Je suis un héros pro.

L'Izuku Midoriya de 15 ans hurlerait de joie en apprenant la nouvelle, en fixant mon diplôme et mon titre, en revoyant les nombreuses photos de la cérémonie.

Moi, je me contente simplement d'encaisser la nouvelle dans un étrange état d'hébétement.

Je vous ai envoyé un message pour vous l'annoncer. Je me suis trouvé stupide, mais je n'arrive toujours pas à vous appeler malgré les semaines qui ont passé. Vous avez pourtant accepté cette régression dans notre communication sans le moindre commentaire et je ressens votre incroyable entrain à travers vos lignes. Vous ne m'en tenez toujours pas rigueur, je suppose. Vous devez être habitué à mes sautes d'humeur stupides.

Je suis heureux d'avoir réalisé mon rêve. Mais le timing rend ma victoire amère.

Aujourd'hui, je me rends au manoir Todoroki et je vais tenter de faire ce que je n'ai pas réussi à faire ces dernières années : affronter les choses en face. Sans baisser la tête. Sans ces maudites œillères.

Oui, j'ai des sentiments pour vous. Quels qu'ils soient exactement, ils sont assez forts pour m'avoir mis à terre lorsque vous êtes parti aux États-Unis. Pour m'avoir transformé pendant quasiment une année entière en poupée seulement remplie d'amertume. Ils sont assez présents et ancrés en moi pour faire capoter toutes les relations que j'entame. Et je ne peux pas supporter de continuer à faire du mal à des gens auxquels je tiens à cause d'un boulet pareil.

C'est ce que je tente d'expliquer à Shôto sans me débiner. Mais me manger cette réalité de plein fouet était une chose, l'avouer en est encore une autre.

J'ai honte. Tellement honte.

Finalement, je ne vaux pas mieux que tous ces érotomanes épleurés qui transforment leurs rêves en réalité dans leur tête.

Fort heureusement, le temps de maturation depuis ma discussion avec Tôya a fait son œuvre. Je suis même surpris d'entendre Shôto s'excuser au nom de son frère, qui n'aurait jamais dû me parler de ça, selon lui. Mon petit-ami est perplexe, mais il me surprend un peu plus en m'avouant qu'il n'est pas vraiment étonné par cette révélation.

Suis-je si facile que ça à lire... ? Suis-je aussi bête, aveugle et enfoncé dans mon déni que tout le monde avait compris, à part moi ?

Et si Shôto s'en doutait, qu'en est-il pour vous, alors... ?

Mais le moment est malvenu pour me laisser encore à errer dans votre direction. Pour l'instant, c'est Shôto qui m'importe et la relation avec lui que je chéris au point de vouloir tout de même me battre pour elle.

Je me sens alors comme un énorme enfoiré d'oser lui sous-entendre que je n'aimerais pas perdre ce qu'on a malgré tout. Je me plie en excuses en lui rappelant que la dernière chose que je veux, c'est lui faire du mal. Et que si vous prenez réellement trop de place entre nous, alors il faudra effectivement faire quelque chose contre ça.

Shôto a la solution toute trouvée. Il ne veut pas que ça se termine non plus, alors il veut que je vous le dise. Il veut que je vous l'avoue.

Il veut que vous m'envoyiez balader une bonne fois pour toute pour me faire redescendre sur Terre.

Je me sens mourir de l'intérieur à cette éventualité. De peur, de honte, d'angoisse. Je ne peux pas vous avouer ça. Je ne peux pas affronter votre réaction. Je ne veux pas briser ce qu'il y a entre nous.

J'ai déjà manqué de vous perdre à plusieurs reprises. Mais cette fois-ci, pourtant ironiquement bien loin de la mort pure et simple, me donne l'intuition que cela pourrait sonner la fin pour de bon.

Pourtant, Shôto ne me laisse pas le choix. Surtout en voyant ma réaction. Cette même réaction qui lui fait du mal, je peux le voir aisément dans ses yeux vairons.

Je suis une horrible personne. Je ne méritais pas Ochako, je mérite encore moins Shôto.