Pov Ron
"Mais enfin Harry, ça fait plus de deux semaines que ça dure !"
J'étais debout dans la salle commune, les mains sur les hanches en train de faire la morale à Harry. Nous étions seuls, la plupart étaient en train de profiter du soleil qui refaisait son apparition depuis quelques jours. Mais Harry passait ses journées à broyer du noir. Il lisait son journal sur la table en bois, près de la fenêtre. Moi, j'avais encore dans les mains une affiche concernant une soirée qui aurait lieu le week-end. Je l'avais trouvé affichée dans la salle commune. Il y avait plusieurs affiches identiques dans les dortoirs et couloirs du château. Une soirée des maisons, je ne voyais pas en quoi cela consistait, mais elle avait lieu la veille de notre match contre Serdaigle.
"C'est dimanche, tu pourrais au moins sortir de ton trou et venir avec nous à Pré-au-lard !" je disais à Harry en reposant l'affiche sur la table.
Hermione et Ange étaient partis le matin même pour flâner ensemble.
"Je n'ai pas envie, Ron.." me répondait distraitement mon meilleur ami tout en lisant la gazette du sorcier.
Je me suis avancé vers lui pour saisir le journal, le rouler en boule et l'envoyer dans la cheminée.
"Hey !"
Je me tournais vers lui.
"Il va bien falloir que vous parliez, tous les deux."
"De qui tu parles ?"
"Harry, arrête de faire l'autruche. Je parle d'Ange, bien sûr !"
Harry s'était levé pour rejoindre le canapé moelleux en me répondant : "Mais... on se parle !"
"Oui, c'est vrai, quelques fois vous arrivez à vous dire bonjour en vous regardant dans les yeux !" je répondais sur un ton ironique.
Je soupirais et m'asseyais à côté de mon meilleur ami.
"Pourquoi vous ne vous adressez plus la parole ?"
"Tu le sais bien.."
"Oui, je sais pourquoi il y a un malaise entre vous, mais sinon ?"
"Un malaise ? Tu crois que c'est un simple malaise ? Ron.. je lui ai avoué que je l'appréciais .. que je l'appréciais beaucoup, mais elle n'a pas l'air d'avoir envie de l'entendre."
"Je pense que si, puisqu'elle t'a aidé à cracher le morceau. Donc, c'est illogique que ce soit cette raison, tu ne crois pas ?"
"Qu'est-ce que tu veux que ce soit ?"
"C'est vraiment tout ce que vous vous êtes dit sur le terrain de Quidditch ? Il n'y a pas eu d'autres sujets de conversation ?"
Je voyais qu'il faisait mine de réfléchir. Le journal était complètement réduit en cendres maintenant. Mais je regardais mon meilleur ami avec insistance.
"On s'est.. légèrement disputés aussi.." avouait-il enfin.
J'ai eu envie de rajouter un vague comme d'habitude sans oser le dire.
"Ah. Voilà qui est très intéressant."
"Stop, c'est bon, je n'ai pas envie d'en parler." Il s'est levé pour tourner en rond dans la salle commune. Il avait envie de partir et de parler en même temps.
Je le coupais.
"Harry, tu meures d'envie d'en parler, mais tu crois que parce que aujourd'hui je sors avec Hermione, je ne suis plus capable d'écouter et de prendre du temps pour mon meilleur ami ? Tu te trompes, mon vieux."
Il s'est tourné vers moi et j'ai lu dans son regard que j'avais raison. Il avait besoin de nous.
"Elle m'en veut .. je pense." avoua t-il à demi-mot après quelques instants de silence.
"Elle t'en veut ? On pourrait vraiment en vouloir à quelqu'un d'éprouver quelque chose pour nous ?"
"Je lui ai demandé ce qu'elle trafiquait avec Zabini et Davies."
"Nous y voilà.. et alors ?"
"Alors, rien. Elle m'a répondu que c'était personnel. Elle s'est braquée. "
"Bien sûr qu'elle s'est braquée, tu fouines ! Donc, tu crois les rumeurs ? Tu crois vraiment qu'elle sort avec deux types en même temps ? En cachette ?"
"Je ne crois rien du tout !" répondait-il sur la défensive. Je pense que de l'avoir traité de fouineur l'avait vexé.
"J'ai envie de savoir ce qu'elle fait mais elle ne dit rien à personne. Comme avec Malefoy. J'ai même l'impression qu'ils font semblant que rien ne se passe ces deux-là, mais pourtant, je sais qu'elle les voient régulièrement."
Je soupirais en essayant de réfléchir en vitesse.
"Tu ne crois pas que c'est pour ses cours ? Tu sais, avec Malefoy elle revoyait ses bases, parce qu'elle passe ses Buses en fin d'année."
Effectivement, en France, les examens étaient en sixième et septième année. Ange allait donc passer ses Buses en même temps que Ginny pour se mettre à niveau, et elle travaillait beaucoup.
"Foutaises, Hermione l'aide déjà beaucoup, et Ange a de bons résultats ces derniers temps."
"Justement, parce qu'elle travaille beaucoup, sans doute." je répondais en haussant les épaules.
Harry est revenu s'asseoir à côté de moi, et nous avons laissé le silence s'installer encore quelques temps.
"Je lui ai demandé ce qu'elle ressentait pour moi." a t-il dit en murmurant.
Je tournais le visage vers lui, j'ignorais ce détails.
"C'est là, qu'elle m'a laissé en plan." a t-il ajouté.
Il avait l'air vraiment malheureux et ça ne pouvait plus durer.
"Je ne serai pas l'homme de la situation ni le meilleur pour te conseiller... mais Harry ... "
Je prenais une profonde inspiration.
"Tu ne crois pas que tu vas un peu trop vite ? Je veux dire... elle venait de se faire plaquer par Malefoy, il l'a humilié maintes et maintes fois au château, il y a eu le procès, elle a cru être enceinte..." Il savait que je connaissais ce détail, je lui avais dit quelques jours plus tôt.
"Où tu veux en venir ?" me demandait-il.
"Tu vas cent fois trop vite, même si admettons elle ressent quelque chose pour toi, laisse-la respirer, elle a besoin de se retrouver avec elle-même et de reprendre confiance en elle. Elle doit avoir peur que tout ne recommence.. moi j'aurais peur, j'aurais vraiment du mal à redonner ma confiance... à qui que ce soit." et j'insistais sur ces derniers mots.
Harry me regardait interloqué, sans rien répondre. Il semblait presque choqué.
"Quoi ?"
"Ron... tu traînes trop avec Hermione !" m'a t-il dit en souriant.
"Et oui, maintenant que je suis encore plus proche d'elle, et tu sais que j'ignorais que c'était possible ! Je dois prendre un peu de sa sagesse également." je lui répondais avec un air malicieux. "Bon, tu viens alors ?"
Nous nous sommes levés ensemble du canapé et il a attrapé ses chaussures.
"Okay... je sors de ma tanière."
Pov Ange
"C'était super ce moment passé ensemble, on devrait vraiment faire ça plus souvent !" me disait Hermione alors que nous nous installions pour boire une bière au beurre. Nous avions sillonné une bonne vingtaine de magasins et de librairies pour nous distraire et passer un moment entre filles.
"Oui, surtout qu'il devient très difficile de te voir en ce moment, mademoiselle l'amoureuse !" je lui disais en ôtant mon écharpe de mon cou pour la poser sur une chaise en bois. Nous étions dans une sorte de pub dont j'ignorais le nom, mais Hermione avait fait une blague en entrant, au sujet de Mrs Rosmerta, la gérante du lieu en parlant de Ron. Il aurait eu un faible pour elle quand il était plus jeune.
"Oui, je suis désolée, je passe beaucoup de temps avec Ron en ce moment.."
"C'est normal et tu as raison. Vous êtes supers, tous les deux." disais-je en m'asseyant et en prenant la carte des boissons.
"Salut Fire !"
En relevant la tête je m'apercevais que Blaise Zabini était dans le bar, lui aussi. Il portait deux choppes de bière au beurre et venait de passer près de notre table. Mon ancien coéquipier se dirigeait vers une table où une belle brune l'attendait. Je riais en le voyant faire.
"Il sort avec elle ?" me demandait Hermione en les observant.
"Oui, je crois. Elle est en septième année. Mais bon, avec lui, je ne sais pas si ça va durer !"
"Ah oui ?"
"Bah, Blaise est du genre coureur, c'est bien connu."
Hermione m'a regardé sans rien répondre. Je sentais qu'elle voulait ajouter quelque chose, mais son visage s'est éclairé quand elle a tourné la tête vers l'entrée, le son de la petite cloche avait attiré son attention, signe que quelqu'un entrait.
"Ah, les voilà !"
"Qui ça ?" je demandais en regardant vers l'entrée. J'ai manqué d'air pendant quelques secondes en remarquant que c'était Harry, qui était en plein fou rire avec Ron. J'essayais presque de me cacher derrière ma carte, carte dont Hermione venait de m'arracher des mains.
"On arrête de se cacher !" m'a t-elle grondé avec un sourire.
"Tu m'as piégé Hermione !" je lui reprochais en lui attribuant un regard sombre. Elle avait cherché toute la matinée à me parler de Harry.
Harry par-ci, Harry par-là. Et à chaque fois j'avais changé de sujet. Les garçons nous ont aperçu.
Ron a encore plus sourit en voyant Hermione.
Harry, lui, n'a plus sourit du tout. Il a fait le même regard à Ron, le même que celui que j'avais lancé à Hermione. Mais Ron l'a complètement ignoré en venant vers nous. Il m'a ébouriffé les cheveux, puis à embrassé furtivement Hermione et s'est assit à côté de moi. Harry, a finalement trouvé le chemin de la table et s'est assis avec nous, en face de Ron. Hermione était en face de moi et échangeait un regard éloquent avec Ron. Ils avaient comploté tous les deux. Ne sachant quoi faire de mes mains, je les mettais sous la table, rabattant les manches de mon pull dessus.
"Mais Potter et Weasley aussi sont là, tous les petits lionceaux sortent pour le printemps on dirait !"
Encore Blaise. Il revenait une nouvelle fois du comptoir avec un pichet d'eau. Il s'est penché vers moi pour dire assez fort pour que nous entendions tous les quatre :
"Elle a une de ces descente, je vais calmer le jeu avec de l'eau, sinon je serai ivre en moins de deux."
J'ai rigolé en l'écoutant, chose qu'il ne se serait sans doute jamais produite quelques mois plus tôt. Mais bizarrement, il n'était pas aussi agressif qu'on le pensait, il était plutôt quelqu'un de drôle. Il avait suffit d'un match de Quidditch pour que l'on s'entende plutôt bien. On a suivit Blaise du regard alors qu'il rejoignait sa dulcinée.
"Mais, Zabini a une copine ?" demandait Ron.
"Oui, ça fait un moment. Ils sont bien amoureux ces deux-là." je répondais en le regardant la rejoindre.
"Ah ouais ?"
"Oui.." je me tournais vers eux et je risquais un regard vers Harry en ajoutant : "Ils sont ensemble depuis le bal de Noël."
Harry n'a rien répondu, mais il a soutenu mon regard. Il a compris le message que je lui envoyais : Blaise n'était pas mon petit ami ! Et ne l'avait jamais été, et ne le sera jamais. J'ai eu du mal à rompre le lien visuel. Les yeux d'Harry avaient quelque chose de troublant, quelque chose qui me gênait depuis la toute première fois que je l'avais vu. J'ai réussi à baisser les yeux sur la table.
"Quoi de neuf, vous avez fait quoi ce matin ?" demandait Ron en souriant à Hermione.
"On a flâné, d'ailleurs il est très difficile de faire sortir Ange d'un magasin de Quidditch." répondait Hermione en m'adressant un clin d'œil.
"N'importe quoi..." je disais en souriant.
"A ce point-là ?" Ron me regardait maintenant en riant légèrement.
"Tu es autant accro de ça ?"
"Non, Hermione exagère."
"Pardon ? On est restés tellement longtemps que je crois avoir compris toutes les règles et feintes." ajoutait Hermione en souriant tout en prenant les bières au beurre que Mrs Rosemerta venait nous distribuer. Je levais les yeux au ciel en continuant de faire comme si c'était faux.
"D'ailleurs, tu as bien acheté un vif d'or ?"
Je relevais les yeux sur Hermione.
"Euh.. non.. pourquoi ?"
"Ah oui ? Pourtant tu en avais un dans ta main quand on a quitté le magasin, non ?" m'a t-elle dit en buvant une gorgée. Ron était en train de faire de même. Mais Harry, lui, a tourné la tête vers moi.
"Je me suis trompée alors.. " ajoutait Hermione sur un ton qui laissait deviner que non, elle ne pensait pas s'être trompée.
J'ai croisé le regard vert qui me donnait la sensation que ma gorge se serrait. Je me suis donc tournée rapidement vers Ron pour changer de sujet.
"Et vous, quoi de neuf ?"
"Oh rien.. ah si ! Vous êtes au courant qu'il y a une soirée samedi ?"
"Oui, on a vu les affiches avec Ange. Qu'est-ce qu'on fait, on ira faire un tour ? J'ai vu que ça commençait à vingt heures." lançait Hermione.
"Pourquoi pas, mais on reste pas tard, on a match contre les Serdaigles le lendemain. Tu en penses quoi Harry ?" demandait Ron à son meilleur ami.
Enfin, Harry prenait la parole. En prenant bien soin de ne pas me regarder.
"Oui, si vous voulez. Mais à vingt trois heures on rentre, le match est à dix heures le dimanche, il faudra un minimum de sommeil pour être en forme. Ce serait bien que l'équipe se retrouve dans la salle commune vers vingt trois heures quinze, pour qu'on fasse un point."
Je sentais tout mon corps être envahi de stress alors qu'ils parlaient d'une future soirée. Je ne pouvais m'empêcher de penser à la dernière soirée, celle où je m'étais jetée dans les bras de Malefoy comme une idiote.
"D'ailleurs, l'entrainement est mercredi soir." a t-il ajouté en me jetant un coup d'œil. J'ai préféré ne pas répondre, car le mercredi soir j'étais occupée. Mais je pourrais bien changer de programme pour cette fois.
"Tu viens toi aussi Ange, à la soirée ?" me demandait Ron, voyant que je ne disais rien.
"Hum... non, j'ai.. j'ai déjà quelque chose de prévu.."
"Ah oui, tu fais quoi ?"
"Oh... rien de très important."
"C'est certainement très personnel." lançait Harry en me fixant tout à coup du regard et en insistant sur le dernier terme en employant un ton claquant. Voilà, je sentais sa colère foncer droit sur moi. Il était en colère, depuis notre dernière conversation, et ça sortait enfin. C'était terminé de s'éviter toute la journée. Il devait être exaspéré que je garde encore des secrets. J'avais relevé les yeux sur lui, presque choquée qu'il m'attaque devant Ron et Hermione. Deux semaines de silence devait être trop pour lui.
"Oh, Ron, j'ai vu un magnifique pull dans une vitrine, viens je te le montre tout de suite !" annonçait Hermione tout en se levant. Elle enfilait déjà son manteau.
"Quoi, maintenant ? J'ai pas fini ma bière au beurre Hermy !"
"Oui, maintenant ! Allez !" elle lui saisissait déjà le bras et disparaissait avec Ron dont on entendait vaguement les réclamations alors qu'ils sortaient tous les deux du bar. Harry et moi continuions à nous regarder, lui d'un air sombre, moi plutôt brillant.
"Harry, s'il te plait, je comprends que tu sois en colère, mais.."
"Tu sais quoi, fais ce que tu veux, je m'en moque. Mais pourquoi tu ne dis pas à Ron ce que tu comptes faire samedi soir ?"
"Parce que je ne peux pas le dire, Harry !"
"Sinon quoi ? Ton petit ami a honte d'être avec toi ? J'en ai ma claque de tes mensonges, je commence même à croire que tu recommences à sortir avec Malefoy."
"Pardon ? Jamais !" je commençais a hausser le ton moi aussi.
"Qui alors ?"
"Mais je ne fréquente personne Harry !" J'avais l'impression de lui répéter ces mots inlassablement.
Il a levé les yeux au ciel, exaspéré de la situation puis il s'est levé.
"Tu a voulu me parler sur le terrain de Quidditch, juste pour me faire avouer ce que je ressentais pour toi, mais c'était quoi le but au juste ? Etre contente d'avoir encore un mec amoureux de toi ? Tu dois en avoir dix qui attendent d'être avec toi, tu as du bien t'amuser de me faire cracher le morceau."
"Quoi ?" j'étais atterrée d'entendre son discours, atterrée de me dire qu'il pensait vraiment une chose pareille. Je me levais également, et du coin de l'œil j'ai vu que Blaise nous écoutait de là où il était.
"Tu sais quoi, j'ai compris ton problème : tu ne sais pas ce que tu veux ! " m'a t-il lancé tout en enfilant à son tour son manteau.
"Harry, où tu vas ?"
"Je rentre, je te laisse. Des fois que ton petit-ami veuille te voir pour un moment personnel, je ne voudrais surtout pas gêner."
Et il a quitté le bar à son tour en lançant un regard appuyé sur Blaise. Je suis restée pétrifiée un instant en sentant les larmes me brûler les yeux. Mais j'ai voulu arrêter de laisser couler les larmes.
Dire stop à la douleur, ne plus jamais laisser les gens que j'aimais quitter ma vie.
C'est pourquoi je me suis précipitée vers la porte sans prendre la peine de prendre ma veste et j'ai couru dans la rue pour rattraper Harry. Je l'ai cherché des yeux quelques secondes et enfin je suis arrivée près de lui. Je l'ai contourné et je l'ai forcé à s'arrêter en appuyant sur ses épaules, il avait l'air plutôt surpris.
"Ange, mais tu.."
Je le coupais.
"Tu sais quoi Harry, c'est vrai, tu as raison, je ne sais pas ce que je veux." je lui disais en ayant la respiration saccadée. Je le regardais droit dans les yeux, en essayant de reprendre contenance. "Mais je sais que je ne souhaite en aucun cas te faire du mal."
Je laissais glisser mes mains de ses épaules car je sentais qu'il allait m'écouter, que je n'aurais pas à le forcer de rester.
"En fait, je pense même que je sais ce que je veux mais j'ai peur. Et je sais que si on s'ignore tous les deux, si on continue comme ça, j'en serai malheureuse."
Il ne m'a pas répondu et me fixait de ses yeux émeraudes. Il buvait mes paroles, tout simplement. Il attendait des réponses de moi, mais ses soupçons, ses idées ne m'aidaient pas à avoir l'esprit posé et calme.
"Samedi soir, je serai là." je lui annonçais.
"Quoi, tu changes tes plans ?" me demandait-il en ayant une voix beaucoup plus douce qu'à l'intérieur du pub.
"Non, je dois être à cette soirée, mais... j'arriverai en retard. Harry, je te promet de tout t'expliquer ce soir-là. Je.."
"Tu vas continuer à me cacher ce que tu fabriques encore combien de temps, Ange ?"
Il fronçait déjà des sourcils car il ne supportait pas qu'on lui cache des choses. Harry avait toujours enfreint une multitude de règles dans cette école juste pour apprendre la vérité. J'étais même étonnée qu'il ne m'ai pas forcé à boire du Veritaserum.
"Encore quelques jours. Quelques jours, et je te promet.. que tu comprendras tout. Laisse-moi du temps. J'ai.. j'ai besoin de temps, Harry, je sais que je t'en demande beaucoup, mais.."
"Je ne sais pas."
"Quoi ?"
"Je ne sais pas si j'attendrais, Ange. J'en ai marre, marre d'attendre. Je ne suis même pas certain que ça en vaille le coup."
Un coup de poing. C'est ce que je ressentais, dans l'estomac, juste assez net pour me bloquer la respiration. Ses paroles avaient un effet démesuré sur moi.
"Oh... je.. je comprends.." je lui répondais en laissant glisser mon regard sur sa veste, ses mains, et enfin le sol. Je hochais la tête en reculant un peu car je sentais sa colère revenir au galop et j'avais beaucoup appris avec Harry. Entre autre, il ne fallait jamais insister, Ginny pouvait l'affirmer. Et surtout, ne jamais lui mentir.
"Excuse-moi.. de t'avoir fait du mal.." je sentais les larmes remonter dangereusement, c'est pourquoi j'ai voulu prendre congé rapidement. J'ai hoché la tête en le regardant dans les yeux.
"Je vais te laisser tranquille Harry."
Il n'a rien répondu, mais son regard a changé. J'ai vu un sentiment passé dans ses yeux sans réussir à l'interpréter. Je croyais avoir connu la douleur, mais ce que je ressentais sur le moment, aucun échange ne m'avait autant été douloureux.
Quelques jours plus tard, j'étais en cours de métamorphoses avec le professeur McGonnagal. C'était plutôt une réunion avec les Gryffondors de sixième année, car notre directrice de maison souhaitait que l'on s'intéresse à notre avenir professionnel d'une façon plus sérieuse. J'étais assise seule à une table. Une table proche de la fenêtre d'où je pouvais regarder le monde extérieur à ma guise. Où je pouvais m'évader sans penser à rien, sans ressentir la tristesse qui me suivait depuis quelques jours. Depuis que j'avais parlé avec Harry, je m'isolais. J'arrivais mieux à réfléchir, seule.
"Bien, j'ai jugé bon de vous grouper en fonction de vos motivations professionnelles, vous me ferez un devoir commun sur les études à accomplir pour cela. Je pense que vous vous rendrez mieux compte de l'importance de vos résultats scolaire si vous tenez tant à votre rêve."
J'écoutais ma directrice de maison tout en me souvenant qu'effectivement, au moment de mon arrivée à Poudlard, j'avais rempli une sorte de questionnaire sur mes envies de profession. Les élèves mettaient à jour leur fiche à chaque rentrée. Le professeur énumérait les groupes, parfois assez nombreux comme celui de Ron où tout simplement les élèves ne savaient pas vraiment quoi faire, plus restreint comme celui d'Hermione qui souhaitait intégrer le ministère de la magie, où bien celui de Neville qui souhaitait être professeur. Il n'y avait pas de règles, des groupes de six, de huit, ou de trois. Et il y a eu un groupe de deux :
"Miss Fire et Mr Potter, vous serez ensemble."
Je crois que je n'aurais pas pu être plus mal à l'aise. Je sentais que je perdais au moins dix centimètres à force de me ratatiner de chagrin ces derniers temps. Mais cette annonce ne m'aidait pas à reprendre confiance en moi.
"Bien, tous les groupes sont formés, maintenant je vous laisse le reste de l'heure pour commencer vos travaux !"
J'ai levé les yeux vers Harry. Il passait sa main sur sa nuque, il devait être autant mal à l'aise que moi. Nous ne nous étions pas reparlé depuis la rencontre à Pré au lard. J'essayais de me convaincre d'une chose positive, nous allions briser la glace avant l'entrainement de Quidditch de ce soir. Il a du venir à ma table car Hermione avait réquisitionné la sienne pour son propre groupe. Quand il s'est assis près de moi, nous n'avons rien dit pendant un moment. Dans un soupire, je sortais mon parchemin et commençais à inscrire nos noms.
"Je ne comprends pas une chose.."
Je tournais le visage vers Harry en l'interrogeant du regard. J'étais très étonnée que ce soit lui qui brise le silence.
"Auror ? Tu veux vraiment être Auror ?" me demandait-il en dirigeant ses émeraudes vers moi.
J'ai eu un petit temps avant de lui répondre, je ne savais pas si ça venait du fait qu'il m'adressait enfin la parole, ou si je venais de remarquer la réelle couleur de ses yeux.
J'avais effectivement écrit sur le fameux questionnaire que je voulais être Auror.
"Oui.. pourquoi tu me demande ça ?" je demandais en essayant de reprendre une contenance.
"Je ne sais pas... je ne te voyais pas du tout faire ça." répondait-il simplement en prenant à son tour un parchemin, rompant notre lien visuel. Je terminais de noter un petit paragraphe que McGonnagal avait inscrit au tableau. J'essayais de repousser notre conversation, en prenant tout mon temps. Ou alors, j'étirais la conversation, pour capter son attention. Je ne savais pas bien sur le coup. Je n'ai pas pu me retenir plus longtemps.
"Qu'est-ce que tu me vois faire plus tard ?"
Il a tourné son visage vers moi en répondant comme si c'était évident:
"Poursuiveuse."
"Hein ?"
"Oui, poursuiveuse. Professionnelle."
"Ce n'est pas un métier Harry..."
"C'est un métier. Et quand on te voit voler... Tu as un don, tout le monde en parle à l'école. Pourquoi vouloir être Auror ? Si c'est pour ce que je crois... c'est dommage."
"Ce que tu crois ?"
Il a hésité, je l'ai vu. Mais il s'est jeté à l'eau.
"Tu veux rendre justice à ta famille."
J'ai tourné le visage vers le tableau, sans rien répondre au départ, comme impressionnée qu'il me dise tout ça. J'étais un peu piquée en vérité.
"Mes parents seraient fières que je reprenne le flambeau." je disais simplement.
"Ah oui ? Et toi, tu ne serais pas fière de représenter un club, un pays sur un balai, là ou tu sais qui tu es ?"
Je me tournais de nouveau vers lui, sans rien répondre. J'étais sans voix de l'écouter parler de moi de la sorte. Lui, a baissé les yeux sur son parchemin.
Il a ajouté : "Tu sais où es ta place quand tu voles. Tout le monde le voit, sauf toi."
Il continuait son discours tout en écrivant le paragraphe de notre directrice de maison.
"Je remarque que tu as du mal à voir ce qu'il y a autour de toi, sauf dans les airs. Et puis, c'est ta vie, pas celle de tes parents. Et on en a qu'une. Et sur un terrain de Quidditch... tu as l'air heureuse."
Alors qu'il disait que je voyais rien autour de moi, j'étais en train de le détailler. De le regarder vraiment.
Chaque épis bruns qui tombaient sur son front, la façon dont ses sourcils s'arquaient quand il parlait.
Sa manière de pincer les lèvres quand il écrivait, sa façon de tenir sa plume.
La couleur de ses yeux, les cils bruns qui bordaient l'émeraude.
Son don de lire en moi, de m'observer.
Je retrouvais usage de la parole alors qu'il reprenait un peu d'encre pour sa plume, me sortant de ma rêverie.
"Et toi alors ? Pourquoi vouloir être Auror ? Je pense que c'est exactement la même raison que moi."
"Non. Moi c'est une envie profonde, un besoin aussi. Je sais que toute ma vie, si j'en ai une, je devrais me consacrer pour la paix. C'est mon rôle. Je suis né pour ça. Et toi.. tu es née pour faire rêver les gens."
Je ne répondais toujours pas, continuant de le regarder. Il a levé les yeux vers moi.
De pouvoir plonger dans son regard, je me souvenais. Je me souvenais de ces soirées, au coin du feu. Quand Harry et moi n'arrivions pas à trouver le sommeil, nous nous retrouvions dans la salle commune au milieu de la nuit, nous nous installions devant la cheminée. Nous mettions une couverture chaude sur nos épaules et nous parlions. Nous parlions jusqu'au bout de la nuit. Nous étions épuisés, c'est certain, mais nous nous sentions tellement libérés ensuite. Nous parlions de nous, de nos rêves, de nos angoisses.
Un de ces soirs là, Harry m'avait parlé d'une prophétie qui le liait à Voldemort. Il l'avait découverte l'année précédente au ministère de la magie. Elle expliquait que aucun des deux ne pouvait vivre tant que l'autre survivait. J'en avais eu le cœur brisé de l'apprendre. Mais j'avais tout fait pour ne pas montrer mes sentiments face à lui. Je les avaient toujours refoulés, loin, très loin dans mon esprit. Mais alors que je me perdais, que je me perdais dans un océan vert, je sentais que j'étais sur le point de m'ouvrir. De m'ouvrir complètement à lui. J'en ressentais le besoin urgent, mais par où commencer ?
"C'est tout ce que j'avais à te dire, mais si tu tiens vraiment à gâcher ta vie en voulant faire plaisir aux autres. Tu es bien parti, alors vas y, fonce."
"Harry, s'il te plait..."
"J'ai l'impression que tu aimes avoir le cœur brisé.. tu ne veux pas qu'on t'aide. Tu ne veux pas que je t'aide. Alors, je te laisserai, moi aussi."
Ses mots ont eu l'effet d'une claque. Je n'avais pas eu le temps de lui dire quoi que ce soit qu'il m'a déclaré le fond de sa pensée, sur un ton presque irrité. La cloche a sonné sans que je ne puisse répondre. Mais de toute façon, je ne pense pas que j'aurais pu répondre quoi que ce soit. Harry a rangé ses affaires rapidement, me laissant seule à ma table.
J'ai eu du mal à sortir de cette conversation.
En fait, elle m'a suivi tout au long de la journée jusqu'à l'entrainement de Quidditch.
Pov Harry
Nous étions samedi soir et nous nous préparions tous dans nos dortoirs pour la fameuse "soirée des maisons". Personne ne savait vraiment en quoi consistait cette dite soirée, personne ne l'organisait, les professeurs restaient très secrets, nous sentions bien qu'ils savaient tout de cette soirée sans rien nous dire. Il était juste inscrit sur l'affiche que nous devions tous avoir un vêtement de la couleur de notre maison, le reste en noir. Alors que je m'habillais, je poussais ma malle de Quiddich sous le lit. J'avais fouillé tout l'après-midi à la recherche de mon vif d'or. D'un vif d'or en particulier. Sans succès.
Je venais de mettre ma chemise noire sur le dos en prenant mon nœud papillon rouge dans les mains et je sortais de mon dortoir pour descendre dans la salle commune rejoindre mes amis. Cette soirée me ferait du bien, j'en étais certain. Et j'avais raison de le croire.
"Harry, tu es prêt ?" me demandait Hermione dans une belle robe noire et une ceinture rouge soutenant sa taille.
"Oui, les autres sont déjà là-bas ?"
Effectivement, il n'y avait que Ron, Hermione, Neville et Seamus encore présents dans la salle commune. Je boutonnais les derniers boutons de ma chemise en constatant cela, tout en regardant partout autour de moi. Je refusais de le dire à quiconque mais je cherchais Ange. Elle avait dit qu'elle serais en retard à la soirée, mais je ne savais pas si elle viendrait vraiment. Je ne l'avais que très peu vu cette semaine. Une fois dans le pub à Pré-au-lard, en cours et à l'entrainement. Malgré tout ce que j'avais envisagé, elle était venue à l'entrainement alors que depuis plusieurs semaines elle était absente le mercredi soir. J'avais fait exprès de placer l'entrainement ce soir-là, pour voir si elle ferait l'effort de venir. Ce qu'elle avait fait..
La veille, elle avait loupé l'après-midi entière sans que je n'en connaisse la raison. Et Zabini n'était pas au cours de potions que nous avions en commun ce jour là. Je pensais sérieusement qu'elle sortait avec lui, malgré que je l'avais vu avec une fille à Pré-au-lard.
"Oui, dépêchons-nous on va louper le début !" nous pressait Hermione.
Nous avons parcouru les couloirs ensemble dans la bonne humeur, tout le monde semblait vouloir passer une bonne soirée. Nous sommes arrivés devant la grande salle transformée pour l'occasion. Plus de bancs ni de tables. Le ciel magique comme je l'appelais, montrait des constellations magnifiques. Le long des murs, des tables étaient dressées avec des boissons non alcoolisées. Tous les professeurs étaient présents pour la surveillance. Nous arrivions tout juste pour le début de soirée, car à peine étions nous entrés, qu'une musique avait commencé à retentir dans la salle. Comme si la salle avait attendu que tout le monde arrive. Nous écoutions une musique plutôt entraînante et nous cherchions tous son origine, c'était une guitare.
"Regardez là-bas !" Hermione pointait du doigt une sorte de scène qui était comme floutée dans un épais nuage noir. Nous distinguions quatre personnes avec des instruments sans voir de qui il s'agissait. Et une voix a retenti.
Une belle voix.
"C'est une chanson des Bizarr'Sister !" précisait Seamus en commençant à applaudir.
Puis, nous avons vu l'ombre de la scène commencer à rétrécir, révélant l'identité d'une personne alors qu'elle jouait de la batterie. C'était Jackson Davies. Il était habillé en noir avec une cravate bleu. Alors qu'il jouait, des étincelles argentées et bleu tombait doucement du plafond. Les élèves de Serdaigle applaudissaient tout en comprenant que leur maison était à l'honneur. Plus la musique passait, plus l'ombre perdait en place sur scène.
Bientôt, nous découvrions une fille de chez Poufsouffle, dont je ne connaissais pas le nom, qui se tenait derrière un piano et faisait les chœurs de la chanson et levait les bras vers les élèves de sa maison qui l'applaudissaient. Elle avait une robe noire et des chaussures jaunes. Des étincelles de la même couleur virevoltaient bientôt dans toute la salle.
Enfin, et à la grande surprise générale, l'ombre laissait voir un garçon au teint brun jouer de la guitare et visiblement, il prenait son pied et affichait un grand sourire sous une pluie verte. Tous les Serpentards présents hurlaient leur encouragement. Ils étaient bien connus pour être fiers de leur maison. Zabini était en train de mettre le feu à la salle, avec une veste émeraude. Il jouait de la guitare et regardait de temps en temps la dernière personne à découvrir, visiblement il jouait avec cette dernière.
Et puis, un puzzle était en train de se reconstituer dans mon esprit.
Jackson Davies.
Blaise Zabini.
J'ai enfin reconnu la voix qui chantait depuis le début alors que je l'apercevais dans un panache noir qui la révélait. De l'ombre elle était passée à la lumière. C'était le dernier refrain, celui qui demandait le plus de puissance dans la voix. Son débardeur noir scintillait dans toute la pièce comme un diamant. Ses mains tenaient une guitare qui était posée contre elle grâce à une bandoulière et elle chantait devant un micro posé sur un trépied devant elle. Elle était éclatante sous une pluie rouge, une rafale tourbillonnante dévastait la pièce. Je comprenais que les scintillements, paillettes et lumières de couleurs variaient en fonction des applaudissements et des réactions du public. Alors qu'elle terminait la chanson, toute sa tenue s'est transformée en un rouge flamboyant.
Ange était aussi belle en rouge qu'en noir. Je comprenais qu'elle était tout en noir sans détail rouge pour indiquer qu'elle cherchait sa place. Arrivée en sixième année, j'imagine qu'il était difficile d'avoir le même sentiment d'appartenance que nous à sa maison. Mais dans le fond... en regardant les réactions des élèves présents, qui applaudissaient bruyamment, en apercevant toute sa tenue devenir pourpre... elle était une vraie Gryffondor.
La chanson s'est arrêtée, c'était la folie dans toute la salle.
"Pour une surprise, c'est une sacrée révélation !" criait Ron pour couvrir le bruit des rires et conversations.
Je me sentais tout engourdi, incapable de faire quoi que ce soit, les bras le long du corps. Comme hypnotisé, je fixais Ange qui venait de taper dans la main de Zabini en éclatant de rire. Quand Dumbledore a prit la parole, les quatre musiciens se sont alignés sur scène, en quittant chacun leur instrument. Le directeur de l'école était en train d'expliquer la raison de la soirée : la cohésion des maisons qui était possible. Il reprenait en partie un discours qu'il nous avait fait un soir après le fameux match où les équipes étaient mélangées. Tous regardaient fièrement les élèves présents.
Tous, sauf Ange qui regardait le sol. Elle souriait malgré tout. Dumbledore expliquait comment il s'y était pris pour organiser la soirée : les quatre élèves avaient effectué des répétitions secrètes tous les mercredi soir depuis plusieurs semaines. A ces mots, Ange a relevé les yeux, droit sur moi. Droit sur moi, donc elle m'avait vu entrer dans la salle. J'ai tout lu dans son regard et sa façon de pincer légèrement les lèvres. Voilà ce qu'elle me cachait, pas une relation, une simple soirée.
C'était la fameuse punition d'Ange pour avoir envoyé un cognard sur Malefoy. Organiser une soirée en secret pour la cohésion des maisons, sans rien dire à personne. D'ailleurs, le Serpentard était dans la pièce avec Cho, et réagissait de la même manière que moi : il ne bougeait pas d'un pouce. Ange me fixait intensément de ses yeux vairons. Sa tenue redevenait noir et sombre, de la même manière que les applaudissements cessaient pour écouter le directeur.
Hermione s'est tournée vers moi et m'a embrassé la joue, elle était soulagée pour moi. Je ne savais pas comment réagir, je me sentais ridicule. Ridicule pour tout ce que j'avais dit à Ange. J'avais été dur avec elle, pour une simple soirée. Je me tournais vers mes amis, me souriant tous.
"Et si on allait boire un verre ?" lançait Ron dans ma direction.
"Bonne idée. Très bonne idée."
Dommage pour moi, pas d'alcool ce soir.
Deux heures plus tard, je consultais l'heure. Je ne voulais pas rentrer tard, match de Quidditch oblige. J'étais contre le mur au fond de la salle tout en regardant la scène. J'avais hésité toute la soirée, je voulais parler à Ange mais j'ignorais quoi lui dire. Je voulais m'excuser et en même temps me cacher pendant trois jours pour ce que je lui avait dit. Pour les larmes que j'avais fait naître dans ses yeux. Je l'observais depuis le début de la soirée, elle était presque autant à l'aise sur une scène que sur un terrain de Quidditch. J'avais noté une phrase d'une chanson qu'elle interprétait. Elle disait tout en fixant Malefoy :
Don't know what I want
But I know it's not you *
J'avais la sensation qu'elle mettait un terme définitif à ses sentiments vis à vis de lui, sur scène. Le fait qu'elle dise cette phrase éveillait en moi notre conversation à Pré-au-lard, où je lui avais dit qu'elle ne savait pas ce qu'elle voulait. Aujourd'hui elle semblait le savoir. Elle savait déjà qu'elle ne voulait plus de lui.
Alors qu'elle terminait de chanter en compagnie de Blaise, Malefoy lui a lancé du fond de la salle :
"Ca y est, tu as terminé Fire ? Nous on sait ce qu'on veut, que tu te la ferme !"
L'ensemble ou presque des Serpentards riaient à la remarque du prince des Serpentards, Pansy un peu plus fort que le reste, et Malefoy semblait satisfait de sa réflexion. Je me tournais finalement vers Ange pour observer sa réaction. Elle serrait les mâchoires et sa guitare entre les mains et prenait rageusement une partition qu'elle plaçait sur un pupitre, elle voulait clairement l'ignorer mais je sentais de là sa colère. Zabini s'amusait beaucoup de la situation et jetait un œil à ce qu'ils allaient jouer.
"Qu'est-ce qu'on peut faire pour que t'arrête de brailler ?" relançait Malefoy, alimentant la tension qui commençait à poindre dans la salle.
Ange, devant son micro, en train d'échanger avec Zabini, répondait simplement, consciente que tout le monde écoutait :
"Je ne sais pas, demande à ton père, ça marche bien sur toi. "
Elle avait été froide et ne l'avais même pas regarder, ne contentant d'accorder sa guitare. Une fois fait, elle levait les yeux sur lui et lui lançait un sourire mesquin.
Zabini relevait finalement les yeux vers Malefoy en lui lançant un regard surpris, visiblement Ange ne comptait plus se laisser faire.
Malefoy serrait rageusement son verre, noyé dans le bruit que plusieurs Gryffondors faisaient en applaudissant les musiciens pour que les choses avancent et que cette conversation prenne fin avant que cela ne dégénère.
Pendant une sorte d'entracte, j'avais réussi à coincer Zabini pour lui demander une faveur. Je n'avais plus mon courage de Gryffondor contrairement à Ange qui assurait le spectacle sur scène. En l'observant chanter et jouer de la guitare, je me remémorais qu'elle m'avait dit avoir appris à jouer de cet instrument quand elle était petite, avec son père.
J'ai négocié longuement avec Zabini, mais il a finalement accepté ma demande.
J'avais trouvé une solution pour lui adressé un message.
Pov Ange
Nous arrivions enfin aux derniers morceaux. Je commençais à être épuisée. Moralement et physiquement. J'avais réussi à cacher cette soirée à toute ma maison et j'en étais plutôt fière, les cours privés avec Dumbledore étaient très efficaces. Toute la pression retombait et je me sentais fatiguée. Cette soirée m'avait complètement libérée. Je me sentais sereine. J'avais démontré à tout le monde, surtout à Harry, que je ne cachais rien de mal. Alors que j'accordais ma guitare pour un morceau, j'ai croisé le regard de Drago. Il me fixait de ses yeux d'orage et je n'arrivais pas à interpréter cet échange visuel. Rien que de le regarder, je me souvenais de notre dernière conversation, où je lui annonçais ne pas être enceinte, juste affaiblie et que j'avais besoin de repos. Il avait été soulagé et avait rapidement prit congé. J'avais remarqué son air fatigué, tout comme ce soir. Il semblait épuisé, comme malade. Je lui avait conseillé de se reposer et il m'avait envoyé bouler. Voilà comment notre histoire s'était terminée... du moins, je l'avais fait quelques minutes plus tôt avec un morceau que j'avais tenu à chanter.
"Tiens, on va jouer ça." Blaise me tendait une partition que je ne connaissais pas.
Je commençais à être horrifiée en lisant les notes.
"Mais, je ne connais pas la chanson ! On a jamais répété pour celle-ci ?!"
"Laisse tomber Fire, c'est moi qui chante cette fois."
Je me tournais vers Jackson et Lena, la fille de Poufsouffle.
"T'en fait pas Ange, elle est super facile !" me lançait cette dernière. Jackson acquiesçait d'un hochement de tête.
"Bon, okay..."
Je n'étais pas très sûre de moi, d'autant plus que Blaise ne m'a pas laissé le temps de soufflé qu'il démarrait les premiers accords. Mais en regardant de plus près, je n'avais aucune note à jouer. J'avais peur de me tromper alors j'ai voulu demander à mes amis musiciens de m'expliquer. Sans que je ne m'y attende, Blaise s'est penché vers moi et m'a dit dans le creux de l'oreille :
"C'est Potter qui a choisit cette chanson, elle est pour toi. Il a dit que tu devais bien l'écouter."
J'ai relevé vivement la tête vers la foule où j'ai vu Harry. Il était au fond de la salle, contre le mur, les mains dans les poches. Il m'a fait un signe significatif, il a porté son index à son oreille en la tapotant légèrement. Ce n'était pas une blague de Blaise, Harry avait vraiment choisit une chanson pour moi. Blaise a commencé à chanter. Je me tournais vers lui, avec l'impression que je vivais quelque chose qui n'était pas ma vie, comme si j'étais saoule, je n'arrivais pas à comprendre ce qui se passait. Après ces jours difficiles, Harry revenait enfin vers moi ?
Quand les ténèbres tombent
Et t'encerclent
Lorsque tu tombes
Quand tu as peur et que tu es perdu
Sois courageux
Alors que j'étais encore sous le choc, je gardais mon regard braqué sur Blaise. Personne ne pouvait démentir, il avait une voix magnifique qui transportait tout le monde. Je buvais littéralement ses paroles vu les circonstances.
Je viens pour te soutenir à présent
Lorsque toute ta force s'en est allée
Et que tu te sens mal
Comme si ta vie s'était échappée
Suis-moi, tu peux me suivre
Et je, je ne vais pas t'abandonner
Alors que je commençais à comprendre le message d'Harry, les larmes auraient pu monter vite, très vite. Mais j'étais tellement sous le coup de l'émotion que j'avais du mal à bouger ne serait-ce que le petit doigt. J'ai tourné la tête vers lui, il continuait de me regarder, comme si c'était lui qui me disait les mots de vive voix. J'étais émue et soulagée en même temps, qu'il revienne vers moi malgré tout... j'avais passé des jours terrible, à espérer que je ne vive qu'un simple cauchemar. Je me tournais une nouvelle fois vers Blaise, écoutant le message du brun aux yeux verts.
Suis-moi, tu peux me suivre
Je te maintiendrai en sécurité
Suis-moi, tu peux me suivre
Je te protégerai
Je te protégerai toujours, mon amour **
Toute la salle applaudissaient la performance de Blaise, qui était heureux de voir du vert partout. Alors qu'il avait terminé cette magnifique chanson, Harry est sortit de la salle après m'avoir lancé un regard appuyé. J'étais pétrifié sur place, comme si l'on m'avait fait subir le sortilège de saucisson. Blaise s'est tourné vers moi.
"Hey, tu as écouté ou quoi ?"
"Euh.." j'ai dû me racler la gorge pour faire sortir un son audible. "Oui, oui."
"Bah non... Suis-moi. Il est sorti. Qu'est-ce que tu attends ?"
J'écoutais Blaise tout en regardant la porte par laquelle Harry était partit quelques instants plus tôt. Voyant que j'étais encore sous le coup de l'émotion, Blaise a retiré la bandoulière de ma guitare.
"Allez... Vas y. Ca ne pourras plus durer bien longtemps comme ça." m'a t-il dit en souriant.
Harry ne me détestait pas. Harry n'était plus en colère contre moi. Est-ce que je pourrais reprendre le cours normal de notre amitié... ou bien...
Tout d'un coup, c'était comme si le rythme de mon cœur, ma vie, s'accéléraient à une vitesse fulgurante. Comme si je comprenais enfin tout ce qu'il se passait dans ma tête... dans mon cœur.
J'ai été ravie d'avoir choisi une jupe avec des bottines plates, j'ai pu sauter de scène sans encombre, sans prendre les escaliers. Je n'ai pas marché en traversant la salle. J'ai couru. J'ai volé.
J'ai eu le temps d'entendre Ron crié "Dans la salle commune ! " avant de quitter la salle. Je n'ai jamais été aussi rapidement devant le portrait de la grosse dame. J'ai donné le mot de passe après avoir pris un temps d'arrêt, pour sentir toute l'adrénaline parcourir mon corps. Puis, après être entrée, je l'ai vu, devant la cheminée.
Harry faisait face aux flammes. Il savait que c'était moi, parce qu'il a dit avant de se tourner vers moi :
"Tu m'as suivi."
Son regard a transpercé le mien. Je me suis rapproché de lui.
"Oui."
"C'était... une super surprise cette soirée. Très réussie, vraiment."
Je n'ai rien répondu, me contentant de le regarder.
"Je suis désolé pour.. tout ce que je t'ai dit. Je me sent tellement idiot."
"Ce n'est pas grave."
"Est-ce que tu comptes enfin t'ouvrir à moi ?"
Je me suis approché encore d'un pas.
"Oui, Harry."
"Tu sais, cette chanson.. j'ai l'impression qu'elle a été écrite pour toi. Pour nous. J'ai toujours eu du mal à m'exprimer, et à faire de grands discours.. mais je trouve qu'elle résume plutôt bien la situation."
Alors qu'il avait baissé les yeux au sol, il a relevé le regard vers moi. "J'ai toujours eu l'impression que tu passes ton temps à me fuir."
Je lui ai adressé un mince sourire.
"Je crois savoir pourquoi..." ai-je répondu. Il m'a interrogé du regard.
"Je crois savoir pourquoi Malefoy voulait que je m'éloigne de toi."
"Ah oui ..."
"En fait, je crois qu'il a vu avant moi. Qu'il a su avant moi, ce que j'éprouverais un jour. Tout comme Ginny." j'ai dis en continuant de soutenir son regard. J'ai rajouté :
"Il savait que j'irais vers toi, mais il a tout fait pour que ça ne se produise pas."
"Pourquoi l'avoir choisi lui ?"
J'ai répondu le plus sincèrement du monde : "Parce que j'ai peur de te perdre. J'ai vécu les dernières journées de façon.. indescriptibles. C'est tellement difficile d'être loin de toi. En réalité Harry, je sais depuis le tout début ce que j'éprouve pour toi, mais tu es tellement... je trouve tellement que tu es une personne incroyable, j'étais.. je suis tellement attachée à toi.. que j'ai eu peur. Je me voilais la face.. je crois que je me rend compte de mes sentiments que depuis quelques jours."
Harry m'a regardé de longues secondes, puis il a eu un sourire, un sourire qui s'est élargit alors qu'il s'approchait de moi pour s'arrêter à un pas. Sans que je ne m'en aperçoive, ma tenue sombre redevenait rouge, progressivement. Comme le courage qui me faisait dire de tels propos à Harry.
"Pourquoi tu souris ?" je lui demandais.
"Tu l'a dit."
"J'ai dis quoi ?"
"Que tu éprouvais quelque chose pour moi. Tu viens de le dire." J'ai souris malgré moi et j'ai baissé le regard. J'ai sorti de ma poche un objet doré et animé que j'ai déposé dans la main du brun. Il a gardé sa main sur la mienne, m'attirant un peu plus vers lui. Je venais de lui rendre son vif d'or.
"C'est toi qui l'avais ?" a t-il murmuré.
"Oui... c'état la dernière chose que j'avais de toi. Je voulais la garder." je répondais comme si l'on m'avait fait boire du Véritasérum.
"Tu as vraiment cru que je sortais avec quelqu'un d'autre ?"
Il a eu un petit rire. "Oui. J'étais aveuglé.. par toi. Tu es tellement mystérieuse parfois, que j'ai du mal à te cerner."
"Désolée pour le malentendu."
Il y a eu un moment de silence durant lequel nous nous regardions sans rien dire. Je sentais quelque chose de très étrange parcourir tout mon corps alors qu'il laissait voler son vif d'or dans la pièce et qu'il me saisissait ma main libre. Je n'arrivais pas à m'arrêter de sourire. Harry a alors placé ses deux mains autour de mon visage. J'étais complètement hypnotisée par son regard.
"Suis-moi." m'a t-il dit doucement en me regardant dans le plus profond des yeux.
"D'accord" j'ai répondu dans un souffle.
Un bruit sourd nous a fait sursauté. Dean accompagné de Ginny, Seamus, Ron et Hermione venaient de rentrer, suivi de près par le reste de l'équipe de Quidditch. Il était vingt-trois heures trente. Nous avions une petite réunion à vingt-trois heures quinze dans la salle commune pour le brief. Ils avaient sans doute voulu nous laisser un peu de temps, mais malheureusement, pas assez.
Nous avons reprit contenance comme si de rien n'était, mais personne n'était dupe. Alors que je montais au dortoir avec les filles après la courte réunion, personne n'a loupé l'évidence de la situation. J'étais trop émue pour ce soir pour continuer notre conversation, mais je savais que Harry ne m'en voudrait pas, je l'ai lu dans son regard. Nous n'avions pas eu le temps de réellement nous rapprocher mais une chose était certaine, la situation était clarifiée. Et j'entendais tout mon corps se libérer, comme si enfin, le bonheur m'envahissait.
J'ai fredonné la chanson que Harry m'avait en quelque sorte dédié, alors que je grimpais les marche en colimaçons.
"Follow me."
* il s'agit en réalité d'une phrase issu du titre de Paramore, I caught myself.
** la chanson d'Harry est un tube de Muse (si vous ne connaissez pas il est temps d'aller voir le clip) le titre est Follow Me, elle est sublime.
J'espère que ce chapitre vous plaira, j'ai décidé de les rendre plus long ! Profitez-en, la suite s'annonce plutôt... hum non, je vais garder le mystère, j'aime le fait que vous ne voyez pas du tout où cela va mener. ;)
Une petite review avec vos réactions me ferait très plaisir, vos avis sont mon moteur !
A très vite !
