notes: Bonjour, bonsoir! Et nous voilà partis dans la grosse guerre dont voici le premier chapitre officiel. Je ne sais pas quoi dire de plus, si ce n'est bonne lecture


Seizième histoire: Descente aux Enfers

Allemagne, dans les régions montagneuses de la Bavière.

La nuit était tombée depuis un moment, alors qu'un groupe de dix personnes empruntaient un chemin qui menait vers ce château qui dominait le paysage, tel un palais de contes de fées. Cependant, aucune magie pure, ni enchantements n'émanaient de ses hautes tours qui touchaient les étoiles.

Le château d'Heinstein. L'ouverture la plus connue et la plus facile d'accès entre les Enfers d'Hadès et la terre.

Alors que les âmes des Spectres étaient scellées dans une stèle au milieu de nulle part entre l'Europe et l'Asie, et que l'une des missions des chevaliers résidant aux Cinq Pics de Rozan en Chine était de la surveiller jusqu'à ce que le sceau d'Athéna ne se brise par la force du temps, c'était de cet édifice qui s'imposait devant eux que sortaient l'armée du seigneur des ténèbres enfin ressuscitée.

Le groupe avançait d'un pas sûr, sans pour autant manquer de vigilance. Malgré l'absence d'âmes autour, depuis qu'ils avaient atterri dans la forêt.

Les villages aux alentours étaient déserts, comme si aucun être humain n'y avait vécu depuis un moment... comme si le silence et la mort dominaient cette région...

Aucune présence, pas la moindre étincelle du cosmos noir d'un Spectre qui rôderait, qui monterait la garde aux abords même de l'entrée du château.

Un regard noisette se leva en direction du chevalier des Gémeaux.

Ce dernier répondit à la jeune femme dissimulée sous un voile:

« Pas la peine de rester ici, ô déesse. On perd du temps sans la moindre raison. Si l'on doit se battre, on le fera, mais avant tout, nous devons vous guider et entrer dans les Enfers tous ensemble.

-Oui, Kanon, fit Athéna. Allons-y. »

Sans hésiter, ils gravirent la pente qui menait vers un pont de pierre.

Le premier assaut se fit par des soldats d'Hadès qui semblaient eux même surpris de l'arrivée de l'armée d'Athéna sur les lieux. Les jeunes Seiya et Ikki les balayèrent de leurs poings sans utiliser leurs techniques. Répétant ces mouvements à plusieurs reprises, ils n'eurent étonnamment pas le moindre mal à entrer dans le château.

À côté de lui, Aiolos semblait soulagé d'autant de facilité. Pourtant, Kanon ne partageait pas l'opinion de son ami. C'était trop simple. Vraiment trop simple.

Même en Asgard, les soldats se battaient, faisaient preuve de résistance. Ce n'était pas de simples pions posés çà et là qui se faisaient sauter par dessus les remparts comme des objets méprisables...

Le Gémeau sentait au fond de lui que quelque chose n'allait pas. Comme si un piège se refermait sur eux. Mais où? Comment allait-il survenir? Sans prévenir, à tous les coups.

Depuis ce départ précipité du Sanctuaire après la mort du Corbeau, malgré la confiance qu'il avait envers ses compagnons restés sur les terres sacrées et toutes ces mesures pour garder le plus de monde en sécurité, il avait envie de faire demi tour. Pour être sûr. Pour son frère, son pépé, Milo, et tous les autres...

Mais il ne devait pas. Il avait la vie d'Athéna entre ses mains, de valeureux chevaliers l'accompagnaient, dont le Sagittaire, Pégase et le Phénix, et il s'était résolu d'aller de l'avant pour battre Hadès avant que les Spectres ne fassent trop de dégâts.

Il croyait en ceux qui étaient restés en Grèce et leur faisait confiance pour faire reculer l'ennemi et le faire dégager hors du Sanctuaire.

S'avançant dans un couloir à peine éclairé par des torches, le groupe arriva dans une grande salle sombre, où juste la pleine lune illuminait de son éclat le plafond de verre au dessus d'eux. Des vitraux aux détails impressionnants et aux couleurs si vives qu'elles apportaient un peu de chaleur dans la pièce, comme un kaléidoscope.

Dans cette atmosphère étrange, tous s'étaient arrêtés. Ils avaient battu tous les soldats sur leur passage, et se trouvaient là dans une impasse.

La salle formait un cercle, une baie vitrée donnant sur une terrasse en pierre fermée, sans aucune route possible, avait vérifié Shiryu avant de revenir de son éclairage.

Puis, Shaka s'avança à tâtons vers un mur sur lequel un immense tableau était accroché montrant une famille heureuse, composée d'un homme, une femme et une petite fille aux longs cheveux noirs, tous souriant, montrant le bonheur de leur quotidien, au moment de la peinture.

Kanon se doutait de l'identité de l'enfant: Pandore, la jeune femme qui était en Asgard, frappée par Hypnos, alors qu'elle était la sœur d'Hadès depuis les temps mythologiques. Cependant, il n'y avait pas à chercher trop loin pour se rendre compte que cette joie de l'époque du tableau avait disparu, et qu'à la place, un regard froid, dénué d'émotions, même, avait remplacé le sourire pur de cette petite fille. Il se souvenait aussi de ces yeux remplis de stupéfaction quand elle l'avait vu, lui, le chevalier des Gémeaux, alors que c'était leur toute première rencontre. Était-ce une réminiscence d'une vie passée? Il n'en savait rien, mais probablement aurait-il une réponse à cette question aux Enfers...

« Athéna, fit le chevalier de la Vierge, brisant au passage le fil des pensées de Kanon, je sens une force spirituelle derrière ce mur. Comme un courant d'air provenant du sol et remontant vers nous.

-Ce serait l'entrée des Enfers, demanda Camus.

-Maitre, en effet, le mur me semble pas assez solide pour être une fondation du château, confirma Hyoga, posant ses mains à son tour contre la tapisserie. Et malgré l'air peu glacial, il y a comme une sensation de froid qui vient à nous...

-... comme quand on avait du faire face à Hypnos dans le palais d'Odin, constata le Phénix.

-Je vois ce que tu veux dire, Ikki, ajouta Kanon. Les Spectres ont, pourrait-on dire, un signe remarquable dans leur cosmos, une note de ténèbres qui peut vous figer d'effroi et qui grandit en fonction de leur puissance.

Imitant les autres chevaliers en posant ses mains près du tableau, il ressentait également ces poussées d'air malsain qui remontaient jusqu'ici, lui remémorant ce combat brutal face à Rhadamanthe du Wyvern et ses accès de violence au travers de ses attaques dévastatrices...

-Le passage a dû être bloqué pour éviter tout soupçon, mais on doit casser ce mur.

-Je m'en charge, intervint Aiolos tout en s'illuminant d'une aura dorée alors qu'il préparait son poing. Athéna, reculez, s'il vous plait.

Entourée de ses protecteurs, la jeune fille se trouvait juste derrière Kanon. Ce dernier ne montrerait jamais à quel point il était impressionné de la force du Sagittaire, quand bien même ce dernier n'avait pas utilisé un dixième de sa puissance pour réduire le mur à l'état de gravats.

Désormais, sur la droite, le grand tableau demeurait accroché, mais bancal, penchant vers le sol, la jeune Pandore et ses parents toujours souriants.

Tandis que sur la gauche, un trou béant dans l'obscurité d'où des volutes d'un vert fluo anormal remontaient et s'estompaient aussitôt.

-Il y a comme un escalier qui descend, dit Shun qui s'apprêtait à traverser le tas de pierres.

-N'avance pas plus, ordonna Kanon. Sauf si t'as vraiment envie de mourir!

-Je...

-Athéna nous a donné sa bénédiction avant de partir, et pas seulement pour renforcer nos armures, je te rappelle. Dohko et notre Grand Pope l'ont vécu eux aussi, par le passé. L'entrée aux Enfers ne se fait pas à la légère.

Le chevalier Andromède attendit que le reste du groupe le rejoigne.

-Souvenez-vous de ce qu'ils nous ont dit, continua Kanon. Intensifiez votre cosmos du plus fort que vous le pouvez, même au delà si c'est possible. Athéna, restez tout près de nous, au mieux, accrochez-vous, mais utilisez de votre cosmos aussi.

Le chevalier sentit alors les doigts fins de la jeune fille s'agripper à son armure. Découvrant ces bandages sales sur la peau nacrée de son poignet, il ferma les yeux. Sa déesse, quand bien même trop peu éveillée à son rôle, semblait aimer ses chevaliers, et ce sacrifice avant leur départ du Sanctuaire l'avait prouvé. L'autre main de la jeune fille tenait le bras d'Aiolos.

-Tout le monde est prêt, cria le Gémeaux.

En entendant les voix confirmer à l'unisson, il ordonna l'explosion simultanée de leurs cosmos, et une multitude d'auras colorées et aux températures différentes éclaira l'escalier en colimaçon qui descendait à n'en plus finir.

Le moment d'aller aux Enfers était enfin arrivé.

Cependant une voix s'éleva:

-Seiya! Il est resté dans la salle!

Kanon ne devant pas perdre sa concentration, se rendant compte des paroles de Hyoga. Le cosmos de Pégase n'était pas présent dans cette union de leurs forces.

-Seiya! Rejoins-nous sur le champ, hurla-t-il.

-Partez devant, répondit le chevalier de Bronze. Athéna est prioritaire!

La voix du jeune homme résonnait dans les escaliers, et semblait stressée, comme s'il était dans une urgence vitale. Le Gémeaux râlait pour lui même de ne pas pouvoir se retourner, de quitter ce champ de force pour ramener Seiya par l'oreille, mais leur déesse s'accrochait fermement à son bras...

-Kanon, j'ai confiance en Seiya, déclara Aiolos d'une voix chaude et assurée. Je l'ai entrainé et je peux te dire qu'il pourra s'en sortir.

Un rictus se dessina sur les lèvres du Gémeaux alors qu'une pensée légère traversait son esprit. Cette assurance d'une grande douceur et si convaincante dans les paroles du Sagittaire lui rappelait tellement son grand frère. Ils s'étaient bien trouvés ces deux là, vraiment. Ce qui confirmait son envie d'en finir au plus vite, que Saga retrouve son Aiolos de petit ami...

-Seiya, je sais pas pourquoi tu restes là bas, mais si tu es sur de toi, on se retrouve aux Enfers, cria Kanon. Meurs pas entretemps sinon ça ira mal pour toi.

-Kanon, Aiolos, Saori-... Athéna, mes amis, j'arriverai très vite, je vous le promets! »

Enveloppés dans cette boule de cosmos, le chevalier des Gémeaux, accompagnés de sa déesse, de son meilleur ami et d'autres guerriers d'Athéna, sauta dans le vide dans l'espoir d'arriver aux Enfers, en vie et de pouvoir défier et vaincre Hadès au bout de leur route...

地下

Tournant le dos à la brèche qui menait aux Enfers, le chevalier de Bronze se tenait sur ses gardes, en position de défense. Conscient qu'il désobéissait aux ordres de Kanon, il ne pouvait faire autrement.

Face à lui, un homme à la protection sombre avançait lentement, presque insouciant, un léger rictus sur ses lèvres. Un Spectre, un vrai. Pas un de ces minus qui montaient la garde et qui étaient plus faibles que les soldats du Sanctuaire ou même Cassios à l'époque de son entrainement.

Seiya n'avait pas hésité une seconde à s'écarter du groupe lorsqu'il avait senti cette aura anormale. Pourtant, il aurait voulu sauter dans le vide aussi, mais cela valait-il le coup de se retrouver dans le royaume d'Hadès, certes, mais juste à l'état d'âme errante et non plus en tant que chevalier protecteur d'Athéna?

Hors de question de mourir comme ça. On l'avait choisi pour cette mission si importante, la toute première pour lui. Sa déesse, les chevaliers d'Or, le Grand Pope, même, lui faisaient confiance. Aiolos avait passé tant de temps à le renforcer, à le pousser à dépasser ses limites, il leur devait au moins ça: la preuve qu'on pouvait compter sur lui. Et la promesse de revenir sur terre, dans un monde en paix, et de revoir un jour sa grande sœur, Seika. Il allait montrer à cet être étrange la puissance de ses poings.

« Tu ne sautes pas avec les autres, chevalier? Aurais-tu peur?

-Je n'ai pas peur, Spectre! Je voulais éviter qu'on se prenne une attaque fourbe dans le dos de ta part!

-Très bien pensé, en effet. Mais rien ne te garantit que tes amis arriveront en entier aux Enfers.

-Je leur fais confiance. Ils sont en vie.

-Il va falloir que je te réduise en poussière en premier, alors, soupira le Spectre.

-Ne crois pas que je vais me laisser faire!

Seiya se mit en posture d'attaque, alors qu'une aura bleutée l'entourait. Il dégaina son poing droit en direction de son adversaire.

PEGASUS RYUU SEI KEN

Une multitude de coups à une vitesse folle s'abattait sur le Spectre, qui bougea à peine de là où il se trouvait. Il se déplaçait sans problème, comme si la technique du chevalier de Bronze ne lui faisait pas plus de mal qu'une brise matinale.

-C'est tout? J'aurais imaginé que les chevaliers d'Athéna étaient plus forts, siffla le Spectre.

Il n'était pas si rapide. Seiya le savait et avait juste testé les réactions de son ennemi. Il allait devoir donner un peu plus d'énergie et intensifier un peu plus son cosmos.

Il lança à nouveau son attaque.

Le Spectre bougea à nouveau, comme sûr d'avoir esquivé, mais son regard clair s'agrandit en découvrant comme un dernier moment un pied s'abattre sur son visage, l'envoyant valser au sol.

Pégase se remit aussitôt en position de défense, observant la réaction de l'homme à terre. Aucun doute, il ne l'avait pas raté cette fois, au vu de la lenteur qu'il mettait à se relever et ce filet sombre au coin des lèvres. Le jeune homme avait tant appris du combat au corps à corps avec Marin, son maitre, et il en eut acquis toujours plus grâce à Aiolos. Rapidité, feinte, mesure de la portée des poings et des jambes, il en savait un rayon, et ne se retiendrait pas pour appliquer ces enseignements contre l'armée d'Hadès.

-Bien joué, chevalier. Mais je ne vais pas en rester là. Tu vas gouter à la plus grande technique de Valentine de la Harpie, Spectre de l'étoile céleste de la lamentation.

Ce dernier fut petit à petit entouré d'une aura rose vif et les ailes de son Surplis se déployèrent. La puissance de son cosmos n'était pas à négliger, Seiya le sentait bien et restait sur ses gardes quand il l'entendit crier son attaque.

GREED THE LIVE

De ses bras tendus vers le haut Valentine propulsa des rayons rosées en direction du chevalier, presque aussi rapides que la seconde salve de ryuu sei ken.

Le Bronze put en éviter quelques uns mais fut touché sans qu'il ne put réagir, sentant son corps se transpercer et son énergie vitale de le quitter petit à petit en une douleur brulante, cinglante et presque insurmontable. Aucun son ne sortit de sa bouche tellement il fut surpris.

L'attaque lui avait paru sans fin, alors qu'il retomba au sol, brisant le carrelage sous le choc, à demi conscient.

Il était encore en vie... Il arrivait à bouger. C'était le plus important.

-Tu peux encore te relever, chevalier, fit Valentine.

-Comme tu le vois, confirma Seiya une fois debout.

Son corps était comme ankylosé, mais il ne devait pas y penser. Il était résolu à en finir avec cette Harpie, pour vite retrouver Aiolos, Athéna et les autres.

Sans perdre de temps, il reprit sa position d'attaque, laissant son cosmos l'envelopper, tout en ayant confiance en cette armure de Pégase qu'il avait obtenue loyalement et que leur déesse à tous avait bénie pour une victoire dans cette guerre.

PEGASUS RYUU SEI KEN

Il se sentait bien, et, ignorant les remarques provocantes du Spectre qui lui disait qu'il serait trop lent pour lui, et trop affaibli après son attaque, il lança à nouveau son poing, encore et encore, comme une pluie de météores s'abattant sur son adversaire.

Plus rapidement encore à chaque fois, si bien qu'un fracas retentit, brisant un pan de mur qui menait sur la terrasse.

Valentine fut projeté au travers et à son tour, il était au sol, immobile.

Seiya se précipita à sa rencontre, pour vérifier son état... Il bougeait à peine.

-Bravo, chevalier, dit le Spectre avec beaucoup de difficulté, sa voix tremblant. Mais... attaquer le château et prendre la tête de notre seigneur Hadès ne sera pas si facile pour vous...

-On le sait, répondit Pégase. Mais peu importe combien vous êtes en Enfers, cela ne nous arrêtera pas...

-Sache que là où vous vous dirigez, il n'y a que les plus puissants parmi nous. Dont mon maitre, le seigneur Rhadamanthe qu'un des vôtres a cru tuer... J'étais le seul Spectre présent ici, au cas où des chevaliers viendraient attaquer, comme vous l'avez fait. Le reste est en train d'envahir votre Sanctuaire avec l'aide de...

La Harpie ne put finir sa phrase, pris d'une quinte de toux qui lui fit cracher du sang sur le côté.

Seiya, quant à lui, réalisait l'urgence primordiale de leur situation. Les terres sacrées d'Athéna seraient anéanties s'ils ne se dépêchaient pas de battre Hadès.

Sans plus attendre, il se releva et se dirigea vers la brèche menant aux Enfers.

-Tu vas mourir, chevalier, si tu tombes dans ce trou, articulait le Spectre.

-Si c'est le cas, je le découvrirai assez vite, non? »

Le jeune homme observa les ténèbres dans lesquelles ses amis et Athéna avaient plongé quelques minutes auparavant.

Il était blessé de ce tout premier combat, il avait mal un peu partout, mais qu'était-ce après toutes ces années d'entrainement et l'avenir de la terre qu'il devait défendre? Il n'avait pas utilisé ses forces à leur maximum, loin de là. L'armure de Pégase bénie par Athéna l'avait protégé bien plus qu'il ne l'aurait imaginé.

Éveillant son cosmos au plus haut qu'il le pouvait, Seiya ferma les yeux. Il avait confiance en ses amis, ses ainés et sa déesse. Il les retrouverait en bas. Il sauta dans le vide, dans l'espoir que ses pensées se réalisent au fond de ce précipice.

地下

Se relevant avec difficulté, la jeune fille ouvrit les yeux sur cet étrange paysage qui s'étendait devant elle, si différent. Dénué de végétation, de la roche à perte de vue d'une couleur oscillant entre le bleu sale et le gris, et au dessus, un ciel parfois noir, parfois rouge dans lequel des nuées violacées dansaient.

Curieusement, elle arrivait à respirer sans problème, comme si l'air était le même qu'à la surface.

Oui, elle était bien aux Enfers, ils avaient réussi à traverser cet escalier sans fin, leurs cosmos unis les avaient maintenus en vie. Ils...

Où étaient-ils passés, tous?

Elle se retrouvait seule sur cette corniche, sans pouvoir distinguer un éclat doré provenant d'un Aiolos ou d'un Kanon, ni même entendre une voix d'un des chevaliers de Bronze au loin.

Avaient-ils au moins survécu? Probablement. En son for intérieur, elle ne ressentait pas ce vide soudain, comme les fois où son cœur s'était resserré si fort, lorsque le Capricorne était tombé en Asgard, ou bien le Cancer qui s'était battu face à un Spectre, ou encore la veille même, lorsque la mort du Corbeau fut si rapide, si brutale.

Tous ses chevaliers étaient quelque part, proche de cette petite falaise d'où elle se devait de descendre.

Comment faire, elle qui n'avait jamais fait d'escalade de sa vie, qui avait toujours été accompagnée de son intendant au Japon, à l'époque où elle logeait dans la propriété de son grand-père, ou en Grèce, toujours suivie de servantes et de prêtresses ou du Grand Pope.

« Il y a quelqu'un? » S'écria-t-elle à tout hasard.

Pas de réponse. Ni d'autre solution que de retrouver le sol de par elle même.

Petit à petit, se tenant fermement aux pointes rocailleuses de peur de chuter trop rapidement, elle progressait vers le bas, s'étonnant de ses capacités.

Le voile qui la couvrait depuis le départ du Sanctuaire s'échappa de ses épaules et s'envola dans l'atmosphère pour se déposer doucement. Surprise, elle perdit l'équilibre et dévala également le reste de la paroi, criant de peur.

L'arrivée fut lourde et douloureuse.

Elle mit un peu de temps avant de réaliser son état. Ses bras dénudés et ses jambes étaient égratignées, griffés çà et là. Sa longue robe tâchée de poussière et de résidus de pierre bleu gris. Et son cœur battant à tout rompre.

Elle tendit la main pour récupérer son voile et le rabattit sur ses épaules et ses longs cheveux châtains aux reflets mauves.

Ses yeux piquaient et des larmes menaçaient de sortir. Elle devait les retenir et être courageuse. Elle n'était plus Kido Saori, mais la déesse grecque de la sagesse et de la guerre, Athéna. Tel était son destin, et sa mission ici même, à cette époque était d'affronter le dieu Hadès, dans cette Guerre Sainte perpétuelle qu'ils se donnaient pour protéger la surface de la Terre et ses habitants.

Ceux qui l'accompagnaient jusqu'ici étaient ses chevaliers, et tous ensemble, devaient atteindre le palais du Seigneur des morts.

Alors, pourquoi était-elle si seule, là?

Ses mains s'entourèrent l'une et l'autre autour de ses poignets et des bandages qui les protégeaient. Ces entailles ne lui faisaient plus mal. Ce sacrifice qu'elle avait dû faire pour bénir les armures de ceux qui l'accompagnaient, pour qu'eux aussi avancent près d'elle jusqu'au bout. Ce sang à priori divin qui permettrait des miracles.

Le seul miracle qu'elle souhaitait pour l'heure était de revoir au moins un de ses guerriers vivant. Juste un seul. Qu'ensemble ils puissent trouver le bon chemin à prendre et continuer leur quête.

Cependant, vers où aller? Il n'y avait même pas l'esquisse d'une route ou d'un sentier. Autant sur sa gauche et sa droite que devant elle, s'étendait ce paysage rocailleux et triste. Même la vision de ce ciel rouge ne l'enchantait guerre.

Elle s'avança un peu au hasard, quand elle crut voir des silhouettes. Elle ne réfléchissait plus, ne se posait même pas la question de savoir si elle courait vers un ennemi qui l'avait repérée, et qui pouvait l'attaquer.

Avant de se précipiter vers ce qui pouvait être un danger, elle sursauta en entendant qu'on lui parlait:

« Saori-san, vous êtes vivante, quel soulagement!

-Shiryu... Contente de te retrouver. Sais-tu où sont les autres?

-Hyoga, Ikki et Camus sont tombés au même endroit, indiqua le Dragon en pointant du doigt le groupe d'ombres vers lequel elle allait. Quant aux autres, on espère qu'ils soient bien arrivés eux aussi...

Une fois face aux chevaliers de Bronze et d'Or, une présence inattendue s'y trouvait également.

-Seiya, tu as pu nous rejoindre!

-Oui. J'ai appris des choses importantes, mais le chevalier du Verseau veut qu'on soit tous réunis pour que je raconte.

-Et à raison, fit le maitre de Hyoga. Je crois que nous allons être quasiment au complet.

Tous se tournèrent dans la direction vers laquelle les yeux bleus de Camus étaient fixés, et Athéna ne put retenir un sourire de soulagement dès l'apparition de Kanon, Aiolos et Shaka.

-Vous avez tous réussi, constata Aiolos. Même toi, Seiya...

-Il manque Shun, déclara Ikki. Personne ne l'a vu?

-J'ai retrouvé Kanon et Aiolos sur ma route, répondit Shaka. J'ai du tomber très loin d'ici, mais pas la moindre présence d'Andromède.

Tous firent un non de la tête.

-Je suis sur qu'on le retrouvera, intervint Seiya. Mais on n'a pas le temps de rester là, on doit au plus vite aller vers le palais d'Hadès et l'anéantir. Il...

-Calme-toi un peu, coupa Kanon. Déjà tu vas expliquer pourquoi tu t'es séparé de notre champ de cosmos.

-Justement, j'ai bien fait. Il y avait un Spectre qui était sur le point de nous attaquer et qui visait Saori-san. Je ne peux expliquer comment j'ai pu m'en apercevoir, mais mon intuition m'a dit de vous protéger à tous, quitte à rester dans le château à vous attendre mais voilà. Je l'ai battu, mais j'ai appris quelque chose... Le Sanctuaire est en grand danger. La majorité des Spectres a été envoyée là bas, et ici, il n'y en a que quelques uns, dont un certain Rhada machin... Le supérieur de ce Valentine contre qui je me suis battu et...

-Attends, tu as bien dit ''Rhadamanthe'', criait presque le Gémeau.

-Oui... Pourquoi?

-Il est sensé être mort, répondit Ikki. On l'avait vu en Asgard et...

-... et je l'avais tué, enchaina Kanon, affichant un regard noir de colère si cinglante que Saori pouvait presque la ressentir.

-Ce que je comprends, ajouta Aiolos, c'est aussi l'urgence en effet de notre mission ici. Athéna étant ici, l'effigie de son armure, qui se trouve être la grande statue derrière le palais du Grand Pope, entre nos mains, le Sanctuaire n'a plus aucune protection divine et court un danger extrême. Et les sceaux posés un peu partout ne ralentiront pas les Spectres.

Le Gémeau lâcha un juron peu châtié.

-Il ne faut tout simplement pas trainer ici, dit Camus. Nous devons avancer et faire de notre mieux pour combattre les Spectres et Hadès.

-Allons-y, chevaliers, fit Athéna. Je me sens rassurée avec vous, je sais que vous éliminerez tous nos ennemis et que vous me protègerez.

À cet instant, Kanon tourna son regard noir en direction de la jeune fille:

-''Vous quoi''? Pardonnez-moi, déesse, mais je crois que vous n'avez pas compris tout ce qui se passe, ici. Rappelez-moi qui vous êtes? La déesse de la sagesse et de la guerre, n'est-ce pas? Je pense très sincèrement qu'il faut que vous agissiez de la sorte, enfin! Plus tôt aurait été l'idéal, mais on va pas non plus défier les divinités du temps, on ne l'a pas, le temps, par la présente. Alors, vous allez vous secouer un peu et arrêter de jouer les petites filles gâtées qui connaissent de la vie que le confort qu'on leur donne. Vous êtes la putain de représentante de la paix sur Terre! Vous êtes là pour montrer à Hadès que c'est votre force dont les humains ont besoin pour vivre, et non les ténèbres de ce dieu. Et ça se fait sans chialer, sans faire des petits caprices, en marchant la tête haute et en le battant avec tout le cosmos puissant qui sommeille en vous, est-ce clair?

Saori ne sut répondre. La voix grave du Gémeau résonnait autour d'eux comme un écho qui revenait sans cesse et qui lui matraquait la tête. Il l'avait piquée dans son comportement, lui infligeant des propos durs comme elle n'en avait jamais entendus de toute sa vie. Pourtant elle faisait tout son possible pour rester digne, et ne pas fondre en larmes comme une enfant qu'on aurait grondée.

-Kanon, ça suffit, s'emporta Aiolos également. Tu crois vraiment que c'est le moment de...

-Oui! Parce que ce que je veux escorter jusqu'au bout c'est une déesse, celle que je suis fier de servir, et peu importe qu'elle soit encore jeune, elle a le même âge à peu près que les gamins qui sont là également et qui n'ont pas eu peur de sauter dans le vide pour elle.

-Tu as raison, chevalier, dit cette dernière. Je suis consciente de n'être encore qu'une enfant, mais je prends sur moi pour devenir celle pour qui tu as juré de te battre, vêtu de ton armure d'Or. Désormais, je ferai tout pour vous accompagner, chevaliers, qui avez accepté de me protéger au cours de cette guerre. S'il le faut, moi aussi je me battrai pour que vous restiez en vie. Je comprends ton inquiétude et ta colère, Kanon, mais j'irai jusqu'au bout avec vous. Et comme le temps presse, nous devrions partir. Notre Sanctuaire a besoin de notre victoire sur Hadès, alors, en avant, chevaliers.

-Nous vous suivons, Athéna, répondit le Gémeau d'un ton plus posé.

La déesse répondit d'un signe de tête et, cherchant la bonne direction, elle sentait au travers son cosmos que tout droit serait le mieux.

-Par là, je pense. Avec un peu de chance, peut-être que nous croiserons Shun.

-Il nous attend quelque part , c'est certain », fit Aiolos.

Athéna marcha en tête du cortège, montrant à tous, surtout à Kanon qu'elle pouvait être cette déesse courageuse, aimée et estimée de ses chevaliers. Ce que eux ne voyaient pas, c'était ces larmes qui perlaient sur le visage de la jeune fille, celles qui menaçaient de sortir depuis si longtemps. Depuis bien avant ces remontrances du Gémeau, bien avant sa chute à son arrivée aux Enfers... Depuis qu'elle avait dû quitter la propriété de son grand-père au Japon pour embrasser son destin de déesse... Mais jamais elle ne le montrerait. Elle se devait de rester forte jusqu'au bout...

Après quelques minutes de marche, une silhouette semblait faire des signes au groupe qui approchait: c'était le chevalier d'Andromède.

« Shun, s'écrièrent Shiryu et Seiya en chœur.

-Athéna, grand-frère! Je vous attendais! Je savais que vous viendriez! »

Le jeune Bronze se tenait devant un édifice presque incongru dans cette vallée rocheuse. Un arc était érigé au milieu de nulle part, comme un avant-poste ou une entrée au centre de fortifications qui n'existaient pas.

Tout en haut du bâtiment, des inscriptions en grec étaient gravées:

''Vous qui entrez ici, abandonnez tout espoir''

Dans sa tête, Saori refusait cet ordre. Donnant toute sa force possible, elle garderait cet espoir de rentrer chez elle, dans un monde de paix.

地下

Lorsqu'il avait ouvert les yeux dans ce paysage désolé, Shun s'était retrouvé seul, séparé de son frère, des chevaliers d'Or, de ses amis et d'Athéna. Il avait mis quelques temps avant de se repérer, et, découvrant cette arche imposante à quelques dizaines de mètres de son point de chute, il avait compris que ce devait être un endroit important, par lequel ses compagnons de route passeraient probablement. Et quelque chose, comme une intuition, lui faisait dire qu'ils étaient tous en vie, même Seiya resté en arrière dans le château.

Alors, il avait décidé d'attendre, quand bien même il n'avait aucune notion du temps, ni de la manière dont il s'écoulait ici bas. Le seul indice qu'il avait pu avoir était ses chaines d'Andromède. Il s'entoura de celle dont le bout était arrondi en une barrière de protection chargée de son cosmos, tandis que la seconde, triangulaire en son bout, restait posée négligemment au sol. En apparence, et prête à réagir si une présence ennemie ou alliée approcherait.

Combien de temps avait-il patienté sans bouger, alors que des courants d'air allaient et venaient depuis l'ouverture de cette arche, au son de cris de lamentations et de pleurs presque angoissants qui l'appelaient par delà cette limite, et ce, avant que sa chaine ne réagisse, et qu'un groupe n'arrive à sa hauteur. Athéna, Ikki, Seiya, Kanon et tous les autres étaient bel et bien vivants.

Quel pied de nez à cette phrase inscrite dans la pierre de la porte. Dans les Enfers, dans les ténèbres les plus sombres, l'espoir était permis. C'était une vérité universelle! Et il y avait cru à leurs retrouvailles.

L'on lui raconta ce qui s'était passé depuis leur saut dans les escaliers du château, les atterrissages hasardeux de chacun, et surtout les paroles de Seiya, concernant l'urgence de leur mission. À cet instant, Shun repensa à son amie d'enfance et compagne d'entrainement sur l'ile d'Andromède, June, restée au Sanctuaire. Elle savait se défendre et se battre, mais il espérait la revoir à nouveau, en vie. Il fallait y croire. Et quand bien même il n'aimait pas la bagarre, s'il n'avait pas le choix, il déploierait ses chaines pour protéger et sa déesse et ses frères d'armes.

Aussi, aux côtés de Seiya et Shiryu, il s'apprêtait à traverser l'arche quand tous trois furent interrompus.

« Attendez, ordonna Shaka.

-Qu'y a-t-il, demanda le Dragon.

-Nous devrons être prudents une fois qu'on aura traversé cette porte. Cette citation n'est pas qu'un simple élément décoratif, c'est un avertissement pour quiconque pénètre dans les Enfers.

-Tu as raison, confirma Camus. Dans les archives des anciennes guerres saintes que j'ai pu lire dans la bibliothèque de notre Grand Pope, j'ai pu découvrir de curieux témoignages, comme quoi des chevaliers qui avaient passé cette porte avaient péri pour avoir voulu regarder en arrière. Kanon, tu as pu le constater aussi, en lisant certains ouvrages, mais quand bien même le combat entre Athéna et Hadès recommence sans fin, les manières d'agir sont différentes, et pourtant similaires.

-Je vois de quoi tu veux parler, répondit le Gémeau, hochant la tête. J'étais tombé sur un texte décrivant des corps s'enflammer quand ils se retournaient, d'autres pétrifiés pile par delà cette porte des Enfers pour avoir tourné la tête. Et à la différence des âmes errantes, c'était bien des êtres faits de chair et de sang qui en étaient victimes, des chevaliers d'Athéna tels que nous.

-Ce qui signifie une chose, renchérit Aiolos. C'est que nous devons avancer sans revenir sur nos pas. Notre but étant d'amener Athéna jusqu'à Hadès, si l'un de nous se trouve coincé face à un ou plusieurs Spectres, il ne faudra pas l'attendre. Tu as constitué notre unité en donnant toute ta confiance en nos capacités, Kanon, donc, nous remporterons cette guerre. C'est de cette manière dont j'interprète le message sur cette porte.

-... On peut voir ça comme ça, en effet. Mais sans se précipiter bêtement, nous devons avancer avec prudence. »

Tandis que tous acquiesçaient aux paroles du Gémeau, Shun se faisait la remarque que le chevalier doré avait un visage plus fermé que d'habitude et qu'il ne cachait même pas sa force. Même les plus stratèges et les plus forts d'entre eux pouvaient aussi avoir du mal à cacher leur nervosité. Même les plus puissants restaient des êtres humains face à un danger permanent.

Ainsi, tous sur leurs gardes, ils marchèrent sous l'arcade de la porte, et Andromède sentit quelque chose le traverser. Comme une impression qu'un fantôme passait par son corps, comme un courant d'air. Tous se regardèrent, preuve que ce n'était pas un fait de son imagination. Ils étaient réellement en Enfer, et avaient passé un champ d'énergie qui délimitait la véritable entrée.

Avant de descendre un sentier, des ondes dansaient sur l'horizon rougeâtre et la route les menait là bas.

« La mer, demanda Seiya.

-Non, le courant a l'air trop fort pour que ce soit une mer, répondit Hyoga.

-C'est un des fleuves des Enfers, ajouta Camus. Que nous allons devoir traverser, sans aucun doute.

-Sachant qu'on n'en voit pas le bout, je ne vois pas comment on va faire, remarqua Ikki.

-C'est pour cette raison que nous nous dirigeons vers la berge pour aviser d'une solution, répliqua le Verseau en appuyant sur chaque mot comme s'il voulait bien se faire comprendre.

Une fois arrivés au bord de l'eau, le groupe fut interpelé par des cris, des pleurs et des lamentations d'êtres humains dont les visages étaient défigurés de grimaces, se mouvant lentement, comme des acteurs d'une pièce de théâtre. Pourtant, Shun n'avait pas cette impression qu'ils jouaient la comédie et devaient souffrir réellement, même dans ce monde des morts.

-On raconte que ces gens ne pourront jamais trouver le repos éternel, éclaira le Verseau. Pour tant de diverses raisons, on ne leur permet pas de traverser les fleuves, et sont condamnés à errer sur le bord pour toujours.

-Il y a vraiment des conditions aussi sévères pour mourir paisiblement, s'interrogea Saori.

-Oui, répondit Shaka. Dans toutes les cultures et religions du monde, depuis la nuit des temps, tout dépend de la vie que l'on mène sur terre, les conséquences se jouent dans l'au delà. L'on croit souvent que mourir est un soulagement, mais ce n'est que le début d'une longue route vers la paix intérieure, et les fantômes, les esprits qui hantent par endroits ne sont pas anodins. Certains pensent qu'en se réincarnant ils agiront différemment, d'une meilleure manière que dans leur précédente vie, mais faut-il encore pouvoir passer dans le monde des morts pour cela. Et pour ces gens que nous voyons ici, ce ne sera pas chose aisée s'ils arrivent à traverser ce fleuve...

-Voilà des paroles bien sages et avisées pour un nouvel arrivant, s'écria une voix au beau milieu de l'eau.

Shun et les autres se tournèrent en cette direction et virent une barque approcher du bord, un homme à priori de grande taille ramant et guidant l'embarcation. Le jeune Andromède ressentait un cosmos émaner de cette personne, et la vue de cette protection noire et les regards méfiants de son frère et de Kanon notamment confirmèrent ses pensées: un Spectre.

-Vous êtes combien, aujourd'hui, demanda-t-il. Dix, hein... Pas que ça m'arrange pas, mais c'était pas le bon jour pour mourir, croyez-moi. Ils sont en sous effectif de l'autre côté, pour... pour des raisons qui ne vous concernent pas. Tant que vous avez de quoi payer pour dix, vous pourrez monter.

-Il faut payer, s'étonna Shun.

-Et oui, mon ptit gars. C'est la condition pour passer l'Achéron, et la raison pour laquelle tous ces pauvres bougres ne peuvent avoir un jugement décent aux Enfers. Si on vous a enterrés avec de l'argent, vous n'aurez pas à vous lamenter, croyez-moi... Et ne vous bilez pas, je prends tout ce qui a de la valeur, monnaie, bijoux... Même cette petite statue funéraire que votre archer semble cacher dans sa tenue, là...

Andromède tourna la tête vers Aiolos, et remarqua ladite statue: l'armure d'Athéna sous sa forme miniature. Le Sagittaire la dissimula aussitôt au creux de son armure d'Or.

-Hors de question, déclara ce dernier. Je ne vous...

-Nous allons réfléchir, fit Kanon au Spectre avant de rassembler le groupe. D'une voix qui ressemblait à un murmure, il reprit: vous avez remarqué que c'était un Spectre. Il n'a pas l'air intelligent comme ça, mais il vaut mieux se méfier et surtout éviter de tergiverser trop longtemps.

-Tu as donc une idée?

-Oui, Aiolos. Risquée mais sait-on jamais. À savoir de mettre en jeu l'armure d'Athéna.

-Kanon, ça va pas? Tu...

-Laisse-moi finir, Seiya. J'ai jamais dit qu'on allait lui donner la statuette. On va juste le laisser faire son boulot et on reprendra l'armure une fois de l'autre côté du fleuve.

-Tu crois que ça va marcher?

-Faites-moi confiance, Athéna. Nous sommes dix contre lui. Qu'on soit morts ou vivants, lui est en infériorité numérique.

La déesse acquiesça.

-C'est d'accord, confirma Aiolos. Si cette statuette nous permet de monter sur ta barque et d'arriver de l'autre côté du fleuve, nous paierons le voyage ainsi.

Le Spectre semblait examiner la miniature de ses yeux cachés derrière le casque de son surplis et déclara:

-Très bien, embarquez. Mais allez-y doucement, et ne vous agitez pas trop si vous ne voulez pas envoyer le pauvre Charon au fond... »

Etrangement, la traversée se faisait sans encombre, malgré les remarques désagréables du Gémeau envers le Spectre qui voulait entonner quelques chants pour à priori, égayer le voyage. Shun surprit plusieurs fois le Sagittaire donner des coups de coude dans l'armure de Kanon. Probablement pour lui rappeler qu'ils ne dominaient pas tant que ça la situation et qu'il devait calmer ses accès de nervosités. Parce qu'en effet, son cosmos doré se faisait ressentir par moments, surtout dès que Charon élevait la voix pour tenter un air aux notes pas très justes.

Andromède non plus ne se trouvait pas à l'aise dans cette embarcation, tous étant à l'étroit.

Tout en patientant jusqu'à la vue prochaine de la terre ferme, il observait ses compagnons, était particulièrement étonné du calme serein de Camus et Shaka, il constatait que son frère, Seiya et Hyoga ne perdaient pas le Spectre des yeux, tandis que Shiryu regardait vers l'horizon rougeâtre et Athéna avait les paupières closes, comme si elle priait.

« … vous avez l'air assez nobles, tous, fit Charon, brisant le silence. Vous êtes quoi? Un ordre secret et il y a eu un drame dans votre communauté et vous êtes tous tombés pour protéger votre dame, mais la tragédie a eu lieu quand même?

-Un truc du genre, oui, répondit Kanon en un soupir comme las.

-Ici, aux Enfers, on se rend pas compte de ce qui se passe à la surface et il nous tombe tous les jours toutes sortes de personnes, et mon rôle n'est que de les accompagner pour qu'ils aient un jugement adéquat. En tout cas, j'espère que vos âmes pourront être apaisées, parce qu'il n'y a plus grand monde ici. Notre seigneur Hadès a envoyé la majorité de son armée sur terre pour une guerre, mais moi, je suis le passeur des Enfers, je ne me bats pas, j'ai un boulot pour l'éternité... Ah, nous voici enfin en vue de votre destination.

Shun regardait la petite statue de déesse posée juste aux pieds de Charon. Comme ils l'avaient convenu, dès que possible, l'un d'entre eux devraient la prendre avant de fuir loin du passeur.

La barque s'arrêta à quelques mètres.

-Et voilà, mes bons messieurs dames. Puissent les juges vous indiquer le lieu le mieux adapté à votre mort...

Ikki, le plus proche de l'armure, tenta de s'en emparer au moment de descendre, quand la rame du Spectre le stoppa dans son élan.

-On ne touche pas à ça, mon garçon. C'est mon dû pour votre traversée.

-Mais nous allons quand même la récupérer, répondit le Phénix avec un regard de défi.

-Je te le déconseille fortement ou bien...

Entretemps, Seiya avait pris la statuette dans ses mains et s'apprêtait à bondir hors de la barque quand...

EDDYING CURRENT CRUSHER

Le chevalier Pégase fut projeté par dessus bord, du côté opposé de la berge, lâchant l'armure qui tomba elle aussi dans les eaux du fleuve.

-Seiya! s'écrièrent-ils tous.

-Tel est le châtiment de ceux qui osent me voler, déclara Charon. Et vous allez payer vous aussi pour avoir tenté de m'avoir de la sorte, ajouta-t-il en se mettant dans une position qui semblait offensive, sa rame juste devant lui.

-Athéna, vite, sur la terre, fit Hyoga tandis qu'il accompagnait la jeune fille sur le rebord.

-Vous avez dit... Athéna? Alors vous êtes...?

-Ses chevaliers, en effet, répondit Kanon. Et nous allons battre ton seigneur pour que cette guerre cesse enfin. Mais avant cela, tu vas faire remonter Seiya et l'armure de notre déesse du fleuve.

-Impossible, ricana Charon. Au fond de l'Achéron reposent des âmes tourmentées qui incitent ceux qui passent par dessus ma barque à les rejoindre. Et l'autre gamin il... QUOI?!

Le Spectre n'eut le temps de finir alors que Shun aidé d'une de ses chaines faisait revenir son ami des eaux.

-Seiya, tu vas bien, s'inquiéta Shiryu.

-Je... Pégase toussa à plusieurs reprises avant d'articuler... Désolé... l'armure je l'ai lachée et...

-Ne t'en fais pas, je vais la chercher, fit Shun tout en déployant ses chaines qui plongèrent dans le fleuve.

-Parce que tu crois que tu vas y arriver, sale mioche, railla Charon.

Ignorant la remarque, Andromède concentra son cosmos sur les maillons de ses deux chaines qui avaient disparu dans l'eau. Malgré une légère appréhension, il ne se sentait pas seul, il était entouré de ses ainés, ses amis d'enfance, et de son grand frère. Et il avait confiance en ces deux armes qui pouvaient traverser l'univers et les dimensions si nécessaire pour trouver ce qu'elles cherchaient.

Au bout de quelques secondes à peine, liée par le bout triangulaire de la chaine offensive, l'armure d'Athéna refit surface et vola en un long arc de cercle jusqu'à la terre ferme, dans les mains de la déesse.

-Comment tu... Charon ne semblait pas y croire. Petit morveux, tu vas me le payer! Vous allez tous me le payer!

-Kanon, Ikki-nii-san, et tout le monde, partez, ne m'attendez pas.

-Shun...

-Je vais l'affronter, Seiya. Tu l'as dit toi même, le Sanctuaire est en danger, et le temps presse. Amenez Athéna jusqu'au palais d'Hadès, c'est le plus important. Je vous rejoindrai, je vous le promets.

-Bien... si tu es sur de toi, dit le Gémeau.

-On se retrouve très vite, Shun, ajouta le Phénix.

Le groupe partit en courant sur un chemin en pierre bleu grise sinueux et montait vers le reste des Enfers.

Quant à Shun, il se tenait devant Charon.

-Tu m'as l'air un peu trop confiant, gamin. Tu tiens tant que ça à mourir dans le fleuve?

-D'ordinaire, je n'aime pas me battre pour le plaisir de la bagarre. Mais je n'ai pas le choix. Il en fallait bien un qui reste sinon tu aurais très bien pu nous expédier dans les aux profondes de l'Achéron l'un après l'autre...

-En tout cas tu n'es vraiment pas stupide, sauf que tu vas mourir...

Andromède étala sa chaine défensive au bout arrondi autour de lui, tandis qu'il lança l'autre vers le Spectre.

NEBULA CHAIN

Son attaque n'eut aucun effet, Charon faisant tourner sa rame à une vitesse vertigineuse et parant de cette manière tous les coups. Mais pas que. Des éclats s'en échappèrent et touchèrent le chevalier de Bronze un peu partout sur le corps, l'expédiant au sol.

Il sentit quelques douleurs le parcourir.

-Alors qu'en penses-tu, gamin? Ma Rolling Oar peut à la fois éviter tes assauts mais aussi je peux te les rendre sans problème! Et ta chaine au sol me semble relativement inutile également, ricana-t-il.

-Tu es si sur de toi, alors qu'on vient juste de commencer le combat.

-Parce que ma rame te rendra tes coups à la même puissance que tu me les enverras. En somme, tu vas mourir de tes propres attaques, et moi, je pourrais partir en toute quiétude voguer à nouveau sur le fleuve.

-Même si tu crois avoir un rôle indispensable dans ces Enfers, rien ne te permet de sous estimer tes adversaires, Charon, fit Shun alors qu'une aura rosée l'entourait, tandis qu'il se relevait.

-Oh! Tu vas rajouter un peu plus de puissance dans tes chaines, on dirait? Je te la renverrai avec plaisir, gamin. Et je te vaincrai enfin.

Andromède, tout en se concentrant, se souvint alors des paroles de son maitre à l'époque où il s'entrainait sur cet ilot perdu dans l'océan Indien, de ses enseignements sages précisant qu'il ne devait pas dépendre seulement de ses chaines, ni de son armure de Bronze. Et que sa force résidait en lui, au creux de son cosmos. Cette force bonne et puissante qui sommeillait dans son corps et que même ses poings pouvaient dégager de manière destructrice.

Shun s'était toujours refusé à demander des missions offensives, une fois devenu chevalier. Il apprenait, bien au contraire, à soigner dans l'infirmerie du Sanctuaire, et son intérêt pour la médecine grandissait toujours plus. Il avait même pu discuter une fois avec Aphrodite, le chevalier d'Or des Poissons. Un homme étrange au premier abord mais doté d'une connaissance infinie des plantes et de leurs vertus. Les circonstances de la Guerre avaient décidé qu'ils ne seraient pas sur le même front, mais l'adolescent espérait pouvoir à nouveau avoir une conversation avec lui, tout en soignant les guerriers blessés par ce conflit divin, et ensuite rire avec June et enfin, passer la nuit à regarder les étoiles avec l'ombre de son grand frère qui veillait sur lui au loin.

Pour cela, il devait à nouveau se déjouer de cette citation à l'entrée de la porte des Enfers et ne pas perdre espoir.

Il n'avait pas peur, et tout doute s'en était allé désormais. Son cosmos augmentait tout autour de lui, et, lâchant ses chaines qui pendaient mollement à ses poignets, il brandit son poing droit duquel une tempête naissait et s'abattit sur Charon.

NEBULA STORM

Le Spectre ne semblait opposer la moindre résistance, se faisant soulever par le courant d'air comme un bout de papier s'envolant au dessus du fleuve, si léger... Non... C'était Shun qui s'étonnait presque de la force de son attaque, alors que le surplis de son adversaire s'effritait peu à peu.

La tempête s'arrêta d'un coup, faisant retomber le passeur sur sa barque qui, emportée par les flots agités du fleuve, le récupéra en un lourd fracas. Plus rien sur l'embarcation ne bougeait alors.

Le bateau, guidé par les légères vagues dues à la Nebula Storm s'en alla au loin au beau milieu de l'Achéron.

Shun avait vaincu un Spectre. Était-il réellement mort? Peu importait. Il fallait rattraper les autres.

Il se remit d'un petit étourdissement, probablement dû au choc de l'attaque de Charon.

Regardant la route sinueuse, il se mit en route. Il n'était qu'au début des Enfers, et qui saurait combien d'ennemis allait-il affronter...


notes de fin: Merci d'avoir lu! J'ai adoré écrire ce chapitre, même le passage de Saori. Je n'ai pas eu de grosses difficultés, je savais où j'allais. En tout cas, selon les idées que j'avais, ça coulait de source. Sans m'en rendre compte, j'ai fait quelques petits clins d'œil totalement involontaires à la série d'origine, comme Aiolos qui brise un mur pour découvrir un truc derrière (comme chez loi au Sanctuaire avec son testament caché), le ''en avant chevaliers'' digne de Bernard Minet ou le ''je savais que tu viendrais''-like de Shun. J'ai bien ri en me relisant et découvrant ces lapsus peu désagréables...
La suite sera en réflexion dès que possible, je suis en constante construction de mes plans avec tant de recherches et de visionnages pour faire cette guerre.
Les caractères d'interlude sont 地下 chika, sous-sol en japonais.
Je vous dis à la prochaine. Des bisous