite totale du moteur sporique sur lequel ils travaillaient depuis si longtemps.
- Comment vous sentez-vous capitaine ? demanda Culber qui vérifiait déjà son état.
- Parfaitement bien. Comme je l'imaginai, pour moi, ça ne posera pas de problème. Lieutenant Stamets ?
- Nous avons récolté une masse d'information incroyable capitaine, fit-il avec enthousiasme. Cette fois, tout à parfaitement fonctionné. Il n'y a pas eu une seule erreur ou dysfonctionnement.
- Cela prouve que votre système fonctionne parfaitement. La seule problématique est donc le navigateur. Je servirai de navigateur pour le Discovery mais vous devrez trouver des alternatives rien que parce que ce vaisseau ne peut pas dépendre de moi pour utiliser le moteur sporique.
- Nous allons trouver, assura-t-il. Maintenant que nous pouvons sauter correctement, nous allons pouvoir analyser en profondeur la manière de communiquer avec le réseau. Les données de vos capteurs cérébraux sont incroyables, remarqua-t-il plongé dans sa tablette. Vous crevez tout les plafonds.
- Il paraît que j'ai une activité cérébrale hors norme, s'amusa-t-il.
- Et cela me fait penser que l'on a peut-être encore sous-estimé le niveau d'évolution cérébrale qu'il faut pour être navigateur dans le réseau.
- Ce sera à vous de le déterminer. Docteur Culber ?
- Je de détecte aucun problème capitaine, sourit-il l'air soulagé. Mais j'aimerai autant être là pour les premiers sauts et surveiller régulièrement votre état si nous poursuivons.
- Très bien. Tentons le second saut plus loin maintenant. Alerte noire.
- Oui capitaine !
L'alerte fut relancée et si la distance fut cette fois-ci beaucoup plus grande, ce fut tout aussi facilement qu'ils la parcoururent en une fraction de seconde via le réseau, ressortant pile où cela avait été prévu sans aucun problème. Cette réussite extasia totalement l'équipage, le rassurant aussi sur le fait de ne pas connaître le sort du Glenn grâce à leur capitaine. Ces deux sauts ne furent que les premiers d'une longue série. Dans les semaines suivantes, ils multiplièrent les essais, faisant varier les distances à chaque fois, tentant plusieurs sauts rapprochés, analysant leurs effets sur l'espace ambiant. Cette fois, le moteur sporique était bel et bien en course, tenant toute ses promesses avec un bon navigateur. Cela fut aussi l'occasion pour Harias de se familiariser toujours plus avec cet incroyable réseau vivant qui couvrait l'univers entier et, il l'avait entraperçu, bien plus encore.
Entre les sauts, Stamets et son équipe analysaient toutes les données récoltées grâce à lui, toujours plus enthousiastes. Ils avançaient à pas de fourmis mais ils étaient sur le chemin pour commencer à comprendre comment communiquer avec le réseau. Bien sûr, tout le travail du Discovery continuait, la réussite du moteur sporique poussant tout le monde à travailler encore plus sur les divers projets. Très vite après les premiers sauts réussis, Harias avait vu Burnam accourir, ayant parfaitement compris ce qu'il s'était passé, très enthousiaste elle aussi devant cette réussite, demandant comment ils avaient fait. Harias l'avait renvoyé froidement, lui rappelant que ce n'était plus ses affaires et qu'elle n'avait plus accès à ce projet. Il avait ajouté que son comportement négatif de ces dernières semaines dans les tâches et les restrictions qui lui avaient été assignées n'étaient clairement pas pour l'encourager à changer sa place à bord. Il l'avait renvoyé au travail, lui intimant de réfléchir à son comportement.
Khan quant à lui, s'il ne savait rien des spécificités du moteur sporique, avait bien compris qu'il s'agissait d'un moyen de propulsion instantané très complexe, nécessitant un esprit très intelligent pour naviguer. Il ne posait pas de question sur le sujet, ayant bien deviné l'importance du projet pour Starfleet et l'intérêt de sa confidentialité. Harias savait pourtant que tant que ce système ne serait pas utilisable sans lui même, il n'était pas viable pour être utilisé par d'autres et donc, ne lui servait à rien pour l'instant. Khan était du genre à les laisser se casser les dents sur le sujet pour finaliser le projet et tenter de le récupérer ensuite. Seulement, il savait aussi que Harias ne le laisserait pas faire et que tenter quelque chose là dessus ruinerait ses propres efforts pour atteindre son but. Il restait donc soigneusement hors de ça. Quelques semaines après les premiers sauts, Harias voulut tenter autre chose, une autre expérience. Pour cela, il réunit Stamets, Saru et Landry dans son bureau :
- Je voudrai programmer une nouvelle expérience avec le réseau, leur annonça-t-il.
- Un nouveau saut ? demanda Paul.
- Pas exactement. J'aimerais me rendre directement dans le réseau et pas seulement y passer une fraction de seconde. J'ai eu le temps de me familiariser avec lui et je sais comment faire maintenant pour me rendre dans le réseau. Cela pourrait nous apprendre énormément sur lui. Je vais donc m'y rendre, pendant une heure et je vous emmène avec moi lieutenant commander.
- Vous pouvez faire ça ? demanda l'homme très enthousiaste.
- Je peux et on va le faire. J'estime que s'il y a une personne qui mérite de venir avec moi, c'est vous. Allez passer une combinaison et prenez votre matériel. Nous nous retrouvons au cube.
Il ne fallut pas le dire deux fois à l'homme qui partit en courant avec un :
- À vos ordres capitaine !
- Êtes-vous certain que c'est prudent capitaine ?
- J'ai pris le temps de connaître les spores par cœur et je communique désormais très facilement avec le réseau. À chaque saut, j'ai eu l'occasion de le voir furtivement et j'en sais désormais bien assez pour y entrer et en ressortir sans problème. Une telle visite pourrait beaucoup nous aider. Nous ne savons presque rien du réseau et si nous voulons avancer, cela doit changer. Nous devons apprendre à le connaître comme nous connaissons notre univers. Je suis optimiste sur la réussite de cette expérience. Mais lorsque nous serons dans le réseau, nous serons certainement coupé de vous. Avec le temps et si nous réussissons comme je l'espère, nous pourrons peut-être créer un moyen de communiquer entre le réseau et notre espace. D'ici là, nos voyages dans le réseau nous couperons du Discovery. Je compte donc sur vous pour veiller sur le vaisseau et l'équipage en notre absence.
- À vos ordres capitaine, répondirent-ils ensemble.
Harias leur sourit, heureux de voir sa relation avec eux désormais très belle. Maintenant, ils évoluaient vraiment en toute confiance comme un capitaine devait évoluer avec son numéros un et son numéros deux. Landry s'était énormément apaisée à son égard, reconnaissant qu'il était un excellent capitaine tout à fait à propos pour le Discovery. Elle lui était désormais loyale et lui faisait confiance, ayant bien compris que la relève de Lorcas n'était pas de son fait et qu'il était réellement un très bon capitaine. Tous sur le vaisseau le reconnaissaient d'ailleurs, très heureux qu'il ait pris le vaisseau en main.
- Je compte rester dans le réseau pendant une heure pour commencer mais nous ignorons si le temps coule de la même manière dans le réseau alors si vous n'avez pas de nouvelle dans l'heure, ne paniquez pas. Laissez nous vingt-quatre heure. Si au bout de vingt quatre heure vous n'avez pas de nos nouvelles activez le moteur sporique avec une forte charge de spore. N'entrez pas de destination. Activez le moteur avec les spores. Cela le connectera au réseau et enverra une impulsion d'énergie à l'intérieur. La signature du moteur sporique est caractéristique et je peux la sentir. Je saurais alors qu'il est temps de rentrer pour analyse. Si vous n'avez pas de réponse dans l'heure en retour, contactez le QG.
- Mais vous avez dit que ça allait bien se passer, fit Landry inquiète.
- Oui mais je ne suis pas infaillible alors même s'il y a peu de chances que ça capote, il vaut mieux que vous sachiez quoi faire si ça arrive, sourit-il.
- Très bien capitaine, approuva Saru.
- Je vais rejoindre monsieur Stamets, dit-il en se levant. Je doute qu'il soit patient maintenant que je lui ai parlé de ça, rit-il.
- Je suis du même avis capitaine, remarqua Saru.
- Il va se comporter comme un gosse. Un gosse savant mais un gosse, s'amusa Landry.
- Il y a des chances, approuva-t-il. Rejoignez la passerelle. Je vous préviens quand nous débutons l'expérience.
Ils obéirent sur le champs et il prit le chemin de la salle des machines sporique. En y arrivant, il trouva Stamets déjà fin près, en combinaison, son matériel à la main.
- Vous avez fait vite, s'amusa-t-il alors que le reste de l'équipe le regardait avec curiosité.
- Ça vous surprend ? Vous me proposez de réaliser le rêve de ma vie. Je ne vais pas traîner.
Harias sourit et le rejoignit, l'invitant à le suivre dans le cube. Il ne fallut pas le dire deux fois et ils furent bientôt enfermés à l'intérieur.
- Harias à passerelle, appela-t-il alors. Le lieutenant-commander Stamets et moi nous apprêtons à débuter l'expérience. Êtes-vous près ?
- Oui capitaine.
- Cadet Tilly, appela-t-il alors en regardant la rousse. Donnez nous un tube de spores je vous prie.
- Oui capitaine, répondit-elle en s'exécutant.
Bientôt, ils étaient cernés par une nuée de spores lumineuses bleutées dansant autour de l'être ailé, se nichant dans ses ailes. Harias avait remarqué que les spores aimaient ses ailes, entrant plus facilement en contact avec lui et son énergie lorsqu'elles y étaient. Elles s'y plaisaient et y survivaient très bien. Harias se demandait d'ailleurs s'il ne pouvait pas abriter une certaine quantité de spores sur lui ainsi. Cela lui permettrait certainement de voyager dans le réseau sans avoir à repasser par le Discovery si un jour cela s'avérait nécessaire. Il posa une main sur l'épaule de Stamets dont-il sentait l'excitation :
- Harias à passerelle. Nous partons.
- Bonne chance capitaine, salua Saru.
Une seconde plus tard, Harias partait pour le réseau avec son subalterne, la chose encore plus simple sans avoir à emmener le Discovery avec lui. Un instant et ils entraient dans le réseau qu'il avait tant de fois entre aperçu. Mais s'y arrêter vraiment était autre chose. Ils se retrouvèrent avec une véritable forêt fongique autour d'eux. Ils y avaient les mêmes spécimens que dans la serre du Discovery mais en bien plus grands et d'autres, des centaines d'autres de toutes sortes. On aurait pu croire à des arbres et des plantes s'il ne savait pas que seuls des champignons se trouvaient ici. Mais la différence notable était l'incroyable lumière qui émanait de chaque spécimen. Des lumières de toutes les couleurs mais l'intensité n'était pas très forte, laissant une certaine obscurité planer comme dans un sous bois spatial. Le ciel, si c'était un ciel, ressemblait à l'espace, à une nébuleuse mais Harias comprit vite qu'il était chargé de spores de toutes les teintes. Tout était très calme, apaisant, serein et Harias admira cela avec émerveillement. Stamets en fit autant, souriant comme un enfant, tournant sur lui même, touchant délicatement les champignons.
- C'est magnifique, souffla-t-il finalement. Alors c'est à ça que ressemble le réseau.
- Aussi beau que je l'avais entraperçu pendant les sauts, approuva-t-il. Je pense que l'environnement est viable pour vous mais vérifiez avant de retirer votre casque, dit-il.
Cela réveilla le scientifique qui sortit ses instruments pour commencer ses analyses sans se départir de son sourire. Harias quand à lui, s'assit au sol, étendant ses ailes derrière lui, décidé à analyser par lui même ce lieu incroyable.
- Qu'est-ce que vous faîte capitaine ? demanda Stamets.
- Vous avez vos appareils, j'ai mes sens. Moi aussi je veux apprendre à mieux connaître le réseau. Il est fascinant. Faisons chacun nos observations et nous en discuterons une fois rentré.
- J'y compte bien, sourit-il. Merci capitaine, dit-il avec gratitude.
Harias lui sourit et ils se mirent au travail chacun de leur côté. Très vite, Paul confirma que l'environnement était parfaitement viable pour lui et sans danger, retirant son casque pour mieux profiter du spectacle. Il observa un instant son capitaine qui semblait méditer les yeux clos, une nuée de spore colorées autour de lui. Il n'y avait pas cru lorsqu'il était arrivé sur le Discovery mais maintenant, il était ravi d'avoir rencontré cet être extraordinaire sur tout les plans. Harias comprenait l'univers comme personne et travailler à ses côtés était incroyable. Son capitaine lui avait permis d'avancer à pas de géants depuis son arrivée, jusqu'à lui permettre d'être là, en plein dans le réseau. Jamais il n'aurait cru cela possible. Il se fit donc une joie d'analyser tout cela, l'opportunité incroyable.
Après une heure, Harias bougea de nouveau, se relevant, lui signalant qu'il était temps de rentrer. Stamets râla un peu, l'amusant mais il céda rapidement, se reprenant. Harias lui promit qu'ils reviendraient et il revint poser une main sur son épaule, se concentrant pour les faire sortir du réseau et regagner le cube du Discovery sans aucun problème, ravissant le scientifique impressionné. Saru, Landry et Culber les attendaient avec Tilly dans la salle des machines et ils sortirent du cube.
- Sommes nous en retard ? demanda-t-il.
- Pas du tout capitaine, répondit Saru. Vous êtes pile à l'heure prévue. Nous pouvons écarter la distorsion temporelle entre le réseau et notre univers.
- Cela facilitera les choses pour nos expérimentation futures, sourit-il. Quelque chose à signaler en mon absence ?
- Non capitaine. Tout a été on ne peut plus calme, répondit son second.
- Parfait. Monsieur Stamets, direction l'infirmerie, ordonna-t-il alors que l'homme allait déjà vers ses ordinateurs.
- Mais capitaine…
- Mesure de prudence lieutenant-commander. Nous ne savons pas grand-chose du réseau et si à priori, rien n'était dangereux pour nous là bas, vous allez y passer comme moi. Vous pourrez revenir analyser vos données ensuite.
- Bien capitaine, soupira-t-il de mauvaise grâce.
Ils se rendirent donc à l'infirmerie avec un Culber heureux de voir son compagnon obéir facilement avec leur capitaine. Ils purent en ressortir rapidement sans rien à signaler, Stamets courant littéralement vers son laboratoire. Harias quant à lui rejoignit sa passerelle pour un entraînement au combat comme cela était prévu. Cela faisait plus de cinq mois qu'il dirigeait le Discovery et qu'il avait repris l'entraînement de ses officiers. Et il était extrêmement fier de leurs progrès, de leur travail. Ils avaient énormément avancé et à ses yeux, ils étaient prêt maintenant. Aussi ce jour là, il débuta le programme de simulation de Khan avec eux, programmant une simulation par jour avec débriefing immédiat. Ils commencèrent donc, tous restant parfaitement calmes après son entraînement. La première simulation qui n'était que d'un niveau de parfait débutant fut une réussite totale et rapide, Harias aux commandes. Ce premier niveau finit, il lança un regard à Khan qui souriait, l'air ravi d'enfin leur soumettre son programme. Mais surtout, il espérait battre le capitaine ailé et son équipage avec lui. Harias quand à lui, avait bien l'intention de lui prouver que l'équipage du Discovery n'était pas aussi pathétique qu'il le pensait.
Dans les jours qui suivirent, ils enchaînèrent les simulations, réussissant facilement même si le niveau restait bas pour l'instant. Harias et Stamets multiplièrent aussi les séances dans le réseau, tout deux ce contentant d'analyses et de ressentis pour le moment, observant et appréhendant ce subespace incroyable. Ce ne fut qu'après un mois de séance quotidiennes qu'il rassembla l'équipe du moteur sporique avec son numéro un pour faire un point sur tout ce qu'ils avaient appris.
- Nous avons fait des bonds de géants grâce à vous capitaine, remarqua Stamets tout sourire. Notre compréhension du réseau n'a jamais été aussi grande. Nous sommes désormais certains qu'il s'étendant dans l'univers tout entier mais pas seulement. Il semblerait qu'il s'étend même à d'autres univers, d'autres réalités quantiques.
- Je sais, je l'ai senti, sourit-il.
- Vous pouvez percevoir cela ? s'émerveilla Tilly.
- Maintenant que je sais parfaitement utiliser le réseau pour voyager et que je le comprend, que je parviens à communiquer avec lui en parfaite symbiose, il me montre toutes les routes et toutes les destinations que je demande. J'ai essayé de voir jusqu'où il pouvait aller et il m'a fait comprendre. Votre théorie d'origine est parfaitement exacte monsieur Stamets : le réseau traverse tout l'univers et même tout les univers. Il est le squelette, les muscles, les veines… de l'Univers. Et il est plein de vie. Il serait l'origine de la vie que je ne serai pas surpris. Votre découverte est absolument grandiose. Félicitation.
- Merci capitaine mais sans vous, nous n'aurions pas avancé autant.
- Une maigre contribution à votre travail. Tout le mérite vous revient. Où en sommes nous pour le navigateur ?
- Nous comprenons de mieux en mieux comment est fait le réseau et nous répertorions les espèces que l'on y trouve grâce aux échantillons que nous ramenons. Mais nous n'avons qu'effleuré la surface pour l'instant. Il faudra du temps.
- Comment pourrait-il en être autrement lorsque l'on parle d'un système aussi complexe et vaste ? Il faudra probablement des années pour avoir des connaissances décentes sur le réseau.
- Le problème du navigateur reste entier, reprit Stamets. Nous n'avons toujours personne d'autre que vous capable de communiquer avec les spores comme il le faut pour user du réseau pour voyager.
- Nous ferons avec pour l'instant. L'important est d'apprendre à connaître le réseau, sa biologie, son fonctionnement… tout ce qu'on pourra, remarqua-t-il. Il faut être prudent. Il soutient la vie absolument partout. Nous ne savons pas encore si utiliser le réseau pour voyager pourrait être néfaste pour lui. Nous avons connu la pollution sur bien des mondes, nous ne pouvons pas risquer de porter préjudice au réseau mycélien. Nous allons donc continuer notre étude minutieuse, une chose à la fois, avec prudence. Je parlerai à l'amirale de la flotte pour lui faire comprendre l'importance d'être prudent avec le réseau. Le Discovery restera unique longtemps je pense. Prenez votre temps Lieutenant-Commander et si vous souhaitez agrandir votre équipe pour étudier cette masse d'informations, vous n'avez qu'à me soumettre vos requêtes de recrutement. Faîte comme vous le jugerez utile pour travailler au mieux. J'attendrai chacun de vos rapports avec impatience.
- Oui capitaine. Et vous ? Allez vous nous dire ce que vous percevez ?
- Cela serait très compliqué pour moi, soupira-t-il. J'aimerai vous expliquer ce que je perçois mais je n'ai ni les mots, ni les principes scientifiques, ni la manière d'expliquer… Mes perceptions et ma manière de les interpréter est très loin de vos principes scientifiques. Je ne saurai comment le dire. Je peux vous confirmer vos théories et vous donner des pistes mais je crains de ne pas être d'une plus grande aide. Je risquerai de vous embrouiller plus qu'autre chose.
- Je vois. Et bien nous apprendrons par nous même, sourit Paul. Votre aide est déjà inestimable. Nous avançons plus que je n'aurai jamais pu l'espérer depuis que vous êtes là. Merci pour ça capitaine.
- C'est mon travail, sourit-il. Et c'est pour ça que j'ai été choisi pour le Discovery. Continuons donc ainsi. Étudiez le réseau sous tout les aspects avec autant de précision que possible.
- Oui capitaine, répondirent-ils en cœur.
Il approuva, leur souriant avant de s'en aller avec son second pour rejoindre la passerelle et reprendre son propre travail. Parce que si le réseau était assurément le point crucial du Discovery et son projet le plus incroyable, il n'était pas le seul et tous avaient besoin de son attention. Les semaines continuèrent à couler, Harias suivant l'étude du réseau mycélien de près, emmenant régulièrement Stamets dans le réseau pour qu'il puisse l'analyser. Et il en profitait pour se connecter de plus en plus profondément au réseau, à ce subespace incroyable reliant tout les univers, noyau de la vie. Sa nature de maître de la mort s'était un peu plus éveillée depuis sa découverte du réseau et son héritage continuait à s'enrichir dans cette voie, lui en apprenant plus sur l'univers, la vie et la magie, les autres réalités. Lui savait qu'elles existaient depuis longtemps mais pas qu'elles pouvaient autant interagir les unes avec les autres. Il savait maintenant qu'il pouvait aller dans d'autres réalités via le réseau et donc, qu'il pouvait retourner sur Gaïa. Mais le voulait-il ? Certainement pas. Cet univers était désormais le sien. Il s'y sentait plus chez lui que jamais. C'était son foyer et son avenir désormais.
Au plus il passait du temps dans le réseau, à faire sa connaissance et celle de tout ce qui y vivait, au plus il comprenait. Ce jour là, il était une nouvelle fois dans le réseau avec Paul. Le scientifique ne mettait plus de combinaison pour venir, ayant fermement établi qu'il ne risquait rien ici. Aucune forme de vie ne semblait risquer quoi que ce soit dans ce milieu d'ailleurs. Paul travaillait de son côté, récoltant des échantillons, et lui même s'était assis au sol, méditant, étendant son esprit partout, envoyant ses pensées et ses émotions pour se faire connaître et communiquer. Il sentait bien qu'il y avait toutes sortes de consciences intelligentes et animales de tout niveau dans le réseau mais elles ne semblaient pas vouloir se montrer à eux pour l'instant, les observant de loin et il laissait faire. Leur présence ne semblait pas déranger, suscitant une certaine curiosité qu'il percevait et tout se passait sereinement. Il laissait donc le temps au temps. En ce moment, il s'intéressait à une chose en particulier : aux spores. Immanquablement l'élément le plus important, le lien entre le réseau et les autres dimensions de l'univers.
Jusque là, ils utilisaient les spores bleues d'une seule espèce de champignon : les prototaxites stellaviatori. Une espèce du réseau qui s'était aussi implantée dans leur univers grâce à ses spores justement. Des spores qui, comme celles plus classiques qu'ils connaissaient déjà, avaient comme voyagé dans les vents pour s'implanter ailleurs. Sauf qu'ici, les vents étaient des courants d'énergie reliant les diverses dimensions de l'univers. En venant directement dans le réseau, ils avaient découvert des centaines, des milliers d'espèces fongiques produisant elles aussi des spores de toutes les couleurs. Il s'intéressait à elles et au plus il le faisait, au plus il saisissait les subtiles nuances d'énergies entre chaque type de spores. Il lui fallut de nombreuses visites pour comprendre réellement mais ce jour là, la chose lui parut soudain évidente. Il se releva, attirant l'attention de Paul qui ne le voyait jamais bouger avant qu'il ne soit temps de repartir :
- Il est déjà l'heure ? demanda-t-il déçu.
Il ne passait jamais assez de temps à son goût dans le réseau mais il savait aussi qu'ils ne pouvaient rester longtemps. Son capitaine était déjà incroyable de prendre autant de temps pour l'emmener là, il doutait qu'un autre se soit autant investi avec lui avec tout le travail qu'un capitaine avait déjà sur son vaisseau. Il y avait cela et le fait que Harias avait expliqué que s'ils gardaient un temps équivalent à leur univers, c'était grâce à sa grande concentration et à son attention pour la chose. Au fait que lorsqu'ils voyageaient avec le réseau, il se concentrait aussi bien sur l'espace, leur destination, que sur le temps pour ne pas se perdre dans l'un ou dans l'autre. Rapidement, il avait mis en évidence que le réseau permettait aussi de voyager dans le temps et qu'il fallait être très prudent. Il lui obéissait donc toujours lorsqu'il disait qu'il fallait rentrer.
- Non, vous avez encore le temps mais je viens de comprendre quelque chose, répondit-il en se mettant à chercher aux alentours.
Stamets lui emboîta le pas, curieux :
- Qu'est-ce que vous cherchez ?
- Je ne sais pas encore moi même. Je suis ma perception d'énergie mais si ça se confirme, vous pourrez peut-être avancer un peu plus sur le navigateur.
Enthousiaste à cette idée et toujours curieux d'observer son capitaine à l'œuvre, Stamets le suivit. Longuement, ils marchèrent et déambulèrent dans la forêt fongique lumineuse, Harias cherchant quelque chose de bien particulier de ses sens. Il fallut du temps mais il finit par trouver, s'accroupissant au pied d'une grosse pierre, écartant un petit rideau de lichen pour trouver un creux dans la roche. Là, se trouvait une plante ou plutôt, un champignon fait de cross et de fines lianes ondulant verticalement. Il n'était pas très grand, d'une couleur ocre dorée qu'ils n'avaient pas encore croisé ici, sa lumière douce et chaude de la même teinte, comme les spores qui flottaient autour. Paul se baissa près de lui, regardant ce qu'il avait trouvé.
- Tiens, un petit nouveau, sourit-il en prenant quelques images. Il ne ressemble pas du tout aux autres.
- Et je sais pourquoi, sourit Harias. C'est pour ça que nous arrivons toujours dans cette zone du réseau lorsque nous venons en visite. Il m'a conduis ici pour que je trouve celui-ci.
- Que voulez-vous dire ?
- Cela fait un moment que je m'intéresse à la grande diversité d'espèces et donc de spores qu'il y a ici.
- Si ce n'est le matériel génétique et donc l'apparence et les caractéristiques biologiques de chaque espèce dont-elles sont issues, il n'y a pas de différence d'après nos analyses. N'importe lesquelles pourraient servir au moteur sporique avec exactement les mêmes performances.
- C'est ce que disent nos analyses en effet. Pourtant, à force de me concentrer dessus, j'ai perçu une infime différence énergétique entre chaque espèce. Je suis loin de toutes les avoir vu bien sûr. Il doit y en avoir des milliards de sortes partout dans l'univers. La différence vient des spécificités de chaque espèce mais vous savez ce qu'il y a de vraiment intéressant là dedans ?
- Non. Quoi ?
- Il semble que chaque type de spore ait une affinité avec une forme de vie, dit-il en le stupéfiant. Cette différence est aussi une sorte de lien de symbiose potentielle avec une autre forme de vie. Avec le tardigrade, nous avons vu que les spores étaient particulièrement bien faîte pour les symbioses. Si le réseau est source de vie, il est aussi connecté à toutes ces formes. Je crois que chaque type de spore est relié à une espèce vivante. Celle-ci, est celle de mon espèce, sourit-il en avançant une main vers la plante.
Dés qu'il l'effleura, elle pulsa de lumière et se mit à remuer un peu, expulsant une nuée de spores dorées éclatantes. Harias sourit, sentant sa connexion avec elles et avec le réseau beaucoup plus forte. C'était comme si on lui tendait la main et lui ouvrait les bras, lui ouvrait la porte en grand pour l'inviter avec hospitalité et amitié.
- Le réseau m'a fait venir dans cette zone parce que l'espèce la plus compatible avec moi était dans les parages. Il m'a fallu du temps pour comprendre.
- Fascinant. Vous sentez une différence ?
- Oui. Ces spores dorées amplifient mon lien avec le réseau de manière incroyable. C'est comme si c'était plus facile avec elles.
- Cela voudrait dire que si nous arrivons à déterminer quelle espèce de spore est la plus compatible avec, admettons les humains, nous faciliterons peut-être la communication et l'établissement d'une communication avec un navigateur.
- C'est ce que je pense, acquiesça-t-il. Reste à savoir comment relier quelles spores à quelle espèce. Moi je le sens mais il faut trouver comment vous pouvez l'identifier vous même. Je n'ai pas le temps pour une analyse de cette ampleur.
- Je vais me pencher là dessus, assura Stamets en récoltant quelques spores dorées. Jusqu'ici, nous n'avons pas cultivé d'autres espèces sur le Discovery mais si vous êtes d'accord, je pourrais essayer de cultiver celle là ? Pour vous faciliter l'utilisation du moteur sporique. Cela nous aidera sûrement aussi à analyser les différences avec nos bonnes vieilles spores.
- D'accord, approuva-t-il alors qu'il était entouré d'une nuée dorée. Il va être temps de rentrer.
- Très bien, soupira-t-il.
Ils rentrèrent donc, Stamets soumettant cette nouvelle hypothèse à son équipe enthousiaste. Il disait hypothèse tant qu'ils n'avaient pas de preuves scientifiques mais aucun ne doutait de ce que leur capitaine avançait. Ils ajoutèrent donc cela à leurs recherches, Harias continuant aussi à observer la chose. Ce fut avec un certain amusement qu'au fil des semaines et des simulations de combats, Harias sentit la surprise grandissante de Khan face à l'équipage qui réussissait parfaitement sous son commandement. Ils avaient indéniablement changé depuis l'arrivée d'Harias. La passerelle n'avait plus rien à voir et le capitaine savait désormais qu'ils étaient près à tout affronter. Ils avaient encore besoin d'éprouver leurs capacités, de s'exercer et de se prouver à eux même qu'ils pouvaient le faire mais Harias n'avait aucun doute et Khan commençait doucement à le réaliser en les observant faire face à ses simulations.
Ce soir là, Harias était justement seul avec Khan, travaillant dans son bureau. Lorsque c'était le cas, Khan s'asseyait dans un coin du salon de la pièce avec un padd, travaillant de là en silence. Il était rare qu'ils soient séparés. Lorsqu'ils dormaient, lorsque Harias emmenait Stamets dans le réseau ou lorsqu'il allait voir un projet auquel il n'avait pas accès. Mais ils passaient le plus clair de leur temps ensemble et leur relation s'était énormément améliorée. Khan était beaucoup plus détendu, beaucoup moins sur ses gardes avec lui, souriant parfois, laissant passer quelques traits d'humour même si c'était un humour bien à lui. Parfois, ils jouaient aux échecs ensemble, Harias appréciant ces moments autant que leurs entraînements au combat. Khan ne parvenait toujours pas à l'atteindre mais sa frustration et son égo froissé laissaient place à une envie de se surpasser bien plus saine. Leurs entraînements étaient d'ailleurs devenus un véritable spectacle pour le reste de l'équipage, tous ayant bien compris que leur capitaine et son assistant étaient bien au-delà des autres en matière de combat. Comme souvent le soir, lorsque Harias prolongeait un peu sa journée au-delà de son temps de service, Khan restait avec lui pour en faire autant. Et cette fois, le capitaine sentait l'augmenté titillé par sa curiosité. Il se décida finalement à prendre la parole, tournant le regard vers lui :
- Comment avez vous fait pour les faire changer à ce point ? demanda-t-il. L'équipage d'aujourd'hui n'a plus rien à voir avec celui de notre arrivée.
- Ils ont grandis, évolués, appris, sourit-il sans lever les yeux de son travail. Tous nous avons dû apprendre un jour. Rien ne naît avec la science infuse, s'amusa-t-il. Vous savez Khan, tout le monde a du potentiel. Nous n'avons peut-être pas les mêmes capacités, le même esprit, la même force, les mêmes possibilités… Mais tout le monde est capable de devenir exceptionnel à sa façon. En réalité, je n'ai fais qu'une chose : croire en eux. C'est la meilleure chose que l'on peut faire pour les autres et surtout pour ceux qui nous font confiance. J'ai cru en eux et j'ai fais de mon mieux pour leur apprendre ce que je sais.
- Pas tout ce que vous savez loin de là.
- Ce ne serait pas pertinent. Ils n'ont pas besoin d'avoir le même savoir et les mêmes compétences que moi, cela m'appartient. Mais ils doivent se construire leur propre savoir et leur propres compétences. Un bon professeur enseigne et montre le chemin mais ne dit pas ce que ses élèves doivent devenir. Cela dépend du choix de chacun. Mon rôle est de les aider à devenir ce qu'ils veulent devenir et à apprendre à avoir confiance en eux, à développer leur potentiel. Nous sommes tous différents en la matière et chacun a quelque chose d'unique à apporter même s'il est moins savant, moins fort ou moins expérimenté que vous. L'erreur de Marcus, Lorca et des autres comme lui est de vouloir formater les gens comme ils le veulent, moi, je les aide à devenir librement ce qu'ils veulent, à découvrir leur potentiel et c'est très différent. J'ai vu le pire comme le meilleur autour de moi Khan et je sais que les gens de la Fédération, de Starfleet, sont bien intentionnés et désirent vraiment être bons et bienveillants. Ils veulent apprendre et c'est la meilleure des volonté à mes yeux. Ils sont peut-être différents de vous, de moi, mais ça ne veut pas dire qu'ils sont une gêne ou qu'ils n'ont rien à apporter.
- Que vous apportent-ils à vous ?
- Si vous saviez. Tant de choses merveilleuses. La confiance en premier lieu, la tolérance, la bienveillance. Avant d'entrer chez Starfleet, j'ai toujours été seul et travailler en équipe a été un défi pour moi. J'ai eu du mal à faire confiance à mes camarades, jamais je n'aurais cru devenir capitaine et en être capable. Cet équipage fait de moi un capitaine, ce vaisseau me permet d'assouvir ma curiosité, mon envie d'aventure, ma soif d'apprendre. Je sais déjà beaucoup mais regardez, si je n'avais pas rencontré Stamets et eut le Discovery, je n'aurais pas eu connaissance de son merveilleux projet. Et croyez moi Khan, Stamets n'est peut-être qu'un simple humain un peu plus intelligent que les autres à vos yeux mais c'est par sa passion et sa curiosité qu'il a fait des découvertes stupéfiantes que personne n'aurait imaginé, pas même ceux qui se disent plus intelligents que lui. Il n'est pas le seul à bord. Parce que nous sommes différents, avec des points de vus différents, nous pouvons offrir quelque chose d'unique aux autres. Ce que cet équipage m'apporte en plus de tout ça, c'est une famille et tellement de ces choses si précieuses dont la solitude nous prive. Ils triompheront de votre programme Khan et ils vous prouveront qu'ils peuvent être forts eux aussi.
- J'en doute, sourit-il.
- Nous verrons, s'amusa-t-il. Sachez que c'est valable pour vous aussi.
- Quoi donc ?
- Je crois en vous, dit-il en relevant le regard pour lui sourire. En vous et en votre peuple. Je suis persuadé que vous ferez des choses merveilleuses.
Khan ne dit rien et s'il ne laissa rien paraître, Harias le sentit touché et un peu confus. Il reporta son attention sur son travail, souriant doucement. Au plus le temps passait, au plus Khan s'apaisait et commençait à se questionner sur les autres, sur la Fédération et Starfleet. Ce qu'il avait espéré faire en le prenant avec lui fonctionnait.
Le lendemain, Harias était de nouveau dans le réseau avec Stamets, concentré depuis quelques jours sur une étrange impression qui émanait des lieux. Paul avait implanté avec succès l'espèce fongique dorée dans une nouvelle petite serre du Discovery spécialement aménagée à côté de celle déjà existante. Un seul et unique spécimen avait poussé sur le socle central où on l'avait placé. Il n'était pas plus grand que celui trouvé dans le réseau et ne semblait pas vouloir s'étendre ou se reproduire. Cela intriguait Stamets mais Harias avait compris que le spécimen serait et resterait aussi unique qu'il l'était. Un par univers et par subespace, lui même pouvant voyager à travers tout les univers et les espaces. Cela ne l'empêchait pas de produire en masse ses spores dorés. Des spores qui avaient remplacé celles, bleues, qui se trouvaient dans son interface avec le moteur sporique sur ses cornes. Lorsqu'il était dans le réseau, Harias restait à proximité de ce que Paul avait appelé la Mezoria en son honneur. Grâce à elle, son contact avec le réseau était plus puissant que jamais.
Depuis quelques jours, il avait une impression étrange, un mauvais pressentiment. Il ressentait comme un malaise lorsqu'il se plongeait dans le réseau et il n'aimait pas cela. Il n'en n'avait parlé à personne, encore incapable d'émettre la moindre hypothèse à ce sujet mais il faisait tout pour découvrir ce qu'il se passait. Dans trois jours, ils retourneraient vers la Terre après six mois de mission pour une permission. L'équipage s'en irait une moitié à la fois pour deux semaines. Il voulait découvrir ce qu'il y avait avant cela. Il se concentrait donc là dessus alors que Paul travaillait non loin, testant les réseaux d'énergies présents partout autour d'eux. Il s'était totalement plongé dans sa méditation, ouvrant grand son esprit au réseau, transmettant son envie de comprendre et d'aider s'il le pouvait. Cela faisait un moment qu'il tentait de se faire connaître, lui et ses intentions. Le réseau était vivant, faire connaissance et se présenter lui paraissait évident. Il se sentait accepté par cet espace désormais et cela n'avait fait que faciliter ses déplacement vers le réseau et via le réseau. Il lançait donc encouragement sur encouragement pour qu'on lui montre ce qui n'allait pas et ce jour là, on lui répondit.
La réponse fut… violente, très violente. Une douleur fulgurante le traversa, brutalement, le faisant hurler de souffrance comme il ne l'avait fait que rarement dans sa vie. La décharge d'énergie fut monumentale. Les images et les sensations affluèrent brusquement dans son lien avec le réseau. Terreur, souffrance, peur, douleur, angoisse, panique, tourment, désolation, mort, agonie… Ce fut un maelstrom de supplice que le Maître de la Mort qu'il était identifia rapidement, instinctivement, le réseau lui montrant les images et lui transmettant les informations nécessaires pour comprendre. Cela parût durer une éternité avant que ça ne cesse, Harias peinant à faire refluer tout ça, à tenter de transmettre sa promesse d'aider et de remédier à ce mal. Finalement, le réseau cessa de lui transmettre sa souffrance et son désarrois et péniblement, il put reprendre contact avec la réalité.
Il rouvrit les yeux, sa vision trouble, son souffle court alors qu'il sentait son corps tout entier trembler. Une quinte de toux violente le prit, le goût du sang envahissant sa bouche. Il allait s'évanouir, c'était certain mais avant, il devait retourner avec Stamets sur le Discovery. Stamets qui était d'ailleurs accroupi devant lui, semblant parler sans qu'il ne l'entende vraiment, l'air affolé. Il lui fallut une immense concentration pour comprendre qu'il l'appelait :
- Capitaine ? Capitaine Harias ? Capitaine ? appelait-il terriblement inquiet.
Harias s'aperçut alors qu'il le tenait par les épaules et que c'était grâce à lui qu'il ne s'était pas effondré. Encaisser la souffrance d'un système aussi gigantesque n'était pas pour son corps et son esprit. Il ne tiendrait pas longtemps et le sachant, il leva péniblement sa main pour la poser sur l'épaule de son subalterne, rassemblant ses dernières forces pour sauter et retourner sur le Discovery. Il eut à peine le temps d'entrevoir le cube de réaction du moteur sporique de son vaisseau qu'il s'effondrait, à bout de force.
- Appelez une équipe médicale ! hurla Paul en rattrapant son capitaine s'écroulant.
Toute son équipe sursauta à cette arrivée inattendue, quelqu'un appelant l'infirmerie alors que les autres, Tilly en tête, se précipitaient vers le cube, ouvrant pour le rejoindre et entourer leur capitaine.
- Oh bon sang mais qu'est-ce qu'il s'est passé ? demanda la rousse.
- Je n'en n'ai aucune idée, répondit Stamets. Aidez moi à l'allonger, attention à ses ailes.
On l'aida sur le champs et rapidement, le docteur Culber déboulait avec une équipe médicale, Landry arrivant en courant elle aussi.
- Que s'est-il passé ? demanda Hugh en s'agenouillant près de son capitaine pour commencer à l'examiner.
- Je n'en sais rien, répondit son compagnon en s'écartant pour laisser les médecins agir. On travaillait exactement comme d'habitude, rien d'anormal et brusquement, il s'est mis à hurler de douleur. Je n'avais jamais entendu un truc pareil, dit-il en serrant les dents. Ça a duré un moment sans que je ne parvienne à attirer son attention et puis ça s'est arrêté brusquement. Il a lutté pour se concentrer et nous ramener et il s'est effondré.
- Il a perdu toute son énergie, s'inquiéta Hugh.
Et tous pouvaient voir que l'or avait disparu du corps de leur capitaine, indiquant son déclin. Tous le savaient à bord pour avoir lu le dossier sur lui et son espèce extraordinaire.
- Est-ce que le réseau a pu lui pomper son énergie ? demanda-t-il.
- Ce n'est jamais arrivé jusque là, répondit Paul. C'est possible mais le capitaine m'avait expliqué que le réseau ne pouvait pas lui prendre ses forces s'il ne l'autorisait pas lui même.
- Comment va-t-il ? demanda Tilly trépignant d'angoisse.
- Il souffre beaucoup et il est très faible. Je ne sais pas ce qu'il s'est passé mais ça a considérablement éprouvé son organisme. Et vu sa gigantesque capacité de résistance, ce n'est pas rien. On l'emmène à l'infirmerie, dit-il à ses infirmiers. Avec une téléportation. On risque d'abîmer ses ailes autrement. Ordinateur, téléportation d'urgence vers l'infirmerie, commanda-t-il. Énergie.
Immédiatement, l'équipe médicale disparue avec le capitaine ailé, laissant les membres d'équipages atrocement inquiets.
