Chapitre 23 : Retour sans fanfare
Pendant que nous résumions Lupin et moi à McGonagall les événements qui s'étaient produits au 12 square Grimmaurd, ainsi que tout ce que nous avions appris, les gamins restèrent à regarder leurs pieds.
« Vous êtes vraiment totalement inconscients. » gronda notre Directrice blême à la fin de notre récit « Mais qu'est-ce qui vous a pris de vouloir régler ce problème tous seuls, au lieu de vous confier à vos professeurs ou à vos parents ? »
La contemplation des pieds se fit plus insistante. Voyant qu'elle n'obtiendrait pas de réponse sur ce point, McGonagall en revint à une question plus pratique, à savoir le livre qu'ils avaient soit disant « trouvé » et qui expliquait le contenu de la malédiction Opes ac dolor. Quittant leurs pieds des yeux, les gamins s'entreregardèrent. A l'issue de ce conciliabule muet, Scorpius Malefoy sembla avoir été désigné pour prendre la parole, sans que je comprenne le moins du monde comment.
« Nous avons utilisé un sort d'orientation pour trouver des informations en lien avec le nom de la malédiction « Opes ac Dolor » … » expliqua ce dernier
« C'est donc le sort que vous utilisez systématiquement pour vos mauvais coups. » l'interrompit Lupin qui n'avez manifestement pas très bien digéré qu'Albus et Scorpius lui aient « emprunté » son mémoire sur les sorts des mangemorts l'année précédente en le localisation grâce au sort en question « Et cette fois-ci, vers où le sort vous a-t-il orienté ? »
« Vers un ouvrage … dans la Réserve de la bibliothèque de Poudlard. » murmura Scorpius Malefoy
McGonagall eut un haut-le-corps.
« Comment avez-vous pu vous permettre d'aller chercher un ouvrage dans la Réserve qui est interdite aux élèves ? » s'écria-t-elle d'un ton coléreux
Si notre Directrice espérait que les gamins se sentent gênés, elle dut être déçue quand Teddy Lupin répliqua :
« Mais parce que ce livre parle de notre famille. Il parle de nous ! »
Notre Directrice soupira :
« Vous réalisez quand même Monsieur Lupin que les secrets du monde sorcier qui sont conservés dans les ouvrages de notre Réserve, concernent forcément les ancêtres de certains des élèves issus des vieilles familles de sorciers. Et pour autant, les autres élèves ne volent pas dans la Réserve les livres qui parlent de leur famille. »
« C'est à cause de ces agressions. » se défendit le louveteau
McGonagall soupira à nouveau. Si elle avait cru amener les gamins à exprimer des regrets, elle avait pour le moment échoué. Notre Directrice changea donc de sujet :
« Il est temps de nous expliquer comment vous avez réussi à sortir ce livre de la Réserve. Madame Pince surveille particulièrement ce rayonnage interdit qui bénéficie aussi d'importantes protections magiques. »
Nouvelle concertation visuelle du côté des gamins. D'une manière toujours aussi énigmatique à mes yeux, ce fut Victoire Weasley qui fut désignée pour lui répondre :
« Eh bien, j'ai eu un malaise pendant que j'étais à la bibliothèque. Du coup, Teddy et Delphini ont dû alerter Madame Pince pour me faire transporter à l'infirmerie … »
« Vous me prenez vraiment pour un Troll, Miss Weasley ! » rouspéta McGonagall « Dites plutôt que vous avait feint un malaise pour détourner l'attention de Madame Pince avec vos deux complices, pendant que vos trois acolytes pillaient la Réserve ! J'aimerais d'ailleurs savoir comment ils s'y sont pris pour tromper les protections magiques que nous avions mises en place. »
Si je pouvais avoir des petits doutes sur le « comment », je ne pouvais pas en avoir sur le « qui ». Dans cette bande de malfrats, seul Albus avait la puissance magique nécessaire pour faire une chose pareille, il l'admit d'ailleurs aisément :
« C'est moi qui l'ai fait, Professeur McGonagall. J'ai lancé un sort de Désorientation à la Réserve pour que Rose et Scorpius puissent récupérer le livre. »
« Un sort de Désorientation ? Qu'est-ce que c'est que ça ? » s'inquiéta notre Directrice
« C'est un sortilège en Fourchelang. » expliqua Albus un peu gêné « Il permet de … troubler temporairement les repères d'une protection magique par exemple. »
« Mais qui vous enseigne cette magie en Fourchelang ? » reprit McGonagall en me jetant un coup d'œil suspicieux
En tant que serpentard et qui plus est de directeur de la Maison Serpentard, je voulais bien être forcément suspecté de tout et n'importe quoi, mais la magie en Fourchelang ne rentrait vraiment pas dans mes capacités. Je haussai les épaules pour le rappeler à McGonagall. Albus qui avait suivi le manège, voulut lever l'ambiguïté :
« C'est Salazar Serpentard qui m'apprend la magie en Fourchelang. »
Il avait gommé de son récit la discussion qu'il avait eue avec la momie d'un très ancien sorcier Fourchelang lors de notre voyage en Egypte, sans doute pour éviter de m'incriminer. Et puis notre Directrice était déjà bien assez choquée par sa référence au fondateur de notre Maison.
« Salazar Serpentard ? Son portrait vous voulez dire. Vous vous rendez donc régulièrement dans la partie des cachots interdite aux élèves. » remarqua-t-elle d'un ton sec
« C'est que je n'ai pas le choix, Professeur McGonagall, » voulut se justifier Albus « il est le seul à connaître cette magie ici et à pouvoir me l'apprendre. »
« Pourquoi auriez-vous besoin d'apprendre la magie en Fourchelang ? » rétorqua McGonagall
La question laissa Albus totalement sidéré. Cette fois, je n'avais aucun mal à comprendre ce qu'il avait en tête. Pour lui, c'était non seulement un droit, mais même un devoir d'apprendre à maîtriser toutes les magies qu'il était capable de pratiquer, et en premier lieu la magie en Fourchelang dont il se sentait en quelque sorte dépositaire. Il cherchait encore une manière de faire valoir son point de vue à notre Directrice, quand Rose Granger-Weasley intervint sur un ton absolument mélodramatique :
« Vous savez, Professeur McGonagall, heureusement qu'Albus pratique la magie en Fourchelang, sinon le Professeur Rogue et le Professeur Lupin seraient arrivés trop tard pour nous sauver. »
Sentant notre Directrice ébranlée, la gamine poussa son avantage :
« Avant leur arrivée, ces sorciers que nous avons trouvé Square Grimmaurd ont tout de suite essayé de nous envoyer des sortilèges impardonnables, s'ils avaient réussi à se mettre en face de nous, ils nous auraient sans doute blessés ou même tués ! »
Elle poursuivit d'ailleurs sa démonstration en énonçant les sorts qu'elle avait entendu de la part de leurs adversaires. Non seulement, sa stratégie pour embobiner notre Directrice marchait parfaitement sur cette dernière, mais elle semblait même réussir à convaincre Lupin qui peinait à cacher sa peur rétrospective. Pour ma part, si je n'étais pas totalement dupe, je me retenais avec difficulté d'applaudir la performance de Miss Granger-Weasley. En même temps, je jetais un coup d'œil narquois à l'objet posé sur une étagère qui avait au contraire montré ses limites. Comment le Choixpeau Magique avait-il pu passer à côté d'un tel serpent et l'envoyer chez les lions ? A moins que, comme Harry, elle n'ait supplié ce vieux chiffon de ne pas la répartir à Serpentard.
Mal remise de ses émotions, Minerva finit par demander d'une voix encore émue à Albus, comment il s'y était pris pour empêcher leurs adversaires de se positionner en face d'eux alors qu'en Fourchelang ou pas les sorts se lancent en ligne droite.
« C'est grâce aux serpents que je conjure. Une fois qu'ils sont créés, ils m'obéissent. Je peux donc leur ordonner de se diriger vers un adversaire qui ne serait pas en face de moi. » expliqua le gamin qui finit par faire une démonstration face à l'incompréhension manifeste de notre Directrice. Il lança un sort en Fourchelang pour faire naître de sa baguette un serpent de feu avant de lui ordonner de se précipiter dans la cheminée après avoir contourner un fauteuil, apparemment du moins, car dans les faits seule Delphini Black pouvait juger de ce qu'il racontait.
Je m'étais habitué à cette magie étrange, de même manifestement que les camarades d'Albus nullement impressionnés de sa démonstration. En revanche, je surpris un frémissement chez McGonagall comme chez Lupin. Aucun des deux ne fit cependant de commentaire. Quant aux portraits des anciens directrices et directeurs que j'avais assourdis d'un sort discret, ils ne perdaient pas une miette du spectacle. Finalement, McGonagall retourna s'assoir derrière son bureau sans commenter la performance du gamin.
« Miss Granger-Weasley, remettez-moi la traduction que vous avez faite du livre que vous et vos acolytes avaient frauduleusement emprunté à la bibliothèque. » ordonna notre Directrice avant d'ajouter alors que Rose Granger-Weasley sortait son parchemin de sa poche pour le lui remettre « Où se trouve le livre en question ? »
« Dans ma malle. » avoua Teddy Lupin en détournant les yeux pour échapper au regard courroucé de son père
« Apprêtez-vous à le remettre à votre Directeur de Maison. » commanda McGonagall « Et maintenant … »
Notre Directrice s'arrêta un instant pour parcourir des yeux les six gamins alignés qui attendaient sa sentence.
« Je doute que vous soyez suffisamment conscients des risques invraisemblables et parfaitement inutiles que vous avez courus ce matin. Aussi j'enlève 15 points à chacun d'entre vous pour vous donner l'occasion d'y réfléchir. » assura-t-elle d'un ton ferme « En outre, chacun me copiera cinq fois la totalité du règlement intérieur de l'école, afin de vous donner une petite chance de vous en souvenir désormais. Monsieur Lupin, Miss Weasley, vos autorisations de sorties à Pré-au-Lard sont suspendues jusqu'à la fin de l'année. Je ne peux pas appliquer cette punition à ceux qui n'ont pas cette autorisation, mais sachez que je vous l'aurais supprimée si vous l'aviez eue ! »
Difficile de dire, ce que les principaux intéressés en pensaient de ces sanctions, car à nouveau ils scrutaient leurs chaussures avec la plus grande attention, mais je trouvais pour ma part McGonagall bien trop clémente. J'aurais voulu qu'elle fasse preuve de suffisamment de sévérité pour éliminer chez ces gamins toute tentation de recommencer, mais je n'étais pas non plus inconscient qu'une plus forte punition pourrait les conduire à plus de dissimulation encore. Or, c'est la confiance qu'Albus me faisait qui l'avait conduit à me prévenir à temps.
Et justement, notre Directrice venait de s'arrêter devant Albus qui par fierté essayait de faire bonne figure même s'il n'en menait pas large. De son côté, McGonagall paraissait partagée :
« Reste votre cas Monsieur Potter. Il semble que c'est à vous que nous devions le fait qu'une initiative stupide ne se soit pas transformée en véritable catastrophe. A votre bon sens qui vous a fait appeler à l'aide avant qu'il soit trop tard. Et, d'après votre cousine, à cette magie étrange en Fourchelang que vous semblez avoir à cœur d'apprendre et qui vous aurait permis de tenir vos adversaires à distance le temps nécessaire pour que vos professeurs arrivent. Aussi, je vous accorde 100 points. Cependant, il n'est pas question qu'au sein de cette école vous pratiquiez devant qui que ce soit susceptible de s'en émouvoir, une magie dont les origines et les effets sont si mal connus. Sauf à ce que ce soit une question de vie ou de mort naturellement, mais il n'y a pas de raison qu'une telle circonstance se reproduise. »
Albus encaissa sans broncher la mise en garde et les 100 points. La différence était subtile mais elle était de taille. McGonagall ne lui avait pas vraiment interdit de pratiquer la magie en Fourchelang, mais simplement de le faire devant un public non averti, ce qui était une sacrée concession de sa part. Et encore fallait-il que les sorts soient audibles pour être interdits …
Notre Directrice congédia les gamins dans la foulée. Ils disparurent sans demander leur reste.
