Les mois ont passé.

J'ai finalement monté ma propre agence et je reste encore un peu surpris de me rappeler que je l'ai créée avec Katchan.

Lui non plus ne voulait finalement pas rejoindre une agence déjà existante. Si de mon côté, j'ai avancé l'argument que je voulais tout bâtir de mes propres mains pour entamer quelque chose de neuf, Katchan, lui, a évidemment annoncé qu'il ne voulait surtout pas être dans l'ombre de quelqu'un.

Vu notre réputation et notre puissance, nous sommes devenus célèbres assez vite. Kaminari nous a rejoint peu après car cela ne se passait pas bien dans sa propre agence et nous faisons notre petit bonhomme de chemin en tant que nouveaux héros pros depuis. Ça se passe bien, j'en suis pleinement satisfait.

Je suis donc en compétition directe avec l'agence de Shôto dans le district de Mustafu et si la presse people se fait un plaisir de nous appeler régulièrement « les amants rivaux », nous nous en fichons pas mal et nous préférons nous en amuser.

Ça se passe plutôt bien de ce côté-là et je suis encore surpris que notre couple se soit relevé de l'épreuve que nous avons traversée. Shôto était réticent quand il m'a récupéré après mon ultime appel avec vous, et comment lui en vouloir : j'ai été dans un état déplorable pendant des semaines. Il a fait preuve d'une patience exemplaire car je me suis accroché à lui comme un fou pour lui prouver que j'étais prêt à faire des efforts malgré la situation. Je tiens à lui, je ne veux pas qu'il en doute. Je tiens tellement à lui que je crois fermement que j'aurais de véritables foutus sentiments qui fleuriront un jour pour lui, je le sais.

En attendant, le temps suit son cours.

Je n'ai évidemment pas de nouvelle de vous. J'ai même été jusqu'à effacer votre numéro devant Shôto pour lui prouver ma bonne foi. Et si je suis resté brave du début à la fin, ça a été quelque chose d'horrible à faire.

Je ne sais pas exactement ce que vous lui avez dit, mais ma mère est au courant du fait que nous avons décidé de prendre nos distances. Je sais que vous continuez toujours de l'appeler. J'essaie de me dire que ce n'est que par simple habitude ou par affection pour elle. Je sais que vous vous êtes rapprochés ces dernières années. Mais je n'ai pas l'impression que vous lui avez dit la vérité, car elle n'est jamais venue m'en parler. Elle n'a pas commencé à me regarder autrement.

Peut-être que si elle sait, elle passe juste outre.

Dans tous les cas, Shôto est toujours le seul à connaître mon secret - mettant Tôya de côté, mais Shôto l'a apparemment assez recadré pour qu'il ne lui vienne pas tout de suite l'idée de rouvrir la bouche -, et c'est très bien ainsi. À tous les autres qui me demandent de vos nouvelles de temps en temps, je leur réponds juste que je n'en ai plus car ainsi va la vie.

Aujourd'hui, j'arrive à le dire sans que ma voix ne tremble ou ne flanche.

Mais je ne suis pas certain pour autant que ces longs mois de rien aient changé quoi que ce soit.

J'ai toujours mal de ne pas vous avoir près de moi. De ne pas entendre votre voix. De ne même pas savoir comment vous allez ou ce que vous faites de vos journées.

J'ai mal de ne même pas avoir eu l'occasion de vous revoir. J'ai mal que la vie se soit simplement goupillée de cette manière et que les choses ne se soient pas passées autrement. Que l'on se serait rencontré dans une autre vie ou que je n'aurais jamais eu à vous aimer : qu'importe.

J'évite de trop y penser. Autant pour me sauvegarder que par respect pour Shôto.

Nous emménageons justement ensemble pour nous rapprocher de nos agences respectives. Et pour avancer dans nos vies, tout simplement... Le temps passe et de ce côté-là, c'est simplement confortable. J'aimerais me vanter de devenir adulte, mais par moment, je me sens pourtant encore tellement petit et tellement jeune.

Je me sens encore comme votre élève, All Might. Quand je sauve des gens et qu'ils m'acclament, quand les journaux chantent mes louanges, je n'arrive jamais à repousser la pensée insidieuse que ça ne sera jamais mieux que vous. Que je suis destiné à rester dans votre ombre à jamais car c'est juste ainsi.

Un soir, j'ai trouvé le courage d'en parler à Shôto. Il est le mieux placé pour avoir une idée de ce que je ressens. Mais il m'a répondu que ce n'était pas comparable. Que contrairement à Endeavor et lui, c'est bien moi et moi seul qui me cantonne à rester dans votre ombre. Qui me refuse d'en sortir.

Je crois que cette conversation m'a encore fait perdre des points auprès de lui.