En passant : C'est un peu pour cette raison que j'avais eu beaucoup de mal à réorganiser mes actions sur cette dizaine de chapitres : Tout se déroule un peu trop vite à mon goût ^^'

Melynee : C'est gentil d'avoir quand-même pris le temps !
Je pense que tu es très claire, et je te remercie ! C'est ce que j'essaye de faire :D
Et ça me fait hyper plaisir de ne pas être la seule à apprécier un bon héro passif XD (à prendre dans le sens littéral du terme, évidemment)
Je te souhaite plein de courage, de motivation et de temps libre, en tout cas ! J'ai hâte d'avoir la suite de "sous emprise"

Guest : Contente que ça te plaise toujours :D
Harry était tristounet, mais on va le faire reprendre du pwal de la bête, ne t'inquiète pas :D

TW : suite directe du chapitre précédent, donc, mêmes thèmes que le chapitre précédent.


Il vit le corps de Nguyen tomber au sol, et il entendit le rire hystérique de Rockwood :

« J'y crois pas, Drago ?! T'aimes tellement ça que t'essaye de me chauffer ?! »

Il vit ses jambes, ses mollets grêlés s'approcher.

« Mais avec plaisir, petite pute ! Je vais te… »

Un éclair rouge le frappa de plein fouet, et son corps fut projeté contre un mur.

Drago hurla de douleur. Il n'avait pourtant pas été touché. Mais il n'était plus sûr de quel corps était à lui. Les deux, probablement ? Lequel avait été touché, lequel avait souffert, lequel avait été violé, lequel avait joui de le baiser, encore et encore ?

Le rire ne cessa pas.

Il vomit une nouvelle fois, et sut quel corps était le sien. C'était forcément celui-là. Celui qui régurgitait à n'en plus finir, celui qui était sale.

Il entendit des mots étrangers, et devina qu'il devait s'agir de l'équivalent du latin pour les asiatiques, car un nouvel éclair rouge frappa quelque chose dans son dos.

Nguyen se redressa en se tenant la gorge et en tendant sa baguette. Il baragouina encore quelque chose, et des cordes noires jaillirent de l'extrémité de sa baguette. Drago tourna vivement la tête, et vit qu'elles venaient de s'enrouler autour du corps inconscient de Rockwood. Un nouveau sort, et Carrow, qui se tenait immobile et les regardait d'un air absent fut à son tour saucissonné. Il broncha à peine.

Le rire de Rockwood ralentissait, comme s'il était produit par le mécanisme vieillissant d'un vieux poupon mécanique. Un « Ah » par seconde, de plus en plus grave, de plus en plus lent.

Encore d'autre mots. Cette fois, ça ressemblait à une suite de juron : Nguyen reniflait, encore essoufflé, le visage écarlate et gonflé, ses beaux yeux rougis par l'éclatement des petits vaisseaux sanguins qui les parsemaient. Il se redressa de toute sa hauteur, porta sa baguette à sa gorge, et d'une voix enrouée prononça, en anglais cette fois : « Troubles à l'infirmerie. Besoin de deux renforts. Situation sous contrôle. »

Puis il dépassa Drago, et se pencha sur une masse sur le sol. Drago sut qu'il s'agissait du corps de Jugson. Il le sut parce qu'il avait assisté au massacre. Autrement, il n'aurait jamais pu deviner que ça avait été un homme.

« Aah… Aah… Aaaah… » De plus en plus lent…

Nguyen arrêta sa baguette là où aurait dû se trouver la tête de Jugson, et Drago eut encore un haut-le-cœur, bien que son estomac fût vide et qu'il ne parvint même pas à expulser de la bile.

« Calvaria reponam, murmura doucement Nguyen. Cerebrum reponam. Moveo tardius… »

C'est inutile, c'était… Pourtant, les éclats d'os blancs s'élevèrent de la masse rouge et gluante pour se ré-associer les uns aux autres. La matière grise sous le sang se mit à s'agiter et à se déplacer en émettant un son répugnant.

Drago se recroquevilla, ferma les yeux et se plaqua les mains sur les oreilles.

La vision de Rockwood revint, avec le corps répugnant de cette petite garce qui…

Drago réouvrit les yeux, Drago libéra ses oreilles. Il s'agita, d'avant en arrière, en fixant résolument son regard sur le petit tas que formait la couverture verte abandonnée au sol, en concentrant exclusivement son ouïe sur les sortilèges de soin que prononçait l'infirmier.

Des Gardiens finirent par arriver. Il y eut le Major Runcorn, il y eut le Brigadier Johnson, il y eut les Surveillants du corridor 3 : Avidan, qu'il connaissait, et Huffman et Patel, qu'il ne connaissait pas. Et puis il y eut le Directeur Potter, qui, lorsqu'il apparut, permit enfin à Drago de se calmer.

Il y eut une discussion à voix basse entre Potter et Johnson, et enfin, on l'interrogea.

Potter le fit s'asseoir sur une chaise et déclara :

« Malfoy, il faut que tu nous dises ce qui s'est passé. Cette fois, t'es pas le seul concerné. »

Drago se mordilla les lèvres et observa pensivement les hommes présents. Le crâne de Jugson avait été réparé, mais l'homme ne s'était pas réveillé. Carrow se tenait toujours debout, apathique. Runcorn l'avait giflé et l'avait interrogé, mais il n'avait pas répondu, et il se balançait doucement, comme bousculé dans un vent léger. Rockwood, par intermittence, revenait à un état de demi-conscience et alors un nouveau « Aaah » lent, grave, malsain, s'élevait, son rire semblant avoir été ralenti mille fois.

« Personne n'est responsable », marmonna Drago en pesant soigneusement chaque mot, et Potter poussa un soupir agacé en se redressant, probablement peu surpris de cette réponse. « Carrow a attaqué Jugson, » ce n'était pas un mensonge, « mais ce n'est pas sa faute. » Ce n'était pas un mensonge. « Il n'a plus toute sa tête. » C'était vrai. « Cet endroit est traumatisant pour lui, » c'était probable, « et se réveiller ici a dû le bouleverser. » C'était crédible.

Carrow le fixait, avec son visage inexpressif. Drago était surement la personne présente la plus familière pour lui, puisque Jugson et Rockwood étaient tous deux silencieux, et c'était sa voix à lui qu'il écoutait, et ses ordres à lui qu'il exécuterait, s'il prenait l'envie à Drago de s'adresser à lui.

« Il s'en est simplement pris à la personne la plus proche qu'il ait trouvé, » ce n'était pas un mensonge, « mais il ne l'a pas vraiment fait exprès. » Pas un mensonge non plus.

Après quoi, Nguyen était apparu, avait tout vu, et il ne servait à rien de peser ses mots. Il termina donc sa tirade sur un ton moins hésitant : « J'ai appelé à l'aide, Monsieur Nguyen est arrivé, et il s'est occupé de tout. »

Drago ferma les yeux, revit ce petit corps répugnant, gémissant, jouissif qui se tortillait, mais il tâcha de l'ignorer et de se répéter sa tirade. Aucun mensonge, aucune accusation. Il s'en sortait bien.

« Je peux prendre du Veritaserum pour témoigner », conclut-il en regardant Potter.

Celui-ci se redressa, soupira, puis interrogea Johnson et Nguyen sur l'état psychologique de Carrow. Tous deux confirmèrent que l'homme souffrait d'apathie permanente, liée à une vieille punition qu'il avait reçue, il y a des années de cela… Runcorn adressa un discret regard d'avertissement à Drago, qui hocha la tête, nerveusement.

Le message était évident : Aucun gardien n'était responsable. Ce n'était d'ailleurs pas tout à fait faux. Aucun des expergefacto que Carrow avait subi ne l'avait rendu fou. C'était l'accumulation, le fait que que les Surveillants soient venus chacun leur tour, réglés comme des horloges, pour lancer le sort à nouveau, chaque heure, qui avait fini par briser le prisonnier.

Les premiers jours, dormir avait été difficile même pour les autres détenus… Le bruit de porte, le bruit de pas, les supplications, les pleurs…

D'autres Surveillants étaient arrivés, et certains étaient restés. Parmi eux, beaucoup avaient participé à l'agonie mentale de Carrow. Il y eut des raclements de gorges gênés, des regards fuyants, des piétinements embarrassés…

On accusa l'infirmier Ward. De toute façon, il n'était plus là, et puis même si ce n'était pas vraiment son idée à la base, il s'était intéressé à l'expérience, et peut-être qu'à la fin, il était un peu plus responsable que les autres.

« Et comment s'y est pris Ward pour renouveler le sortilège assez régulièrement ? » interrogea Potter en se tapotant le bras de sa baguette.

Personne n'osa répondre. Peut-être qu'il comprit, puisqu'après quoi, il entama une espèce de discours tout sauf motivationnel en examinant le corps exsangue de Jugson.

« Les gars, je sais que je vous fais chier avec mes ordres, que je vous facilite pas les choses, et que vous aimeriez bien pouvoir faire votre boulot sans m'avoir constamment sur le dos… Je le sais, parce que je suis exactement comme vous. Mais j'espère que vous comprenez que si on se comporte comme eux, on vaut pas mieux qu'eux. J'espère que vous savez que parmi ces trous du cul, il y en a qui ont des gosses, qui vont peut-être bien grandir en pensant que leurs parents sont des victimes qui ont tout de même pas mérité ça… J'imagine que vous comprenez que le jour où ces gosses seront en âge de faire notre boulot, si nous, on a pas bien fait le nôtre, ils se vengeront à leur tour, et ça pourrait bien être sur nos gosses à nous… »

Seul le silence lui répondit.

« Enfin, bon, reprit Potter d'un ton plus joyeux, plus de peur que de mal, hein ? Nguyen, je vous proposerais bien de donner un coup de baguette à votre cou, mais je pense que Douglas fera ça mieux que moi ? Non, j'insiste Douglas, je sais que vous avez un don pour la médecine, c'est l'occasion idéale : c'est pas tous les jours que notre toubib ne peut pas effectuer un soin lui-même ! Quant à lui… »

Il désigna Rockwood, qui émit un nouveau « Aaaah » pas loin de ressembler à un meuglement…

« Dès que son état sera un peu stabilisé, mettez-le à l'isolement. On va s'en charger avec Johnson, pas vrai ?! Au fait, Everglade, puisque vous êtes là, je voulais vous dire… »

Potter ne laissa pas Drago remonter seul à l'abri des appartements vides. La question ne se posa même pas, il n'eut pas besoin de donner un ordre, mais à chacun de ses déplacements de la journée, il posa sa main contre les reins de Drago et l'emmena tranquillement avec lui.

Il y avait son bureau officiel. Une grande pièce élégamment meublée mais dans un désordre indescriptible. Drago rangea pensivement les lieux pendant que Potter communiquait par poudre de Cheminette avec des représentants du ministre, avec des institutions étrangères, avec des communicants…

Il y avait la salle de repos des Gardiens, où ils prirent leur repas du midi, et que Drago connaissait déjà. Il fit mine de manger en déplaçant la nourriture dans son assiette et portant ses couverts vides à sa bouche.

Il y avait le corridor des détenus non-humains. Là, Drago refusa d'entrer, et Potter finit par l'abandonner magnanimement dans le sas d'entrée pendant qu'il allait s'occuper d'on ne savait quoi. Peut-être s'extasier devant la taille des dents des Loups-Garous, tirer les chevillettes nécessaires et faire choir les bobinettes appropriées.

Il y avait le Hangar aux Patronus. Potter lui mit sa baguette entre les mains et Drago rejoignit le groupe pitoyable des débutants, où il ne fit même pas semblant de fermer les yeux.

Il avait déjà fait la même erreur, trois ans auparavant : Aucune technique n'avait fonctionné pour rendre les choses avec Waren un peu plus supportables. En désespoir de cause, Drago avait voulu examiner son esprit, en vue de le comprendre un peu mieux.

Il s'était vu à travers ses yeux. La petite salope aux cheveux longs, la façon qu'il avait de réclamer, rien qu'avec sa façon de se déplacer, rien qu'avec sa façon de parler ou de se taire. Sa bouche presque sans lèvres, qui ressemblait juste à un autre trou à remplir, ses yeux inexpressifs qu'on avait envie de crever pour pouvoir aussi l'enfiler par là…

Waren ne s'était même pas aperçu de l'intrusion. Il pensait en permanence à ces choses-là, et Drago n'avait pas fait remonter à la surface une anectode inhabituelle.

Il n'avait plus jamais voulu pratiquer la légimancie depuis ce jour-là.

Il n'avait plus été capable de supporter les miroirs. La vision de Waren se superposait au reflet. Il avait commencé à se voir tel qu'il était, lui qui avait toujours considéré, jusque-là, que l'héritage Malfoy lui avait offert un visage relativement harmonieux bien qu'inhabituel.

Quand la journée de travail de Potter fut terminée, ils remontèrent enfin aux appartements du Directeur presque sans avoir échangé un mot. Peut-être par habitude, peut-être par omission, en tout cas, certainement pas par cruauté, Potter voulut emprunter les larges escaliers partant du hall. Drago serra les dents, jusqu'à ce que la douleur dans ses fesses ne l'oblige à faire une pause au milieu de la première volée de marches.

Potter s'excusa platement, et ils eurent enfin un petit moment de complicité quand ils s'interrogèrent sur la pertinence à redescendre les marches déjà gravies ou à s'obstiner tout de même jusqu'au prochain palier. Dans les deux cas, ils pourraient ensuite emprunter le monte-charge.

Quand deux Surveillants les croisèrent, Drago voulut justifier leur immobilisme, et il pointa la porte du doigt en racontant tous les aménagements dont il avait eu l'idée lors de sa dernière escapade : Les cache-oreilles, les lampes, les cloches, les tapis, les capes de secours, les…

Les Surveillants disparurent avant qu'il n'en soit arrivé à l'étape des décorations.

« Tu te rends compte, j'espère, marmonna Potter avec un sourire crispé, que maintenant qu'ils ont entendu ça, ils vont s'attendre à ce que je mette tout ça en place rapidement… »

Drago haussa les épaules. « Tout ça aurait dû être mis en place il y a des lustres. »

Une fois rentrés, Drago voulut aller se laver. Potter lui demanda s'il avait besoin d'aide, mais à nouveau, imaginer son corps nu sous son regard à lui… Drago secoua la tête et s'enfuit vers la salle de bain.

Il vit ses jambes trop maigres, trop blanches, avec les vaines bleues qui ressemblaient presque à des varices, les genoux cagneux, les bras couverts de cicatrices, avec la Marque des Ténèbres toujours visible, les doigts tordus et crochus, la poitrine creuse qui laissait voir les côtes asymétriques… Les cuisses toujours rouges et marbrées, le sexe toujours barré de cicatrices horizontales… Il ne poussa pas le masochisme à s'observer une nouvelle fois dans la glace.

Quand ce fut l'heure de se coucher, Drago échangea l'habituel t-shirt blanc contre une espèce de blouse de la même couleur. Le vêtement était ample et avec des manches longues.

Potter sortit son livre du moment, mais Drago le lui prit des mains et enjamba les cuisses de Potter pour l'embrasser doucement.

« Malfoy… l'interrompit-il au bout d'un moment. Je pense pas que ce soit une bonne idée. T'as eu une grosse journée, je crois pas que tu sois en état.

– Tu m'as dit qu'on ferait ce que je voudrais, et qu'on irait à mon rythme, lui rappela Drago. Je ne sais pas ce que ta psy t'a dit, mais oublie-la… »

Potter se mordilla les lèvres, puis il attrapa brusquement la nuque de Drago et ils échangèrent enfin un vrai baiser.


Je ne crois pas qu'on m'ait demandé pourquoi Drago n'utilisait pas systématiquement la légimancie pour se défendre, puisqu'il en est capable... Je donne quand même la (une) réponse dans ce chapitre ! Non seulement il ne s'en sent pas souvent le droit, mais ce qu'il voit dans ses explorations mentales est quasi systématiquement traumatisant pour lui.