Notes: Bonjour, bonsoir! Voici une nouvelle aventure dans cet univers de Saint Kanon avec une petite *hum* immersion dans le monde des mers. Je vous souhaite une bonne lecture.


Septième histoire: Entre terre et mers

Kanon relisait encore pour la énième fois la lettre d'invitation de la part de Julian Solo pour Kido Saori. Toujours les mêmes phrases pompeuses remplies d'hypocrisie vantant les bienfaits que la fondation Graad apportaient aux orphelins du monde entier, les termes de condoléances dénués de sincérité et l'étalage de la grandeur impériale de l'entreprise maritime dont ce jeune homme était l'héritier, surement dans le but d'impressionner la jeune fille afin qu'elle fonde en pâmoison face à lui, et qu'un accord entre les deux fortunes fût scellé par un mariage après une soirée d'anniversaire à base de cuisine de luxe et d'alcools hors de prix... quand bien même les deux principaux concernés étaient mineurs et en pleine adolescence, mais bon, les riches ne se prennent pas la tête sur ce genre de détail...

Pas une seconde, le chevalier n'avait cru à une invitation en bonne et due forme. Les Solo dominaient le monde via le commerce maritime et les routes par delà les mers et les océans. C'était eux qui persuadaient les dirigeants de la planète au bon fonctionnement des voies aquatiques, eux également qui œuvraient pour éviter tout accident, que les marchandises livrées par cargo et les paquebots de croisière ne se croisent jamais, que l'éventualité d'une catastrophe fût évitée. Au travers de tout cela, ils contrôlaient la majeure partie de la terre. Quant à la fondation Graad, elle agissait dans le but de réduire la misère dans le monde, collaborant avec les organisations mondiales pour la paix, et faisait majoritairement prenait en charge les orphelins quelque soit la zone du globe.

Il y avait là deux puissances qui allaient se rencontrer. Deux entités qui contrôlaient la terre et ce, dans deux sphères parallèles, si l'on réfléchissait bien. La première étant à l'échelle humaine, où l'argent, la politique et les terriens agissaient. Et la seconde à l'échelle divine, dans laquelle il était question de Poséidon, le dieu des Mers et des Océans, et Athéna, déesse de la Sagesse et de la Guerre. Au travers de cette invitation remplie d'hypocrisie, le sort de la planète pouvait réellement se jouer. Quand bien même Kanon n'arrivait à lire entre la dizaine de lignes que comportait la lettre...

Dès sa réception, la veille, il avait souhaité parler au Grand Pope quant à la stratégie à adopter. Pour seule réponse, son Pépé lui dit: ''Je te fais confiance. Athéna serait en meilleure sécurité si elle été accompagnée de plusieurs chevaliers, mais vous ne devrez attaquer seulement si vous sentez notre déesse en danger. Voilà, ta première décision importante, Kanon.''

C'était bien beau, tout ça, mais que faire? L'invitation n'était adressée qu'à Saori Kido, pas à Athéna. Et un seul extra n'était autorisé pour cette réception. De ce fait, cela pourrait paraître suspect et parfaitement idiot de débarquer à dix dans une fête mondaine.

Et si cela n'était qu'une invitation des plus bêtes entre gens de la haute société, tout simplement. Et si c'était seulement ce Julian qui écrivait à Kido Saori et non Poséidon qui s'adressait à Athéna? Et si au contraire c'était un piège dans lequel une raison divine se cachait?

Kanon tapa du poing sur la table, épuisé par sa migraine qui revenait. Par chance l'hématome sur sa joue avait disparu. C'était un sacré avantage cette capacité de guérison que possédaient les chevaliers d'Athéna. Mais cela ne l'aidait en rien pour cette foutue réception à laquelle il se rendrait avec sa déesse. Fallait-il y aller qu'à deux ou avec d'autres? Il avait jusqu'à la fin de la journée pour décider et en informer Athéna...

津波

Une résidence immense proche du Cap Sounion, la propriété des Solo. Au beau milieu de toute cette foule élégamment habillée, la jeune Saori, escortée de quatre hommes et une femme avançait dans l'espoir de repérer le maitre des lieux. Kanon, fermant la marche du petit groupe espérait avoir fait les bons choix.

La veille, en discutant avec sa déesse, ils avaient estimé que la meilleure idée était de venir avec un représentant de chaque ordre des chevaliers d'Athéna, sans forcément imposer un rapport de force. Ainsi, Kanon serait là non seulement en tant que principal accompagnant de Saori, mais aussi en tant que chevalier d'Or. Deux chevaliers d'Argent: Moses de la Baleine et Shaina de l'Ophiucus en tant que femme protectrice du Sanctuaire, et Hyoga du Cygne, le Bronze, et ami d'enfance de Kido. Saga était aussi présent, officiellement comme frère de Kanon et professeur, officieusement parce qu'il avait été à l'origine du réveil de Poséidon.

Le Gémeaux espérait du plus profond de son être que cette réception se termine rapidement, sans problème idéalement. Il n'avait jamais été à l'aise dans ce genre de démonstration mondaine, et il n'osait pas imaginer l'humeur de Milo s'il l'avait choisi pour cette sortie. À ce propos, quand Kanon lui avait fait part des noms qu'il avait désignés pour cette invitation, il perçut un regard presque de soulagement de la part du Scorpion. Pourtant, ce qu'il aurait aimé sa présence, au moins pour se mettre dans un coin à critiquer à deux les attitudes assez coincées des convives.

Quant aux autres chevaliers, Shaina étant l'une des meilleures dans la classe argentée, son niveau dépassant presque ceux des hommes, elle était pressentie de suite à venir. Elle avait l'habitude de ne pas porter le masque lors de missions d'infiltration où elle devait se mêler aux autres, et dans ce cas là, son masque était totalement incongru et ne passait pas inaperçu. Elle savait se maquiller de telle sorte que personne ne pouvait imaginer son véritable visage. Rares étaient ceux qui l'avaient vue réellement. Elle même avait suggéré de prendre Seiya pour le chevalier de Bronze, mais ce dernier avait obtenu une autorisation spéciale pour se rendre au Japon pour un court séjour et revoir sa sœur, avant de revenir au Sanctuaire.

Moses, lui, était un homme imposant qui, lors de son entrainement avait affronté la nature dans ses plus cruels caprices, au prix de son œil gauche. Kanon l'avait choisi parmi les chevaliers d'Argent, justement pour ses capacités à réagir si Poséidon amorçait une attaque. Ce n'était pas à la carrure qu'on jugeait son adversaire et le Gémeaux l'eut appris d'Aldébaran du Taureau, son voisin du dessous: un mastodonte qui faisait peur au premier abord mais empli de justice et de fidélité envers le Sanctuaire.

Finalement pour les Bronze, il n'y avait que Hyoga de disponible: Shiryu était lui aussi reparti, aux Cinq Pics en Chine pour sa part, afin de rapporter les événements survenus au Sanctuaire, tels que la présentation d'Athéna à ses protecteurs et cette future rencontre avec Poséidon. Shun restait au chevet de son frère et les autres Bronze profitaient de la richesse du domaine sacré pour se renforcer. C'était Camus qui avait recommandé son disciple à Kanon. Car bien que discret, il était intelligent et pouvait se montrer prompt à agir en cas de problèmes.

Chose que le chevalier d'Or n'espérait pas arriver...

Tout en observant les gens, il remarquait les serveurs bien habillés et curieusement assez musclés. Était-ce un critère pour travailler chez les Solo? Il notait entre autres un homme à la peau mate dont la coiffure iroquoise et blanche jurait particulièrement avec sa tenue noire et blanche de barman, et le visage fermé, comme concentré sur les boissons qu'il confectionnait. Trois hommes se faufilaient çà et là au milieu de la foule amassée dans le jardin de la résidence, tenant fermement leur plateau rempli de cocktails colorés, presque autant que leurs chevelures rose, verte et châtain clair à eux on aurait dit. Des éclats de verre se firent entendre proche de la maison, et une jeune femme blonde semblait crier sur un autre serveur au teint pâle presque maladif qui allait et revenait avec un balai et une pelle pour nettoyer l'accident.

Kanon sentit le cosmos de Hyoga, s'intensifier l'espace d'une demi seconde pour retomber aussitôt. Au moment où un autre serveur, lui aussi aux cheveux verts, s'approcha du groupe pour proposer des boissons. Pourtant le chevalier d'Or ne décelait aucune hostilité devant l'étranger. Malgré tout, le plus jeune semblait nerveux, et fixait l'employé des Solo se diriger vers le bar.

« Saori-san, fit le Cygne, permettez-moi de m'éloigner un court instant.

-Tout va bien, s'inquiéta la jeune femme.

-Oui. Juste je voudrais vérifier quelque chose. Il m'a semblé voir parmi le monde une personne que j'avais connue il y a des années, mais je pense être dans l'erreur. Ce ne sera pas long.

-Nous ne bougeons pas de là, Hyoga, répondit Saori. Julian ne devrait pas tarder. À ce qu'il paraît, il avait des affaires à régler avant de venir à sa fête.

-S'il y a un problème, reviens vite, d'accord », confia le Gémeaux.

D'un signe de la tête le Bronze confirma avant de quitter le groupe à la recherche du serveur.

津波

Hyoga pourtant était sûr de lui, ce devait être lui, sans nul doute. Malgré les années, il n'y avait pas deux comme celui qui avait été le seul ami de son âge, avec qui il jouait en Sibérie. Tout ce temps passé ensemble, tous ces souvenirs qu'ils avaient créés jusqu'à ce que cet ami quitte la région sans un mot, comme si sa présence pendant près de trois ans n'avait été qu'un mirage. Et pourtant, des micro cicatrices qu'il avait sur son corps n'étaient pas dues à son entrainement, mais bien à de sacrées chutes sur la banquise à faire le fou, comme un garçon insouciant loin de sa formation de chevalier et du début de sa vie brisée par la perte de sa mère et le fait d'avoir été balloté d'orphelinats en foyer avant de se trouver d'autres amis au Japon. Il avait été sa plus longue amitié et il était pratiquement sur que c'était lui qu'il approchait.

« Isaak? Tenta-t-il

Le serveur se retourna aussitôt. Hyoga se retint de réagir, mais voyant le visage du jeune homme, il était stupéfait d'y voir un œil mort et une cicatrice qui lui barrait tout le côté gauche jusqu'au menton. Une blessure bien plus effrayante que celle de Moses... Lorsqu'il lui avait présenté son verre, il ne l'avait pas remarqué. Probablement parce que le serveur avait la tête baissée à ce moment là...

-Hyoga? C'est bien toi, alors, répondit-t-il. Ça fait longtemps.

-Oui... Je n'étais pas sûr de savoir si c'était bien toi et avec ton...

-C'est moi, oui. Et tu as l'air d'être en forme. Je suis content de te voir.

-Je me suis inquiété de ta disparition il y a trois ans. On racontait au village que tu avais été emporté par une tempête de neige.

-J'ai failli. Mais des collaborateurs de la famille Solo m'ont emmené et j'ai aussi suivi une certaine éducation, on va dire.

-Je suis content que tu sois en vie, déclara Hyoga. Mais cette cicatrice, comment...

Avant qu'il n'ait plus finir sa question, le chevalier de Bronze remarquait que Isaak ne l'écoutait plus, et tournait la tête dans une autre direction.

-Je dois retourner travailler, Hyoga. C'est une grosse réception, et je ne peux pas laisser mes collègues dans l'embarras. Peut-être qu'un autre jour on pourra discuter...

-Bien sur, ça me ferait plaisir.

-... enfin, si Athéna et ses chevaliers ne nous causent aucun ennui bien sur... »

Sans laisser le temps à Hyoga de répliquer, le serveur disparut parmi les invités et réapparut au niveau du comptoir où le barman l'aidait à charger son plateau.

L'espace d'un instant, le Cygne l'avait ressentie cette force glaciale et anormale qui émanait du corps de son ami d'enfance. Et cette phrase comme teintée d'amertume envers les protecteurs du Sanctuaire...

-Tout va bien, Hyoga? Demanda Kanon qui l'avait rejoint. Me mens pas, je l'ai senti ce cosmos, moi aussi.

-J'espère. C'était mon ami quand je m'entrainais en Sibérie. Il a parlé des chevaliers d'Athéna comme une menace...

-Mmh... On dirait que tous les serveurs ne sont pas que de simples larbins. Tiens toi sur tes gardes, si tu veux mon avis. Il faut le plus possible éviter la panique parmi les invités et surtout protéger notre déesse et mon frère.

-Compris. »

津波

Depuis le bâtiment principal de la propriété, un jeune homme élégamment vêtu d'un costume pastel laissant ressortir ses longs cheveux bleu océan sortit, Julian Solo, accompagné d'un autre homme, plus petit aux cheveux lavande ondulés. Dès lors, toute l'attention des invités se posa sur eux.

« Chers invités, merci infiniment d'être venus des quatre coins du monde pour assister à mon anniversaire. Je vous prie de m'excuser pour cette absence impardonnable pendant ces longues minutes, mais je me devais d'accueillir mon ami, qui est également une étoile montante parmi les plus grands flutistes. Voici Sorrente Meerjung. »

Tandis que les convives applaudissaient, Kanon, en retrait, en compagnie des autres chevaliers et de Saga, observait toute cette mascarade. C'était bien digne des riches de faire toute une mise en scène pour présenter une star de la musique classique en devenir. Il reprit son attention quand Saori quitta leur groupe pour s'avancer vers Solo. Elle leur avait dit de la laisser parler au propriétaire, qu'ils ne devaient surtout pas se faire remarquer. Ni Hyoga, ni lui même n'avaient parlé de ce cosmos qu'ils avaient senti chez ce Isaak. Mais d'un commun accord, les serveurs allaient être observés attentivement...

Julian se détourna d'hommes plus âgés à qui il serrait la main pour lancer un sourire franc et éblouissant à la jeune femme qui gravissait les trois marches de la terrasse.

Montrant toute l'assurance qu'elle avait acquise tout au long de sa vie et des journées passées avec son grand-père disparu, Saori se présenta face à l'héritier des Solo, telle une fille de bonne famille, consciente de son rang dans la société. Droite et impassible, ses lèvres n'esquissant qu'un sourire modéré et poli, elle se laissa baiser la main et s'inclina à son tour en guise de salutation.

-Mademoiselle Kido, fit Julian. Je suis plus que ravi de votre présence à ma fête.

-Il est tout à fait normal que je sois là, répondit-elle. Autrefois, mon grand-père et le vôtre étiez amis et votre père a eu l'occasion de traiter avec notre fondation.

-Je ne parlais pas d'affaire, mais de vous, qui rendez pâles toutes les compositions florales que j'avais fait apporter pour décorer les tables.

-Je vous remercie pour vos paroles.

-Vous avez dû faire un long voyage depuis le Japon, et si vous le permettez, sachez que rien ne me ferait plus plaisir de vous accueillir dans ma demeure. En tout bien tout honneur, évidemment. Une chambre vous sera préparée.

-Je... Je ne suis pas venue seule, en vérité et...

-Les personnes qui vous accompagnent sont également les bienvenues. Mon manoir est assez grand. Et un diner bien plus intime, avec moins d'invités serait plus adapté pour apprendre à se connaître.

-Eh bien... dans ce cas, je ne peux refuser...

-Puis-je vous proposer de venir avec moi, je souhaiterais vous montrer quelque chose qui m'est cher.

Saori hésita. Cherchant du regard ses protecteurs, elle croisa celui de Shaina assise au bar, en train de siroter un cocktail. La femme chevalier lui fit un signe de la tête. En une entente tacite, la déesse la prévenait de son écart de la foule en compagnie de Solo.

-Je vous suis, Julian, répondit-elle.

Tous deux traversèrent alors la terrasse et l'esplanade où se tenait le buffet, et s'éloignèrent des invités amassés autour des tables. Après une minute de marche, le brouhaha s'estompa, faisant place au bruit de la mer qui s'écrasait contre la falaise, quelques mètres plus bas. Le vent soufflait et soulevait autant les cheveux de Julian que ceux de Saori.

-Nous voici dans le lieu que je préfère de mes terres, fit-il. Voyez, sur votre gauche, le temple terrestre de Poséidon, au bout du Cap Sounion.

-En effet, c'est magnifique, constata la jeune femme. Vous avez l'eau à perte de vue, on se croirait dans un rêve.

-Cela pourrait être réel et à vous si vous le souhaitez, Saori.

-Que voulez-vous dire?

-Que ma propriété pourrait être vôtre si vous m'épousiez.

Elle recula d'un pas, surprise de cette demande. Elle était consciente depuis son plus jeune âge de son importance, du nom qu'elle avait hérité de son grand-père et de sa fortune. Mais son destin était tout autre. Elle avait découvert cette mission de protéger la terre du mal qui pouvait la ronger, elle était à la tête de chevaliers qui mettraient leurs poings et leurs pieds au péril de leurs vies pour la paix. Jamais l'idée ne lui était venue de même songer à se marier un jour. L'amour qui sommeillait en elle était pour cette planète, uniquement. Aucun être ne pouvait s'accaparer l'exclusivité.

-Julian je...

-Imaginez, nous pourrions régner autant sur terre que sur les mers. Le monde nous appartiendrait et...

-Le monde n'appartient à personne, coupa-t-elle. La terre accueille chaque être, qu'il soit humain, animal, ou même végétal. Vouloir le diriger c'est briser la paix si fragile qui le maintient depuis toujours.

-Je ne voulais pas vous offenser, Saori. C'était une manière maladroite de me déclarer. Je sais que c'est inattendu, que nous nous sommes rencontrés que trop peu de fois depuis notre enfance. Cependant, j'ai malgré tout cette impression que l'on se connait depuis toujours. Depuis les temps mythologiques si j'ose dire.

La jeune fille soutenait le regard azur de Solo. Ces paroles qui pouvaient faire rêver ne l'atteignaient pas. Au contraire, elles attisaient toujours plus de méfiance. À tel point que petite à petit, une aura dorée l'enveloppait.

-Je vous prierai d'en venir à vos intentions réelles, Julian... ou devrais-je vous nommer autrement...

-Je ne cherche pas l'hostilité, très chère. Ce sont vos intentions à vous qui m'ont interpelées dès lors qu'un de vos protecteurs m'a réveillé voilà quatorze ans maintenant, bien avant votre retour sur terre.

-Je comprends alors la raison pour laquelle vous souhaitez que l'on reste pour la nuit dans votre demeure. Moi non plus, je ne souhaite pas mettre la vie d'innocents en péril. Et pourtant, j'ai perçu des cosmos hostiles par moments, parmi vos serveurs...

-Mes Marinas s'en prendront à vos chevaliers seulement s'ils attaquent en premier, Ô Athéna.

Cette dernière ressentit une puissance comme écrasante émaner de Julian, une aura divine aussi terrible que la sienne, celle de Poséidon. Sans montrer un signe de faiblesse, soutenant le regard bleu et la lumière argentée autour du jeune homme, elle restait face à lui, ses yeux l'observant sans le défier.

-Je vous le répète, Julian... ou Poséidon, jamais mes chevaliers n'ont voulu vous provoquer. Votre réveil n'est dû qu'à un malheureux geste d'un habitant du Sanctuaire, et non une volonté d'un de mes protecteurs. Je vous garantis que jamais je n'aurai pensé à vous déclarer la guerre, ce serait une perte inutile entre nos deux armées. Mon retour sur terre, vous en savez la raison: le Seigneur Hadès est lui aussi sur le point de se réveiller afin de reprendre à nouveau ce conflit qui ne concerne que nous deux uniquement. L'implication d'autres dieux de l'Olympe tels que vous ou même Arès, jadis, n'est qu'un triste enchainement d'événements.

-Si tels sont vos arguments, jeune Athéna, j'insiste alors sur le fait de rester avec moi cette nuit avec vos chevaliers. Partir de suite serait une déclaration de guerre directe.

La jeune fille, sans calmer son cosmos, déterminée à tout pour éviter les combats, soutenait le regard et l'impressionnante aura argentée autour de Julian. En un infime instant, elle se sentait d'un coup différente. Cette force qui la soulevait, ces paroles qu'elle avait prononcées et qui provenaient du plus profond de son être la faisaient changer petit à petit. Elle grandissait, elle n'était plus désormais Kido Saori, mais la déesse protectrice de la Terre, Athéna. Elle se souciait des habitants de cette planète et de ses chevaliers. Et pour rien au monde, elle ne voudrait mettre en péril la paix. Comme à chaque Guerre Sainte face à Hadès, trop de gens perdaient la vie. Un combat contre un autre dieu, à cause d'une maladresse serait du gâchis. Pour elle et pour l'autre camp.

-Dans ce cas, si l'idée d'être hébergés dans votre manoir avec mes chevaliers permettrait d'éviter un affrontement, j'accepte. Quant à votre proposition de mariage, ce n'est pas envisageable.

-Nos hôtes sont encore jeunes, répondit Poséidon en proposant son coude pour que la jeune fille s'y accroche. Si la paix est maintenue et que votre armée revienne victorieuse face à Hadès, il sera temps d'en reparler...

-J'en doute », fit Athéna en retournant vers le manoir en compagnie du jeune homme.

津波

C'était la deuxième fois dans sa vie que Kanon avait l'occasion de dormir dans un lit des plus confortables, mais encore là, il n'arrivait pas à trouver le sommeil. La première fois c'était lorsqu'il s'était rendu au Japon chez Kido Mitsumasa, pour rencontrer la jeune Saori, et il n'avait pu dormir à cause de Milo qui l'avait littéralement martyrisé à force de bouger. Ce soir là, il servait de peluche à son grand frère, assoupi et serein. Malgré le second lit dans leur chambre, ils avaient cette habitude de dormir ensemble, même à leur âge. Ils étaient proches, et jamais le chevalier ne rejetterait Saga. En vérité c'était le Gémeaux qui avait besoin de sa présence après cette journée insensée au cours de laquelle, il dut supporter des mondanités insupportables, et en même temps rester sur ses gardes dès qu'il croisait un serveur à la solde de Solo. Sans compter cette explosion de cosmos qui s'était produite en plein milieu de l'après-midi, comme arrêtant le temps. Autant lui et les autres chevaliers que les employés du manoir étaient alors prêts à intervenir, à se précipiter au bord de la falaise du Cap Sounion et puis plus rien. Sa déesse et Solo revenaient au creux de la réception comme si de rien n'était, et même la jeune fille lui avait adressé à lui, Kanon, un regard rassurant. Sur le moment c'était à n'y rien comprendre.

Il y eut ensuite ce diner incongru, quelques heures plus tôt, après la fin de la garden party dans une salle à manger qui devait faire la longueur du Palais de Pépé Shion, en partant du perron jusqu'aux escaliers menant au temple d'Athéna, sans exagérer. Mais la baie vitrée qui donnait sur les jardins et la mer apportait cette impression de grandeur. Cette fois ci, seuls les chevaliers, Solo, Athéna et les larbins étaient présents. Larbins qui s'étaient révélés être les Généraux de Poséidon, les sept protecteurs les plus puissants du dieu des océans. La jeune femme blonde qui aidait au service dans la journée faisait également partie de cette armée.

Le repas se fit dans une ambiance lourde, en silence. Seul Solo expliqua qu'ils partiraient tous ensemble le lendemain, avant l'aube, découvrir le sanctuaire sous-marin, que ce serait un acte diplomatique entre les deux divinités, scellant un pacte de non agression entre eux.

Kanon était soulagé de cette idée. L'urne des Gémeaux qui reposait dans l'angle de sa chambre ne lui serait probablement pas utile, mais il valait mieux ne pas baisser la garde. Il avait ressenti des éclats de cosmos hostiles par moment, provenant des Marinas – ce terme employé pour désigner l'armée de Poséidon. Malgré tout, il priait pour que tout aille bien le lendemain.

En tournant la tête vers la fenêtre ouverte, il sentait l'air frais entrer dans la pièce, et ce parfum iodé qu'il aimait tant et l'apaisait. Il devait dormir un peu pour être en forme, dans quelques heures, qu'importe ce qu'il se passerait. Il remonta le drap sur le corps nu de son frère qui dormait comme un loir, son souffle régulier et tranquille, et sourit. Le Gémeaux protègerait son grand frère innocent qui avait du s'excuser pour sa maladresse de jeunesse. Il ferma les yeux, tentant de s'aligner avec la respiration de Saga, afin de s'abandonner au sommeil. Ce fut un échec provoqué par des cris effroyables dans la nuit.

津波

Quand bien même sa grande taille n'était pas un problème, Moses semblait avancer dans ce manoir tel un éléphant dans un magasin de porcelaine. Tout ce luxe l'incommodait, tellement il n'était pas habitué. C'était d'ailleurs la première fois qu'il entrait dans un manoir, qu'il goutait de la cuisine fine, et qu'il était assis dans un lit aussi moelleux. Avant de se coucher, il s'était lavé dans cette salle de bain immense comme trois chambres de son dortoir au Sanctuaire et aussi lumineuse que le soleil en plein jour. Il avait nettoyé consciencieusement chaque partie de son corps, de peur de salir le linge, et même le marbre de la douche.

Tout le début de sa vie, il l'avait vécu dans des conditions modestes, même pauvres et dans la quasi solitude. Il avait obtenu seul son armure de la Baleine, s'était formé tout seul aussi, dans une terre reculée de Nouvelle Zélande. Quand il était encore un petit garçon, il avait perdu sa mère, son petit frère et avait échoué dans le sauvetage de son père qui était également celui qui l'entrainait pour être chevalier. Un séisme d'une rare violence avait secoué la région, et des chutes de pierres s'étaient abattues en conséquence sur leur maison. Il y avait laissé également son œil gauche et souffrait encore de cette blessure, ravivant de cruels souvenirs de son enfance. Lorsqu'il fut appelé au Sanctuaire en tant que protecteur d'Athéna, d'autres chevaliers d'Argent, tels que les dénommés Astérion ou Algol ou bien Babel vinrent à sa rencontre pour le saluer. Malgré sa grande taille, cette cicatrice hideuse, il ne fut pas mis à l'écart. Il avait mis des mois à tolérer dans un premier temps leur présence, et puis à les apprécier petit à petit. Ce groupe de chevaliers d'Argent était solidaire, dirigé plus ou moins par Marin et Shaina, Astérion aussi, mais chacun avait sa place. Même lui, Moses, le grand borgne solitaire qui avait survécu à une terrible catastrophe naturelle.

Lorsqu'on annonça qui représenterait le Sanctuaire au cours de cette visite chez Julian Solo, il était persuadé que c'était Astérion qui irait. Pas lui. Et pourtant, Kanon l'avait désigné. Non pas parce qu'il était protégé par la constellation d'un animal marin, mais pour sa robustesse, et pour sa résistance face à la nature. Depuis deux jours, il se sentait fier d'appartenir à cette armée. Afin d'honorer Athéna, de protéger la terre, il aurait un comportement irréprochable et passerait au delà de ces douleurs dans son œil aveugle qui le lançaient parfois. Le syndrome du membre fantôme, lui avait-on dit un jour. Cette sensation bizarre que la partie du corps qu'on avait perdue était toujours là. De temps en temps il fermait son œil droit, mais il ne voyait rien et rien ne se passait du côté gauche, pas même un battement de paupière...

Alors pourquoi avait-il si mal là?

Moses se redressa dans le lit, se sortant de sa somnolence. Il guetta le silence, mais il était seul dans sa chambre. La fenêtre était fermée, les rideaux également. Pourtant quelque chose n'allait pas. Une boule se durcissait dans l'estomac du chevalier, un malaise qu'il connaissait pour l'avoir vécu. Cette impression de tituber alors qu'il n'était pas debout, ces mouvements du sol irréguliers qui partaient dans tous les sens et dont l'intensité augmentait petit à petit... un tremblement de terre! Le chevalier en avait vécu des centaines et des milliers en Nouvelle Zélande, là où l'activité sismique était régulière et importante. Par réflexe, il chercha un endroit où s'abriter. Le bureau en face du lit était bien trop petit pour sa carrure. La porte! Se placer dans son entrebâillement était sûr, et puis, il pourrait aider les autres habitants du manoir après les secousses. Sans réfléchir plus longtemps, il se plaça à l'entrée de sa chambre, et savait son armure de la Baleine proche. Il attendit encore un peu et d'un coup le sol ne bougeait plus, comme une machine qui avait cessé de fonctionner. C'était étrange, comme s'il avait fait un rêve, comme s'il avait été victime d'une illusion. Solo avait dit qu'ils ne tenteraient rien face à eux mais si Athéna était en danger? Moses avança à tâtons dans le couloir, au moins pour s'assurer que rien ne se passait du côté de sa déesse, il ferait demi tour juste après. Mais au bout de deux pas, une arme invisible le frappa dans l'estomac et le grand garçon tomba lourdement sur le parquet...

津波

La porte de sa chambre fermée, Shaina était assise devant le miroir du meuble à côté de son lit pour cette nuit. Elle retirait enfin tout le maquillage utilisé pour révéler son vrai visage. Pour la réception chez ce Solo, elle avait choisi une apparence à peu près similaire à ce qu'elle était vraiment: une jeune adulte, européenne. Elle quitta ces lentilles noires, pour retrouver ses yeux vert émeraude, assortis à sa chevelure châtain aux reflets pomme verte qui eux aussi étaient cachés sous une perruque couleur noisette.

Il n'y avait que Athéna et les autres femmes chevaliers qui connaissaient Shaina telle qu'elle l'était en vérité. Mais, parce qu'elle était souvent envoyée en mission en dehors du Sanctuaire, elle avait dû redoubler d'imagination pour évoluer sans son masque parmi les gens dits normaux et passer inaperçue quand il fallait espionner. Même les hommes qui l'accompagnaient dans ces travaux pouvaient d'un moment à l'autre découvrir ses yeux bleu la veille et verts le lendemain, tout comme ses cheveux coiffés en chignon strict et puis en longue coupe blond platine juste après. Dans ce domaine où les femmes chevaliers étaient mises à l'écart malgré leur force, elle avait dû être inventive et se faire une place. Son amie Marin effectuait soit des missions dans l'ombre d'observation ou d'espionnage, soit elle s'occupait des jeunes recrues. Shaina, elle, rêvait d'être considérée comme l'égale des chevaliers hommes. Pour le moment, à cause de cette loi du masque, elle n'avait que cette méthode. Et puis quelqu'un l'avait déjà vue sous son vrai jour. Sans faire exprès, mais elle croyait vraiment à ces châtiments qu'elle devait infliger à celui qui l'avait découverte. Seiya.

Ce Japonais devenu chevalier Bronze de Pégase à la place de son élève à elle, Cassios, n'était pas méchant, mais terriblement doué. Il progressait très vite, et avait su faire sa place dans le Sanctuaire malgré les mauvaises langues, les soldats bêtes et racistes, il s'était fait des amis, même au sein des Chevaliers d'Or et se sentait en Grèce comme chez lui. Il s'était excusé après l'avoir vue sans son masque, comme un garçonnet qui avait fait une grosse bêtise. Et elle n'avait rien dit à l'époque. Aujourd'hui, elle évitait de rester proche de Seiya. Tiraillée par ce qu'elle devrait faire. Elle ne pouvait le tuer, malgré cet affront de l'avoir vue sous son vrai jour. Surtout pas à l'aube de la grande Guerre Sainte qui menaçait d'éclater. En même temps, elle ne pouvait pas... non, ce n'était pas cela qu'elle ressentait. Elle n'était pas amoureuse de lui. Pégase était un peu plus jeune qu'elle, il était un gamin à ses yeux. Malgré tout, elle n'arrivait pas à le détester. Elle n'arrivait pas à haïr son regard pétillant quand il courrait dans le domaine, ses éclats de rire qui résonnaient parmi les colonnes quand elle le surprenait à discuter avec le chevalier du Lion... elle s'était même félicitée d'avoir son masque le jour du combat pour l'armure de Bronze, afin de cacher son admiration pour ce cosmos puissant qui dégageait du Japonais. Elle s'en était voulue de n'avoir pas soutenu Cassios pendant quelques secondes. Mais Seiya était impressionnant... non le terme était trop fort mais quand même... elle n'arrivait pas à se décider. Heureusement ce jour là, il n'y avait eu aucun témoin, donc pas de pression sur ses épaules et elle prendrait le temps de résoudre ce dilemme qui la rongeait depuis tout ce temps. Si seulement Seiya n'occupait pas ses pensées comme, là, face à son reflet et fatiguée de cette journée.

Shaina avait fini de se démaquiller. Elle se leva du petit tabouret et s'étira.

L'on frappa à la porte. Un domestique de Solo à cette heure avancée de la nuit? Elle mit un haut à capuche qui recouvrait son visage de moitié et alla ouvrir.

En voyant qui était dans le couloir face à elle, elle ne put s'empêcher de crier.

« Se... Seiya?

Le chevalier Pégase se tenait devant elle, vêtu d'une tenue qu'il affectionnait quand il était en civil: un tshirt rouge et un jean bleu, avec des baskets blanches aux pieds. Elle pouvait distinguer chaque détail grâce aux veilleuses dans le couloir, et c'était bien lui, c'était bien ses grands yeux sombres constellés d'étoiles comme deux minuscules univers et son sourire franc et bienveillant.

-Que... chuchota-t-elle, qu'est-ce que tu fais là?

-Je suis venu voir comment ça se passait chez ce Solo, répondit-il.

-Mais... t'es fou! Tu aurais pu te faire attraper!

-J'ai fait attention, ne t'en fais pas.

-Mais tu n'étais pas au Japon pour voir ta sœur?

-Si, je l'ai vue, ma sœur. Maintenant je suis là pour toi.

Shaina se sentit troublée. Seiya était là devant elle, lui souriant alors que quelques minutes auparavant, elle pensait à lui. Impossible, elle devait rêver... Et pourtant, elle se laissait aller quand le jeune homme s'avança vers elle et la prit dans ses bras.

-Seiya...

-Je ne pensais qu'à toi au Japon... J'en oubliais ma sœur...

-Seiya, dis-moi... comment s'appelle-t-elle ta... »

La jeune femme n'eut pas le temps de finir sa phrase quand elle sentit un étau la compresser petit à petit, la faisant crier. Puis une douleur dans l'estomac et plus rien...

津波

La chambre était grandement éclairée malgré une heure avancée de la nuit, mais les deux jeunes hommes qui y logeaient s'en fichaient presque. Tout comme le fait qu'ils devraient être prêts avant le lever du jour.

Hyoga et Isaak tentaient de rattraper plus de trois ans de séparation et parlaient à tout rompre, oubliant tout autour d'eux, même leurs rangs respectifs de chevalier d'Athéna et de Marina de Poséidon.

Le premier lui avait raconté les grandes lignes de la suite de son entrainement, des enseignements sages et sévères de Camus du Verseau, et des exercices difficiles et éprouvants que lui imposait son maitre Crystal. De cette promesse qu'un jour, lorsqu'il serait devenu un chevalier du Cygne accompli et sûr de lui, lorsque la paix serait enfin établie sur terre, il serait autorisé à remonter le corps de sa mère à la surface de ce bras de mer de l'Océan Arctique et qu'il pourrait lui offrir une tombe décente, dans les terres éternellement enneigées de Sibérie.

Le second lui parla de sa disparition soudaine du village. Qu'il avait été emporté par une tempête alors que son traineau s'était cassé sur le chemin du retour et qu'il avait cru sa vie s'arrêter quand son visage percuta un glacier éternel et la pointe d'une stalactite qui lui perça le visage du côté gauche. Il s'était réveillé dans un centre hospitalier russe dans lequel il fut soigné qui appartenait à la famille Solo qui l'eut recueilli ensuite. Les années passant, il avait suivi une éducation correcte, en compagnie des autres futurs Marinas, et son cosmos s'était développé, froid, comme celui de Hyoga. Mais Isaak décida de rester dans l'armée de Poséidon, dans laquelle il se sentait bien et s'était fait d'autres amis. Et surtout il adhérait à ces idéaux de paix et de tranquillité dans les fonds marins. Protéger les océans était désormais sa mission, et plus particulièrement l'Océan Arctique.

« … pourquoi as-tu menacé de ton cosmos lors de la réception, dans ce cas, demanda Hyoga.

-Ce n'était que des signaux d'alerte. Un code entre nous parce qu'on avait repéré dans la foule les chevaliers d'Athéna. On ne comptait pas vous attaquer. Sauf si vous allez attenter à la vie de notre maitre.

-On avait les mêmes consignes. Notre déesse venait en paix, et nous sommes ici pour représenter tous les chevaliers de notre Sanctuaire, rien de plus.

-Et le jumeau du chevalier d'Or? C'est vraiment lui qui aurait réveillé l'esprit de Poséidon?

-Oui. Sans faire exprès en plus. Un peu comme nous, quand on avait cassé le pied qui retenait l'étagère de Camus dans l'isba et qui s'était effondrée avec tous les livres étalés partout...

-Je m'en rappelle! Comment on s'était fait engueuler à l'époque! Je crois que j'ai jamais autant couru dans la neige pour rentrer au village, fit Isaak le sourire aux lèvres. Mais du coup, il est pas méchant, cet homme?

-C'est juste un prof du Sanctuaire spécialisé dans la théorie. Même s'il avait prétendu à devenir chevalier lui aussi, il s'est dirigé vers l'enseignement.

-Donc, en effet, il n'y aurait aucune menace de guerre entre nos deux camps...

-Non, confirma Hyoga. Isaak... si tout se passe bien, on pourrait redevenir amis, comme avant?

-Je sais que vous aurez une guerre à mener bientôt et... on a grandi, mais si on se revoit un jour, il n'y aura aucune raison pour qu'on s'entretue.

Le blond regardait son ami d'enfance, heureux de l'avoir retrouvé. Il s'était passé beaucoup de choses autant pour l'un que pour l'autre et une nuit ne saurait rattraper le temps perdu. Mais une amitié pouvait recommencer entre eux, sur de nouvelles bases.

Un cri dans le couloir, un peu plus loin brisa ce doux silence qui s'était installé.

-Hyoga, tu as entendu?

-Oui... Comme une voix féminine... Saori-san...?

Les deux garçons bondirent de leurs lits et se précipitèrent dans le couloir, tout comme d'autres l'avaient fait en même temps qu'eux, dont Kanon, et les Marinas, tous en tenue de nuit. Au bout, le flutiste arriva, suivi de Solo et de Saori saine et sauve. Par contre, la masse au sol... Moses était allongé, inconscient. Hyoga s'avança et sentit son pouls. La jeune déesse s'accroupit à l'entrée d'une chambre.

-Shaina-san! S'écria-t-elle. Elle est vivante mais... Thétis-san, fit-elle en s'adressant à la Marina blonde qui était présente aussi. Veuillez entrer dans la chambre et me donner son masque. C'est important pour une femme chevalier et...

En quelques secondes, Shaina retrouva son visage métallique neutre.

-Qu'est-ce qui s'est passé, demanda Julian.

-Nous l'ignorons, Monsieur, répondit l'autre Marina aux cheveux verts qui arborait un regard doré. Mais seuls deux chevaliers d'Athéna ont été attaqués et... Je suis sorti de ma chambre après avoir entendu des cris.

-J'ai eu le même réflexe que Bud, confirma Isaak. Hyoga peut en attester, nous étions en train de discuter quand cela s'est passé.

Protégeant la porte de sa chambre dans laquelle Saga était encore, Kanon regardait le comportement de chacun des Marinas. Le flutiste avait parait-il sa chambre dans une autre aile du manoir, et était arrivé en même temps que Solo et Athéna. Isaak était avec Hyoga et le Cygne ne manifestait aucune appréhension par rapport à son ami d'enfance. La blonde non plus ne semblait pas dangereuse, si sa déesse à lui l'autorisait à veiller sur Shaina. Ce Bud, droit comme un piquet dégageait un cosmos puissant, mais sans la moindre hostilité. Quant aux deux en pyjama, celui aux cheveux roses et tenant une énorme peluche d'abeille dans ses bras, il n'était pas sur ses gardes du tout, et dormait encore à moitié. L'autre aux longs cheveux châtains avait le regard perdu, comme pour essayer de comprendre la situation. Et le grand bronzé à la crête blanche et au visage fermé constatait la scène sans un mot. Comme tout le monde en somme...

Le Gémeaux quitta le pas de la porte de sa chambre pour examiner le corps de Moses. Qu'est-ce qui avait bien pu terrasser ce grand gaillard? Heureusement il sentait parfaitement sa respiration régulière. Lui aussi, il allait devoir se reposer dans son lit. Parce qu'il n'était pas certain que Solo change ses plans pour dans quelques heures. Seulement il ne se sentait pas de transporter tout seul le chevalier de la Baleine.

Alors qu'il allait demander de l'aide au premier Marina qui réagirait, Kanon sentit un léger courant d'air le frôler jusque dans le dos, rapide, et partant en direction de sa chambre, celle qu'il partageait avec son frère. Sans plus réfléchir, il s'y rendit et attrapa l'ombre qui se tenait au dessus du lit, au dessus de Saga qui se réveillait. Malgré l'obscurité de la pièce, il décocha sans trop réfléchir un coup de poing dans ce qui devait être un visage humain et traina l'être hostile dans le couloir éclairé par les lumières au plafond.

-Kanon, fit Saori le regard peu rassuré. Qu'est-ce qui s'est passé? On t'a vu disparaître d'un coup et...

Le Gémeaux revint en tenant un petit homme pâle et recourbé sur lui même, un peu sonné.

-J'ai trouvé ça qui s'apprêtait à faire du mal à mon frère dans notre propre chambre, déclara-t-il en contenant du mieux la colère qui montait en lui. Monsieur Solo, vous le connaissez?

-... Kaasa, souffla Bud.

-En effet, confirma Julian, il s'agit de Kaasa des Lyumnades, le Général représentant l'Océan Antarctique.

-Il n'était pas au diner avec nous ce soir, vous nous aviez dit, demanda Saori.

-Oui, répondit Thétis en sortant de la chambre de Shaina. Il s'était fait porter souffrant, en prétextant un coup de chaleur à la réception.

-Il n'avait pas l'air malade quand il a tenté de frapper mon frère si vous voulez mon avis, répliqua Kanon. D'autant que j'imagine que ce n'est pas non plus à cause d'un fantôme que Shaina et Moses sont tombés. Vous prétendez vouloir la paix entre nos deux Sanctuaires mais malgré ces belles paroles, vous tenez à l'écart la majorité de vos hommes pour endormir notre méfiance, vous emmenez notre déesse de l'autre côté de la baraque pour nous assurer qu'elle court aucun danger, et en plein milieu de la nuit, vous sortez le gars qui ressemble à n'importe qui pour nous éliminer un par un? C'est ça, votre accord de paix, Poséidon?

-Kanon! Ça suffit, s'écria Saori.

-Il était prêt à buter mon frère! Un innocent!

-Calme-toi, Gémeaux, intervint Bud. Aucun de nous n'était au courant des agissements de Kaasa. Au nom de notre dieu, je ne te permets pas de nous insulter de la sorte. Nous voulons la paix et...

-Ta colère est justifiée, chevalier, coupa Julian. Kaasa est, je l'admets, un mauvais élément de mon armée. J'ai voulu lui donner sa chance, quand les employés du groupe Solo l'ont recueilli et lorsque j'ai ressenti un cosmos important en lui. Cependant, il ne s'est jamais caché du vice et de la fourberie qui le caractérisaient. Malgré ce corps maladif que vous pouvez voir, il sait lire dans le cœur des gens pour en déceler leurs plus grandes faiblesses et les retourner contre eux. Toute mon armée, même Bud qui, en tant que Dragon des Mers, est le Général en chef, m'a mis au courant du danger que pouvait apporter Kaasa, mais comme nous aspirons à une paix éternelle, je ne pouvais me douter qu'il allait vous attaquer directement et de manière aussi cruelle. Athéna, Kanon, je vous prie d'accepter toutes mes excuses pour l'idiotie de ce Général. Enfin... J'ignore si cela apaisera votre colère, mais dès demain, il sera banni dans un coin reculé du Sanctuaire Marin.

-Veuillez m'excuser, Julian, dit le Marina aux longs cheveux châtains, mais j'entends l'alarme de mon réveil sonner dans ma chambre. Il me semblerait que le départ vers les fonds marins soit pour bientôt et...

-Tu as raison, Baian. Cette nuit a été trop courte pour tout le monde, mais nous devrions nous préparer sans plus attendre. Bud, puis-je te charger de la surveillance de Kaasa? Des soldats viendront t'assister très rapidement.

-Bien sur.

-Kanon, je te présente mes excuses pour la tentative d'agression sur ton frère Saga. Cette attaque sur un homme qui n'est pas un chevalier n'est pas pardonnable, je l'admets. Jamais je ne l'aurais autorisé, même en temps de guerre.

Le chevalier le regarda droit dans les yeux sans un mot. Sa colère avait du mal à redescendre, mais il devait faire un effort. Au moins pour Saga, au moins pour rassurer son grand frère.

-Si nous devons aller dans votre domaine sous peu, Shaina et Moses auront besoin d'aide, déclara-t-il.

-On va s'occuper d'eux. Krishna, le Général de l'Océan Indien ne va pas tarder à revenir des cuisines.

-Qui donc?

Le grand bronzé qui s'occupait du bar au cours de la réception de la veille arriva avec un plateau où deux récipients fumants étaient posés.

-Monsieur Julian, fit ce dernier, voici les infusions pour les chevaliers d'Argent.

-Je te remercie. Dès qu'ils seront réveillés, tu partiras avec le groupe d'Athéna. On se retrouve à la porte du souterrain.

-Bien, Monsieur. »

津波

Un peu plus d'une heure après, le groupe composé de la délégation d'Athéna et de Poséidon et ses Généraux franchit une porte cachée dans le manoir de la famille Solo qui menait vers un couloir au début composé de béton, des murs jusqu'au sol. Il n'y avait aucune source d'électricité et la marche se fit à la lumière de plusieurs bougies portées à bout de bras.

À la tête de ce cortège, Bud, le Dragon des Mers, dirigeait un petit homme à l'apparence maladive. Ce Kaasa qui avait terrassé Shaina, en prenant la forme de celui qu'elle portait secrètement dans son cœur, Seiya. Il avait fouillé dans son esprit, pour dénicher la chose la plus chère et la plus cachée, cet attachement pour le chevalier Pégase. Il l'avait violée, tout simplement. La jeune femme se sentait souillée, d'avoir pu se laisser tromper ainsi, d'avoir permis un inconnu découvrir son secret et surtout de s'en être servi contre elle. Elle se sentait si honteuse, surtout d'avoir menti à sa déesse à son réveil. Elle avait prétendu ne plus se souvenir mais elle se rappelait des moindres détails. Tout comme de cet accès de lucidité, alors que le Marina la serrait contre elle, si fort qu'elle en criait de douleur. Chaque fois qu'elle avait une courte discussion avec Seiya, celui-ci parlait tout le temps de sa sœur, et jamais il ne manquait de l'appeler par son prénom, Seika-nee-chan, avec des termes d'affection en japonais. Toujours dans sa langue natale à lui. Jamais il n'avait parlé d'elle autrement. Si seulement elle avait pu s'en apercevoir plus tôt... Cela n'aurait peut-être rien changé au sort de cet odieux personnage. Il était banni définitivement de l'ordre des Marinas, pour agression et prise d'initiative dangereuse. Soit disant, voulait-il tester la force des chevaliers d'Athéna, cependant aucun Général, ni même Poséidon ne le crurent. En rentrant au Sanctuaire, elle craignait de retrouver Seiya, qui lui manquait pourtant. Mais cette intrusion dans son cœur ne l'avait pas laissée indemne...

L'on passa du béton à une cavité en terre et au sol, des planches en bois. Et une forte odeur de vase et d'algues mélangés agressèrent les narines des chevaliers. Moses ne se sentait pas bien, comme au bord de la nausée. Sa grande taille l'obligeait à se courber un peu pour marcher, et les parois étaient trop rapprochées. La fatigue et le choc dus à l'attaque surprise de Kaasa n'amélioraient en rien son état et son esprit pouvait lui jouer des tours. Cependant, il ne pouvait s'arrêter en plein milieu du chemin. Devant lui, le Marina aux cheveux roses tenait une torche, et derrière, il y avait Hyoga et d'autres, dont le flutiste qui fermait la marche. Tous les Généraux, sauf Kaasa, portaient leurs armures, leurs écailles comme on les qualifiait dans l'armée de Poséidon. Le dieu lui même avait sa protection et son trident en main, derrière Bud, et Athéna à sa suite, était vêtue d'une longue robe blanche, son sceptre éclairant aussi le passage d'une douce lueur. L'on avait conseillé à Hyoga, Shaina, Kanon et lui même de revêtir leurs armures, et Saga ne devait en aucun cas quitter son frère. La route était inclinée en une pente douce et ils allaient bientôt franchir la frontière qui séparait le sous sol du manoir Solo du sanctuaire marin ainsi que la barrière d'énergie qui protégeait les deux zones. Cela ne dura qu'un instant, une demi seconde à peine, mais Moses sentit un choc dans la poitrine. Comme une secousse, comme ce traumatisme de son enfance que Kaasa avait fait remonter dans son esprit. Cette peur enfouie des séismes et la disparition de sa famille sous ses yeux de petit garçon qu'il avait réussi à maitriser pour devenir chevalier de la Baleine. Son œil mort semblait pulser contre son visage, et une migraine l'envahit. Il devait se montrer courageux, ne pas flancher, être ce grand chevalier qu'il avait réussi à devenir. Tout irait bien, dès lors que cet ancien Marina serait enfermé et que lui, Moses, remonterait à la surface retrouver ses amis argentés au Sanctuaire.

Kanon aussi avait ressenti le passage entre le manoir et l'arrivée sur les véritables terres de Poséidon. Il ne se rappelait plus, quatorze ans auparavant que le choc fut aussi violent, sous les prisons du Cap Sounion. Ici, il pouvait admettre qu'il était déstabilisé et avait failli tomber sur Baian derrière lui, Saga semblait secoué également par la transition entre les deux mondes et avait perdu l'équilibre.

« Tout va bien derrière, demanda Poséidon. Nous entrons dans le Sanctuaire Marin.

Le bout du tunnel arriva enfin, et les jumeaux, comme par le passé, redécouvraient ce monde incroyable. Au dessus d'eux, le ciel d'un bleu marine avec ces volutes blanches qui dansaient. La surface de l'eau. Ce que trouvait Kanon encore plus impressionnant était ces hauts piliers qui se dressaient vers la terre, comme s'ils s'élevaient encore plus loin dans le ciel. Et en face, le temple de Poséidon, majestueux, presque plus imposant que le Palais du Grand Pope et le temple d'Athéna mis côte à côte. Il ignorait en quelle matière étaient construits les bâtiments, mais ce blanc tacheté de reflets orange pâle qui bougeaient au fil du courant de l'eau apportait un côté féérique à l'architecture. Au dessus de leurs têtes, comme s'ils suivaient des routes bien définies, des poissons, des crustacés et d'autres créatures nageaient en toute quiétude dans ce monde quasi silencieux. Il n'y faisait ni chaud ni froid, et l'on percevait à peine l'humidité. Chose tellement étrange quand l'on savait qu'on était sous l'eau... Il y a quatorze ans, Kanon n'avait vu que l'intérieur du temple, ce trône imposant, et la démesure des bâtiments. Il s'en rappelait encore maintenant. Mais l'extérieur était encore plus irréel. Son regard se posait sur chaque détail, les routes bien dessinées au sol, sur lequel le sable fin dansait au fur et à mesure des pas, et au bord, de part et d'autres, des limites formées par des coraux et d'impressionnants coquillages desquels il distinguait de minuscules crabes en sortir pour se cacher vite dans une cavité plus proche. C'était presque s'il avait envie de quitter le groupe qui avançait vers le temple principal, pour observer cette nature inhabituelle. Il aimait la mer, s'y baignait dedans et là, il en touchait le fond et s'y sentait bien. Comme si cette colère furieuse envers Kaasa pour avoir tenté d'agresser son frère se calmait progressivement. Jamais elle ne disparaitrait mais son esprit était apaisé.

À propos du Général déchu, de grands soldats de la taille de Moses à peu près, tenant des lances pointues et coiffés d'un casque avec des ailes de poisson sur les côtés l'embarquèrent loin. Le petit homme au teint blafard ne protestait pas, comme s'il avait été drogué.

-Chevaliers, fit Athéna, je me rends avec Poséidon dans son temple pour sceller la paix entre nous. Je reviens vite.

-On peut vous proposer, en attendant une visite de notre Sanctuaire, suggéra Sorrente, le flutiste.

Le groupe approuva, Kanon le premier, fasciné par tout ce qu'il voyait, au dessus de lui, à ses pieds, et tout autour.

-C'est beau, n'est-ce pas, dit Bud qui s'était approché du Gémeaux, tandis que Saga marchait un peu plus en avant.

-C'est très beau. Et incroyable d'imaginer qu'on est sous la mer...

-J'ai eu cette même impression à mon arrivée ici. Mais tu devrais comprendre pourquoi Poséidon ne souhaite pas prendre part à la guerre qui oppose Athéna à Hadès. Cela impliquerait ce domaine et en détruirait tout. Autant les paysages, que l'équilibre entre les créatures. Et surtout cela dérèglerait la terre en surface.

-Que veux-tu dire?

-Tu vois ces piliers, au nombre de sept? Ils soutiennent chacun des océans, Arctique, Antarctique, Pacifique nord et sud, Atlantique nord et sud et Indien. Et celui au centre, c'est le Main Bread Winner, qui maintient la terre. S'ils tombent, c'est la fin pour le monde sous marin. Et cela dérègle le monde terrestre. Nous Généraux, sommes les gardiens de ces piliers. On ne fait pas que défendre Poséidon et son domaine.

-J'avoue que j'ignorais tout cela, admit Kanon.

-Il est vrai que nous tous, avons plus d'affinités avec les océans, parce que les Solo nous ont sauvés et que notre vie à la surface n'a pas été des plus joyeuses. Mais nous protégeons la planète par les fonds marins.

-Tu veux dire que vous avez été dégoutés en quelque sorte de la vie sur terre?

-On nous a offert une opportunité de vivre pour un idéal qui nous convenait mieux. Tu vois Isaak, il est orphelin, et avait trouvé l'amitié avec ce Hyoga. Mais il a failli perdre la vie à cause d'une tempête. Baian, lui, a été recueilli dans le fond d'une rivière alors qu'il était perdu en forêt, loin de ses parents. Krishna a failli périr dans une crue du fleuve Gange. Io avait glissé du haut d'une falaise. Pour ce qui est de Kaasa... Je n'ai pas eu l'occasion de parler avec lui plus que ça. Il a toujours été en marge, et ne s'est jamais intéressé à nous. Nous non plus d'ailleurs. En fait, il n'y a que Sorrente qui a eu de la chance dans sa vie. Il est l'ami d'enfance de Julian, et le destin lui a permis d'être l'un de ses Généraux. Quant à Thétis, c'est une sirène, une vraie. Elle peut aussi bien nager avec une queue de poisson dans ces eaux, comme dans les contes, que marcher avec aise à la surface. Elle est née et a grandi dans la zone de la Méditerranée. Bud indiqua un carré de ciel bleu près du plus gros des piliers. Elle nous informe principalement de la vie ici, quand nous sommes sur la terre.

-Je vois. Même à vous il n'est pas arrivé que de bonnes choses. Bien que vous viviez et protégiez ce monde. Et Kaasa, où a-t-il été emmené?

-Dans une fosse obscure. Une sorte de prison proche des volcans sous marins aux éruptions aussi violentes qu'inattendues.

-Sans sa protection?

-S'il est un vrai serviteur de Poséidon, son cosmos saura le maintenir en vie. Je n'aime pas non plus ce procédé, mais il vous a offensés et mis en péril cette paix entre nos deux domaines. Il a aussi attenté à la vie de ton frère qui n'est même pas un chevalier, je pense que c'est la punition la plus juste que notre dieu ait pu prononcer sur son cas.

Kanon avait senti une note d'amertume dans la voix de Bud, au moment de parler de son frère. Comme s'il parlait d'un sujet qui lui était personnel.

-Et toi? S'adressa-t-il au Dragon des Mers Ton histoire?

-Ma famille à moi existe. Mon père est un grand marchand, ma mère brode des tapisseries et j'ai un frère jumeau également qui, si tout s'est bien passé pour lui, sert la garde d'un petit royaume indépendant dans le grand nord, entre la Norvège et la Russie, le royaume d'Asgard. Cependant, je suis né lors d'une période de grandes restrictions économiques, et une loi fut passée à ce moment là, comme quoi les familles ne devaient accueillir qu'un seul nouveau né. Ce n'était pas la faute de mes parents, comment allaient-ils prévoir en avance qu'ils auraient des jumeaux? Malgré leur influence, ils n'avaient pas coupé à cette loi et m'ont caché dans la grange d'un fermier proche de notre maison, pendant cinq ans. Ils se sont fait attraper, et mon père avait eu le choix: m'abandonner ou se faire emprisonner. Hors de question de laisser tomber mon frère. Là aussi, parait-il ils avaient du faire un choix sur lequel des deux enfants ils devaient garder officiellement. J'ai été abandonné près d'une rivière, en plein hiver polaire et la famille Solo m'a pris sous son aile. On m'a raconté mon histoire telle que je le fais à toi actuellement. J'ai grandi en même temps que Julian et Sorrente et je suis devenu le premier des Généraux à m'éveiller à cette fonction.

Kanon et Bud avaient quitté le groupe qui visitait pour discuter, assis tous deux sur un rocher. Le chevalier était effaré de l'histoire du Dragon des Mers. Il avait entendu des choses sur les passés de ses compagnons du Sanctuaire mais ils n'étaient pas les seuls à avoir eu des débuts de vie tragiques. Et surtout, cette séparation de Bud avec son frère jumeau. Lui même ne pouvait se l'imaginer, ni même se savoir trop loin de Saga, trop longtemps, sans avoir des nouvelles de lui.

-Je peux te demander... tu n'es pas obligé de répondre, mais... tu comptes un jour revoir ton frère?

-Je sais pas. J'ignore même s'il se rappelle de moi. Je sais que tout va bien. L'entreprise Solo traite aussi avec le royaume d'Asgard, donc j'entends des choses, mais est-ce qu'un jour je voudrais retourner sur ces terres enneigées où on m'a laissé du jour au lendemain...? Je peux pas encore répondre.

Kanon non plus n'avait pas la réponse aux paroles teintées de peine dans la voix de Bud.

-... en tout cas, j'insiste sur ce point, chevalier des Gémeaux, continua le Dragon des Mers, je souhaite tout autant que Poséidon la paix entre votre Sanctuaire et le nôtre. C'est important, pour tous les êtres innocents qui peuplent ces deux mondes. Ton frère en fait partie et sa maladresse a été pardonnée. Il paraît que vous allez mener une guerre terrible, donc tu te dois de le protéger de toutes tes forces. Tu as cette chance de l'avoir à tes côtés et vous semblez bien vous entendre. C'est un lien précieux que tu dois garder pour toujours.

-Je te le promets, Bud. J'aimerais te souhaiter de retrouver ton frère à toi, un jour, mais c'est ta vie. Donc, promets-moi de préserver au moins ce beau royaume de ton dieu. »

Avant de se lever et de rejoindre les autres, les deux hommes se serrèrent la main, d'une poignée franche et sincère. Depuis l'esplanade au centre de tous les piliers, les deux divinités marchaient à faible allure, leurs deux cosmos éveillés et entourant les guerriers d'une aura puissante et apaisante. La preuve de la paix entre Athéna et Poséidon. Kanon ignorait s'il avait un nouvel ami ou juste un allié d'une autre armée. Une chose était certaine et ce Bud la lui confirmait: Saga, son frère était très important et rien au monde ne pourrait le blesser à moins de passer d'abord sur le corps des Gémeaux.


notes de fin: Merci d'avoir lu ce gros gros chapitre! Je n'ai pas pu faire autrement pour la longueur, c'était impossible de couper, dès lors que les idées me venaient en tête! J'ai voulu un arc de Poséidon tranquille au mieux, sans morts inutiles. Je ne sais pas si je reprendrai les marinas par la suite, mais on sait jamais. Vu que j'ai incrusté le royaume d'Asgard... Concernant Shaina, j'ai pris d'énormes libertés quant à sa condition de femme chevalier, mais j'ai eu cette idée du maquillage en me disant ''elle fait des missions, si elle veut passer incognito dans la foule, c'est pas avec son masque'' d'où cette idée du maquillage. Pour le nom de famille de Sorrente, j'ai fait ma petite tambouille en prenant le mot allemand de sirène, Meerjungfrau. Seulement, de mes lointains souvenirs d'allemand, j'avais déduit que le mot était formé sur Meer (mer) + Jung (jeune homme) + Frau (jeune fille). Jeune homme/fille de la mer. Alors c'est surement le terme générique que m'a sorti Google trad, du coup, comme Sorrente est un gars j'ai coupé à Meerjung.
Les caractères de transition sont ceux de tsunami.
Pour la suite, je n'ai strictement aucune idée où je vais aller. Dans ma tête je ne suis pas encore prête pour aborder ce gros dossier de la guerre sainte. On verra.
Je vous fais des bisous et à la prochaine.