Petit moment mignon ! (même si totalement oublié de le prendre en compte pour le chapitre 28, ha ha... orz

Bonne lecture !


La salle de bain était très rudimentaire.

À la base, c'était un simple baquet stocké dans le coin cuisine, qu'on tirait dans un coin de la pièce principale et qu'on remplissait d'eau qu'on avait chauffé dans la marmite suspendue dans la cheminée, puis qu'il faudra vider d'une manière ou d'une autre. Bref, une tannée à chaque fois, ce qui faisait d'un moment de confort une corvée sans fin et menait à un écart conséquent entre chaque bain.

L'absence évidente d'intimité fut ce qui le hérissa le plus, surtout avec la manie de M. le Héros de rentrer sans s'annoncer. Bon, certes, il était chez lui à la base, mais quand même ! Déjà qu'il ne retirait sa capuche que lorsqu'il était seul, ce n'était pas pour être surpris tout nu !

Lorsque sa majesté la reine Zelda décida d'incorporer une salle de bain au plan de la nouvelle version de la maison de M. le Héros, il aurait pu lui sauter au cou pour l'embrasser ! Mais pour des raisons évidentes, il se contenta de trépigner sur place, ce qui mena sur lui deux paires d'yeux interloqués. Il en avait peut-être un peu trop fait.

Comme dit plus haut, la pièce était assez sommaire, mais elle était plus que suffisante pour leur usage ordinaire. Lui avait pu largement en profiter pendant l'absence du propriétaire, découvrant avec grand plaisir la véritable hygiène et le confort de l'eau chaude dans laquelle il pouvait rester aussi longtemps qu'il le souhaitait. Plus d'une fois il en était sortie avec la peau rougie et plissée, entouré d'un large nuage de buée qui le rendait honteux, jusqu'à ce qu'il se souvienne qu'il n'y avait que lui en ces lieux et que donc, personne ne pouvait lui reprocher sa paresse !

Qu'il était bon d'avoir toqué à la bonne porte !

Bien sûr, ça restait un endroit à la décoration majoritairement neutre avec un soupçon d'eux deux dans les produits visibles, la canne et le tabouret dans un coin, pas aussi personnalisé que ce qu'il avait pu faire dans le reste de la maison, mais c'était un bout de chez eux et malgré le froid des dalles de pierre, il y avait quelque chose de chaleureux à contempler leurs brosses à dents à côté de la vasque du lavabo ou les serviettes colorées accrochées au mur. Ne plus entrer dans une salle vide et froide, indiquant qu'il était actuellement le seul occupant, pouvoir discuter quand ils en faisaient le ménage ou se lavaient les dents.

De petits bonheurs simples et tellement domestiques, auxquels il n'auraient jamais pensé aspirer.

Il sortit de sa rêverie lorsque des gouttes d'eau atteignirent son nez, obtenant son attention et des râles.

— Link, tu es un gamin.

— J'assume, ricana-t-il.

Pour se venger, Lavio glissa en arrière, étendant un peu plus ses jambes et s'immergeant plus sous l'eau agréablement chaude. La réaction fut immédiate, son compagnon s'agita en protestant, essayant de récupérer un peu plus d'espace pour lui-même.

— Et c'est moi le gamin ? balança-t-il en guise de représailles.

— J'assume, se moqua le lolien.

Et pour faire bonne mesure, il lui tira la langue avant de replonger le menton sous la surface parfumée.

Évidemment, on pouvait avoir sauvé le monde une bonne demi-douzaine de fois et avoir la maturité d'un caillou, et il ne fallut pas longtemps pour qu'une riposte soit mise en place, et encore moins pour qu'une partie de l'eau contenue dans la baignoire finisse sur le sol, promettant de sales glissades s'ils n'y prenaient pas garde.

Mais pour l'instant, ils étaient bien trop occupés à tenter de prendre l'avantage sur l'autre en riant, les mains agrippées à leurs cheveux mouillés ou au premier membre qui passait à porté, l'objectif étant de noyer - civilement - l'autre, afin de récupérer le plus d'espace possible, et ainsi être sacré roi du bain.

Okay, c'était totalement un bagarre puérile et sans aucun sens, mais ça faisait parfois du bien d'être puérile et de n'avoir aucun sens. Encore plus, loin de possibles témoins et dans des circonstances aussi informelles. En effet, Shiro était banni de la pièce depuis la fois où il avait tenté de picorer la savonnette, ce qui l'avait rendu fort malade.

Quand l'inconfort et l'épuisement eurent raison d'eux, ils lâchèrent leurs prises, fanfaronnant chacun d'avoir eu le dessus sur l'autre, tout en sachant que non seulement ça n'avait aucune importance, mais en plus ils étaient ex-æquo.

Ou, en tout cas, c'est ce qu'ils se dirent, pour se rassurer intérieurement.

— Viens par là, l'invita Link en ouvrant les bras.

Diligemment, Lavio vint s'appuyer contre son torse alors qu'il l'étreignait, accolant leurs têtes. Les yeux fermés, ils reprenaient leurs souffles, avant de rire, le ridicule de la situation précédente les atteignant finalement.

— On est des gamins, pouffa le commerçant.

— Ça fait du bien, parfois. Tu es bien plus lumineux quand tu es détendu comme ça.

Leurs yeux se croisèrent pendant qu'il attrapait sa main et enlaçaient leurs doigts.

— Vraiment ? Dis m'en plus, ça m'intéresse~

— Mmh, j'hésite. Si je poursuis dans cette voie, tu vas avoir la tête qui gonfle tellement que tu vas rester coincé ici, me privant ainsi du luxe de l'eau chaude.

— Tch, vilaine langue. Tu parles de la possibilité que je me retrouve cloîtré à vie dans une pièce aussi triste que celle-ci, et tout ce qui t'inquiète, c'est que je te dépossède de tes bains ? N'aurais-tu pas de cœur ?

— J'en avais un, mais je te l'ai donné, le taquina-t-il avant de l'embrasser au coin de la bouche.

Il lui aurait fallu s'éloigner de sa peau chaude pour un baiser plus approfondi et c'était hors de question. Hyrule n'était en rien aussi froid que Lorule, mais il restait malgré tout sensible au changement de température et appréciait grandement toute source de chaleur, peu importe sa forme.

M. le Héros était en passe de devenir sa préférée. Surtout maintenant qu'ils partageaient le même lit, cauchemar ou pas !

— Et je te promets d'en prendre grand soin, jura-t-il contre ses lèvres.

Son étreinte sur lui se resserra et ils restèrent ainsi, savourant seulement leur proximité et la sensation de la peau de l'autre contre la sienne.

Bien sûr, la température baissait et ça commençait à devenir désagréable, mais la simple idée de bouger, de se séparer, même pour un court instant, les révulsait. Alors, à la place, ils se blottissaient un peu plus l'un contre l'autre, à la recherche de la chaleur corporelle de l'autre, s'imbriquant comme ils le pouvaient.

— T'endors pas, souffla Lavio dans le silence quasi omniprésent.

— Mais je suis si bien installé, se plaignit-il faussement.

Il rit, repoussant une mèche rose derrière son oreille, son doigt redessinant une cicatrice puis l'os de sa mâchoire, admirant ses traits comme si c'était la première fois qu'il les voyait. Il tenta de réprimer son sourire quand une légère rougeur naquit sur ses joues puis s'étendit, gagnant les oreilles et la gorge.

Link n'était pas habitué aux compliments sur son physique - lui non plus - et chaque petite marque dans ce sens l'amenait à toujours plus de couleurs. C'était une activité qu'il adorait réaliser, curieux des limites, jusqu'à quel point il pouvait le faire rougir, seulement en énonçant des vérités.

Le seul danger, c'était quand le jeu se retournait contre lui et que, pour se venger, ce foutu vétéran moqueur les lui resservait à sa sauce, alignant compliment sur compliment, avec cette étrange lueur douce au fond de ses yeux bleus. Le pire, c'est quand il y ajoutait une caresse de ses mains abîmées. Il ne faisait que le frôler, mais la sensation restait pendant des heures, tel un membre fantôme le provoquant.

Il était totalement à la merci de ce satané héros, et sans doute cette réalisation lui ferait-elle peur dans d'autres circonstances. Dans celles-ci, elle avait quelque chose d'énivrant.

Parfois, son côté sale gosse revenait des années en arrière, à l'époque où se moquer de lui paraissait être le sport national, que ce soit sa volonté de garder la tenue violette de lapin, ses taches de rousseur, ses dents proéminentes et légèrement écartées, ses mains et ses pieds trop grands en comparaison avec le reste de son corps. Il avait envie de retourner enfoncer son bonheur actuel dans la gorge de ces vilains moqueurs, les voir s'étouffer dessus et le leur faire regretter chaque mot, chaque geste, chaque pensée.

On pouvait avoir le cœur lâche et l'esprit revanchard, c'était loin d'être incompatible.

— Tu souris, petit lapin, chantonna Link en lui volant un baiser.

— Je suis heureux, avoua-t-il C'est aussi simple que ça.

— Alors, assurons-nous que ça t'arrive le plus souvent.

— Seulement si à toi aussi.

— Ton bonheur suffit au mien.

Le seul moyen de le faire taire, c'était de l'embrasser, définitivement. Ce qui tombait plutôt bien, c'était une solution qui lui plaisait énormément. Et, merveilleusement, c'était aussi une qui plaisait excessivement à son fiancé. Il le soupçonnait même de faire exprès, de temps en temps, juste pour l'encourager à prendre les devants ou parce qu'il voulait un baiser mais n'osait pas le demander.

C'était compliqué, un héros, fallait pas croire. En plus, il venait souvent sans mode d'emploi, ce qui en rendait l'entretien encore plus compliqué. Le seul moyen de s'en sortir était de l'apprivoiser petit à petit, puis d'apprendre le fonctionnement en situation réelle.

Heureusement pour lui, M. le Héros était un cobaye plein de bonnes volontés, facile à corrompre avec ses plats favoris.


— Et vous dîtes que ça vous est arrivé comment ? répéta Zelda, abasourdie.

Face à elle, Lavio et Link se mouchaient allégrement, chaudement couverts, le nez bien rouge.

C'était une de ses visites habituelles, mais elle les avait découvert pratiquement collés au foyer de la cheminée, emmitouflés sous tous les plaids que possédait cette maison, buvant des litres de thé presque bouillant, toussant comme s'ils avaient une pierre dans la gorge.

— Va te faire voir, décréta son frère, aussi aimable qu'à l'habitude.

Il ne prit même pas un air coupable quand son fiancé tourna vers lui un regard désapprobateur, se contentant de l'éviter en tournant la tête vers le mur.

Définitivement un sale gosse. Mais c'était son sale gosse.

Bon sang qu'il l'aimait…


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