Notes: Bonjour, bonsoir. La suite de Saint Kanon est enfin là, je vous souhaite une bonne lecture


Vingt cinquième histoire: Enfants brisés

Environ dix années plus tôt...

Une voiture noire sillonnait les routes escarpées des massifs de la Forêt Noire, en Allemagne, avant d'entrer dans une propriété dont les grilles s'ouvraient au passage du véhicule.

Un homme vint ouvrir une portière et deux petites paires de jambes sautèrent dans le parterre en gravier pour s'émerveiller de la nature riche et luxuriante qui s'offraient à leurs yeux. Des allées de fleurs aux multiples couleurs, un immense château, et trois personnes qui les attendaient patiemment sur le parvis de l'entrée.

La petite fille riait à gorge déployée, rejoignant sa mère et enlaçant ses jambes cachées sous une jupe droite.

Le petit garçon se plaçait entre sa petite sœur et son père, un grand homme à la musculature imposante. Lui aussi avait le regard qui pétillait sous ses boucles sombres.

« Papa, il viendra Julian, demanda l'enfant.

-Non. Son père a dit qu'il était malade. Et il est préférable qu'ils restent chez eux en Grèce. La prochaine fois, il viendra jouer chez nous, Miguel, ne t'en fais pas.

-... d'accord, murmura le garçonnet un peu triste.

Cependant son sourire se dessina à nouveau sur son visage quand la petite fille des propriétaires du château vint à leur encore en courant, ses longs cheveux noirs et lisses volant dans les airs, autant que les volants de sa robe lavande.

-Pandore, s'écria la petite sœur de Miguel de sa voix fluette, lâchant sa mère pour rejoindre son amie.

-Bienvenue à vous au château Heinstein, déclara l'homme moustachu qui marchait lui aussi vers la famille qui sortait de la voiture, son épouse, une femme aux longs cheveux châtains ondulés qui volaient au vent. Je suis content de te revoir, toi et ta famille ici, dans notre propriété, Garcia.

-Merci à toi de nous accueillir, répondit le père de Miguel. Si je n'avais pas été autant pris par mes affaires, nous serions venus bien plus tôt. Heureusement, j'ai pu me libérer et nous rentrerons au Mexique que dans une semaine.

-C'est vrai, s'écria la petite Pandore. Miguel et Maria restent une semaine? C'est trop bien! »

Les enfants, emportés par la joie, formèrent une ronde à trois, sautant et riant à gorge déployée.

Dans l'entrée de ce domaine riche et luxuriant du château d'Heinstein, on avait une impression de se trouver dans l'antichambre du paradis. Comme un avant goût de ce que pouvait être une vie éternelle de bonheur et de bien-être pour l'éternité et même dans l'au delà.

過去

Depuis qu'elle était née, Pandore n'avait jamais été malheureuse. Toujours bien entourée dans cette immense propriété, ses parents, héritiers d'une lignée noble et œuvrant pour le bien être des villages alentour de cette région reculée d'Allemagne, la gâtaient d'un amour sans faille. Son père lui racontant des histoires sur leur pays, mais aussi des contes intemporels, de fée ou issus de bon nombre de mythologies. Et sa mère lui apprenant les arts manuels tels que la couture, le dessin ou même la musique. Cette dame avait embrassé une courte carrière de joueuse de harpe, avant de donner naissance à celle qu'elle appelait ''sa petite poupée''.

Cette dernière était curieuse de tout, préférant étudier dans les jardins du domaine en compagnie de ses précepteurs, plutôt que de rester assise devant un pupitre, les jours où le soleil éclairait la terrasse et les étendues de verdure et de fleurs. Elle aimait la vie, et rêvait un jour d'aller dans une école avec d'autres enfants.

Parce que ses seuls amis n'habitaient pas la région.

Julian Solo était en Grèce et Miguel et Maria Garcia habitaient de l'autre côté du monde, au Mexique, un pays si loin, qu'il fallait prendre l'avion pour aller les voir.

Pourtant, malgré son très jeune âge, elle savait qu'ils étaient tous amis et qu'ils le seraient pour toujours.

Et en cette journée d'été, elle riait aux éclats, tellement heureuse de retrouver ce frère et cette sœur venus jouer avec elle.

Certes les adultes avaient décidé ce séjour dans ce château pour des raisons de grands, mais peu importait. Pandore entrainait ses amis dans les jardins de la propriété pour courir dans les étendues d'herbe, les parterres de fleurs, jusqu'au petit mausolée au fond, un brin isolé.

« C'est quoi, cette petite maison, demanda Miguel.

-Je ne sais pas, fit la fillette. Mon père m'a dit que c'était un endroit où personne ne venait, et qu'un jour il le ferait tomber. C'est dommage, ça pourrait être mon petit château pour jouer...

-Oh oui, s'écria Maria. On serait des princesses et Grand Frère un prince aussi! On va voir?

Pandore n'eut pas le temps d'arrêter son amie qu'elle était déjà tout proche de l'édifice. En vérité, son père lui interdisait de s'en approcher, sans lui avoir donné de vraie raison. Mais les adultes n'étaient pas là pour la surveiller, ce jour là, et elle était avec Miguel et Maria. Elle ne craignait rien.

Tous trois arrivés devant la porte, ils purent l'ouvrir sans difficulté, le cadenas comme rouillé et brisé par le temps.

La jeune Heinstein fut prise d'un frisson qui parcourait son corps. Le vent qui circulait dans les jardins, probablement. Non, elle n'avait pas peur. Elle poussa la porte de toutes ses forces, aidée de ses amis et ils se retrouvèrent à l'intérieur d'une unique pièce circulaire.

En son centre, une sorte d'autel était érigé avec ce qui semblait être une boite.

Les enfants s'en approchèrent, intrigués.

-C'est quoi, demanda Maria qui, de par sa petite taille, s'était mise sur la pointe des pieds pour regarder. Une boite à trésors?

-Il y a un papier collé dessus, constata Miguel. Je sais pas si on a le droit de le toucher... Aaaah... »

Le garçon se mit à hurler, tout comme sa sœur au moment même où Pandore avait effleuré ce morceau de vieux papier où il y était inscrit des caractères en grec. Elle même se sentit propulsée en arrière par une lumière qui jaillit du coffret, et qui se divisa en deux.

Alors qu'elle vit ses amis quitter à la hâte le mausolée, elle allait les imiter, mais la porte se referma brutalement. Elle était prisonnière, tremblant de peur et à la merci de ces deux cercles lumineux, un argenté, l'autre aux nuances dorées. Elle n'arrivait pas à les quitter des yeux, effrayée par ces deux étoiles noires qui dansaient comme au ralenti.

Une voix presque irréelle, dénuée d'humanité résonna alors dans la pièce:

« Pandore, nous te remercions pour nous avoir libérés.

-Qui... qui êtes-vous...

-Nous sommes les dieux Hypnos et Thanatos. Les dieux du Sommeil et de la Mort qui accompagnent le Seigneur Hadès, dans les Enfers. Pandore, ton destin était de nous réveiller et très bientôt, l'âme d'Hadès renaitra dans le corps d'un de tes amis. Tu te dois de les protéger jusqu'au retour des 108 étoiles maléfiques qui constituent l'armée des Spectres, que tu dirigeras le moment venu. En attendant, veille sur tes amis, l'un d'eux est la réincarnation d'Hadès... »

Les lumières s'éteignirent aussi vite qu'elles n'étaient apparues et la fillette se retrouva quelques secondes dans le noir, perdue, incapable de bouger.

Puis, comme un automate, elle se releva, ouvrit la porte du mausolée et sortit dans le jardin.

Là, Miguel et Maria, encore choqués se précipitèrent dans ses bras, lui demandant comment elle se sentait, ce qui s'était passé.

Pandore resta silencieuse, essayant de comprendre cette force étrange qui grandissait en elle...

過去

« … Je n'ai pas tenu cet engagement de garder Miguel et Maria avec moi, reprit Pandore après un long silence. Tous deux étaient repartis avec leurs parents au Mexique. Quant à moi, j'étais toujours troublée par cette rencontre avec les dieux jumeaux. Je ne comprenais pas grand chose. C'était en consultant un des livres de mon père que j'eus réalisé la gravité de la situation. Un ouvrage sur la mythologie grecque parlant d'Hadès, de Thanatos et de Hypnos. Mais j'étais incapable de réagir, ni de savoir comment faire. Et, quelques jours plus tard, un séisme se produisit au cœur même du château d'Heinstein. À ce moment là, j'étudiais dans les jardins. En revenant à l'intérieur, une scène d'horreur se présentait sous mes yeux. Mes parents, mes professeurs et tout le personnel allongés à terre, immobiles, sans vie. J'étais la seule debout. Et pourtant, je n'éprouvais aucun chagrin. Comme guidée par une force invisible, je me revois avancer jusqu'au premier étage, là où se trouvait le grand salon avec le tableau nous représentant mes parents et moi. Juste à côté, il y avait ce grand rideau qui cachait un placard détruit laissant place à un escalier qui descendait. Du plus loin que je me souvenais, je n'avais jamais vu cet escalier, et pourtant, il ne m'avait pas surprise sur le moment. Et c'était sans la moindre crainte que je le descendis. Je me dirigeais pour la première fois vers ce royaume, où nous nous trouvons actuellement. Vers les Enfers, attendant la venue de l'incarnation d'Hadès. »

La jeune femme se tut, et ne prêta aucune attention aux réactions de ceux qui l'écoutaient, qu'ils fussent chevaliers d'Athéna, Spectre ou même son amie d'enfance retrouvée.

Dans son esprit, tant d'images revenaient: les Dieux Jumeaux qui l'avaient accueillie devant le palais de Giudecca, lui rappelant son rôle, de veiller sur le retour d'Hadès, de diriger d'une main de fer l'armée des Spectres et de tout mettre en œuvre pour vaincre Athéna.

Pourtant elle avait attendu de longues années seule, et peu à peu, des êtres effrayants pour certains, imposants d'autorité pour d'autres vinrent se soumettre à ses ordres, devenant des soldats, des guerriers, des Juges même. Cependant, parmi eux, aucun ne ressemblait ni à ses amis, ni à Hadès.

Ce ne fut qu'un jour où elle avait voulu remonter dans le château de son enfance qu'elle découvrit un corps meurtri, gisant au sol. Il portait une protection noire, bien plus noire que celles des Spectres, et de fins cheveux sombres ondulés s'étalaient sur le vieux parquet vermoulu.

Pandore reconnut, après tant de temps son ami, Miguel. Il avait grandi, était devenu un homme fort, mais vêtu d'une armure qui lui était étrangère.

En voulant le toucher, elle ressentit comme un choc, une étincelle puissante, comme un cosmos qui s'en dégageait. Il était vivant. Et, en ouvrant les yeux, son cœur à elle s'emballa. Elle découvrait un regard à la fois noble et imposant, un regard divin.

Les paroles que les dieux jumeaux avaient prononcées par le passé, dans le mausolée s'étaient avérées: un de ses amis seraient l'incarnation d'Hadès, et il était là, tout proche d'elle. C'était Miguel.

Après l'avoir ramené dans les tréfonds des Enfers, Hypnos et surtout Thanatos expliquèrent à Pandore leur stratégie, d'envahir la surface de la Terre, et ne laisser aucune chance à l'armée d'Athéna. Elle apprit ce qu'il fallait des chevaliers, et Miguel, plongé dans un sommeil profond, sans qu'on ne sache s'il était encore lui même ou si l'âme du dieu avait pris possession de son corps, écoutait malgré lui les paroles divines.

D'une voix neutre, comme perdue dans ses souvenirs, elle raconta tout cela et retomba dans le silence.

« … le temps passait, Athéna était revenue sur terre, reprit-elle en un murmure, cependant notre seigneur restait ainsi, immobile. Je sentais ce cosmos puissant, mais il n'ouvrait les yeux que très rarement, comme ce jour là où deux auras divines s'étaient rencontrées aux alentours de la mer Méditerranée...

-Ce devait être lors de mon entrevue avec Julian Solo... Poséidon je veux dire, fit la déesse de la Guerre.

-Tu connais... bien sur que tu ne pouvais que le connaître, Athéna, soupira Pandore. Tu es venue sur Terre sous la forme d'une riche héritière, c'est normal. La deuxième fois où Miguel eut ouvert les yeux, c'était avant ce séjour en Asgard. J'avais cru que son réveil était définitif, mais à mon retour, après cette défaite et l'enfermement définitif de Hypnos à Elysion, il s'était rendormi.

-Je me rappelle vaguement de tes paroles, intervint le chevalier du Phénix, à Asgard. Tu disais que Kanon des Gémeaux ne t'était pas inconnu...

-En effet. Il a le même regard que Miguel ou même Hadès. Comme si les trois personnes avaient les mêmes yeux, à s'y méprendre. J'y ai cru voir notre Seigneur éveillé venant nous chercher en Asgard, mais j'étais en tort...

-Que sais-tu de cette invasion au Sanctuaire, demanda Athéna.

-Une initiative de la part de Thanatos. Hadès étant encore plongé dans un sommeil profond que personne ne peut briser, la Mort a décidé de détruire toute forme de vie à la surface de la terre, s'octroyant un ordre que notre seigneur n'a jamais donné pour prendre le contrôle de la guerre à lui tout seul.

L'archer doré parmi les chevaliers s'insurgea:

-Mais... ce n'est pas de cette manière dont une Guerre Sainte entre Athéna et Hadès devrait se dérouler! Depuis la nuit des temps, malgré les interventions d'autres dieux, cet affrontement ne concerne en vérité que les deux véritables camps et...

-Je comprends ton indignation, Aiolos, coupa la déesse. Au Sanctuaire nos amis se battent au péril de leur vie, pensant que c'est la stratégie d'Hadès, alors qu'ils sont pris dans un piège duquel nous seuls pouvons les sortir. Et ce, en accomplissant notre mission.

-Oui, Athéna.

-Ne trainons pas, dans ce cas!

A la sortie du chemin menant aux abords du palais de Giudecca, la voix qui résonna à l'instant se révéla être celle de Kanon des Gémeaux. Cet homme au regard et au cosmos tellement similaires à ceux de Miguel, que Pandore en restait encore troublée, interdite et incapable de se relever.

Le chevalier avait du mener un combat terrible, probablement face à Rhadamanthe, à en juger l'état de son armure dorée fissurée et brisée çà et là. Et ce corps, même meurtri, semblait encore solide et prêt se battre encore.

-Kanon, tu es vivant, sourit Athéna.

-Oui, et nous ne devons pas trainer. Peu importe qui sert d'enveloppe charnelle à Hadès, il faut en finir au plus vite. Allons-y!

Pandore se releva d'un coup, une aura mêlée de violet de de noir l'entourant.

-Attendez! Ce n'est pas parce que je vous ai dévoilé des informations que je vous laisserai battre notre Seigneur aussi facilement.

-Cette guerre doit cesser, répliqua Athéna. Pour l'honneur des dieux, et pour l'équilibre de l'univers tout entier. Nous partons, Pandore.

-Je ne...

-Ecoutez Dame Pandore, couina d'un coup Zelos qui bondit sur les chevaliers. Vous ne...

Le Spectre fut balayé sans cérémonie par une trainée de flammes qui le projeta loin dans le paysage désolé des Enfers.

-Partons, Saori-san », déclara simplement le Phénix.

À cet instant, la commandante des Spectres réalisa qu'il ne restait plus qu'elle pour protéger Hadès. Plus aucun soldat présent dans le royaume, et même Zelos qui n'était pas le plus puissant, restait malgré tout fidèle au Seigneur. Il avait été anéanti par un chevalier de Bronze si rapidement.

La jeune femme était désemparée. Et prise de doutes...

Son rôle avait été le même depuis des années: veiller sur le corps d'Hadès et diriger les Spectres, mais au final qu'avait-elle réellement réalisé?

Même sa tentative d'alliance avec Asgard avait échoué, malgré l'énergie qu'elle avait donné pour le tenter.

Et en somme, ce n'était pas l'armée d'Athéna qui l'avait bridée dans ses actions, c'était bel et bien Hypnos et Thanatos qui l'effrayaient. Le Sommeil qui commandait réellement l'invasion au pays d'Odin, qui l'avait neutralisée au même titre qu'Hilda de Polaris. Et la Mort qui avait rassemblé la majorité des Spectres sous son aile pour s'envoler à la surface et détruire le Sanctuaire d'Athéna dans un premier temps, puis l'humanité tout entière et après...

Cela signifierait-il que les ambitions de Thanatos s'étendraient jusque dans les océans, et même les Enfers ou dans les cieux...? Et dans ce cas, que deviendrait-elle? Et Hadès? Et Miguel...?

Une armure dorée et une longue chevelure blonde s'imposèrent sous le regard de la jeune femme. Le chevalier d'Or de la Vierge, Shaka. Il montrait une sorte de collier serré fermement dans son poignet droit.

« Pandore, regardez les perles de ce chapelet, fit-il. Elles sont au nombre de 108, comme les Spectres qui combattent pour Hadès. À chaque mort d'un de ces hommes, leur éclat disparaît, rendant la perle terne. Voyez, il n'en reste plus beaucoup de brillantes. Je dirais au moins une dizaine mais pas plus. Et celle du Spectre qui vous accompagnait vient de s'éteindre elle aussi. Je ne prétends pas que les chevaliers d'Athéna sont plus forts, nous avons nous aussi subi des pertes. C'est un fait indéniable au cours d'une guerre. Cependant, nous tenons toujours debout et ici bas, il n'y a plus personne pour protéger Hadès.

-Que veux-tu chevalier?

-Je vais rester ici, le temps que ma déesse et mes amis atteignent le palais d'Hadès sans encombre, et je les rejoindrai ensuite.

Pandore aperçut Kanon hocher la tête en direction de Shaka, comme un signe qu'ils partaient, alors.

-Attendez, s'écria-t-elle.

Le cosmos du chevalier de la Vierge s'intensifia, immobilisant la jeune femme, la rendant impuissante à ce moment là. Pourtant elle ne voulait pas se laisser faire. Quitte à devoir l'affronter, elle empêcherait Athéna d'avancer.

-Arrêtez... Athéna, non..

Une autre aura se manifesta, sombre et ressemblant presque à celle de Shaka.

-Maria?

Son amie d'enfance s'était relevée, ses longs cheveux ondulés dansant dans les airs et au gré de son cosmos, tandis que ses yeux brillaient d'une lueur mêlant tristesse et colère.

-Je ne vous laisserai pas tuer mon frère, scanda la voix fluette. Je le ramènerai chez nous au Mexique, loin des Enfers, loin de vous tous, même de toi, Pandore! C'est votre faute à tous si nous avons perdu nos chers parents, si nous avons été enlevés par les Chevaliers Noirs.

Pandore ouvrit de grands yeux stupéfaite.

-Maria, comment peux-tu dire cela? J'ignorais tout de ce qui s'était passé après votre retour chez vous et...

-Bien sur, que tu ne savais rien. Mais tu viens de l'avouer, que c'était toi qui avais réveillé Hypnos et Thanatos, qu'ils t'avaient dit que ce serait mon frère qui était la réincarnation d'Hadès...

-Je ne pouvais pas...

-Tais-toi, coupa Maria. On n'a jamais voulu tout ça! Peu après notre retour au Mexique, notre père s'est fait assassiner par des tueurs à gages. Notre mère n'a pu le supporter et elle s'est même donné la mort, tandis que Miguel et moi avions été enlevés loin de tout, dans la jungle, près d'un site Aztèque. Tu te rends compte de l'ironie... On était cachés dans la nature, alors qu'à quelques centaines de mètres, des touristes s'extasiaient devant les ruines que notre famille se démenait à protéger. L'œuvre de toute la vie de notre père, qui voulait préserver le patrimoine. Et tu sais ce qui est encore plus ironique dans tout ça? C'est que nos ravisseurs c'était des guerriers, des malfaiteurs qui souhaitaient la destruction de tout ce pourquoi Pedro Garcia, notre père, avait donné sa vie. Oui, Miguel et moi avions passé de longues années avec ces criminels, les Chevaliers Noirs. On avait même été entrainés à en devenir. Résignés et voulant survivre à tout prix, nous étions devenus nous aussi ces criminels. Pourtant on s'est soutenus de toutes nos forces. Black Gemini et Black Virgo. Telles étaient nos nouvelles identités. Mais on n'avait pas oublié nos vrais noms. On se l'était interdit. Malgré l'ordre du chef, qui voulait qu'on renie nos origines. Avec Miguel, on s'était promis de rester soudés, inséparables. Même dans nos missions. Sauf un jour où il était parti en Allemagne, dans l'ancien domaine d'Heinstein sans moi. Ordre du chef des Chevaliers Noirs. Heinstein. Ce nom avait résonné dans ma tête, bien après la disparition étrange de mon frère. Puis tout était revenu une fois que, de mon propre chef, j'avais décidé de m'y rendre. J'y avais retrouvé le château, désormais en ruines, et puis surtout ce mausolée, d'où la tragédie de notre famille avait débuté. J'avais ressenti un peu du cosmos de Miguel à l'intérieur du château. Je me doutais qu'il y était, mais avant cela, je ne voulais laisser aucune trace de cette petite maison, pour que plus jamais il y ait un autel avec une boite scellée par un papier avec un mot écrit en grec ancien. J'avais détruit le mausolée. Et puis, j'ai suivi cette aura qui devait être celle de mon frère et s'éloignait peu à peu, jusque au fond d'un escalier. Sans réfléchir j'ai plongé dans un trou, et je crois que jusqu'à présent j'étais inconsciente. Je me suis retrouvée rouée de coups par ce qui devaient être des Spectres... Mais en vous écoutant, j'ai compris que Miguel était vivant, et je rentrerai avec lui sans faute. Alors moi non plus je ne laisserai pas Athéna le tuer, qu'il soit Hadès ou non. Il est avant tout mon frère...

-Tu ne peux rien faire, fit Shaka après un long silence qui avait suivi le récit de Maria.

-Comment ça?

-Tu n'es qu'une âme errante, tu as plongé dans le puits des Enfers sans réfléchir. Or, les êtres humains, à moins d'avoir été éveillés au huitième sens, ne peuvent franchir la dimension des morts vivants et en bonne santé.

Pandore s'était tue, et quand bien même elle faisait tout pour le cacher, son cœur s'était resserré en écoutant l'histoire de son amie d'enfance. Elle n'avait pas réalisé les conséquences de cet acte, à l'origine si innocent, que d'entrer dans une petite maison de pierre au fond du jardin de son château, d'ouvrir un coffret qui avait libéré des dieux qui apporteraient malheur et destruction. Ce qu'elle ne donnerait pas, à l'instant, pour se réveiller dans sa chambre, avec sa mère qui jouerait de la harpe d'un côté et son père qui lui lirait des contes de l'autre. Ce qu'elle aurait souhaité que tout cela ne fut qu'un rêve... Et pourtant c'était bien la réalité. Elle était la chef des armées d'Hadès et devait l'épauler jusqu'au bout. Cela, elle l'avait accepté.

Par contre, une vérité qui venait d'éclater à l'instant, était bien plus dure, plus brutale...

-Le... chevalier a raison, déclara-t-elle. Tu es bel et bien morte, Maria.

-... non... je... pourquoi des Spectres m'ont tabassée alors...? et pourquoi je n'ai pas le droit d'entrer dans le grand palais et...

-Les Spectres peuvent interagir avec les morts, les toucher et les matérialiser. Tu n'as pas été jugée, et en tant qu'âme errante, tu es considérée comme un intrus. Et par conséquent, notre Seigneur n'accepte pas de te rencontrer.

-C'était un grand Spectre blond qui m'a battue...

-Ce devait être Rhadamanthe.

-... ça veut dire que je ne reverrai jamais Miguel...?

-Je t'y emmènerai, Maria. Quitte à ce qu'on se batte contre ce chevalier, moi, Pandore, je te laisserai le voir. Si cela peut t'apaiser.

-Je me dois de vous le répéter, intervint Shaka. Mais la seule issue pour cette guerre, mais aussi pour le salut de vos âmes, est la victoire sans faille d'Athéna sur Hadès. Vous resterez ici en attendant. »

En son for intérieur, Pandore brulait de pouvoir verser toute sa colère et cette haine qu'elle éprouvait pour toute sa vie gâchée, son amitié avec Maria brisée à tout jamais. Mais en même temps, peu importait les conséquences, elle voulait que tout cela s'arrête. Peu importait qui gagnerait. La Mort ou la déesse de l'espoir. Elle était épuisée.

En regardant Maria, la tristesse l'envahit aussi. Cependant, toutes deux se battraient contre Shaka, s'il le fallait. Au moins pour revoir Miguel une dernière fois...

過去

Juste avant de pénétrer dans un corridor sombre qui mènerait à Hadès, Shun avait donné l'armure miniature à Athéna.

Cette dernière, l'effleurant du bout des doigts, l'éclaira de son cosmos et un phénomène à la fois étrange et féérique se produisit: des éclats de lumière dorée jaillirent de la statuette qui se détacha pièce après pièces, et grandit peu à peu pour se coller au corps de la jeune fille.

Saori Kido n'était plus.

Désormais protégée d'un casque où des motifs de laurier se mêlaient les uns aux autres, sa poitrine défendue par un plastron, tenant dans une main le bouclier de la justice et dans l'autre le sceptre de la divinité de la Victoire, Niké, la déesse se tenait là, fière et conquérante, son cosmos enveloppant les chevaliers autour, leur procurant une vague de courage de d'espoir.

Rien n'était perdu encore.

Au Sanctuaire, comme ici bas, aux Enfers, ils pourraient vaincre et ne laisser aucune chance à Thanatos de créer le néant sur Terre.

Tout en observant cette heureuse transformation, Kanon en oublia aussitôt son corps meurtri. Il était fier de cette jeune déesse dont le regard fixant droit devant eux leur indiquait l'issue certaine de cette guerre. Il croyait en elle, et sans plus attendre, il incita ses compagnons à la suivre.

D'un pas pressé, guidés par Athéna, ils arrivèrent dans une grande salle vide, soutenue par de hautes colonnes noires aux reflets bleu nuit.

Cela rappela l'espace d'un instant à l'esprit du Gémeau la salle du Palais de Pépé Shion, une nuit, où, enfants avec Saga, ils s'y étaient aventurés de nuit... avant de se faire rattraper par des servantes qui les amenèrent fissa dans leur chambre à coucher.

Cependant, là, l'ambiance était différente, malgré les immenses rideaux blancs et d'autres violets plus lourds qui décoraient la pièce. Devant eux, un être semblait somnoler, assis sur un siège, vêtu d'une longue robe d'un velours noir. Ses cheveux couleur d'ébène mi longs et ondulés tombaient négligemment sur les épaules.

Le groupe s'avança et Kanon put percevoir plus de détails sur cet homme immobile.

Aucun doute, ce ne pouvait qu'être Hadès ou bien Miguel ou les deux êtres ne formant qu'un seul.

Ce dernier ouvrit lentement les yeux, et le chevalier d'Or sentit un pincement sur sa peau. En se retournant, il comprit que c'était Aiolos qui l'interpelait, le regard inquiet et méfiant.

« Il te ressemble comme deux gouttes d'eau, fit le Sagittaire en un chuchotement. À s'y méprendre...

-Cela ne change rien, répondit le Gémeau. Il est notre adversaire... enfin celui de notre déesse. »

L'archer hocha de la tête.

Un mouvement se fit depuis le trône et l'homme se redressa:

« Athéna, déclara-t-il d'une voix résonnante, typique de celle des dieux. Te voilà enfin. Prête à constater mon ultime emprise sur la terre.

-Hadès, depuis la nuit des temps, je n'ai cessé de me battre pour protéger ce monde et ses habitants pour qu'ils puissent vivre en paix. En cette époque, je me tiens à nouveau face à toi, pour te prouver que la surface de cette belle planète mérite la lumière et la vie, et encore cette fois, tu perdras. »

D'instinct, Kanon se recula.

Le cosmos de la déesse s'intensifia si brutalement qu'il ne pouvait que s'écarter devant ce combat divin qui allait débuter.


notes de fin: Merci d'avoir lu ce chapitre, encore une fois, si dur à écrire. Mais je tenais à le faire sous le point de vue de Pandore, pour raconter son histoire et sa relation avec les deux personnages originaux que j'ai créés. On approche de plus en plus de la fin de cette guerre et l'écriture n'en est pas plus simple, bien au contraire!
Concernant Maria, Miguel, leurs origines et les chevaliers noirs, encore une fois, ça viendra à un moment ou un autre. Tout comme la suite qui a un grand besoin de travail en amont pour tout organiser.
Les kanji d'interlude sont 過去 (kako, le passé en japonais).
Je vous fais des bisous et à la prochaine.