VORACITY I - New World
Arc 4 : L'Écuyer Contrefait
Prologue
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Harddyn poussa un gémissement et s'effondra sur le torse massif de Zenberu. Allongé ainsi, il pouvait entendre son cœur battre et sentait sa poitrine se soulever au rythme de sa respiration devenue rapide à cause de l'orgasme. Il était bien. Il n'avait pas envie de bouger.
Il appréciait énormément les moments qu'il passait avec Zenberu. Et le Lacertéen répondait à chaque fois présent avec empressement quand Harddyn le convoquait. C'était… agréable. Il aimait ça. Mais c'était surtout parce que c'était Zenberu. Ses autres serviteurs étaient également toujours complaisants au sujet des divertissements sexuels, mais il préférait souvent faire appel à l'homme lézard.
Il appréciait beaucoup de choses chez lui. Son physique puissant, son enthousiasme, sa bite, son franc-parler. Ce dernier était assez comique d'ailleurs. Zenberu semblait tout le temps hésiter entre la franchise et un langage plus poli. Il commençait généralement une phrase de manière assez rustique avant de se rappeler à qui il parlait. Dans ses moments, il se mettait à bafouiller pour se rattraper, ce qu'Harddyn trouvait charmant.
Parfois, celui-ci se voyait faire d'autres choses que du sexe avec lui. Discuter, se promener ou encore s'entraîner. Même, juste se reposer ensemble, comme un coup… mais il revenait rapidement à la réalité. Zenberu était un serviteur et il était le maître. S'il se permettait des privautés avec lui, ou est-ce que ça finirait ? Alors il taisait ses envies et se contentait d'appeler son amant plus souvent.
« C'était… c'était… wow » murmura Zenberu au bout d'un moment.
« Parce que d'habitude ce n'est pas bien ? » Le taquina Harddyn.
« Ce n'est pas ce que je veux dire » s'empressa de corriger le Lacertéen. « C'est toujours formidable ! T'es un super bon… enfin… je veux dire que vous êtes très doué maître. »
Harddyn gloussa silencieusement. Il était heureux que l'homme lézard ne lui tienne pas rigueur de la petite séance de torture qu'il lui avait fait subir après sa résurrection. En fait, il était très satisfait de posséder à nouveau tous ses doigts à la main gauche. Il ne savait pas vraiment quoi penser des ajouts d'or dans ces cicatrices, mais puisque ça ne le gênait pas, il s'en contentait.
Harddyn sourit d'ailleurs en les caressant doucement. Il trouvait que l'or allait magnifiquement avec le vert de son corps. Mais soudain, son regard se fit vague pendant quelques instants alors qu'il recevait un message télépathique de la part de Ainz. Il soupira. Lui qui espérait un second round, ça allait devoir attendre.
« Vous devez partir ? » Demanda Zenberu.
Il commençait à avoir l'habitude que son maître reçoive des appels qu'il n'entendait pas. En Guerrier, il avait analysé et retenu les indices. Il pouvait à présent dire quand elles se déroulaient.
« Malheureusement » répondit Harddyn en se redressant.
Le sexe encore légèrement dur de Zenberu glissa hors de son anus, libérant des flots de spermes qui maculèrent les cuisses de l'homme lézard. Mais Harddyn claqua nonchalamment des doigts et lui et son partenaire se retrouvèrent à nouveau propres. Celui-ci se leva alors et se mit à chercher ses affaires pour s'habiller. Auparavant, cela aurait été assez simple. Cependant, depuis que les Lacertéens étaient sous domination de Nazarick, il y avait un changement de ce côté.
L'une des premières choses qu'avait faites Cocytus en tant que gouverneur avait été de commencer l'entraînement des Lacertéens. Et il ne s'était pas arrêté aux Guerriers, mais avait également donné des leçons aux Chasseurs, aux femmes et aux plus âgés des enfants. Même les Druides avaient reçu quelques cours. Selon lui, tout pouvait arriver et chacun d'eux devait savoir se défendre.
Pour l'occasion, à la demande de Cocytus, Nazarick avait fait livrer des équipements fabriqués sur mesures pour la physiologie des Lacertéens. Tous les Chasseurs s'étaient vus procurer des armures légères en cuir augmentant leur furtivité ainsi que des arcs et les Druides des robes magiques amplifiant leurs pouvoirs. Bien entendu, les Guerriers, eux, avaient reçu des armements plus conséquents et surtout adaptés à leur style de combat. Les Chefs, avec Zaryusu, considéré comme le Champion de Lacertéens, faisaient évidemment partie du lot.
Ce dernier, ainsi que Kyuku Zuzu, portaient des armures légères en métal pour le premier et en os pour l'autre. Zaryusu avait également récupéré Supplice Gelée après qu'elle ait été analysée par Ainz et Harddyn qui en avaient par la suite élaboré une version plus puissante. Son frère, Shasuryu, portait des pièces d'armures plus lourdes pour convenir avec son utilisation de la large épée à deux mains. Elle laissait cependant ses mains non protégées, car sinon il n'aurait plus pu pratiquer la Magie Druidique. Sukyu Juju, le Chef au lance-pierre l'avait abandonné pour une arbalète de poignet et une armure de cuir pour favoriser sa vitesse.
Zenberu, lui, étant un Moine, un artiste martial. Il n'avait besoin d'aucune arme à l'exception d'une paire de gants de cuirs renforcés remontant jusqu'au biceps et maintenus par des lanières. Il avait également une veste courte sans manches bordée de fourrure au col et ouverte sur son torse, un pantalon large pour ne pas gêner ses mouvements soutenus par une ceinture de tissus et pourvus de protège-tibias en métal. L'ensemble était si sexy sur lui que, la première fois qu'il l'avait vu, Harddyn n'avait pas résisté à l'envie de faire l'amour en gardant le maximum de vêtements.
Bien entendu, même armés, ils étaient loin de représenter une menace pour Nazarick. Ils étaient certes des sujets conquis, mais une récolte pouvait survenir n'importe quand. C'est pour ça qu'aucun des équipements ne dépassait le niveau Supérieur. Et c'était seulement ceux des Chefs et de Zaryusu. Il n'y avait donc aucun risque qu'un soulèvement ne puisse être rapidement réprimé.
« Tu sauras comment rentrer seul ? » Demanda Harddyn.
« Comme à chaque fois » répondit Zenberu en montrant le collier autour de son cou et l'anneau à son doigt.
Ce dernier était l'une des innovations d'Harddyn. C'était le quatrième type artefact de transport basé sur les Anneaux d'Ainz Ooal Gown. Si ceux-ci étaient décorés d'une pierre rouge, ceux des Gardiens de Niveau, violette, ceux des Gardiens de Zone, bleus et celles des autres serviteurs, verts, ceux-ci étaient d'une belle couleur jaune. Il les appelait des Anneaux Invités. Ils étaient distribués à certaines personnes qui n'habitaient pas Nazarick, mais qui y faisaient de fréquents séjours. Zenberu en possédait un. Neiryl également.
Leur utilisation était restreinte cependant. Ils ne pouvaient que leur faire profiter de la capacité d'escorte d'autres Anneaux plus puissants. Actives seules, ils conduisaient inévitablement à la sortie du Donjon. Bien sûr, même avec aussi peu de prérogatives, ça demeurait des outils dangereux entre de mauvaises mains donc ils devaient être confiés aux gardes en faction.
Le second objet
était quelque chose qu'Harddyn n'avait pas créé depuis longtemps. Plus de cent ans. Quelque chose qui appartenait à son ancienne vie : un Portoloin.
Malgré son aversion pour les sensations provoquées par ce type de transport, il ne pouvait nier son côté pratique. N'importe quel déchet ou simple caillou ramassé sur le bord de la route pouvait devenir un artefact permettant de se téléporter d'un endroit à un autre. Il pouvait être activé au terme d'une durée spécifique ou à un moment précis déterminé à l'avance. Les plus performants permettaient également d'être réutilisable à volonté et pouvaient mener à une ou deux destinations différentes.
C'était le cas de celui de Zenberu. Grâce à un vulgaire mot de passe, il pouvait le transporter devant les portes de Nazarick et avec un autre, le ramener au village des Lacertéens.
Harddyn attendit que son amant ait disparu pour penser à s'habiller. Il commença à ramasser les vêtements qu'il avait jetés un peu partout lors de son effeuillage passionné quelques instants plus tôt. Rapidement, il trouva sa jupe, sa ceinture, son pectoral, ses brassards ainsi que ses bottes. Avec cela, il ne lui manquait donc plus qu'une seule chose : son sous-vêtement.
Dans YGGDRASIL (et dans beaucoup d'autre jeu), le sous-vêtement était l'habit de base. Une fois qu'on avait enlevé l'intégralité de son équipement, tout ce qu'il restait c'était un slip (agrémenté d'un soutien-gorge pour les personnages féminins). Bien entendu, cela excluait toute Race n'ayant rien de particulier à cacher à ses endroits (comme les Squelettes). La nudité, pour basique que soit cette caractéristique, était donc une nouveauté.
Bien sûr, qui disait nudité, disait sexe (ça, Harddyn n'avait pas attendu pour l'essayer), mais aussi des tas de sous-vêtements affriolants à concevoir et à essayer. Il s'en était lui-même créé une collection et il avait laissé traîner quelques magazines de mode (dont certains pour de la lingerie) dans divers coins de l'Oasis. Depuis, Wrath, le Démon Artisan, débordait de commandes de toute part venant de PNJ désireux d'agrandir leur garde-robe. Il n'était pas en reste, car Harddyn l'avait vu porter récemment un string ficelle noir sous son tablier de bûcheron. Une vision assez torride.
Mais il ne parvenait pas à mettre la main sur celui qu'il avait enfilé ce matin en se levant. Pourtant il était facilement reconnaissable. En dentelle blanche, il possédait des rubans dorés sur les côtés pour l'attacher. Au bout d'un moment, il cessa sa recherche et soupira. Il prit une robe de chambre en soie nacrée qui se trouvait sur un siège et s'en drapa étroitement.
« Inquisada ! » Dit-il alors d'une voix forte. « Je sais que tu es là. Sors de ta cachette ! »
Il y eut un bruit provenant de dessous le lit.
« Inquisada ? »
« Hum… miaou ? » Répondit ce qui se trouvait sous le lit.
« Sors de là ! » Ordonna fermement Harddyn.
Quelque chose se mit alors à émerger de l'espace sous le large sommier. Ou plutôt quelqu'un. Une jeune femme. D'abondants cheveux blonds avec une frange qui lui arrivaient en dessous de la taille, des yeux bleus lagon, une peau claire, des lèvres roses… elle faisait beaucoup penser à Renner d'un certain côté, se disait Harddyn. Et tout comme elle, sa beauté dissimulait une âme tordue. Elle ressemblait pourtant à une sainte… littéralement puisque c'était un Ange possédant des Classes Cléricales élevées. Elle était à cet effet d'un habit blanc et bleu pâle aux allures monacales composées d'une longue robe fendue sur les côtés avec des manches à dentelle ainsi que d'une coiffe de la même couleur.
« Je ne vais même pas demander ce que tu fais là » commença Harddyn.
« Je… cherchais les toilettes. »
« Bien sûr. Maintenant, rends-moi ma culotte. »
La jeune fille cligna des yeux d'un air innocent.
« Votre quoi ? Votre culotte ? Moi ? Voy… Voyons, quelle idée » dit-elle avec un rire jaune.
Harddyn eut une petite sourire joueur et tendit la main, comme s'il attendait qu'elle le lui rende. Ce faisant, son peignoir de soie s'ouvrit, révélant un peu de son corps nu. Ce n'était pas par pudeur qu'il avait enfilé un vêtement, bien sûr que non. Il s'était rapidement rendu compte que la pudeur ne faisait plus partie de son vocabulaire. S'il s'était ainsi couvert, c'était pour avoir des arguments de négociations. En effet, quand la jeune fille aperçut la peau nue de son maître, elle se figea. Ses yeux s'écarquillèrent… et elle commença à baver. Abondamment.
« Oh… oh… oh ! Cette… cette peau ! Si blanche ! Si parfaite ! Si pure ! » S'écria-t-elle en se mettant à haleter. « Cette cuisse galbée ! Cette aisselle ! Et puis ce petit bout de sexe que l'on voit dépasser du tissu ! C'est tellement… tellement… »
En disant ces mots, elle leva ses deux mains et se mit à faire des gestes obscènes avec ses doigts. Comme si elle palpait Harddyn. Bien entendu, en faisant cela, elle révéla le sous-vêtement qu'elle tenait encore. En voyant cela, ce dernier referma alors brusquement sa robe de chambre, interrompant sa Servante dans son fantasme.
« Bien » dit-il. « Comme à présent nous avons prouvé que c'était toi qui avais ma culotte, rends-la-moi. »
Inquisada grimaça d'une douleur presque physique.
« Oh ! S'il vous plaît ! » Supplia-t-elle. « Laissez-moi juste… Laissez-moi juste… »
Puis, sans laisser le temps à Harddyn de réagir, elle porta le sous-vêtement à son visage et commença à le renifler.
« Oh ! Oh oui ! L'odeur de Maître Harddyn ! Oh ! » Gémit-elle en glissant son autre main dans la fente de sa jupe.
Inquisada avait aussi beaucoup de points communs avec Albedo… notamment son amour immodéré pour son maître et ses réactions plus qu'excessives. La différence, c'est qu'elle avait également la personnalité d'un vieux pervers.
« Non ! Inquisada ! Arrête ! Ne bave pas… dessus. Trop tard » soupira Harddyn. « Tu sais quoi, tu peux le garder. »
« C'est vrai ? » S'exclama Inquisada avec un grand sourire.
« Ce n'est pas comme si c'était le premier que tu me piques. »
« Je suis tellement contente que je le garderai toujours sur moi ! » S'écria la jeune femme sur un ton plus qu'enjoué.
Ce disant, elle plaça les lanières de côté du sous-vêtement derrière ses oreilles, le portant comme un masque sur son nez et sa bouche.
« Tu vas vraiment sortir comme ça ? »
« Bien sûr ! Comme ça, je pourrais sentir et goûter Maître Harddyn quand je le voudrai. »
« Ok, tu sais quoi ? Finalement, rends-le-moi » dit Harddyn en arrachant le sous-vêtement du visage de sa Servante.
« Mais, euh… » Geignit celle-ci.
« Allez ! Dehors ! »
La jeune fille grimaça, mais obéit sans discuter. Harddyn se disait qu'il faudrait qu'il la baise un jour. Histoire de faire retomber la pression. D'après ce qu'il savait, elle n'avait de rapport sexuel avec aucun des autres PNJ de l'Oasis, se réservant pour son Maître bien-aimé. Cela ne l'empêchait pas de se masturber à tout va et en public de manière bruyante. Parfois, elle le faisait avec les doigts, d'autres fois en se frottant contre sa crosse cléricale ou encore contre des meubles (surtout si Harddyn s'y était assis). Il lui arrivait également de se servir d'objets peu orthodoxes (mais tout à fait liturgiques) comme godemichet. Bref, rien d'extraordinaire pour les mœurs libérées de l'Oasis.
Harddyn soupira en regardant sa culotte trempée et la détruisit simplement avant d'en prendre une autre. Il fallait qu'il se dépêche. Il était attendu.
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Harddyn déplia la carte et la posa à plat sur le bureau, face à Ainz. Comme il la découvrait également, il se mit à l'observer.
« C'est les trajets préconisés par l'Administration Impériale ? » Demanda Harddyn.
« Et approuvé par Sa Majesté » ajouta Neiryl.
Celui-ci se tenait au centre de la pièce, tourné vers les deux Souverains de Nazarick. Il avait posé un genou à terre et gardait la tête baissée. En fait, il était assez mal à l'aise. Il avait rencontré celui que son épouse considérait comme son frère et il était terrifié. Cependant, ce n'était pas tant par son apparence que la froide et oppressante aura de pouvoir qui émanait de son être.
Harddyn, lui, se concentra sur la carte. Il fut heureux de voir que le tracé entre Arwintar et Nancledra était resté intouché. Cela voulait dire que tous ceux qu'il avait personnellement engagés (dont Bral), ou plutôt que Tiervain avait personnellement engagés, allait pouvoir garder leur emploi.
« J'imagine qu'ils veulent que ce soit fait rapidement » dit Harddyn.
« Oui. »
C'était problématique. À part Tiervain, enfin, le Doppelgänger qui se faisait passer pour lui, ils n'avaient encore personne de confiance pour s'occuper de ce genre de chose. Sur le plan étaient dessinées pas moins de 6 nouvelles lignes reliant Arwintar à différentes villes majeures. Même avec la Magie, Tiervain ne pouvait pas s'en charger seul aussi rapidement. Il fallait diviser le travail. Bien sûr, il pourrait envoyer d'autres Doppelgängers pour le faire, mais il ne désirait pas que toute l'organisation soit contrôlée par des serviteurs à lui. Il voulait utiliser la main d'œuvre locale afin de pouvoir stimuler l'économie de l'Empire.
Il devait donc engager des gens. Le problème majeur était la confiance. Accepter des étrangers aussi près de leur cercle intime nécessitait une bonne dose de confiance. Surtout s'ils les intégraient à leurs affaires. Devoir engager du personnel, mais en même temps devoir les surveiller n'avait rien de productif. Soit ils devaient pouvoir leur faire une confiance absolue, soit ils devaient faire en sorte qu'ils ne les trahissent pas. Cependant, toutes les idées qui venaient à l'esprit d'Harddyn n'étaient pas des plus acceptables. Selon son concept de carotte et de bâtons, il pouvait soit les fidéliser avec des primes (mais cela ne voulait pas dire qu'ils ne pouvaient pas les trahir dans leur dos) ou les menacer avec du matériel de chantage (chose qui finissait inévitablement mal puisque les intéressés voulaient faire cesser le chantage par tous les moyens).
Non, le meilleur moyen serait d'utiliser ses pouvoirs sur eux, mais il ne pouvait pas s'amuser à modifier la psyché de chacun d'eux pour qu'ils soient loyaux, c'était contre-productif… Cependant, à présent qu'il y songeait, il y avait peut-être une solution. Une solution magique. Toutes ces personnes allaient bien signer des contrats pour être engagées. Il fallait donc que ces contrats soient envoûtés pour que ceux qui y apposaient leur nom leur restent fidèles.
Les contrats magiques étaient en fait assez simples. Un papier enchanté était, certes, nécessaire, mais il pouvait être rédigé avec n'importe quelle encre. Bien entendu, il fallait également que la personne qui s'engageait de signer avec son sang, mais Harddyn connaissait l'artefact idéal pour ce travail. Comme à chaque fois qu'il pensait aux terribles Plume-à-Sang d'Ombrage, son regard était presque immédiatement attiré vers le dos de sa main droite. Pourtant, cela faisait très longtemps que la cicatrice formant la phrase « Je ne dois pas mentir » avait disparu. Cela datait en fait de ses premières années en tant qu'arbre mort. Étrangement, c'était aussi à cette époque qu'il avait appris que ces objets étaient très réglementés et que la femme les avait utilisés en toute illégalité (pas que cela le surprenne). À l'origine, ces plumes ne devaient être employées que pour signer des contrats… comme ceux-ci.
Recréer ces artefacts lui serait facile. Il pouvait le faire les doigts dans le nez. Il pouvait même y incorporer des charmes pour que ceux qui signent ne remarquent ni la douleur ni qu'ils le font avec leur propre sang. Il lui suffirait ensuite de créer des contrats particuliers à signer par l'intégralité de leurs employés. Ils seraient alors obligés d'en respecter les termes sous peine de mort. Bien entendu, Harddyn pouvait faire en sorte de leur faire croire qu'ils les respectaient de leur plein gré, leur enlevant ainsi toute velléité de révolte. Une fidélité inspirée par Magie en somme.
Oui. C'était parfait. Il ferait ainsi signer tous leurs secrétaires, leurs commis, leurs opérateurs financiers et également les coursiers de leur réseau postal. Comme cela, ils n'auraient plus à se préoccuper de problèmes d'espionnage industriel. Même les employés envoyés chez eux par les autres firmes se retourneraient contre leurs premiers maîtres.
« Il faudra vous concentrer en priorité sur la liaison avec Alimeda » déclara-t-il. « C'est la principale cité portuaire de l'Empire. Beaucoup de marchandises vont transiter par là. De plus, la circulation rapide des informations permettra peut-être aux navires d'éviter les Corsaires du Royaume. »
Bien entendu, comme ils étaient ennemis, ce dernier faisait tout pour gêner le commerce de Baharuth notamment avec les États Confédérés d'Argland qui se trouvaient plus au nord. En effet, pour le rallier, les bateaux de transport de l'Empire devaient traverser les eaux proches de Re-Estize où ils pouvaient être abordés par des pirates disposant de lettres de marque du Royaume. Avoir des informations sur leur position serait donc un atout.
« Comment se porte l'achat de cochenille ? » Demanda ensuite Harddyn.
« Les autres Maisons ont commencé à bouger, mais la majorité des stocks est entre nos mains » répondit Neiryl.
Il ne faisait que répéter à la perfection ce que lui avait dit Aryn, ou plutôt Anya, qui dirigeait l'entreprise en l'absence d'Harddyn.
« À cause de la pénurie, les prix ont flambé et il leur est impossible de nous concurrencer. Pas à moins d'abandonner leur marge. »
« Presser également l'allure pour la liaison avec Colgmen. Il faut absolument savoir rapidement quand l'engouement pour l'écarlate se tarira. Inutile de nous trouver avec du surplus sur les bras. »
« Je transmettrais tes… vos consignes. »
« Peut-on envisager bientôt un bénéfice brut ? » Intervint alors Ainz.
Puisque c'était cela, le but, gagner de l'argent pour Nazarick.
« Au train où vont les choses, avec l'expansion constante de nos activités et à cause des financements nécessaires, je crois qu'on ne pourra pas faire de bénéfice avant quelques mois… » répondit Neiryl, mal à l'aise. « Je peux demander à Aryn… Anya de rédiger un rapport plus précis, Monsieur… euh… Seigneur Ainz. »
Il s'était repris suite au toussotement d'Albedo qui se trouvait également dans la pièce. Comme beaucoup d'habitants du Grand Tombeau, elle ne supportait pas les humains. Mais elle prenait sur elle puisque c'était un invité de ses maîtres et elle incitait les autres à en faire autant. Cependant, elle ne tolérerait aucun manque de respect.
À ce moment-là, on toqua à la porte.
« Entrez » dit Ainz.
Yuri Alpha, pleine de dignité comme à son habitude, pénétra dans la pièce.
« Dame Cybertina Gadget et une Prêtresse de Tyresia demandent à vous voir » dit-elle.
« Qu'elles viennent » intervint Harddyn.
Yuri Alpha s'inclina et laissa passer les deux visiteuses. Cybertina était toujours vêtue de sa blouse mal ajustée et elle tenait une mallette à la main. La seconde silhouette était également féminine et d'apparence humanoïde. Du moins pour ce que l'on pouvait voir. Son corps fin à la peau d'albâtre était drapé dans un chiton d'un blanc immaculé. Un long voile du même tissu était posé sur sa tête et dissimulait toute la partie supérieure de son visage.
« Je pense que nous en avons fini avec Neiryl, n'est-ce pas ? » Demanda Harddyn.
« Il semblerait » dit Ainz en hochant son crâne.
Harddyn contourna alors le bureau pour s'approcher de son époux. Se faisant, il porta la main à son oreille pour toucher l'un de ses Cristaux de Changement Rapide et prendre l'apparence de Rakell Carnelian. Elle fit se relever Neiryl et l'embrassa sur les lèvres.
« Nous resterons en contact. Tu te souviens comment rentrer ? »
Neiryl hocha la tête et caressa la bague sertie d'une pierre jaune à son doigt. Sous ses vêtements se trouvait également un collier qui le ramènerait à sa chambre dans leur maison d'Arwintar.
« Quand est-ce que je te reverrais ? » Demanda-t-il.
« Tu as Anya avec toi non ? Elle a mon apparence en mon absence. »
« Ce n'est pas la même chose. »
Harddyn sourit, attendri. Il ressemblait à un chien malheureux comme ça. Il passa sa main dans ses cheveux puis embrassa son front.
« Je ferais en sorte de passer plus souvent. »
Neiryl hocha la tête puis activa le pouvoir de la bague avant de disparaître. Quand il fut parti, Harddyn reprit son apparence, puis se tourna vers les nouvelles venues en s'appuyant sur le bureau de Ainz.
« D'abord, Cybertina » dit-il.
« Oui ! » S'exclama la jeune fille alors que son image vacillait sous les émotions qui la traversaient.
Elle s'avança alors et s'inclina maladroitement devant ses Souverains. Elle était une PNJ et ils n'étaient pas en audience officielle donc elle pouvait s'abstenir de s'agenouiller.
« Je suppose que c'est un prototype de ce que je t'ai demandé » dit Harddyn en désignant la mallette.
« Plu… Plutôt la première version achevée » répondit Cybertina.
« Déjà ? Tu as fait vite. J'avais imaginé qu'il te faudrait plus de temps pour fabriquer les bons composants. »
« m'a bien aidé pour ça. Et il est prêt à lancer la production en masse à votre ordre. »
Harddyn sourit. C'est vrai qu'il n'avait pas du tout pensé à demander à Gear McFly de plancher sur le projet avec elle. Heureusement qu'elle l'avait fait parce qu'après tout, c'était logique. Gear était à la fois Mécanicien, Ingénieur et Pilote. Il avait la capacité de créer des Véhicules divers et variés.
À l'époque d'YGGDRASIL, vu la taille des mondes, il était difficile de se déplacer continuellement à pied. Même en courant. Ceux qui avaient des pouvoirs magiques pouvaient utiliser des Sorts de Téléportations ou de Portail. Cependant, il existait également une autre alternative : un moyen de transport. Au départ, cela n'avait été que des Montures, des Animaux ou des Monstres domestiqués afin d'accepter un ou plusieurs passagers. Il était possible d'acheter les plus basiques à des PNJ marchands toutefois, les plus rapides et manœuvrables ne pouvaient être trouvés que dans la nature. Des Joueurs possédant des Classes de Dresseurs ou d'Éleveurs pouvaient attraper et dompter des créatures sauvages et ensuite les vendre à d'autres.
Cependant, avec la 5e Extension, qui avait fait entrer le jeu dans l'ère de la Technologie, une nouvelle méthode pour se déplacer avait vu le jour : les Véhicules. Cela voulait donc dire qu'avec la bonne combinaison de Classes, on pouvait construire son propre moyen de transport motorisé ou alors le faire construire par quelqu'un. Cela pouvait aller de la simple trottinette au vaisseau volant. Bien évidemment, qui disait construction mécanique, disait également composant. Une nouvelle fois, on pouvait en acheter ou en créer.
C'était pour cela que Gear McFly devait avoir été utile pour le projet de Cybertina. Mais tout autant que ses Classes Artisanales, c'était ses Races qui avaient pesé dans la balance. En effet, l'homme était un Androïde. Un Robot. Grâce à ça et grâce à sa Classe d'Ingénieur, il avait pu acquérir la Classe spéciale Manufacture. Celle-ci lui permettait de construire des composants ou de petits appareils directement dans son corps pourvu qu'il ait les matériaux de base. Bien évidemment, avec un tel assistant, il était normal que Cybertina ait pu avancer aussi rapidement, tout comme il lui serait facile de lancer une production de masse une fois l'objet approuvé.
« Très bien, montre-nous ça alors » dit enfin Harddyn.
Cybertina hocha la tête puis alla poser sa mallette sur le bureau de Ainz. Alors qu'elle faisait claquer les serrures, Harddyn alla s'installer à côté de son ami. Finalement, l'IA en ouvrit le couvercle et la tourna pour en montrer le contenu.
Harddyn se retint de siffler d'admiration. Malgré l'avancée technologique de leur monde à Ainz et lui quand ils en étaient partis, la forme des téléphones portables était restée basiquement la même. Celle d'un simple rectangle. En définitive, c'était ce qui demeurait le plus pratique. Les deux que leur présentait Cybertina en cet instant conservaient un peu ce format de base tout en donnant un aspect très futuriste. Les appareils ressemblaient à des cristaux plats et mats d'un seul bloc taillés en pointe à facettes aux extrémités.
« Le noir est pour Maître Ainz. Le blanc pour Maître Harddyn » précisa Cybertina. « La couleur peut être modifiée et il est possible de rajouter des motifs. Je me suis dit que ce serait… bien de pouvoir les personnaliser… »
Ces derniers mots avaient été prononcés d'une voix faible, comme si elle avait peur d'avoir fait une erreur. Mais de l'avis d'Harddyn, ce n'était pas le cas. Il prit le sien et commença à la manipuler. Il se rendit d'emblée compte qu'il lui était possible de le tordre comme du caoutchouc.
« Flexibilité à mémoire de forme » dit Cybertina. « Il s'adapte au poignet. J'ai pensé que ce serait plus pratique. »
Harddyn suivit la consigne de l'IA et le posa sur l'un de ses avant-bras. Aussitôt, l'objet se courba pour s'y ajuster parfaitement, même avec ses brassards. Il fit quelques mouvements, pourtant il ne bougea pas. Il le récupéra ensuite avec son autre main et celui-ci se détacha, reprenant sa forme initiale.
« Pour l'allumer, il suffit de passer son doigt sur la surface la plus large. N'importe laquelle. Pour éteindre, il faut exercer une pression momentanée sur l'un des côtés » dits Cybertina en continuant son exposé.
Harddyn manipula son appareil pendant quelques instants. Il s'aperçut ainsi que l'écran pouvait s'afficher sur n'importe laquelle des deux faces et que le passage des doigts d'un côté ou de l'autre permettait de régler la luminosité et le son.
« L'interface a l'air assez basique et intuitive » dit Ainz.
Il avait pris son propre appareil et, à l'instar de son ami, avait entrepris de découvrir ses fonctionnalités. Apparemment, la surface tactile était compatible avec le contact de ses phalanges distales.
« Comme vous l'avez exigé, il n'y a que le strict minimum au niveau des applications et des paramètres. Je suis également en train de créer une base de données accessible sur laquelle vous pourrez plus tard télécharger des mises à jour et de nouvelles fonctions. C'est aussi là que vous pourrez récupérer des patchs correctifs. »
« Tu penses que ce sera nécessaire ? » Demanda Harddyn.
« Bien que ce soit un produit achevé, nous sommes toujours en phase de test. Je suis sûr à 95 % de la fiabilité du hardware. Mais pour ce qui est du software, je descendrai plutôt à 78 %. »
« Donc nous servons de cobaye, c'est cela ? » Demanda Ainz, pensif.
« Mais… mais non… pas… je ne voulais pas insinuer quoi que ce soit de ce genre, Maître Ainz ! » Balbutia l'AI, paniquée, en perdant presque sa forme.
« Ce n'était pas un reproche » la rassura Ainz. « Harddyn et moi sommes les seuls vraiment accoutumés à ce type de technologie. C'est normal que nous soyons ceux qui les testent. »
« Je me souviens que vous aviez dit que c'était un appareil de communication, Maître Ainz » intervint alors Albedo. « Mais comment cela fonctionne-t-il ? »
« Eh bien… » commença Ainz.
Mais à ce moment-là, son téléphone émit une sonnerie assez forte, une sorte de musique avec des gens qui criaient. Albedo jugea cela très harmonieux.
« Je vois que tu as trouvé ton bonheur dans ma bibliothèque sonore » dit Harddyn à sa Servante.
« J'aime beaucoup la musique classique » répondit Cybertina, gênée. « Ce groupe, Black Sabbath, est mon préféré. »
« Regarde Albedo » reprit alors Ainz. « Le nom d'Harddyn s'affiche. Ça veut dire que c'est lui qui appelle. En acceptant cet appel, je pourrais lui parle au travers de cet appareil. Un peu comme avec le Sort Message. »
« Sauf que je pourrais aussi envoyer des images fixes ou animées ou de simples messages. »
« Quelle est la distance maximale du réseau ? » Demanda alors Ainz.
« C'est un réseau magique et non satellite » dit pensivement Cybertina. « Justement, il utilise le même principe que Message, mais avec un système de cryptage des communications qui change à chaque appel en fonction d'un algorithme précis. »
Oui. C'était le minimum pour assurer la sécurité de leurs échanges d'information.
« Avec , nous avons fait un essai. J'ai rejoint l'équipe d'exploration de dans l'océan à l'Ouest et , celle de , dans les territoires à l'Est de l'Empire. La communication fonctionnait sans problème. »
Donc, cela voulait dire qu'en théorie ils seraient capables d'utiliser ces téléphones depuis et vers n'importe quel coin de cette planète. Et comme les communications ne dépendent pas de satellites, il était plus que probable que les lieux hors réseaux n'existent pas. Mais bon, ce n'était que de la théorie. Il n'empêche que ce petit appareil allait devenir l'un des instruments de la puissance de Nazarick et de son hégémonie sur le reste de ce monde.
« Quels sont son autonomie et son mode de rechargement ? » Demanda Ainz.
« J'ai repris et adapté un modèle de batterie multi charge trouvée dans nos archives » répondit Cybertina. « Elles ont une autonomie de 50 h en usage constant et se rechargent par contact soit avec de la chaleur corporelle, soit par un transfert automatique de magie. »
Donc Ainz pourrait l'utiliser.
« Pour ceux qui n'ont ni l'un ni l'autre, j'ai créé des chargeurs spécifiques. »
« C'est parfait Cybertina » dit Harddyn en installant à nouveau le téléphone autour de son poignet. « Tu t'es admirablement acquittée de ta mission. "Grâce à cela, nous avons maintenant l'utilité d'une Division Technologique que tu dirigeras."
« Moi ? Mais… »
« Ce sera à toi de constituer une équipe afin de développer la technologie de Nazarick en améliorant ce que nous avons déjà et en proposant de nouveaux concepts. Tu pourras t'entourer comme tu le souhaites en sélectionnant des Serviteurs de Nazarick et de l'Oasis ou en demandant l'invocation d'autres Créatures pour t'aider. »
« Ou… oui, Maître. Merci, Maître » balbutia la jeune femme.
Elle semblait au bord de la panique quand finalement on lui donna l'autorisation de partir. La Prêtresse de Tyresia, qui était restée totalement silencieuse et immobile lors de l'entretien de Cybertina, s'avança et posa les deux genoux à terre avant de croiser les bras sur son torse, comme en prière.
« Ô puissant Maître Ainz, Seigneur de la Mort, et vous Ô puissant Maître Harddyn, Seigneur de la Vie. Je vous remercie d'avoir permis à un être aussi insignifiant que moi de le présenter devant vous. »
« Il me semble l'avoir déjà vu » dit alors Ainz par la pensée. « Elle ne fait pas partie des 100 ? »
« Pas exactement » répondit Harddyn.
« Je me souviens pourtant bien l'avoir déjà remarqué lors de certaines assemblées. »
« Elle fait partie de la suite de l'une des 100 et lui sert alors d'intermédiaire. »
« Je vois… »
« Si je suis venu en ce jour le présenter devant vos augustes personnes » reprit la Prêtresse, « c'est que ma Maîtresse a demandé votre présence en sa tanière dans les plus brefs délais. »
« Quel outrage ! » S'exclama alors Albedo. « Ce n'est pas à Maître Ainz ou à Maître Harddyn de se déplacer, voyons ! Si cette Servante veut s'adresser à nos Souverains, elle doit… »
« Ça suffit, Albedo » la coupa Harddyn. « Si Tyresia nous demande, nous irons la voir. Ce qu'elle a à dire peut être important et elle ne peut elle-même se déplacer. »
« Je comprends alors, Maître Harddyn. Je vous prie de m'excuser » dit Albedo en s'inclinant.
« Nous ferions d'ailleurs mieux d'y aller maintenant » déclara Harddyn.
Ainz hocha la tête et se leva avant d'approcher de la Prêtresse toujours agenouillée.
« Conduis-nous » lui dit-il.
La femme se redressa et s'inclina à nouveau. Quand elle se baissa, Ainz aperçut quelque chose sous les voiles. Des yeux. De nombreux yeux.
« Pourquoi une telle urgence à ton avis ? » Demanda l'Overlord à son ami alors que tous deux suivaient la Prêtresse dans les couloirs de Nazarick.
« Je ne sais pas. Mais tout ce que j'espère c'est que c'est en rapport avec ses Capacités. »
« Ses Capacités ? »
« C'est une Voyante »
« Mmmm… je vois » répondit le Squelette, pensif.
Les Classes de Voyants étaient des Rôles particuliers sur YGGDRASIL. Bien entendu, il était impossible de prédire l'avenir. Cependant, ils étaient extrêmement recherchés quand il s'agissait de trouver des informations importantes. Les 3 Classes de ce type de Rôle, Voyants, Devin et Prophète (respectivement inférieur, intermédiaire et supérieure) leur permettaient d'avoir accès à un forum spécial sur lequel ils pouvaient acquérir des renseignements publiés par les Administrateurs (dont Harddyn). Cartes, quêtes secrètes, astuces, évènements à venir, etc. Plus leur niveau était élevé et plus ils pouvaient progresser dans le forum et trouver des informations importantes.
Bien entendu, dans le Nouveau Monde, ceux qui possédaient ces Classes ne pouvaient plus accéder à ce fameux forum (et de toute façon les informations qu'ils auraient pu y découvrir se seraient révélées inutiles). Cependant, jusque-là, aucune des Classes qu'Harddyn et Ainz avaient pu observer ne s'était retrouvée obsolète. Donc, les Voyants devaient bien servir à quelque chose, comme… vraiment voir l'avenir. Et c'était ce qu'Harddyn espérait en allant voir Tyresia.
Il l'avait rencontré à plusieurs reprises, mais elle se débattait avec ses pouvoirs. Elle percevait des flashs, des impressions, des sentiments, mais rien que l'on pourrait considérer comme de la véritable divination.
Ainz et Hariel suivirent alors la Prêtresse jusqu'à Ashurbanipal et empruntèrent le passage de la Salle de la Sagesse vers l'Oasis. Ils créèrent ensuite un portail qui le mena directement devant le Pavillon des 100 et jusqu'à la chambre de Tyresia. À cet endroit-là, au lieu d'une porte, il y avait une arche de pierre recouverte de voiles blancs. Derrière se trouvait une immense grotte sombre à peine éclairée par des braseros.
Le terme de « chambre » ou « d'appartement » était à prendre au sens large pour les 100. Plus que d'être simplement « décorés » en fonction de leurs goûts personnels, leur aménagement était également particulier à chacun. Par exemple, ceux d'Aude-Lise Deaunnadieu, la Reine des Pirates ressemblait à la plage d'une île déserte avec, au bout d'un ponton, un galion sur lequel elle habitait. Elle possédait aussi un équipage, des Monstres invoqués de différentes races, mais tous avec des caractéristiques de Pirates.
De la même façon, Tyresia (comme beaucoup d'autres) avait ses propres serviteurs. Chez elle, il s'agissait de Prêtresses, toutes identiques à celles qui étaient venues chercher Ainz et Harddyn. Cette dernière les conduisit d'ailleurs dans un coin de la grotte où se trouvaient ses collègues. Toutes étaient à genoux en position de prière, trois d'un côté et quatre de l'autre. Elles formaient une sorte de haie d'honneur menant à un énorme rocher sur lequel on pouvait distinguer une silhouette assise et drapée d'un voile blanc.
« Ô Sainte Tyresia » dit la Prêtresse. « Comme il me l'a été commandé je reviens accompagnée de nos Seigneurs et Maîtres Ainz Ooal Gown et Harddyn Emeryas. »
Elle s'inclina ensuite devant la Prophétesse puis rejoignit les autres, dans la même position. Harddyn et Ainz s'avancèrent alors au milieu d'elle et levèrent les yeux vers la silhouette perchée.
« Oh… Maître Harddyn… Maître Ainz… Quelle joie de vous voir ! » dit Tyresia d'une voix lente et rocailleuse qui résonnait sur les murs de pierre.
« Nous te remercions, Tyresia » lui répondit Harddyn. « Que désires-tu de nous. »
« Que vous écoutiez. »
« Écouter quoi ? » Demanda Ainz.
« Mes Mots. »
« Les Mots de la Sainte Tyresia » ajoutèrent les Prêtresses en cœurs.
« Quels mots ? »
« Ceux qui ont surgi dans les ombres de mon esprit » dit la Prophétesse. « Depuis des mois, je suis hantée par des images, par des sons et par des pensées… je vois des dragons faits d'ossements, des villages paisibles d'humains et de Gobelins en grand nombre, de villes saintes, de combat entre Morts-Vivants, d'êtres de chair s'adonnant à la chair… Parfois, j'arrive à y donner un sens et parfois non. »
En disant ces mots, elle avait écarté ses longs bras décharnés qui avaient glissé sous son voile.
« Et puis soudain, dans une clarté de début des temps, ils sont venus, les Mots ! »
« Les Mots de la Sainte Tyresia » répétèrent encore une fois les Prêtresses.
« Oui, je sais, elle est un peu théâtrale » répondit Harddyn en voyant le regard que lui envoyait Ainz. « Mais tu veux qu'on reparle de Pandora's Actor ? »
« Ces Mots sont en moi ! Ils brillent en moi ! Ils brûlent en moi ! Ils attendent d'être prononcés… »
« Les Mots attendent d'être prononcés. »
Soudain, le rocher sur lequel était installée la femme se mit à bouger. Il commença par vaciller puis par se mettre à rouler dans la direction d'Harddyn et Ainz, emportant Tyresia à son sommet. Calme, Harddyn posa sa main sur le bras de son ami. Il n'avait pas à bouger. De longues perches noires semblèrent alors surgir de nulle part et se plantèrent dans le sol, stoppant le rocher.
Bras ballants dans le vide, Tyresia paraissait toujours assise sur son perchoir déchu bien qu'elle soit plus qu'à l'horizontale sur lui. À ce moment-là, elle releva la tête, révélant un faciès hideux pourvu de deux immenses yeux noirs et de six autres plus petits de chaque côté alors que deux énormes mandibules poilues et pourvues de crochets émergeaient de sa bouche.
« Voulez-vous les entendre ? » Dit-elle alors dans un de chuintement.
« Le voulez-vous ? » Demandèrent les Prêtresses sur le même ton.
« Euh… » hésita Ainz.
« Oui » répondit Harddyn à sa place.
Aussitôt, quelque chose, une sorte de filin, surgit de derrière le rocher et se tendit vers le plafond. Puis, celui-ci se mit une nouvelle fois à bouger, mais cette fois à la verticale. Tracté par le filin, il se mit à monter, entraînant avec lui les longues perches noires et Tyresia.
« Les Maîtres veulent entendre les Mots de la Sainte Tyresia » dirent les Prêtresses.
Elles levèrent les mains et la lumière se fit plus forte, de plus en plus forte jusqu'à ce que finalement, il soit possible de voir le plafond. Le voile blanc de Tyresia tomba alors au sol, révélant la réalité de sa nature.
Jamais elle n'avait été assise sur un rocher, car ce n'était pas un rocher. De même que les perches n'étaient pas des perches. Il s'agissait de ses pattes. Quant au rocher, c'était son abdomen, un énorme et démesuré abdomen d'araignée. Il était bien trop grand pour passer par la porte. Par aucune porte.
Sous les yeux d'Harddyn et de Ainz, la Prophétesse Arachnoïde continua à se hisser jusqu'à la voute de sa grotte où se trouvait sa toile. C'était un enchevêtrement de soie nacrée aux allures impénétrables où elle se posa.
« Entendez mes Seigneurs, les Mots de Tyresia » dit-elle d'une voix qui résonna sur toutes les parois. « Entre le temps du Gel et celui du Soleil, viendra le temps de la Trahison. Sous la couronne faiblissante est Tapie l'araignée. Point ne tue, mais aspire ses forces vitales. Seigneurs du Grand Tombeau prenez garde, car de ses huit pattes avides qui tissent une toile invisible, seront l'outil de votre gloire. Mais la Sainte aux Roses d'Azur, guidée par la Princesse d'Or, s'apprête à brandir l'ombre et les ténèbres pour la frapper. Il vous faudra saisir cette chance pour la dominer ou la perdre à jamais. La Vierge de Cœur ouvrira la voie au Dragon. Et dans le tumulte du Démon Masqué, nul ne saurait voir qu'elle est enchaînée. Souvenez-vous. Le Dragon, la Vierge, le Démon, la Princesse d'or et son Chien le Plus Fidèle, le Bretteur Déchu, le Plus fort des Guerriers et l'Écuyer Contrefait. »
La voix de la Prophétesse résonna pendant encore quelques instants dans la grotte alors qu'Harddyn se répétait les mots qu'il avait entendus. Il n'était pas friand des prophéties. Après tout, c'était l'une d'elles qui avait causé la mort de ses parents. Cependant, bien interprétées, celles-ci pouvaient être des outils puissants… et il était presque sûr de celle-ci.
« Je te remercie Tyresia » dit-il finalement.
« Le Seigneur Harddyn remercie la Sainte Tyresia » dirent les Prêtresses.
Il fit alors volte-face et invita Ainz à le suivre hors de la grotte. Pendant ce temps là, Tyresia s'enfonça plus haut dans sa toile et se recroquevilla pour tomber dans le sommeil. Les Prêtresses baissèrent alors les bras. La lumière diminua et la gigantesque araignée disparut.
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« Tu m'expliques ? » Demanda Ainz.
« C'était clairement une prophétie, non ? » Lui répondit Harddyn.
« Mais peut-on être sûr de son authenticité ? »
« Et pourquoi pas ? »
Après tout, ils étaient dans un monde de Magie.
« Je pense qu'à partir de maintenant, Tyresia va nous réserver des surprises » dit pensivement Harddyn.
« Tu t'attends à d'autres prophéties ? » Lui demanda Ainz.
« Probablement. Mais pas seulement. Sache que Tyresia possède toutes les Classes de Voyantes. Ce qui veut dire qu'elle est également… »
« Une Pythie » souffla Ainz.
Sa stupéfaction était telle qu'il se figea sur place. La Pythie était une Classe supérieure rare, comme beaucoup de celles qu'utilisait Harddyn. À l'époque d'YGGDRASIL, ceux qui l'avaient, non content de pouvoir accéder au forum des Administrateurs pouvaient aussi leur poser des questions et recevoir une réponse de leur part. Un pouvoir énorme pour un jeu où l'information était la clé du succès. Mais ici, c'était différent. Est-ce que son pouvoir lui permettrait toujours d'atteindre le seul Administrateur encore présent, c'est-à-dire Harddyn, ou alors, comme la Pythie des mythes, pourrait-elle recevoir des réponses… des Dieux ?
Cette simple perspective fit frémir Ainz. Quand il sortit de ses pensées, il vit qu'Harddyn avait continué d'avancer sans lui.
« Mais pour cette prophétie-là, que penses-tu qu'elle signifie ? » Demanda-t-il en le rattrapant.
« Je n'ai pas encore tous les détails, mais je suis sûr d'une chose. Je dois me rendre dans le Royaume de Re-Estize… et vite. »
À suivre…
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Bon, j'avoue, c'est un peu long pour un prologue. Presque la taille d'un chapitre normal. Et j'explique beaucoup de choses. C'est juste que dans la suite, le point de vue ne sera pas toujours dur Harddyn, mais sur d'autres personnages. Ceux qui connaissent l'histoire d'Overlord savant qui puisque cet arc est basé sur celui des Hommes du Royaume.
Pour ce qui est de l'apparence de la tenue de Zenberu, je me suis inspiré de celle des moines de FFXIV. Surtout des artwork du Guerrier de la lumière. Si vous faites la recherche en anglais : "Warrior of Light Monk FFXIV", vous devriez voir de quoi je parle. Pour ce qui est des téléphones portables, si vous faites une recherche Google avec les mots "futuristic celle phone" vous devriez tomber sur l'image dont je me suis inspiré.
Pour imaginer l'apparence du visage de Tyresia, j'ai dû regarder des têtes d'araignées pendant deux secondes. Je vais faire des cauchemars pendant des mois après ça.
Bref, en tout cas, je vous remercie de continuer à me lire. Pour ce qui est des interludes dont je vous ai parlé. Est-ce que vous préféreriez que ce soit des chapitres à part ou qu'ils fassent partie de chapitres ordinaires ?
J'ai hâte de savoir votre avis. N'hésitez pas à répondre en même temps que vos commentaires et je vous dis à dans deux semaines.
