Chapitre 7 : Et le feu rencontra l'essence
Serena poussa la porte de l'hôtel Zanzibar et salua le tenancier à la volée :
- Yo !
- Déjà de retour ? Demanda George sans lever les yeux de sa comptabilité.
- Comme tu vois
- J'ai regardé ton emploi du temps jeune fille. Tu as cours jusqu'à 16 heures
- Oui. Et ?
- Ben il est 14 h. Ne me prends pas pour une truffe, Dit le quinquagénaire, l'air sévère
George avait été le meilleur ami d'Héléna et était officiellement le parrain d'Alicia et officieusement le parrain de Serena. Il avait été question de lui confier la plus jeune de sœur Wolfe lorsque leur grand mère était tombée malade. Mais sa situation d'homosexuel célibataire n'avait pas joué en sa faveur alors que politiquement, le pays prenait un virage serré à droite. Il l'avait toujours beaucoup regretté et avait alors accueilli avec joie les deux sœurs à leur sortie d'Eden School. Alicia suivait des cours dans un excellent lycée près de l'hôtel, que Serena pouvait payer grâce à la manne financière de son père, qu'elle avait enfin touchée.
Elle ne savait pas trop quoi faire de sa vie et n'avait aucune idée de quelle voie professionnelle choisir. Elle s'était inscrite en fac de psychologie, pour faire plaisir à George mais elle avait découvert qu'elle détestait ça. Il faut dire qu'après être passé par Eden School, l'enseignement plus classique était difficile à accepter pour les deux sœurs. Alicia s'en sortait bien mieux mais demandait régulièrement à sa sœur de lui rédiger des « fiches de lecture » pour compléter l'enseignement du lycée. Ce qui avait en plus l'avantage d'occuper les journées de Serena, qui passait le reste de son temps à fuir le regard inquisiteur de George qui essayait de la convaincre d'aller à la fac. Elle s'y rendait de temps en temps, quand les intitulés des cours l'intéressaient. Enfin, elle donnait souvent un coup de main à George dans sa gestion de l'hôtel. Les perspectives d'avenir étaient faibles mais elle ne s'ennuyait pas. Elle se disait qu'elle avait le temps de trouver sa vocation, au moins jusqu'à ce qu'Alicia sorte diplômée du lycée. Et puis, quand on était riche comme elle l'était, ce genre de question se faisait moins pressantes.
- Tu ne vas pas vivre sur ton patrimoine durant toute ta vie ? S'énerva alors George comme souvent
- Moi ça me va bien pour l'instant. Dit Serena, nonchalante
- Ça n'a aucun sens ! Tu vas finir triste, seule et déprimée ! Le travail c'est la santé !
- Ou bien, je pourrais devenir une starlette et créer mon propre parfum. Dit Serena, toujours aussi peu sérieuse.
George finit par abandonner la partie et retourna à sa comptabilité en maugréant. Serena rejoignit le petit salon de l'hôtel, dans son fauteuil préféré, qui donnait vue sur le comptoir. D'ici, elle pourrait toujours aller aider son vieil ami, qui n'aimait pas plus les chiffres que les femmes. `
- Qu'est ce que tu fais, mon ange ? Demanda George, qui semblait avoir oublié leur petit affrontement
- Une fiche de révision. Pour Alicia.
- Quel est le sujet que ses satanés professeurs n'arrivent pas à lui apprendre cette fois ?
- La physique des particules, Dit Serena en souriant
- Passionnant. Je me demande encore comment tu peux connaitre tout ces trucs…
- Je m'intéresse à plein de choses et j'apprends vite, contrairement à ce que tu sembles croire. Et puis, je m'aide avec des bouquins ! Mentit Serena en lui montrant un livre
Elle n'avait évidemment pas besoin de l'aide d'un quelconque ouvrage mais elle préférait faire semblant et éviter les questions gênantes.
- Tu pourrais faire prof ! Tu expliques toujours très bien ! S'exclama George, comme frappé d'une illumination
- Hum. J'ai des doutes.
Elle repensa au savon que lui avait passé Alicia quand elle lui avait rendu la dernière fiche qu'elle avait réalisée, qui était d'un niveau de master au lieu d'un niveau lycée. Elle haussa les épaules pour ne pas relancer le débat mais ce fut inutile car l'attention de George fut captée par l'arrivée de deux jeunes hommes dans son hall.
- Bonjour messieurs ! Dit l'hôtelier avec un grand sourire commercial
- Bonjour euh… On voudrait savoir si vous louez des chambres sur la durée ? Demanda le plus petit des deux
- Bien sûr ! À des prix préférentiels ! La jeune fille derrière vous est justement une de mes pensionnaires permanentes.
Les deux hommes se retournèrent vers la jolie brune, qui les salua avec emphase en secouant son manuel de physique. Le plus grand des deux lui fit un sourire. Il était maigre, comme si il n'avait pas pu manger pendant plusieurs semaines. Mais il avait un visage doux et des yeux verts dorés rassurants, qui faisait oublier la maigreur du reste de son corps et de son visage. Inconsciemment, Serena passa une main sur son ventre à présent musclé, en repensait à l'époque où elle était à peine capable de monter trois volées d'escaliers sans tomber d'épuisement.
- OK ! Ça me semble raisonnable.
Le plus petit des deux venait manifestement de prendre la décision de s'installer ici. Ils devaient être frère, mais l'autre était en meilleur état. Plus petit certes, mais également plus musclé, plus en forme. Il avait de longs cheveux dorés noués en tresse, qui ajoutait un côté enfantin à son visage sévère. Elle remarqua qu'il avait de grands yeux dorés et les regardait encore quand George continua ses explications :
- Le règlement se fait tous les 15 jours messieurs. Vous avez une idée de combien de temps vous comptez rester ?
- Sans doute jusqu'à la fin de l'année. Mon frère va suivre des cours au lycée à côté.
- Ah ! Voilà qui est parfait. Vous pourrez y aller avec Alicia !
- Qui ? Demanda le plus jeune
- La jeune soeur de la demoiselle ici présente. Elle fréquente le lycée voisin également. Une jeune fille absolument charmante.
Serena fit à nouveau un petit signe de la main aux garçons qui la regardaient encore.
- Ah… Ben on verra…Dit le plus jeune
- Vous ne suivez pas des cours dans ce lycée également jeune homme ? Demanda Georges
- Non. J'ai déjà mon bac, Dit le plus petit, l'air féroce.
- Vous allez à la fac ? Parce que si vous arrivez à faire en sorte que la jeune fille dans le salon y soit plus assidue, je vous fais une réduction
- Euh... Non, on vient d'arriver en ville, j'ai pas encore décidé de ce que j'allais faire... La priorité c'est l'éducation de mon frère
- Voilà qui me semble familier, Dit alors George en regardant encore Serena, qui lui répondit par un grand sourire.
Il prit les informations d'identité et de paiement que lui fournissaient les garçons. Et il posa, en toute innocence, la question fatidique :
- Vous arriverez à payer vos factures en temps et en heure messieurs ?
- Bien sûr... ça n'est pas si cher...
- Je me fais une fierté de pratiquer des tarifs raisonnables...
- Oui et puis on est pas sur un quatre étoiles non plus, Dit l'ainé
- Ah... erreur fatale, essayez encore ! Grommela Serena, qui se leva de son fauteuil
- Que... Comment ! Mais enfin ! Que dites vous ? Je suis outré ! Un établissement de première qualité comme le mien ! Se gonfla George, qui se lança dans une diatribe enflammée, avant d'être rapidement coupé par Serena, qui lui passa devant. Elle fit un grand sourire aux deux frères, en déployant un trésor de charme qui les fit balbutier.
- Vous souhaiteriez une suite ou deux chambres séparées ?
- Euh...
- Ma soeur et moi occupons l'une des deux suites de l'hôtel. Il ne nous en reste qu'une, que nous préférons mettre à disposition des clients de passage. C'est un avantage non négligeable pour les familles notamment. Je vous donne deux chambres voisines ? Ça vous convient ?
Les deux garçons acquiescèrent.
- Alors… Je note… Edward Elric dans la 204 et Alphonse Elric dans la 206… Voilà les clés. C'est au deuxième étage. Un service de restauration vous est offert. Mais si vous préférez faire la cuisine vous même, pour des raisons de goût ou d'argent, cela est possible également. Il faut simplement réserver la cuisine à des heures précises. Une femme de ménage passera une fois par semaine pour faire le grand ménage. La buanderie est au sous-sol. La porte principale est ouverte jusqu'à 22 heure. Après cette heure, il faudra entrer le code qui change toutes les semaines. Il vous sera donné par la femme de ménage lors de son passage hebdomadaire. Si vous avez des questions, vous pouvez les poser à George. Si vous avez peur de lui et on peut comprendre, vous pouvez demander à ma soeur ou à moi. Nous sommes dans la suite 201, au bout de votre couloir. Serena et Alicia Wolfe.
La chasse que les deux frères venaient de se prendre, associée au regard hypnotisant de la jeune femme, perturbant dans les premiers temps, firent que les frères Elric acquiescèrent sagement et prirent les clés que Serena avait posées sur le comptoir. Ils prirent leurs petits bagages et se dirigèrent vers l'escalier indiqué. George, vengeur, leur cria :
- Je vous précise aussi que je ne suis pas un hôtel de passe. Si vous voulez sauter des gonzesses, il faudra me prouver que vous êtes dans une relation sérieuse et durable. Si c'est des hommes, présentez les moi et je passerai dessus avant !
Serena étouffa un rire et regarda Edward et Alphonse rougir brusquement. George finit par dire :
- Je vous souhaite un bon séjour parmi nous.
- Espèce de vieux… Marmonna le plus petit en montant les escaliers.
Serena jeta un regard à son vieil ami et dit, ironique :
- Tu vois, je pourrais tenir un hôtel. C'est pas une bonne opportunité d'avenir ça ?
George lui tira la langue, puéril.
Alicia arriva à 17 heures passé et salua gaiement George.
- Salut Parrain ! Ça va ?
- Comptabilité. Niveau critique, grommela l'hôtelier
Ali comprit et monta sans faire plus de commentaires au deuxième étage. Une fois arrivée, elle constata avec amusement qu'un jeune homme était allongé par terre et regardait sous le gros secrétaire du couloir avec un air penaud.
- Vous avez perdu quelque chose ? Demanda la jeune fille
Effrayé, il sursauta. Elle rit et l'aida à se relever. Il finit par lui répondre, rougissant :
- Oui mon téléphone
- Prenez la grande règle dans le premier tiroir. Le dernier qui a réussi à récupérer un truc à mains nues de sous ce truc pesait 35 kilos.
- Je dois pas être bien loin, dans ce cas, Dit Alphonse d'un air contrit
Elle lui fit un grand sourire malgré tout et avança sa main pour qu'il la serre
- Alicia Wolfe.
- Alphonse Elric. Je suis nouveau ici. Euh… Je suis dans la chambre là. Mon frère est dans celle là. On reste jusqu'à la fin de l'année scolaire.
- Cool. Encore au lycée ? Demanda la jeune femme, joviale
Alicia aimait passionnément les gens depuis Eden School et se montrait toujours amicale et souriante.
- Oui. Je vais à côté. Au lycée Nord.
- Ah ! Moi aussi. Tu attaques quand ?
- Demain. En Première 4.
- Parfait. On se verra sans doute. Je suis dans la même classe. Je te servirai de guide si tu veux. Faudra juste pas faire attention à la fille avec qui je traine, elle est gentille mais elle n'existe que pour répandre des ragots
- Ah… Oui ! Avec plaisir… Enfin.. Volontiers quoi…
- Cool. On se voit en bas ? Pour le repas de ce soir ?
- Euh… Oui… Sans doute… Volontiers
Elle sourit et entra dans sa chambre. Alphonse se rembrunit et pensa : Félicitations Al. Encore un énorme progrès dans l'art de parler aux femmes. Il pensa qu'il devrait demander des conseils à son grand frère sur la manière de parler à un individu de sexe féminin sans rougir. Puis, il se dit qu'Ed n'était pas beaucoup plus doué que lui en la matière. Mémo personnel : trouver quelqu'un pour parler de filles et surtout, surtout en parler à Ed après.
- Bien passé les cours ? Demanda Serena, en tendant sa fiche de révision à Alicia sans lever le nez de sonCandide de Voltaire.
- On a eut sport. Je pense que la prof va construire un autel en mon honneur, c'est gênant
- Frimeuse, Réagit l'ainée
- Non, réaliste. C'est la fiche sur les particules ?
- Yep
- T'es parti en couille comme la dernière fois ou t'es resté humble cette fois ? Railla Alicia
- Excuse moi si je n'arrive pas à réfréner mon génie
- Frimeuse...
- Non, réaliste...
Mais Alicia semblait satisfaite du travail de sa grande soeur et se mit tranquillement à potasser. Au bout de deux heures, Serena referma le bouquin qu'elle envoya négligemment sur la table basse. Alicia y jeta un oeil :
- Encore Candide ? Ça fait combien de fois ?
- Cinq. J'aime bien les gens innocents. Ça me rappelle ce que ça peut être, l'innocence.
- As-tu jamais été innocente un jour ? Demanda Alicia
- Jusqu'à l'âge canonique de 16 ans, je l'étais. Après… Je sais pas, Dit Serena
- Tu parles beaucoup de sexe en ce moment. Tu serais pas un petit peu dans ce qu'on appelle une période creuse ? Se moqua la cadette
Serena tira la langue. Elle regarda l'heure.
- Faudrait pas tarder à descendre. T'en es où ?
- Je termine le protocole de l'expérience qu'on a à faire demain en TP de chimie
- Et qui concerne ?
- La synthèse du paracétamol.
- Ah ! Intéressant pour une fois ! Nota Serena, en jetant un œil au travail de sa petite sœur et en s'empêchant d'y ajouter des améliorations conséquentes.
Alicia haussa les épaules et apporta un point final à son travail. Elle demanda :
- T'as vu les nouveaux ?
- Ouais. Alphonse et Edward Elric je crois.
- J'ai croisé Alphonse dans le couloir. Il a l'air gentil. Timide mais gentil.
- Il est avec son frère. Qui a gentiment dit à Georges que son hôtel était pas un quatre étoiles.
- Ah, dommage ça. Sourit Alicia
- J'ai du intervenir. Sinon, Georges perdait deux clients.
- Une vraie héroïne, soeurette.
- N'est ce pas ? Dit Serena, en s'étirant.
Alicia se leva et prit un livre sur la table. Sa soeur regarda le titre et railla :
- Sans déconner ? T'en es encore à lire Spinoza ?
- Lâche moi avec ça !
- Avec ce qu'on sait de la Vérité frangine, t'arrives encore à lire ça ? Demanda Serena
- Il y a une différence entre la réalité et les visions de l'esprit. Laisse mes visions tranquilles et retourne à Voltaire.
- Quelle différence ? Rien que sa vision de l'Âme me retourne le cerveau. Hey ! Arrête d'esquiver le débat ! S'exclama Serena, tandis que sa soeur sortait manger.
Après le repas, les deux sœurs sortirent profiter d'une des dernières soirées d'été. Elles s'installèrent dans le parc devant l'hôtel et continuèrent leur débat philosophique.
- J'ai tendance à être une plus adepte de Leibniz que de Kant.
- Alors pour toi, tout le monde il est beau, tout le monde il est gentil, tout le monde est parfaitement là où il doit être par essence ? Se moqua Serena
- Tu réduis les choses et tu le sais très bien
Edward et Alphonse sortirent au moment où elles discutaient de la question de l'âme.
- Autant revenir aux théories antiques alors ! Avec le Léthé et toutes ses conneries, S'exclama Serena
- Tu vois, tu recommences ! Tu dis que la légende des eaux du Léthé, c'est des conneries. C'est juste une image du philosophe, pour expliquer nos instincts par exemple. Réagit Alicia
- L'âme humaine est rattachée à l'intellect humain, qui lui même, dépend du corps. Dit alors Serena
- Mais je suis d'accord avec toi ! Accepte juste qu'il existe d'autres points de vue !
- Mais non ! C'est comme accepter l'idée qu'il y ait plusieurs théories sur la circulation sanguine ! À un moment, il faut parler de fait ! Se récria Serena
Serena parlait fort et se tenait debout, les mains dans les poches. Ses longs cheveux bruns étaient lâchés, ses grands yeux bleus lançaient des éclairs. N'importe qui l'aurait écoutée parler, aurait acquiescé pour lui faire plaisir. Mais c'était pas tout à fait le genre d'Edward Elric, surtout quand il entendait des trucs pareils. Il ne put donc pas s'empêcher d'intervenir :
- Excuse moi mais tu ne peux pas être aussi radicale. La circulation sanguine est une question biologique. C'est une science dure, vérifiable, palpable. Tu peux pas en dire autant de la question de l'âme. C'est beaucoup trop métaphysique.
Les deux soeurs se retournèrent, surprise de l'interruption. Edward regardait Serena, les mains dans les poches. La jeune femme lui fit face, les mains sur les hanches et dit
- Petit un, c'est pas poli de s'incruster dans les conversations des gens. Petit deux… Y'a pas de petit deux, en fait, de quoi tu te mêles ?
- De rien du tout. C'est un débat non ? C'est ouvert.
- Y'a pas de débat à avoir. Rétorqua la jeune femme
- Ah je crois que si. Il me semble que des générations de savants se sont penchées sur la question de l'âme humaine sans jamais trouver de réponses à la question. Peut être parce qu'il y a une raison. Tu ne peux rien affirmer dans ce domaine. C'est comme… parler de l'existence de Dieu. C'est une question de foi.
- Sur ce sujet aussi, il y aurait beaucoup à dire. Mais je me contenterai de te répondre que les générations de savants ne se sont peut être pas penchées dessus de la bonne manière.
Serena et Edward se regardaient fixement. Il y avait une drôle d'électricité dans l'air. Alicia eut cette pensée en les observant, pensant à une chanson qu'elle avait écouté il y a pas longtemps et qui lui semblait drôlement appropriée : Et voilà que le feu rencontra l'essence...
- Et toi du haut de tes… 17 ans, tu viens me dire que tu as trouvé la bonne science pour étudier la question ?
- Pour commencer, j'ai 18 ans.
- Ça te fait un an de plus, félicitations. Ironisa Ed
- Un an de plus pour se pencher sur la question de l'âme, c'est considérable. Ne te moque pas du Temps. Dit durement Serena
- Loin de moi cette idée.
- Écoute… Pas la peine de s'étendre sur le sujet. L'âme est rattachée à l'esprit humain. L'esprit humain est relié au corps puisque dépendant du cerveau. Point à la ligne, Dit Serena en mimant le geste du point.
- Si tu veux. Tu ne m'empêcheras pas de penser que ça tient de la croyance plus que du savoir.
- Je te répondrais qu'il y a des certitudes que l'on paye beaucoup trop cher pour s'entendre dire qu'elles tiennent de la croyance. Dit Serena, une flamme azure dans les yeux
Alicia haussa les sourcils. Elle avait bien entendu compris l'allusion à la Vérité mais il était rare que sa sœur fasse de tel sous entendu. Edward ne se démonta pas et lui répondit :
- Pour ce genre de certitudes, on doit payer très cher
- Tu n'as pas idée de ce que j'ai du sacrifier… Répondit Serena
- Crois moi que la notion de sacrifice m'est particulièrement familière.
Alphonse et Alicia allaient chacun de leur côté intervenir pour éviter que leurs aînés se balancent à la gueule une histoire qu'ils avaient en commun sans le savoir. Mais une distraction arriva par le biais d'un homme l'air manifestement bourré qui se mit dans l'idée de draguer les deux filles.
- Tu veux pas venir avec moi toi ? Pour faire des trucs de sexe ? Balbutia-t-il
- Hein ? Réagit Serena, en cessant de regarder Edward
- T'as des yeux magnifiques, on dirait des enjoliveurs !
- Wow, ça c'est de la réplique... Casse toi... Lança Serena
- Roh en fait non, t'as l'air chiante. Et toi ? Toi aussi t'es jolie. Viens avec moi, on va faire le sexe...
- Alors, je pense pas que ça va être possible, Dit Alicia en repoussant la main que le garçon voulait mettre sur son épaule
- Allez, je suis gentil.
- J'en doute pas mais c'est pas possible...
- J'ai une bite de 25 centimètres ! Cria alors le garçon, qui continuait son manège
- Ravie de savoir que vous êtes à moitié cheval. Mais c'est toujours pas possible et va falloir arrêter de me toucher maintenant, j'ai dit non... Dit Alicia, plus fermement
Serena n'avait pas la patience de sa sœur et s'avança, pour faire face à l'importun. Elle le repoussa légèrement mais fermement pour l'éloigner de sa petite sœur. Elle dit :
- Casse toi, va cuver ailleurs...
Le malotru trébucha et s'énerva d'un coup, se pensant surement Super Sayan mais étant sans doute plus proche du veau malade. Il allait frapper l'une des deux filles, qui savaient parfaitement se défendre, encore plus devant une attaque aussi risible. Mais personne n'avait anticipé la réaction d'Edward, qui assistait à la scène depuis le début. Il envoya son bras dans le torse du garçon et sembla surpris de voir que ce simple geste n'avait pas achevé son adversaire.
- Ah oui, c'est vrai ! Se rappela-t-il en regardant son bras droit d'un air perplexe
- Hey ! Je peux savoir ce que tu fous ? Cria alors Serena, outrée qu'on lui pique sa bagarre
Étonné par sa réaction, lui qui s'attendait à des remerciements, il ne vit pas le bourré lui revenir dessus et le pousser maladroitement. L'élan le fit alors percuter Alicia et ils trébuchèrent tous les deux jusqu'à terre. Serena réagit alors et envoya son pied successivement dans le torse et dans le genou droit du garçon, qui tomba à terre. Elle lui saisit le bras et lui fit une clé, qui fit instantanément hurler sa victime à la mort.
- Tu vois, gros abruti, ça c'est ton bras. Dans ton bras, y'a le radius, c'est un des os les plus solides du corps humain. Si jamais je te recroise en train de harceler des femmes dans la rue, je te le brise. C'est clair ?
- Le bonhomme repartit sans demander son reste. Serena alla alors immédiatement voir si sa petite sœur allait bien.
- T'inquiète, j'en ai vu d'autres...
- Hey ! S'énerva alors Edward, qui s'était remis debout
- Quoi ? Dit alors Serena sur le même ton
- Pourquoi t'as fait ça ?
- Je te retourne la question. T'avais rien à faire dans ma bagarre !
- Y avait ton nom dessus, c'était la tienne ? J'avais pas vu, excuse moi d'avoir voulu rendre service !
- T'as pas voulu rendre service, t'as voulu jouer les gros bras !
- Pas du tout !
- Ce type harcelait ma petite sœur et allait clairement nous agresser. Ma petite sœur. Ma bagarre.
C'est alors que commença une joute verbale d'une violence qui aurait valu n'importe quelle bagarre de rue avec un mec bourré. Les thèmes étaient nombreux et variés. Ils parlèrent par exemple philosophie, sans se préoccuper de transition :
- Arrête de raconter tes conneries, il est normal de considéré que la nature est somme toute bien faîte et qu'elle peut très bien se résumer à une intégration… Disait Ed
- Mais, arrête un peu idiot, on dirait Candide avant son voyage…
- C'est qui Candide et il va où ?
- Alors tu veux me parler de philosophie et t'as pas lu Voltaire, c'est quoi cette blague ?
- J'ai peut être jamais lu ton type mais je suis sûr que t'as jamais lu Flamel
- Nicolas Flamel ? Le type dans Harry Potter ?
- Mais qu'est ce que tu racontes ?
Et ils finirent sur une discussion d'un grand intérêt et parfaitement argumentée sur la question de taille :
- Mais de quoi tu te mêles espèce de nain de jardin ? Cria Serena
- Qui traites-tu de microbe si petit qu'on marcherait dessus sans s'en rendre compte, espèce de petite naine ?
- Comment oses-tu me traiter de nain jouant dans un jeu télé avec des clés et des tigres ?
- Mais de quoi tu parles ? Clama le blond
- De la même chose que toi mais tu es trop limité intellectuellement pour comprendre quoi que ce soit !
- Traite moi d'abrutit tant que t'y es espèce d'idiote !
- Si tu crois que je vais me gêner !
Alicia et Alphonse, qui regardaient le spectacle, finirent par entrainer leurs ainés à une distance de sécurité respectable, avant qu'ils se souviennent qu'on pouvait aussi se battre à coups de poing.
