VORACITY I - New World

Arc 4 : L'Écuyer Contrefait

Chapitre 4

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Le bruit du métal contre le métal emplissait l'air à intervalle irrégulier. Parfois, les chocs s'enchaînaient de façon rapide alors que d'autres, ils étaient plus lents, plus calculés, mais aussi souvent plus puissants. Parfois également, on n'entendait plus rien. Rien à part deux lourdes respirations mêlées de pas dans le sable.

Les deux adversaires se faisaient face. Se regardant l'un l'autre droit dans les yeux. Gazef Stronoff, le Capitaine des Guerriers, tenait entre ses mains une broadsword à large lame, une arme qu'il manquait depuis l'époque où il était mercenaire. Celle que brandissait son opposant, en revanche, semblait plus frêle, aussi frêle que celle qui la tenait. C'était une rapière à la lame effilée et dont la garde encerclait parfaitement la poigne de son porteur. Il était difficile de croire qu'une lame aussi souple et fine puisse résister aux assauts d'une arme aussi lourde que la broadsword et pourtant c'était le cas.

Le poète avait dit « il plie, mais ne rompt pas ». C'était en tous les cas ce que se disait Aliz Jouvelon alors qu'elle faisait face à l'homme plus âgé et (censé être) plus expérimenté.

« Toujours aussi endurante » dit Gazef.

« Vous n'avez pas idée, Capitaine » répondit la jeune femme avec un sourire.

Gazef sentit son visage chauffer à ces mots, mais il secoua rapidement la tête. Ce n'était pas le moment d'être distrait. Malheureusement, ce simple moment d'inattention ne passa pas inaperçu aux yeux de son opposant qui entama son attaque en visant directement la plaque de métal qu'il portait sur son torse.

Aucun d'eux n'avait plus de protection que cela. D'ailleurs, leurs armes étaient factices. Il s'agissait de lames d'entraînements, émoussées afin de ne pas blesser l'adversaire. Il n'empêche qu'un coup reçu avec ces outils pouvait s'avérer douloureux. C'est la raison pour laquelle, tous deux portaient des gambisons par-dessus leur tunique ainsi qu'une plaque pectorale pour protéger le cœur. Leurs poignets étaient couverts par des brassards, leurs mains par des gants et leurs pieds par des bottes hautes, le tout en cuir renforcé. Il s'agissait de l'équipement minimal pour un entraînement sans gêne.

Avec ça, ils étaient prêts à se battre sans se soucier de trop se faire mal.

« Qui est cette jeune femme ? » Demanda Gazef à son second.

Elle se tenait accoudée à la barrière qui entourait le champ d'entraînement dédié à lui ses hommes. Les gardes du palais possédaient leur propre salle et s'il arrivait au Capitaine et au membre de son escouade de s'y rendre, ils préféraient ce terrain, plus petit, mais aussi plus discret. Normalement, les soldats n'avaient pas le droit de s'entraîner en extérieur, car les appartements des invités où séjournaient habituellement les hôtes importants bordaient la cour principale du Palais de Valencia.

Cependant, ce petit pré se trouvait plus à l'écart, par derrière le château de Ro-Lente. Ils pouvaient donc y aller à loisir. Cela aurait été trop étroit pour l'entraînement de la garde, mais pour les Guerriers de Gazef, c'était parfait.

Sauf que généralement, à part eux, personne ne fréquentait cet endroit. Certains devaient être au courant, mais aucun noble ne souhaitait être vu en compagnie de mercenaires comme eux. Et les quelques domestiques qui passaient par là ne le faisaient que pour transmettre des messages. La présence de la demoiselle, en pantalon et chemise avec épée au côté qui plus est, était donc des plus étrange.

« Je ne connais pas son nom » répondit le Vice-Capitaine. « Mais je crois déjà l'avoir vue en tenue d'Écuyer dans le Château. »

« Une femme Écuyer ? » Demanda Gazef, surpris.

« Il semblerait » dit son interlocuteur en haussant les épaules.

Gazef se contenta de faire obliquer ses pieds et de se pencher légèrement en arrière pour éviter la pointe de la lame. Mais, déséquilibré, il lui fallut faire glisser ses bottes sur le sol pour reprendre sa garde. Cela laissa le temps à Aliz de se replier elle-même pour tenter un nouvel assaut. Seulement, cette fois Gazef était prêt. Il pivota et abaissa son corps afin de se mettre hors de portée de l'arme. Celle-ci passa juste au-dessus de lui. Gazef se redressa alors et repoussa son adversaire d'un brusque bourrage de l'épaule au niveau de son aisselle.

Aliz souffla de douleur et se recula rapidement. Elle réussit à se remettre en garde tout en massant la zone que la Capitaine avait heurtée. Son corps large avait non seulement touché son flanc, mais aussi malmené son sein droit et ses côtes en dessous.

« Ce n'est pas des façons de traiter une dame, vous ne croyez pas » grogna-t-elle.

« Il le semble que vous avez subi et fait pire depuis que vous venez nous voir, non ? »

Aliz eut un léger rictus. Ce n'était pas faux.

« Ça fait le sixième d'entre nous qu'elle étale ! » S'exclama Allion avec ravissement.

Contrairement à la Garde, les Guerriers de Gazef acceptaient les femmes. Après tout, chez les mercenaires, peu importe le sexe tant qu'on faisait le job et qu'on frappait fort. Et c'était le cas d'Allion. Physiquement, elle pouvait être comparée à Gagaran, des Roses Bleues. Certes, elle n'était pas aussi puissante, mais elle se défendait. Ce n'était pas pour rien que la plupart des hommes avaient peur d'elle.

Cependant, cela ne l'empêche pas, quand vint son tour, de se faire étaler par l'Écuyère Jouvelon.

« J'en reviens pas ! Elle m'a fait un croche-pied ! » S'exclama Allion en se relevant après le duel. « Tu sais quoi, je t'aime bien toi ! »

Gazef devait également avouer qu'il la trouvait intrigante. Outre sa basse naissance, son style de combat était l'une des choses qui faisaient que les nobles le dénigraient. Pour eux, il se battait sans honneur, car tous les coups étaient permis, même les plus bas. Mais après tout, il avait été mercenaire. Dans ce travail, le plus important, ce n'était ni l'honneur, ni la gloire, mais plutôt de rester en vie suffisamment longtemps pour toucher sa paye (et la défendre).

Aliz Jouvelon, malgré le fait qu'elle soit noble, semblait avoir la même philosophie. Ce croche-pied qui lui avait permis de battre l'une de ses meilleures combattantes en était la preuve. Jamais aucun Chevalier ou Garde n'aurait osé ce mouvement.

« À qui le tour ? » Demanda alors joyeusement l'Écuyère. « Capitaine ? »

Gazef réfléchit quelques instants.

« Je passe pour aujourd'hui » dit-il finalement.

« Une autre fois alors » dit la jeune femme avec un sourire.

En voyant cela, l'homme ne put s'empêcher de penser à quel point elle était charmante.

Mais déjà, Gazef repartait à l'attaque. Croiser le fer avec lui était rude. Le Guerrier était fort. Il était difficile de parer ses coups avec la mince épée de l'autre combattante. Cependant, la dextérité de celle-ci rendait la chose presque facile. Au lieu d'opposer sa force à la sienne, elle utilisait son arme pour accompagner les assauts de celle de son adversaire, faisant glisser le fil émoussé de sa lame contre la sienne afin de la détourner habilement. Le tout était assorti d'un impeccable jeu de jambes.

En effet, contrairement au Capitaine, Aliz était extrêmement mobile. L'arme de celui-ci était lourde et par conséquent plus difficile à manier. Il devait alors concentrer sa force pour se maintenir en place ainsi que rester dans la position le plus stable possible. Cela limitait donc ses mouvements et également sa vitesse.

Au contraire, le style de combat d'Aliz correspondait à sa physionomie. Elle palliait son manque de force par une grande rapidité et malgré le fait que la plupart de ses coups aient été parés, le gambison du Capitaine était en piteux états, parcourus de nombreuses estafilades. Cependant rien qui ne soit dangereux pour lui. Ou handicapant pour le combat.

Cela se jouait donc sur l'endurance.

« Aliz ! Aliz ! Aliz ! »

« On dirait que vos subordonnés m'apprécient plus que vous » gloussa la jeune femme.

« La nouveauté, sans doute. Ou l'attente. Cela fait tout de même près de trois semaines que vous me faites patienter. »

« Vous avez été des plus… insistante, il faut dire. »

« Et maintenant, vous êtes tout à moi. »

Gazef sentit son cœur battre plus fort dans sa poitrine en entendant ces mots. C'était étrange. Il ne savait pas pourquoi il s'emballait de cette façon pour la jeune femme. Au départ, il avait pensé refuser. Certes, l'Écuyère était douée, mais tout de même assez loin de son niveau. Pourtant, elle avait continué à venir et à le défier jusqu'à ce qu'il accepte. À chaque fois, son intérêt se renforçait et au bout de quelque temps, il n'arrivait plus à la sortie de sa tête.

Elle n'était pas seulement douée, elle était également extrêmement réactive et avait la faculté à s'adapter assez facilement à n'importe quelle situation où adversaire. En fait, à force de la voir se battre, il avait ressenti quelque chose qu'il n'avait pas éprouvé depuis longtemps : l'excitation du combat. Il avait envie de l'affronter.

Heureusement, Gazef n'utilisait aucun Art Martial. Le duel aurait été bien trop court sinon. Et puis Aliz n'était encore qu'une débutante. Il lui manquait l'expérience nécessaire pour parvenir à obtenir ces techniques. Il était donc plus juste pour le moment qu'il se limite à sa seule maîtrise de l'épée.

Ce qu'il ignorait c'est qu'Aliz était loin d'avoir besoin d'avantage. Même si on omettait toutes ses Classes de Guerrier et les Techniques auxquelles elle lui donnait accès, Harddyn était un combattant émérite. Longtemps auparavant, quand il était encore sur terre, sa condition spéciale lui avait donné une soif sans précédente de connaissance. Raison pour laquelle il avait entrepris de longues études. Cette soif s'était cependant un peu épanchée, remplacée par un besoin d'essayer de ressentir à nouveau quelque chose. Pour cela, Harry avait appris l'art du combat. L'utilisation des armes à feu et blanches, le corps à corps, et ce partout dans le monde.

En vérité, toutes les hésitations et les maladresses que l'on pouvait voir chez Aliz avaient moins de rapport avec son inexpérience qu'avec les efforts que fournissait Harddyn pour diminuer son talent, un talent affiné et renforcé par ses nombreuses aptitudes physiques et mentales en tant que Maître de la Mort.

« Rester sur la défensive ne vous fera pas remporter ce duel » dit Gazef.

Il fit un pas, puis un second, forçant Aliz à reculer d'autant. Cela non plus n'était pas très bon dans une passe d'armes. Laisser l'adversaire gagner du terrain, c'était lui permettre de contrôler le combat. Bien sûr, Harddyn n'avait pas l'intention de gagner. Aliz avait beau être douée elle ne pouvait pas l'être au point de vaincre. À moins que…

La jeune femme se retint de sourire et attendit le bon moment. Malgré sa longue pratique, Gazef commençait à fatiguer. Il pouvait encore combattre pendant pas mal de temps, mais ses mouvements devenaient légèrement plus lents et irréguliers. C'était quasiment imperceptible, mais suffisant pour lui permettre d'agir.

« Vous m'avez encore battu » souffla Aliz dans une once de déception dans la voix.

Cela faisait au moins la troisième fois qu'elle se battait contre le Capitaine. Heureusement, cette fois, il n'y avait pas de témoins de sa défaite. Le combat s'éternisant, tous les Guerriers étaient repartis vaquer à leurs occupations.

« Vous y étiez presque » répondit galamment Gazef.

« Menteur » rit Aliz en s'essuyant le front. « Il fait chaud, non ? »

Pour incarner Aliz Jouvelon, Harddyn avait désactivé certaines de ses Compétences, notamment celle d'[Immunité aux Changements de Température]. Ce n'était pas la première fois qu'il faisait cela. Il lui arrivait souvent de faire la même chose quand il voulait profiter d'un bon bain fumant. Évidemment, une suée due à un entraînement n'était des plus agréables, mais il aurait été étrange qu'elle ne transpire pas.

« Nous pouvons nous rafraîchir au puits des écuries » dit Gazef.

C'était juste à côté. En fait, le terrain se trouvait derrière elles. Le Capitaine jeta le sceau à l'intérieur du trou sombre puis tira sur la corde pour le remonter une fois plein. Il le posa sur la margelle et y trempa sa main.

« Bien fraîche » dit-il en se la passant ensuite sur le visage.

Aliz fit de même, mais sa petite main ramenait à peine assez de liquide pour humidifier sa nuque.

« Oh, et puis zut ! » S'exclama-t-elle.

Prestement, elle ouvrit les boutons de son épais gambison et le retira. Puis elle prit le sceau et le renversa au-dessus de sa tête. L'eau glacée plaqua ses cheveux sur son visage et coula sur sa chemise et ses chausses. Elle était totalement trempée, mais elle se sentait beaucoup mieux.

« Je revis ! » S'écria-t-elle.

Elle se tourna alors vers Gazef et vit que celui-ci la regardait avec des yeux écarquillés et le visage rouge.

« Oh ! Je suis désolé » s'exclama la jeune femme. « Je vous ai complètement oublié. Je vais puiser un autre sceau. »

Elle se rapprocha de la margelle et par conséquent du Capitaine qui sursauta et se retourna.

« V… votre chemise… elle… »

Aliz cligna des yeux et baissa le regard. Elle comprit immédiatement ce que l'homme avait voulu dire. À cause de l'eau, non seulement le tissu collait à son corps, mais il était devenu très transparent. Cela donnait à quiconque une vue imprenable sur la peau claire de son torse et sur les deux petites bosses de ses seins.

En son for intérieur, Harddyn sourit.

Aliz attendit encore un peu puis, au moment où Gazef se fendit pour porter un coup descendant, au lieu de parler, elle se glissa à côté de lui et lui murmura quelque chose à l'oreille. Gazef se tendit. Ses yeux s'écarquillèrent et du rouge colora ses joues. Aliz en profita alors. Elle lâcha son arme puis colla son dos contre Gazef. Elle passa un bras au tour du sien et un autre derrière sa lame et se servit de ses muscles dorsaux afin de le forcer à la lâcher. L'attaque était si brusque que le Capitaine se laissa désarmer. Son épée tomba un peu plus loin, trop pour qu'il la ramasse. Aliz, de son côté, avait juste eu à se baisser pour récupérer la sienne et la pointer sous la gorge de l'homme.

« J'ai gagné » dit-elle avec un sourire.

« On dirait bien » dit l'homme d'une voix faible. « C'était un coup bas, ce que vous m'avez fait. »

« À la guerre, comme à la guerre, comme on dit » dit la jeune fille en haussant les épaules.

Elle baissa son épée et se rapprocha alors du Capitaine.

« Maintenant, si vous teniez votre promesse. »

« Ma… promesse ? »

« Ce que je vous ai murmuré à l'oreille. Ma récompense pour ma victoire. »

« Mais je… je ne pensais pas que vous… enfin, c'était juste pour… me déstabiliser, n'est-ce pas ? » Bégaya le plus puissant Guerrier du Royaume.

Alors, souris puis lui tendit sa lame d'entraînement.

« Si vous rangiez le matériel et que vous me retrouviez à l'étable » dit-elle d'une voix plus basse que d'ordinaire.

Gazef la regarda s'éloigner en clignant des yeux de stupeur. Rapidement, il nettoya les armes et les replaça sur leur râtelier avant de se diriger vers les écuries. Arrivé au puits, il vit le gambison d'Aliz posé sur la margelle avec un seau plein d'eau à côté. À la flaque au sol, elle devait s'être aspergée pour laver la sueur due au combat. Comprenant qu'il devait faire de même, il commença à déboutonner son propre vêtement remboursé tout en regardant nerveusement de tous les côtés. Il le posa également puis renversa le seau sur sa tête.

Il devait bien avouer que c'était agréable toute cette eau fraîche. Le sentiment de ses habits collés à son corps était certes déplaisant, mais il avait connu pire. Il se dirigea alors vers les écuries. Le tissu de sa chemise était devenu transparent, moulant son torse à la peau brune et aux muscles ciselés. À cause du froid, ses tétons foncés pointaient et il ne voulait pas que quiconque le voie dans cet état.

Heureusement, les lieux étaient vides à cette heure. Les palefreniers devaient être en train de dîner. Il s'avança à l'intérieur du bâtiment en cherchant Aliz des yeux. Il ne la vit pas cependant il aperçut quelque chose de sombre sur le sol. Il se rapprocha et le ramassa. C'était une botte. L'une de celle de l'Écuyère. Regardant autour de lui, il trouva rapidement la seconde qu'il ramassa également. Puis ce fut au tour des chausses. Il rougit en les prenant dans ses bras, mais continua son chemin.

Finalement à l'entrée de l'un des boxes les plus éloignés, il vit enfin le dernier élément de vêtement d'Aliz. Sa chemise. Il s'avança, mais alors qu'il allait aussi la ramasser, il se figea. Là, au fond de la stale vide d'occupant se trouvait la jeune femme. Totalement nue, la peau humide de l'eau du puits, elle était appuyée contre le mur du fond, l'une de ses mains caressant son corps et l'autre la fente de son sexe.

Comme hypnotisé, Gazef lâcha les affaires qu'il tenait dans les bras puis s'avança à l'intérieur. Marchant lentement, il ne pouvait détacher ses yeux de la vision que représentait Aliz. Il faisait sombre dans la boxe, mais les quelques rayons du soleil qui perçait au travers des planches de la bâtisse dessinaient sa silhouette frêle. Les gouttes d'eau sur sa peau scintillaient comme des étoiles. En se rapprochant, Gazef pouvait les voir couler sur son corps. Dégoulinant de ses cheveux sur ses tempes, ses pommettes hautes, ses lèvres fines et rosées puis descendant encore sur son menton pointu et sa mâchoire marquée. Elles dévalaient ensuite son cou gracile et restaient quelques instants bloquées sur ses clavicules apparentes.

Mais les nouvelles chassaient les anciennes qui s'écoulaient sur sa poitrine et contournaient ses seins. Certaines, plus téméraires, glissaient juste entre les deux, ruisselant sur le ventre plat et continuant soit sur les cuisses frêles, mais musclées, soit vers l'entrejambe imberbe. Les premières, elles, poursuivaient leur descente le long des jambes fuselées jusqu'aux fines chevilles dont il aurait pu faire le tour avec seulement deux doigts.

Perdu dans son appréciation, il remarqua à peine qu'il était arrivé juste devant elle. Toujours subjugué, il leva sa main et l'avança vers l'un des seins en forme de petite poire dont le téton rose pointait fièrement, une goutte d'eau tremblotant à son extrémité. Cependant, au dernier moment, il s'arrêta. La gouttelette frémit puis tomba au sol, mais Gazef, lui, ne bougeait plus.

Aliz sourit alors et prit sa main dans les siennes.

« Allons Capitaine, vous savez comment faire, non ? » Dit-elle malicieusement en posant la paume de l'homme droit sur son sein.

Gazef haleta et resta figé pendant quelques instants. Puis, petit à petit, il commença à malaxer le petit monticule en forme de poire.

« C'est bien, mon Capitaine » souffla la jeune femme.

Elle leva l'une de ses mains et la déposa à l'arrière de la tête de l'homme afin de la tirer vers son visage. Gazef se laissa faire et il ferma les yeux. Deux lèvres douces se posèrent sur les siennes. Une chaleur emplit alors son corps et il ouvrit la bouche pour happer celles-ci. Mais, loin de lui en laisser le contrôle, Aliz répondit avec la même fougue. Une bataille des plus délicieuse s'engagea donc entre les deux, chacun essayant d'aspirer les lèvres de l'autre tout en tentant de conquérir sa bouche avec sa langue.

Ce n'est qu'à bout de souffle qu'ils se séparèrent. Haletant, ils se regardèrent dans les yeux puis Aliz, avec une grande fébrilité, passa ses mains sous la chemise humide de Gazef pour caresser ses flancs. Malgré sa rudesse, sa peau était douce, mais également ferme. Chacun de ses muscles était dur comme le marbre. Alors qu'il reprenait ses lèvres, elle se mit à toucher son dos, ses hanches et même descendre jusqu'à ses fesses. Puis elles revinrent et effleurèrent délicatement ses abdominaux ainsi que la toison qui recouvrait sa poitrine. Elle saisit alors les poils foncés à pleine main faisant grogner Gazef de douleur, mais aussi de plaisir dans sa bouche.

Encore une fois, ils se séparèrent. Aliz entreprit de défaire les liens qui retenaient sa chemise puis, Gazef, d'un ample mouvement, s'en débarrassa et la jeta sur le sol avant d'embrasser à nouveau la jeune femme. Il avait beau la dominer de toute sa silhouette, elle était loin de se laisser faire. Comme dans l'arène, elle se battait telle une tigresse, refusant de lui permettre d'avoir le dessus dans leur joute… ce qui n'en était que plus excitant.

Déjà, alors que sa bouche semblait vouloir aspirer la sienne, ses mains étaient une fois de plus à l'ouvrage. Fébriles, elles s'attaquaient à présent à sa ceinture. Le cliquètement du métal emplissait les oreilles de Gazef alors qu'il sentait les doigts agiles de la femme décompresser son pantalon. Une fois le passage ouvert, elle plongea à l'intérieur et saisit son sexe déjà dur comme l'acier. Le Capitaine poussa un gémissement étouffé par les lèvres de son amante.

Doucement, celle-ci sortit le long organe de la gangue de tissu. Elle le sentait trembler dans sa paume. De la largeur de son poignet au moins, il formait une courbe magnifique couronnée par un gland épais d'un rose sombre. Elle caressa la peau délicate de la verge jusqu'au méat. Un liquide séminal gluant et chaud en coulait. Aliz en enduisit sa main pour humidifier le mât de chair et la passa ensuite en dessous pour soupeser et malaxer les lourds testicules.

Soudain, Gazef rompit le baiser et se redressa.

« Aliz… » haleta-t-il.

Celle-ci posa alors un doigt sur ses lèvres pour le faire taire. Elle mit ensuite ses deux mains sur sa poitrine, se dressa sur la pointe des pieds et déposa un léger baiser sur celles-ci. Puis, avec une lenteur calculée, ses mains commencèrent à descendre. Elles caressèrent doucement le poil noir et bouclé qui recouvrait ses pectoraux, s'attarda un peu sur ses tétons bruns puis les passa en dessous, sur les abdominaux. Ses doigts couraient sur la chaire imberbe à cet endroit-là. Lentement. Effleurant chaque bosse l'une après l'autre. Comme si elle les comptait.

Elle descendit ensuite plus bas, sur le pubis et saisir à nouveau la bite épaisse de son amant. Une nouvelle fois, Gazef haleta. Mais comme il n'y avait plus rien pour l'empêcher de s'exprimer à voix haute, un gémissement s'échappa de sa bouche. Les yeux fixés sur les mains d'Aliz, il les vit guider sa verge vers son vagin et glisser la pointe le long de la fente. L'humidité de celle-ci produisait un léger bruit liquide au passage de l'organe violacé.

Finalement, Aliz tira le sexe vers elles afin que le gland écarte doucement les lèvres de sa vulve et frotte son clitoris frémissant. Après cela, Gazef ne savait plus s'il s'était seulement laissé entraîné ou si, au comble de l'excitation il avait lui-même achevé le mouvement, mais toujours est-il que toute sa longueur disparut rapidement à l'intérieur du fourreau chaud et accueillant de la jeune femme. Celle-ci poussa un gémissement et passa ses bras autour des épaules de Gazef.

Celui-ci, éberlué comme à chaque fois, regardait son sexe écarter obscènement le sexe de son amante. Il était toujours étonné de voir un outil aussi massif entrer dans un interstice aussi fin sans le déchirer totalement.

« Gazef ! » Haleta alors Aliz. « Bouge ! Bouge, je t'en supplie ! »

Émergeant de sa stupeur, Gazef entreprit de reculer ses hanches pour faire glisser son organe hors de son fourreau délicieux avant de l'y enfoncer à nouveau d'un coup de reins. Aliz poussa un cri. Gazef recommença l'opération et, encore une fois, il fut récompensé par un son qui donna divinement à ses oreilles. Il se mit alors à faire des vas et viens rapides et puissants à l'intérieur du vagin de son amante. Les petits cris s'étaient transformés en longue litanie de gémissement. Habituellement, le Capitaine des Guerriers aurait pu être inquiet que quelqu'un puisse l'entendre, mais il était trop pris dans son désir pour se soucier de quoi que ce soit d'autre que de son sexe dans celui de sa compagne.

Alors que ses hanches bougeaient à un rythme irrégulier, son pantalon se mit à glisser et tomba à terre. Aliz, elle, s'appuya sur les épaules de l'homme pour soulever ses jambes et s'en servir pour enserrer le corps de Gazef.

Quiconque aurait pénétré dans le box à ce moment-là aurait pu assister à un spectacle des plus scandaleux. Le Capitaine des Guerriers du Roi, nu, le pantalon sur les chevilles, ravageant de ses coups de reins puissants son amante dont la silhouette disparaissait sous celle, massive, de son propre corps et dont on ne voyait que les jambes et les bras fins qui s'accrochaient à lui avec l'énergie du désespoir… et de la passion.

« Oh ! Gazef ! Plus fort ! Je t'en prie ! Plus fort ! » Gémissait Aliz.

Et ce dernier n'était que trop heureux d'obéir. Il accéléra la cadence en continu jusqu'à ce que l'orgasme terrasse sa compagne et que le resserrement de son vagin ne provoque le sien.

Gazef était allongé dans son lit. Dans sa maison. Mais contrairement à son habitude, il n'était pas seul. Un petit corps chaud et endormi se serrait contre lui.

Les yeux grands ouverts, il fixait le plafond éclairé par la lumière de la lune. Il se demandait comment il en était arrivé là. Après tout, il n'avait jamais fait ça. Coucher ainsi avec une femme. Certes, il était déjà allé voir des prostituées quand il était encore mercenaire. Il était tout de même un homme. Mais il était également un gentilhomme et il ne s'était jamais permis de toucher une femme de cette façon s'il n'était pas en quelque sorte engagé avec elle, même de façon non officielle.

Pourtant avec Aliz, c'était différent. Des sentiments, il y en avait, ça, il en était sûr. Du moins, c'était le cas pour lui. Cependant, il y avait autre chose chez elle. Un feu, une passion et surtout une décomplexion des plus totales. Jamais aucune femme qui n'était pas paye pour le faire ne s'était montrée aussi entreprenante avec lui.

Et pourtant, il n'y avait rien de vulgaire à cela. Il avait vu beaucoup de jeunes filles impudiques jeter leur virginité à ses pieds sans jamais ressentir la fraîcheur et l'innocence qu'il éprouve face aux avances d'Aliz. Pour ces filles, c'était comme braver un interdit. Leur attitude mêlait la honte de souiller leur vertige à la convoitise du fruit défendu. C'était peut-être pour cela qu'il n'aimait pas cela. Pourtant, avec Aliz, c'était différent. Elle se sentait dans son bon droit. Elle n'avait ni embarras pour ses envies ni besoin de ressentir le frisson de la transgression. C'était comme si, pour elle, c'était naturel.

Et Gazef avait succombé à son tour. Pour une fille qui avait presque la moitié de son âge. Il avait l'impression qu'elle pouvait lui faire faire tout ce qu'elle voulait.

Et c'était ce qui s'était passé. Jamais il n'aurait osé ne serait-ce qu'imaginer sortir le sexe de l'intimité et de la sécurité de la chambre à coucher. Cependant, il avait éprouvé des frissons en se laissant aller dans un lieu où ils auraient très bien où être surpris. Comme lorsqu'il se battait avec elle, il avait ressenti de l'excitation, celle du danger et de l'aventure.

Allongé sur la paille propre de l'écurie avec une nouvelle fois un corps chaud à ses côtés, il se sentait revivre.

Harddyn, lui, de son côté, se tenait avec la tête appuyée sur sa main. Dans cette position, il pouvait voir le visage mi-émerveillé, mi-apaisé de son amant. C'était étrange. Il n'avait pas vraiment prévu d'entamer une relation avec l'homme. Parce que c'était bien ça. Une relation. Après avoir couché plusieurs fois avec le même homme en peu de temps, on pouvait effectivement dire qu'ils étaient dans une sorte de relation… même s'il ne savait pas laquelle.

Le plus amusant, c'est qu'il était venu seul à lui. Certes, il avait joué de ses charmes, mais il ne s'était pas attendu à ce qu'il réponde, pas sans un peu d'aide de ses pouvoirs.

À présent, Gazef Stronoff semblait lui être totalement dévoué… et il ne savait pas du tout comment il avait fait.

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D'un pas lourd du fait de son armure, Martial Aquileus pénétra dans le Planispherium. Parfaitement circulaires, ses murs de marbres blancs étaient décorés de pilastres cannelés aux rainures dorées à la feuille. Ceux-ci s'élevaient jusqu'à la voûte et se divisaient en ramifications complexes avant de se rejoindre à sa clé, façonnant une énorme fleur. Celle-ci était cependant à peine visible, non pas que le plafond soit si haut qu'il se perde dans les ombres, mais plutôt à cause de l'illusion magique qui laissait apparaître le ciel étoilé.

Les astres étaient reliés les uns aux autres en constellations qui s'ébattaient sur le noir de la voûte céleste en un merveilleux ballet. Certaines d'entre elles filaient, solitaires, semblables à des comètes et d'autres faisaient des rondes, formant des galaxies. À certains moments, des nuages cosmiques aux teintes irisées traversaient l'espace, flottants comme leurs homologues terrestres. C'était un spectacle magnifique.

Bien sûr, Martial savait que ce firmament et ces constellations étaient ceux du monde d'origine de leurs Maîtres. Lui qui volait dans le ciel le jour en regardant le sol et qui se reposait au sol la nuit en regardant le ciel, savait que de telles constellations n'existaient pas en ce monde. Ici, les étoiles dessinaient d'autres formes sans doute liées à d'autres histoires et légendes.

« Quand nous aurons cartographié la terre et que nous connaîtrons notre monde, il sera alors temps de se tourner vers les cieux. Mais continuons à avancer un pas après l'autre et sans nous disperser. »

C'était ce que lui avait dit Maître Harddyn quand il lui avait parlé du firmament de ce monde.

« Mais rien ne t'empêche de commencer à t'y intéresser, si tu as du temps libre » avait-il dit également.

Cela était étrange aux yeux de Martial. Lui ? Un érudit ? Il avait été créé pour être un Guerrier. Mais cela n'avait pas d'importance aux yeux de Maître Harddyn. Au contraire. Il encourageait ses fidèles serviteurs à aller au-delà de ce qu'ils étaient afin de s'orienter vers ce qu'ils voudraient devenir.

« Si vous avez envie de faire quelque chose, d'apprendre quelque chose ou tout simplement de vous amuser, rien ne vous en empêche. Tant que c'est sur vos loisirs, ne vous limitez pas. »

Alors Martial avait commencé à lire sur l'astronomie. Et puis il s'était mis à dessiner le ciel qu'il voyait au-dessus de lui. Maître Harddyn lui avait même donné un télescope afin de mieux observer les étoiles quand il avait un moment de libre.

Cependant, en ce moment précis, ce n'était pas le cas. S'il était venu ici, c'était pour une raison bien particulière. Il avança alors dans la pièce, le métal de ses solerets frappant le sol de marbre. À chacun de ses pas, les petits personnages et animaux marquetés dans la pierre lisse s'écartaient pour éviter d'être piétinés. Il n'eut cependant pas beaucoup à se déplacer pour atteindre le seul meuble qui se trouvait là.

C'était une immense table ronde dont la surface était entièrement tapissée de parchemin sur laquelle était dessinée une carte. En vérité, c'était cet objet qui était vraiment le Planispherium. C'était un artefact d'YGGDRASIL qui permettait d'afficher des données cartographiques rentrées par les Joueurs. La pièce ayant été créée pour lui, elle en avait pris le nom.

Arrivé au bord, Martial tandis son gantelet et fit pivoter un couvercle circulaire positionné sur le pourtour de la table. Celui-ci révéla alors un trou d'où émanait une lueur irisée. L'Homme-Aigle tendit son autre main vers la besace qui pensait sur son côté. Il fouilla au milieu du matériel de dessin et des livres d'astronomie ainsi que divers Potions et autres objets nécessaires à sa mission et finit enfin par trouver ce qu'il cherchait. Il sortit une bourse qu'il ouvrit et dont il versa le contenu dans le trou. Il s'agissait de petits diamants lumineux qui furent immédiatement engloutis. Martial referma le couvercle et regarda la carte. Des taches d'encre commencèrent alors à apparaître au niveau de l'extrémité sud et celle-ci se rétrécit afin d'accepter les nouvelles données.

Comme à chaque fois qu'il faisait ça, pour tester son bon fonctionnement, Martial posa ses gantelets sur la surface de la table à l'endroit de l'ajout et les écarta. Aussitôt, cette partie du monde grossit afin d'occuper plus de place alors que le reste disparaissait au niveau des bordures. Dans le même temps, des renseignements supplémentaires se dévoilaient. Des forêts, des montagnes ainsi que des routes ou des agglomérations apparaissaient accompagnées de leur nomenclature. Martial posa ensuite son doigt sur un espace boisé, faisant émerger de nombreuses fenêtres avec des listes sur la faune ou la flore. Il savait que chacune des entrées de ces listes faisait apparaître d'autres fenêtres descriptives et qu'en faisant la même chose sur les villes, il pourrait avoir des plans et des données précises sur la population, les commerces, la circulation, etc.

Satisfait, il posa à nouveau ses mains sur la carte et, cette fois, les rapprocha afin de revenir sur la vision globale du monde. Cette table était décidément un outil interactif des plus précieux. Il ne savait pas encore bien s'en servir, mais il avait déjà vu leur Maître Harddyn l'utiliser. Avec la virtuosité d'un artiste, leur Seigneur était capable d'exploiter tout le potentiel de leur carte, changer son angle pour obtenir un meilleur point de vue, mettre des éléments en surbrillance, évaluer des schémas de migrations, faire apparaître des répartitions d'espèces végétales, etc. Tout ce pour quoi elle était nécessaire à Nazarick.

Le torse de Martial se gonfla de fierté en songeant à quel point il avait participé. Il se trouvait à la tête de pas moins de 8 équipes d'explorations composées d'Hommes-Oiseau qui parcouraient le monde pour le cartographier à l'aide d'Artefacts qui leur avaient été confiés par Maître Harddyn : des Sextants Anciens.

Normalement, seuls un Explorateur ou un Cartographe (une Classe de Rôle) pouvaient utiliser les Compétences permettant de fabriquer des cartes. Cependant, il existait également des Artefacts qui pouvaient de les imiter. C'était le cas des Sextants Anciens. Ils avaient beau ne pas payer de mine avec toute la rouille qui les recouvrait, leur pouvoir en était tout de même impressionnant. Il permettait, 1 fois par jour, de se servir de la Compétence [Invocation d'Esprits Cartographes Supérieurs] afin de réaliser une analyse topographique d'une fidélité exemplaire se déployant sur exactement 10 km en à peine 1 heure.

Chaque utilisation de l'objet créait un petit diamant lumineux à sa surface, comme ceux que Martial avait intégrés à la carte. Au bout de trois fois, l'Artefact lui-même tombait en poussière, ne laissant derrière lui que les diamants. Ceux-ci devenaient alors des Artefacts à part entière, des Souvenances Locus. Ils conservaient les données des lieux et permettaient d'utiliser la Compétence [Création de Cartes Magiques] par trois fois également avant de disparaître à leur tour.

Afin de répertorier leur avancée, l'équipe d'exploration utilisait une fois ces données et ils créaient une seconde carte pour l'équipe de récolte. En effet, les troupes de Martial étaient suivies à la trace par celle de Glutony. Le Démon de la Récolte avait sous ses ordres des myriades de petits Diablotins qui prélevaient végétaux, minéraux et même, animaux pour leur maître. Aidés de la magie de la carte, ils pouvaient ainsi collecter tous les échantillons possibles d'une zone e semaines, voir en quelques jours.

Bien évidemment, après la création de ces deux cartes, les cristaux étaient remis à Martial qui les amenait ici, au Planispherium où leurs données permettaient de compléter toujours plus le planisphère du Nouveau Monde pour Nazarick et pour leurs Maîtres Ainz Ooal Gown et Harddyn Emeryas afin de leur permettre de le conquérir.

C'est d'ailleurs pour cela que le Grand Tombeau était situé pile au centre de la mappemonde. C'était le point de départ des équipes d'explorations à partir duquel les nouvelles découvertes apparaissaient.

Auparavant, leur connaissance de ce monde se limitait aux Morts Azerlisia à l'extrémité Sud duquel ils se trouvaient, au Royaume de Re-Estize, à l'Ouest et au Sud et à l'Empire de Baharuth, à l'Est. Ils connaissaient également les États Confédérés d'Argland ainsi que la Théocratie de Slane respectivement au Nord et au Sud du Royaume, séparés de lui par la Chaîne du Pic des Eaux et les Collines Abellion.

Cependant, il y avait plus, tellement plus. Outre Re-Estize, l'Empire de Baharuth partageait ses frontières avec trois autres pays. Du côté Ouest, se trouvait toute l'Alliance des Cités-États de Karnassus (appelés souvent simplement l'Alliance ou l'Alliance des Cités-États), un pays composé de quatorze cités semi-indépendantes résultant de l'effondrement de la nation qui se trouvait là auparavant. Plus de la moitié de ces villes sont à dominantes humaines, mais comme pour l'Argland, de nombreuses autres races Humanoïdes et Semi-Humaines vivent également en paix, certains régnant même sur des Cités.

À l'Est de l'Alliance se trouvait ensuite le Royaume des Trolls et, en dessous d'eux, disposants d'une superficie presque égale à ces deux États réunis, se trouvait la Grande Nation Minotaure. D'autres, plus petits, gravitaient autour de lui comme celui des Tribus des Chevaucheurs de Wyverns au Sud-Ouest (et qui bordaient l'Empire au Sud), le Royaume Draconique (dirigé par un ancien Dragon, comme l'Argland) et le Pays des Hommes-Bête (composés d'une myriade de tribus en guerre, notamment, contre les Dragons).

Les deux premiers, le pays des Chevaucheurs de Wyverns et le Royaume Draconique (ainsi qu'une petite partie du Sud de l'Empire) bordaient une mer intérieure assez vaste assez allongée et dans l'axe Sud-Est/Nord-Ouest. Sur la rive opposée se trouvait en fait la Théocratie de Slane qui était bien plus étendue vers le Sud que ce que l'on aurait pu penser au premier abord.

Elle était bordée à l'Ouest par pas moins de quatre différents pays : le Royaume des Nains Noirs, celui des Elfes Sombres, celui des Hauts Elfes et enfin, un désert qui ne possédait pas vraiment de gouvernement, mais au centre duquel se trouvait Eryuentiu, la capitale flottante des Huit Rois Avides dans l'ombre de laquelle s'était développé une ville dont les habitants semblaient avoir hérité de la culture du Japon traditionnel du monde de leurs Maîtres Harddyn et Ainz. Probablement à cause d'autres joueurs venus auparavant ou même des Rois Avides eux-mêmes.

Ces quatre provinces formaient une sorte de frontière entre la Théocratie et un territoire nommé communément "Territoire des Tribus Demi-Humaines". Comme son nom l'indiquait, c'était une zone dans laquelle se regroupaient différentes Races de Semi-Humains, soit qu'elles aient toujours vécu là, soit qu'elles aient été repoussées par toutes les nations alentour et forcées de se terrer là. Toute la partie nord de leur territoire était composée des hauteurs des collines Abelions tandis que le reste était formé de forêts inhospitalières. Une autre chaîne de montagnes, la Dorsale, le séparait également des pays des Elfes et des Nains.

Leurs seules ouvertures étaient donc l'océan de l'Ouest, mais aussi le Saint Royaume de Roble avec lesquels ils partageaient une frontière. C'était en vérité une petite frontière. En effet, l'intégralité du pays formait une péninsule rattachée au continent par une mince bande de terre d'à peine une centaine de kilomètres. Celle-ci ouvrait directement sur le territoire des Semi-Humains qui attaquaient périodiquement, raison pour laquelle un grand mur avait été érigé pour les en protéger.

Tout au Sud, au-delà du désert d'Eryuentiu et de la Théocratie de Slane, mais aussi de la Mer Intérieure du Royaume Draconique et du Territoire des Tribus Hommes-Bête se trouvait une vaste zone dévastée et en friche au-delà de laquelle personne ne semblait déjà avoir été. Il était probable qu'il y ait quelque chose de l'autre côté, mais pour l'instant, ils n'avaient pas été découverts. Les équipes d'explorations elles-mêmes en étaient encore au début de ce territoire. Cependant, ce n'était qu'une question de temps avant que de nouvelles terres soient découvertes.

Un son particulier fit sortir Martial de ses réflexions et une grimace de dégoût déforma ses traits. Il connaissait parfaitement le bruit mouillé de pieds nus claquant sur le sol de marbre. Il n'avait même pas besoin de se retourner pour savoir de qui il s'agissait.

« Toujours allergique aux chaussures, sieur Sharcharock ? » Demanda-t-il simplement.

« Et toi, toujours un balai dans le cul ? » Ricana Jaw en s'avançant dans la pièce. « Comment t'as su que c'était moi ? »

« L'odeur méphitique du poisson avarié. »

L'Homme-Requin ricana et se plaça juste à côté de son camarade. Il pencha son énorme tête triangulaire et ouvrit sa gueule munie de trois rangées de dents.

« Si tu veux, je me ferais un plaisir de te le retirer ton balai » susurra-t-il d'un air entendu. « J'ai deux trucs bien longs et durs pour le remplacer entre les cuisses. »

« Barre-toi, putain ! » S'écria Martial en s'écartant et en portant la main à l'épée qui ceignait son flanc.

« T'es tellement excité que t'en as perdu ton accent le piaf ? »

« Je ne vois absolument pas de quoi tu veux parler, vil sélachimorphe ! » Renifla Martial.

« Mais c'est qu'on utilise des mots compliqués à ce que je vois. Si c'est pas mignon » ricana à nouveau L'Homme-Requin.

Il s'avança vers la table et ouvrit le couvercle en bois avant d'y verser sa propre cargaison de cristaux lumineux.

« Et voilà le travail ! » Dit-il alors que les informations apparaissaient sur la carte.

Les nouvelles zones explorées étaient dans l'Océan à l'Ouest du Royaume et dans celui du Nord, au niveau des Monts Azerlisia et de l'Empire.

« C'est tout ? » Renifla Martial avec un soupçon de moquerie. « 6 mois pour "ça" ? »

« Eh ! Tout le monde n'a pas la chance de pouvoir se concentrer exclusivement sur la cartographie » siffla Jaw. « Glutony et ses larbins sont pas amphibies alors faut bien qu'on s'occupe nous-même de la récolte. Évidemment, ça va moins vite. »

« Voyons, voyons… » dit L'Homme-Aigle avec légèreté en manipulant la carte. « Des coraux, des poissons, quelques mammifères… vous n'avez pas trouvé grand-chose. »

« Je t'en pose des questions ! » S'écria le Requin en montrant les dents.

Cette fois, il était vraiment agacé.

« Pas de nouvelle espèce intelligente, pas de monstre marin… quel ennui » soupira exagérément l'aigle chevalier. « Je pense que Maître Harddyn et Maître Ainz vont être déçus. »

« Les Boss m'ont ordonné d'explorer, alors j'explore ! » S'écria Jaw au comble de la colère. « Peu importe ce que je trouve ou que je ne trouve pas tant que je rapporte tout dans les moindres détails ! C'est quand même pas une tête de piaf qui se prend pour une poule de luxe qui va me faire la leçon ! »

« Une… une poule ! » S'étrangla Martial. « Retire ce que tu viens de dire, espèce de… de sale… poisson ! »

« En voilà de l'insulte ! Et en plus, ton accent se fait la malle à nouveau ! »

« Moi au moins j'ai un cerveau, espèce de brute ! Encore heureux que tu n'aies pas rencontré d'autres races pensantes sinon tout ce que tu aurais trouvé à faire ce serait de leur donner des coups ! »

« Je te signale que j'ai un cerveau, boîte de conserve à ambulante ! »

« Ouais, dans ta bite ! »

À ce niveau de la dispute, Martial était si outré que l'accent distingué et le langage châtié avec lesquels il avait l'habitude de parler avaient complètement disparu. À la place, il hurlait comme un putois sans même plus chercher à la cacher. Pas qu'il y serait parvenu tant il était en colère.

« Mes bite ! Ça connaît mon nom scientifique, mais c'est même pas foutu de savoir que mon espèce en a deux ! »

« Une ou deux, quelle importance puisque tu réfléchis avec ! »

« Je croyais que j'avais pas de cerveau ! »

« J'ai pas dit que tes bites étaient intelligentes ! »

« Moi au moins je m'en sers ! La tienne à force d'être coincé dans ton armure et de cuir dans son jus, elle doit d'être ratatinée ! »

« Tu sais quoi ? Va te faire foutre ! »

« Avec plaisir ! Je suis pas pudibond, moi ! »

« Oh ! Un mot de trois syllabes ? Impressionnant venant de ta part. »

« Et toi t'es qu'une espèce de… »

« Hum hum ! »

Les deux Hommes-Bêtes se figèrent et un frisson glacé parcourut leur échine. Le toussotement qui les avait interrompus était accompagné d'un léger nuage de fumée qui se dissipa rapidement dans l'air. Ce seul indice avait suffi aux deux belligérants pour reconnaître la personne qui était arrivée dans leur dos et surtout pour faire immédiatement cesser leur querelle. Toute colère et frustration avait été abandonnée pour être remplacée par une seule émotion : la peur.

« Ex… Sieur Expelarius » bégaya Martial en tournant la tête vers son interlocuteur.

Il avait, semble-t-il, retrouvé son accent. Cependant, celui-ci était empreint de terreur.

« Que nous vaut le plaisir de… »

Il fut interrompu par un grognement et un nouveau nuage de fumée. La surprise faillit faire glapir l'Homme-Aigle qui eut juste le temps de refermer son bec dans un claquement. Il aurait voulu pouvoir soutenir l'œillade de son interlocuteur, mais il ne pouvait que regarder partout sauf dans les prunelles rouges qui le surplombaient.

Ni Martial ni Jaw n'étaient vraiment petits. Pourtant la personne en face d'eux les dépassait d'une tête au moins. Sa haute silhouette ainsi que les larges ailes de cuir dans son dos obscurcissaient presque l'espace autour de lui. Celui-ci n'était autre que le supérieur des deux hommes, un Seigneur puissant tant par son pouvoir que par la force de sa lignée. En effet, l'être était tout comme eux un Homme-Bête, mais l'animal avec lequel il partageait son ADN n'avait rien de commun avec ceux de Martial ou Jaw. En effet il s'agissait rien de moins que celui d'un Dragon.

Pourvu d'un corps massif, il était vêtu d'une armure noire rehaussée d'or avec, par-dessus un tabard de couleur émeraude. Cette dernière rappelait de temps en temps celle des écailles qui recouvraient son anatomie. En effet, selon la lumière et l'angle sous lequel on les regardait, elles paraissaient tantôt vertes et tantôt bleutées.

Sa tête triangulaire était surmontée de bois de cerfs et une crinière ivoire courait du haut de son crâne jusque dans sa nuque et disparaissait dans son col pour ne réapparaître qu'au niveau de sa queue dont le plumeau fouettait le sol avec agacement. Deux vibrisses blanchâtres émergeaient de son museau fuselé et formaient comme des moustaches ourlées sur son faciès.

« Et bien… » dit-il de sa voix profonde et grondante.

« Je… et bien nous… voyez-vous, Sieur Expelarius, Sharcharock et moi nous… décisions pour comparer l'expérience acquise lors de notre mission d'exploration… vous savez… afin de… de partager nos informations et nous permettre de… mieux les réussir… n'est-ce pas ? »

Il se tourna vers son compagnon qui n'avait pas dit un mot depuis l'apparition du Dragon. Malheureusement, Martial se rendit alors compte qu'il n'y avait pas d'aide à attendre de sa part. En effet, le requin avec la gueule grande ouverte et le regarde vide. Il s'était évanoui debout.

« Mais… mais que vois je ! » S'exclama l'aigle en sortant son tout nouveau téléphone portable. « Il est déjà si tard. Nous devrions rapidement repartir sur le terrain, vous ne pensez pas, Sieur Expelarius ? »

Il n'attendit pas la réponse de ce dernier et saisit le poignet de son compagnon avant de le tirer précipitamment hors du Planispherium.

Resté seul, Expelarius regarda les deux Seigneurs disparaître dans la vide avant de tourner son attention vers la carte.

« Humm… » dit-il simplement alors qu'un nuage de fumée sortait de ses naseaux.

0o0o0

Ce matin-là, Sebas revenait une nouvelle fois de la Guilde des Magiciens avec, sous le bras, un parchemin contenant un Sort inédit et inconnu à Nazarick. En chemin, il s'était rendu au marché pour faire des courses et s'enquérir des dernières nouvelles économiques auprès des marchands.

Auparavant, il serait également allé à la Guilde des Aventuriers pour noter toutes les quêtes présentes sur les tableaux d'affichage. Cependant, depuis l'établissement du système d'espionnage dont il était, pour le moment, le chef, les Démons des Ombres s'occupaient de la récolte passive d'information. En effet, ils pouvaient se rendre partout, écouter des conversations, lire des documents, voire des évènements et rapporter le tout à la tête du réseau, c'est à dire, lui, Sebas, ainsi que Solution. À eux de trier et de compulser les données avant de les faire parvenir à Nazarick.

Bien entendu, la distribution en masse de la technologie de communication créée par Dame Cybertina aidait énormément. Les CrysTels, comme les avaient nommés Maître Ainz et Maître Harddyn, permettaient aux Démons de faire rapidement remonter les informations, soit en envoyant des images, soit des photos, soit des enregistrements audios ou visuels, et ce instantanément et sans qu'à aucun moment ils n'aient à quitter leur poste.

C'était le même appareil qui permettait à Solution de recouper ces données, de les lier entre elles et d'en faire un tout cohérent pour le centre de commandement situé au Grand Tombeau. Cependant, parfois, il était nécessaire que la recherche d'information soit plus active que cela. Certains renseignements importants pouvaient manquer à leur rapport. Des consignes sont alors envoyées à Sebas qui agissait comme un agent afin de poser les bonnes questions aux bonnes personnes dans le but de trouver les informations dont ils avaient besoin.

Pour le moment, il était le seul à pouvoir le faire. Le réseau de surveillance par Démon des Ombres était déjà assez développé, toutefois, ils manquaient d'agents sur le terrain, des personnes qui pouvaient agir, chercher des renseignements, mais également accomplir des missions afin d'augmenter l'avantage de Nazarick sur les autres. D'après Maître Harddyn, ils possédaient déjà quelqu'un dans le Royaume et il espérait en trouver d'autres par son intermédiaire. Il n'y avait qu'à attendre.

En tout les cas, satisfait des réponses qu'il avait obtenues, Sebas retourna à leur domaine citadin à Solution et lui. Il poussa la porte et fut aussitôt salué par quelqu'un. Ce n'était pas la Pléiade, elle avait arrêté de faire cela depuis déjà quelque temps, en même temps que son travail de compilation avait commencé. Cependant, il s'agissait bien d'une servante. Du moins, elle en portait la tenue. Celle-ci, toutefois, était beaucoup plus simple et de qualité moindre que tout ce qui aurait pu être vu à Nazarick.

D'une vingtaine d'années, peut-être un peu moins, elle était de taille moyenne, la peau claire et avec de longs cheveux blond pâle et décolorés. Ses yeux bleu vert, presque turquoise, étaient hantés et ils avaient du mal à se fixer. En vérité, son expression elle-même était loin d'être apaisée. Outre son regard fuyant, elle avait des gestes nerveux et de toques de faciès de temps en temps. Cependant, Sebas devait avouer qu'elle semblait déjà bien moins aux abois que lorsqu'il l'avait ramené.

En effet, il s'agissait bien de la jeune fille que Sebas avait sauvée d'une mort certaine des mains de ses tortionnaires, il y avait à présent deux semaines de cela. Solution l'avait examiné et diagnostiqué au moins trois maladies vénériennes dont la syphilis. Cela ne laissait pas énormément planer le doute sur le métier qu'elle exerçait auparavant (ou qu'on lui avait forcé à exercer).

Elle avait également plusieurs côtes et phalanges brisées, des tendons sectionnés, des dents arrachées, des dysfonctionnements des organes et des fissures du rectum. Son corps était recouvert d'ecchymoses et de coupures et son organisme était saturé de drogue. La majorité des blessures étaient récentes, mais on pouvait voir que certaines étaient plus anciennes. Apparemment, les sévices devaient durer depuis pas mal de temps, mais rien n'était aussi grave. Son dernier client devait être un sadique de la pire espèce et suffisamment riche et/ou influente pour qu'on lui permette d'abîmer ainsi une marchandise.

Toujours était-il qu'il n'y avait chez cette fille aucun dégât qui ne puisse être aisément soigné grâce à la magie et c'est ainsi qu'elle avait rapidement retrouvé figure humaine. Bien entendu, même la magie ne pouvait effacer les séquelles psychologiques de l'agression. Pour celles-ci, le rétablissement était plutôt long, mais en bonne voie.

En effet, c'était la jeune fille elle-même qui avait demandé à travailler pour rembourser sa dette. Sûrement que s'occuper lui permettait d'éviter de penser à ce qui lui était arrivé. Sebas n'avait pu qu'accepter. Il l'avait nourri et consolé, il pensait donc qu'il était également de son devoir de l'aider à se sentir mieux. Et c'était ce qui s'était passé. Elle avait énormément progressé et était moins nerveuse et craintive qu'auparavant.

Cependant, elle ne parlait toujours pas de ce qu'elle avait vécu. En fait, elle ne disait rien sur sa vie. La seule chose que Sebas avait réussi à lui arracher, c'était son nom : Tuareninya.

« Bien… nue… Mait… Sebas » souffla la jeune fille d'une voix faible en pinçant les bords de sa jupe pour faire une révérence.

Elle s'exprimait de cette façon depuis son réveil, la première fois. Ce n'était pas un problème avec ses cordes vocales, c'était juste comme si elle voulait faire le moins de bruit possible. De la même façon, elle se déplaçait toujours prudemment et s'affairait sans le moindre son.

« Je suis rentré, Tuare » dit Sebas d'un ton un peu plus doux que son timbre habituel.

Il ne se rendait même pas compte qu'il lui parlait différemment.

« Comment s'est passé ton travail ? » S'enquit-il. « Tu as eu des problèmes ? »

« Tout s'est bi… passé » souffla la jeune fille.

« Tu m'en vois ravi » dit le majordome en se mettant en marche.

Instinctivement, la jeune fille se plaça à côté de lui. Normalement, ce n'était pas approprié pour une servante d'avancer à côté (et non quelques pas derrière) quelqu'un avec une position hiérarchique supérieure à la sienne comme c'était le cas pour Sebas. Cependant, la jeune fille ne connaissait pas ce genre de règle. Et si le Majordome ne les lui avait pas appris, c'était qu'il n'avait tout simplement pas l'intention de le faire.

« Que mange-t-on aujourd'hui ? » Lui demanda Sebas.

« Ragoût acc… de pomme de… erre » dit la jeune fille.

« Je dois dire que j'ai hâte » dit l'homme à côté d'elle. « Ta cuisine est vraiment délicieuse. »

« Ce… pas vrai » souffla Tuare en rougissant et en triturant son tablier.

« Détrompe-toi, je dis la vérité. Et au vu de nos capacités inexistantes à Solution et moi en cuisine, tu nous es d'une grande aide. D'ailleurs, regarde, j'ai fait les courses » dit-il en Montrant son sac empli de victuailles. « N'hésite pas à me dire si tu as besoin d'autre chose. »

"...ferais l'inventaire ap… déjeuner… vous le dire » acquiesça Tuare avant de tendre les bras vers le paquet. « Je vais le… »

« Ça ira, Tuare » dit Sebas. « Je vais le poser à la cuisine. »

Il lui aurait bien proposé de faire les courses avec lui, mais ce n'était pas une bonne idée. La dernière fois, sa réaction avait été assez violente. Elle n'était pas encore prête à faire face au reste du monde. Mais peut-être qu'un jour…

« Puisqu'il est l'heure, tu peux aller dire à Mademoiselle Solution que le déjeuner sera bientôt servi » dit-il pour changer de sujet.

« Madem…selle… » souffla Tuare en se rembrunissant.

Sa réaction était compréhensible aux yeux de Sebas. Solution ne faisait que l'ignorer. Elle ne lui parlait jamais et ne lui demandait rien. C'est tout juste si elle lui adressait un regard quand elle passait. Une telle attitude ne pouvait que rendre cette pauvre Tuare nerveuse. Après tout, à ses yeux, Solution était la maîtresse de maison. Un seul ordre de sa part et Sebas n'aurait d'autre choix que de se débarrasser d'elle.

« Ne t'inquiète pas » la rassura le Majordome. « Mademoiselle a juste un caractère vraiment difficile… et elle devient facilement jalouse des jolies filles. »

« Ne suis pas… comparé à Mademoiselle… » s'exclama presque Tuare en rougissant.

Sebas se contenta de sourire légèrement.

« Moi je préfère ta beauté à la sienne. »

« Hein ? Mais c'est… » balbutia la jeune fille. « Impossible… suis… si sale… »

Sebas la regarda quelques instants puis posa un genou à terre en prenant ses mains. Tuare sursauta, mais ne les retira pas.

« Je sais que tu penses être souillée et que personne ne peut te trouver belle » dit-il. « Mais comment mesure-t-on la beauté des êtres ? Sur quel critère ? Leur race ? Leur forme ? Et sur quoi se base-t-on ? Une moyenne ? L'avis général ? »

Il fit une pause pour regarder Tuare dans les yeux.

« Chacun a sa propre façon de percevoir la beauté. Certains ne voient que l'apparence, d'autres l'histoire. Moi je pense qu'elle émane de nous et que le reste n'a pas tant d'importance. À mes yeux, tu es loin d'être sale. »

Tuare détourna le regard. Son visage était cramoisi.

« Alors… pourriez… m'enlac… » balbutia-t-elle d'une voix encore plus ténue que d'habitude.

Mais le Majordome la comprit parfaitement. Il se releva et la prit dans ses bras. La jeune fille se mit à trembler à cause des souvenirs qui remontaient, mais elle se calma rapidement sentant la chaleur de Sebas.

« Tu es belle » lui dit-il.

Un bruit se fit alors entendre. Il était trop faible pour être perçu par des oreilles humaines, mais ce n'était pas le cas de Sebas.

« On dirait que quelqu'un est à la porte » dit-il en s'écartant de Tuare.

« Je… ouvrir… » balbutia Tuare.

Elle était blême et tremblait. Le simple fait de croiser quelqu'un la terrorisait. Cependant, elle voulait agir comme n'importe quelle servante et aider son maître autant qu'elle le pouvait.

« Va plutôt prévenir Mademoiselle au sujet du repas » lui ordonna Sebas. « Je m'en occupe. »

Ce n'était pas seulement pour protéger Tuare qu'il avait décidé d'aller ouvrir. Depuis qu'ils étaient ici, les visites avaient été rares, trop rares pour que celle-ci ne semble pas suspecte. Il confia donc son paquet ainsi que le parchemin de la Guilde des Magiciens à Tuare et retourna vers l'entrée.

Derrière la porte se tenait un homme extrêmement corpulent. Ses habits paraissaient d'excellente facture et taillés dans des matériaux coûteux, cependant, il semblait engoncé à l'intérieur, comme s'il avait pris trop de poids depuis qu'il les avait achetés. Son col, surtout, paraissait étrangler son cou inexistant et peinait à dissimuler ses quatre ou cinq mentons supplémentaires. Il portait des bagues à chacun de ses doigts boudinés ainsi qu'un insigne en bronze sur la poitrine qui semblait être assez pesant. Son visage était luisant de sueur et de graisse, probablement à cause d'un mauvais régime alimentaire. Il ne cessait de l'essuyer avec un mouchoir brodé alors qu'il souriait à Sebas.

Derrière lui se tenaient deux gardes du Royaume. Cependant, toute l'attention du Majordome fut concentrée sur le quatrième homme. Sa peau était blafarde comme s'il ne voyait que très rarement le soleil, son visage hâve couturé de cicatrices et ses yeux perçants comme ceux d'un faucon et malveillants comme ceux d'un animal atteint de la rage. C'était lui, sans aucun doute, le plus dangereux. L'instinct de combattant de Sebas lui disait que les vêtements amples et noirs qu'il portait dissimulaient probablement des armes. Le nez sensible du Majordome pouvait également sentir les relents de sang mêlé de haine qui émanait de lui.

« Puis-je vous aider ? » Demanda Sebas, prudent.

« Je suis l'agent de patrouille Steffan Heivish » se présenta le premier homme d'une voix aiguë et plaintive.

Sebas se retint de réagir. Un agent de patrouille était un fonctionnaire qui encadrait la garde de la ville afin d'assurer la sécurité publique. Sa présence ici était des plus incongrue.

« Comme vous le savez probablement » reprit le gros homme, Heivish, de sa voix geignarde, « il existe une loi dans ce royaume interdisant le trafic d'esclave. »

Dans l'esprit du Majordome, certaines pièces commençaient à s'emboîter. Cependant, il ne réagit pas.

« Nous avons ouï dire que quelqu'un dans cette maison aurait peut-être violé cette loi et aurait versé une somme d'argent pour recevoir la propriété d'une personne. Je suis donc venu m'en assurer. Je vous prie de me laisser entrer. »

À suivre…

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Et voici un nouveau chapitre. Je suis désolé du retard. Après ma semaine de vacances, j'ai eu du mal à écrire. Je n'ai repris que récemment.

Pour décrire le monde d'Overlord, je me sers de cartes existantes sur internet. Certaines sont assez restreintes, mais d'autres montrent énormément de territoire.

Je sais pas pourquoi, mais quand j'ai écrit, Jaw s'est mis à avoir la voix française de Bruce Willis dans ma tête 😅 (celle qu'il a dans les Die Hard et Sixième Sens).

Je me souviens plus si Sebas était aussi fleur bleue avec Tuare dans l'anime. Mais dans le bouquin, c'est clair qu'il la kiffe 😂.

N'hésitez pas à me laisser des commentaires et je vous dis à la prochaine.