Écrit par HateWeasel

339. Le Monstre A Douze Têtes.

Tous. La Table Ronde avait demandé à voir tous les membres de la maison Phantomhive. Au vu des événements précédents, cela n'augurait rien de bon. Ils le savaient tous. Même Luka, qui tint la main de son grand frère durant l'entièreté du trajet en voiture. Il avait peur parce que tout le monde avait peur. Clairement, peu importe où ils se rendaient, ce ne serait pas joyeux. Tous les garçons étaient vêtus de beaux costumes, et les plus jeunes Macken ne se sentaient pas à l'aise ainsi. En effet, l'atmosphère dans le véhicule était tendue. L'air était lourd, autant que les émotions des passagers.

Luka avait insisté pour qu'Alois s'assoit entre Ciel et lui à l'arrière, dans l'espoir qu'ils se reparlent. Cette tentative échoua, cependant, alors que les démons plus âgés ne se croisèrent même pas du regard, tous les deux trop têtus pour mettre fin à ce jeu futile entre eux. Alois se contentait de fixer droit devant lui, entre les sièges conducteur et passager, au-delà du pare-brise, regardant la route par-dessus les épaules de Sebastian et Revy. Son bien-aimé, lui, regardait par sa fenêtre, faisant de son mieux pour ravaler son anxiété.

Tandis qu'à l'extérieur il semblait presque parfaitement calme, le garçon était sens dessus-dessous à l'intérieur. Il avait raté sa mission, laissé un dangereux démon prendre la fuite, été devenu un monstre, avait causé des dégâts immobiliers, avait fait perdre du temps de recherche à H.E.L.L.S.I.N.G et blessé son cher Alois. Il n'avait pas envie d'imaginer le châtiment qui lui était réservé. Et s'ils le condamnaient à mort ? Et s'ils l'exilaient, ou pire ? Et s'ils prenaient Alois ? Ciel serait incapable de vivre si cela arrivait. Il n'avait même pas encore eu la chance de s'excuser. Oh, comme il avait besoin de temps pour se préparer à une telle chose. S'excuser n'était pas son point fort.

Il y eu de nombreuses fois durant le trajet où le Phantomhive voulut aller et prendre la main libre de l'autre garçon, mais il craignait de contrarier le blond. Oui, Ciel savait qu'il avait fait une erreur. Il avait fait erreur sur erreur en seulement quelques jours. C'était ridicule, et quoique le blond lui ai dit qu'il été pardonné, Alois lui pardonnerait-il le fait qu'il ne le croit pas ?

Ciel avait peur. Il n'avait pas eu peur depuis bien longtemps. Il avait peur de devenir un monstre, peur de contrarier Alois, et peur de perdre le garçon. Ciel était à la tête de la maison Phantomhive, et de tous ceux qui vivaient entre ses murs. Il était de son devoir de protéger chacun d'entre eux. Maintenant, cependant, il semblerait qu'il ait complètement échoué à sa tâche.

Sa peur s'était désormais répandue. Elle s'était répandue dans la « famille » démone qu'il avait construite, et elle s'était également répandue dans la Table Ronde. Cette rencontre était sans aucun doute le fruit de son « malencontreux déchaînement » sous l'influence de venin démoniaque.

- C'est ridicule… dit soudainement Revy depuis son siège. Pourquoi est-ce qu'on doit tous y aller ?

Sa question ne reçut qu'un silence pendant un long moment, étant donné que personne ne semblait connaître la réponse. Toute réponse que leurs esprits réussissaient à trouver, cependant, étaient renvoyées au fin fond de leurs consciences. Luka tint plus fermement la main d'Alois, attirant son attention sans le vouloir. Le blond regarda son frère et sourit.

- Ne t'inquiète pas, Ciel et moi allons nous occuper de ça, rassura-t-il. On y arrive toujours, non ?

- Pas récemment, non… murmura Revy, et le silence qui suivit fut encore plus lourd qu'auparavant.

Bientôt, la voiture s'arrêta devant leur destination ; le Manoir Hellsing. Ce fut ici que leurs chemins se séparèrent. Sebastian, Luka, et Revy furent tous les trois envoyés dans des pièces séparées où on leur poserait sans doute des questions sur la vie au Manoir Phantomhive. C'était fourbe de leur part. La Table Ronde était sérieuse. Ce ne serait que le duo de démons qui ferait face au Conseil, et ils ne voulaient, naturellement, qu'aucun domestique ou enfant ne gênent la discussion.

Ils furent guidés en silence à travers les couloirs par Mademoiselle Seras Victoria, qui était toujours aussi courtoise et aimable. Pour être franc, cependant, elle fut quelque peu perturbée par l'étrange atmosphère qui régnait autour des garçons. Toutefois, étant donné les circonstances, elle ne pouvait pas les blâmer. A la place, elle compatissait, sachant à quel point cette expérience avait affecté leur relation.

- Je ne pense pas que vous ayez vraiment à vous en faire, dit soudainement la Draculina. Ces vieillards sont peut-être têtus, mais une fois que vous leur expliquerez de manière logique ce qui est arrivé, je suis certaine qu'ils seront de votre avis !

- Clairement, vous n'avez aucune idée de comment fonctionne la politique… répondit Ciel. Les vieillards sont durs à persuader, peu importe le nombre de preuves présentées. Ils resteront accrochés à leurs convictions dépassées.

- Ça explique pas mal de choses, pas vrai, Alois ? répliqua Seras avec un sourire denté, et le blond ricana en couvrant sa bouche d'une main.

Son bien-aimé eut l'air confus. Effectivement, cette affirmation résumait parfaitement toute la situation.

Même avec les efforts de Mademoiselle Victoria pour détendre l'atmosphère, lorsqu'ils atteignirent la grande porte boisée qui abritait la salle de réunion du manoir Hellsing, la gravité de la situation leur retomba dessus de pleine force. Derrière cette porte se trouvait le Conseil des Douze, aussi connu sous le nom de « La Table Ronde », l'espèce de « gouvernement de l'ombre » de l'Angleterre. Une fois que cette porte serait ouverte, le jeu se mettrait en marche, et le duo de démons devrait défendre leur cas. Ils ignoraient comment faire cela, cependant. Ils ne s'entendaient plus aussi bien, après tout. Néanmoins, ils désiraient chacun retrouver la compagnie de l'autre, et ce serait impossible si l'un d'eux mourrait. Après un dernier croisement de regard ainsi qu'un petit hochement de tête, ils ouvrirent la double porte, et posèrent les pieds dans la fosse aux lions.

Devant eux se trouvait une large table en bois de forme ovale où le Conseil était attablé. Tous les regards étaient virés sur eux, et une partie d'entre eux n'avaient pas l'air content ; surtout Sir Hugh Islands et Sir Arthur Kirkland, mais, cela pouvait très bien être dû au fait qu'ils n'étaient jamais content de voir personne. Sir Islands était assis sur une chaise en tête de table, sa chaise roulante à côté de lui ; à l'autre bout se trouvait Sir Integra Hellsing, une expression étrangement neutre sur le visage qui semblait dissimuler son véritable avis sur la situation. Entre ces deux-là se trouvaient Sir Arthur Kirkland, Sir Rupert Midford, Sir Gregory Penwood, Sir Rob Walsh, Sir Anthony Greendown, Sir Pennyworth, Dame Cooper, Dame Bowe, et plus encore.

Certains d'entre eux semblaient être réellement contrariés par ce qui se produisait, tandis que d'autres, comme Sir Midford et Sir Walsh, semblaient avoir l'impression que tout cela ne valait pas la peine. Même ainsi, le duo n'était pas encore sorti d'affaire. Ils devaient encore convaincre les deux personnes que le Conseil prenait au sérieux. Islands mieux valait ne pas y penser, mais Hellsing pouvait peut-être être persuadée. A en juger par l'expression sur son visage, cependant, la probabilité de cela était discutable. Les garçons entrèrent, Ciel faisant un léger signe de la tête, tandis que Alois fit un salut.

- Que me vaut le plaisir de vous rencontrer aujourd'hui ? demanda le bleuté comme s'il ne savait pas déjà.

Cela, cependant, sembla seulement énerver Sir Islands.

- Il suffit, démon, lança-t-il en fusillant la paire du regard. Vous savez parfaitement pourquoi vous êtes ici.

- Ah, alors cela a à voir avec « l'incident de la Black Annis » ? répondit Ciel, masquant son anxiété, comme s'il récitait. Je pars du principe que vous avez tous été mis au courant des événements qui ont eu lieu ?

- Oh, et pas qu'un peu, dit Sir Kirkland. Nous savons pour votre petite « crise ».

- Alors vous ne voulez pas parler de l'affaire ou du démon qui s'est échappé ?

- Plutôt du démon que vous avez laissé fuir ! répliqua l'homme en fronçant ses larges sourcils tout en se délectant du léger soubresaut du bleuté. Vous êtes un monstre. Comment pouvons-nous être sûr que vous n'êtes pas de leur côté, maintenant ?!

- Sir Kirkland, cessez, intervint Sir Midford. Le but de cette rencontre n'est pas de faire des accusations.

- Facile à dire pour vous, répondit l'homme plus jeune. Vous êtes de la même famille.

- Le lien que Sir Midford a avec ma lignée mortelle n'a rien à voir avec cette histoire, dit Ciel. Pourquoi m'avoir convoqué ici, si ce n'est pour souligner mon indéniable nature démoniaque ?

Le garçon parlait en relevant le menton, les mains derrière le dos, prenant une position assurée. La menace blonde en faisait de même, imitant sans le vouloir la tentative du bleuté de garder le dessus. La pièce se remplit de chuchotements, avant que l'un des membres du Conseil prenne la parole.

Il s'agissait de Sir Greendown. L'homme était un peu romantique, ce qui n'allait pas avec son poste, et il était très compatissant. C'était un homme à l'esprit ouvert dans la quarantaine, à la peau sombre et au sourire amical, mais aujourd'hui, ce sourire n'était pas présent. Sir Greendown ne connaissait pas vraiment le démon Phantomhive, cependant, il n'allait pas à l'encontre des choix personnels de ce dernier. Lorsqu'il avait demandé de la compagnie et avait plus tard avoué être amoureux d'un autre homme, Sir Greendown l'avait accepté. Si Ciel recherchait le bonheur, cela lui allait, puisque cela ne blessait personne. Aujourd'hui, cela dit, était différent. Ciel avait franchi une limite, bien qu'inintentionnellement, et personne ne savait si les effets étaient réellement « temporaires ».

- Sir Phantomhive… commença Greendown, … Le fait est que nous ignorons si les effets de ce soi-disant « venin » du démon qui vous a attaqué sont véritablement temporaires. Nous craignons pour votre santé mentale, et votre habilité à rester… loyal.

- Alors vous me suspectez bel et bien d'être un monstre… dit le bleuté à haute voix, et le blond interrompit sa position un instant afin de le regarder.

- Nous sommes navrés, Ciel, répondit Sir Greendown. Mais face à quelqu'un avec vos antécédents et votre… « condition », nous devons maintenir une certaine forme de sécurité.

- Sommes-nous sûr que les effets du venin ne sont que temporaires ? demanda Sir Kirkland.

- Nos examens ont confirmés que le venin n'est plus dans l'organisme de Sir Phantomhive, et les radios de son cerveau n'ont révélées aucune anormalité, dit Sir Integra, mettant fin à son silence. Cependant, nous n'avons jamais eu affaire à ce type de substance auparavant, et nos connaissances sur les démons sont très limitées.

- Alors il n'y a aucun moyen d'être certain ?

- Je vais parfaitement bien, insista Ciel, fronçant les sourcils. Cela ne se reproduira pas.

- Quelle preuve avez-vous ? demanda Sir Islands. Comment pouvons-nous vous croire ?

- Je… ne sais pas…

- Alors vous n'en avez pas ?

- Non, je…

- Alors il n'y a rien ?! demanda Sir Kirkland. Les gentils fantômes sont une chose, mais les démons avec un passé violent et trompeur en sont une autre ! Nous ne pouvons pas être certain de l'intégrité de Phantomhive !

- Comment osez-vous ?! dit Sir Midford. Ciel Phantomhive est plus un homme que d'autres ! Il a servi son pays plus longtemps que vous !

- Seulement parce qu'il serait exécuté autrement !

- A cause de gens comme vous !

- S'il est impossible d'être sûr, comment pouvons-nous nous occuper de cela ? demanda Sir Penwood.

- Je ne sais pas. Je serai d'avis de le laisser tranquille, répondit Sir Walsh.

- Nous ne pouvons pas être laxiste ! dit Sir Islands. Des vies sont en jeu !

- C'est un monstre !

- C'est un homme !

- C'est un enfant !

- TAISEZ-VOUS ! rugit Ciel, demandant l'attention de la pièce.

Tous les yeux s'écarquillèrent face à lui. Même ceux qui étaient au départ sûrs que la situation n'était pas importante furent choqués alors que le bleuté se tenait les sourcils froncés, poings serrés, l'air furieux. Sir Midford était confus, Sir Kirkland était terrifié, et Sir Hellsing était surprise par la réaction soudaine du Phantomhive. Quelques minutes passèrent, et alors que le démon balayait la pièce du regard et les visages de ses supérieurs, il fut horrifié de réaliser qu'il avait à nouveau pris une mauvaise décision, une décision qui pourrait grandement lui coûter.

- J'ai quelque chose à dire, dit une certaine menace blonde, mettant fin au silence.

Il avait toute l'attention désormais, alors que la pièce passa de manière hésitante du Phantomhive au Trancy, le bleuté lui-même inclus.

- Vous êtes tous incroyablement irrespectueux, dit Alois avec audace, ne sourcillant même pas. Ciel essaye de se défendre, mais aucun d'entre vous n'écoute. Nous avez-vous convoqué ici pour parler de la situation de manière civilisée comme des adultes, ou pour se chamailler comme des enfants ?

- Très bien, Monsieur Trancy, répondit Sir Islands. Qu'avez-vous, je vous prie, à dire sur le fait que Phantomhive vienne de s'emporter à l'instant ?

Le vieil homme fut immédiatement pris de court par le sourire du blond.

- De toute évidence, après tout ce temps, vous ne connaissez toujours pas Ciel, dit la menace avec un sourire hautain. Lorsqu'il faut interagir avec les gens, Ciel, pour être franc, est un parfait idiot.

Il marqua une pause alors que certains des membres ricanèrent.

- De plus, Ciel et moi-même avons traversés une expérience traumatisante, reprit-il, ce qui surprit le bleuté. Veillez respecter le fait que malgré notre statut de démon, nous sommes tout de même sujet aux traumatismes émotionnels. Les blessures physiques guérissent vite, mais la principale blessure de Ciel était mentale. Savez-vous tous exactement ce que ce venin a fait à Ciel ? Sir Integra, dit-il, attirant l'attention de la femme, … avez-vous le dossier avec vous ?

Ce fut à cet instant que l'expression de Sir Hellsing changea, quelque peu. Elle semblait désormais amusée. Les affirmations du blond faillirent mettre une expression satisfaite sur le visage de la femme alors qu'elle ouvrit le dossier devant elle.

- Tout à fait, répondit-elle, éteignant son cigare dans un petit cendrier à sa droite. Dois-je le lire ?

- S'il vous plaît, « Sir », répondit Alois, son sourire s'agrandissant.

- « Il a été conclu que le venin injecté dans le patient, le démon sujet n° 001, Ciel Phantomhive, est une neurotoxine qui affecte les parties du cerveau qui gère et réponde à la peur. », commença la femme, lisant le rapport qu'on lui avait directement donné. « Le venin est de nature surnaturelle, ce qui lui permet de passer à travers les défenses régénératives du sujet, comme la plupart des médicaments et potions avec des propriétés surnaturelles. Ainsi, le venin n'a pas été éliminé sur le champ, et a pu avoir accès au cerveau du sujet. »

- « A partir de ce moment-là, il a été en mesure d'apprendre et de créer ce que le sujet redoute le plus, le forçant ainsi à agir vis-à-vis de cela. », reprit-elle, ne s'embêtant pas à paraphraser. « Dans le cas de Ciel Phantomhive, après une étude et une analyse psychiatrique, il a été déterminé que ceci est ce que Phantomhive considère comme complètement 'perdre son humanité', et devenir un 'monstre'. Le sujet a une peur profonde de se sentir 'impuissant' à cause d'un passé traumatisant, et il a également été déterminé que le sujet a une peur bleue de perdre son lien avec le démon sujet n° 003, Jim Macken, résultat d'une affection et de ce qui peut être décrit comme un « amour romantique » pour le sujet 003 ».

La femme sourit alors que le visage du bleuté se réchauffait. Laisser le Conseil soupçonner qu'il ait une quelconque sorte de faiblesse était la dernière chose qu'il voulait. Ces gens se serviraient certainement de cette peur contre lui. Il en était certain, et pourtant, la menace blonde à ses côtés était exaltée par ce rapport. Tout le monde dans la pièce, cependant, était en pur état de choc.

- Alors… Vous êtes en train de dire… commença Sir Midford, levant un sourcil, … Ce… venin… est capable « d'apprendre » les peurs de la personne, et de les rendre réelles ?

- Exactement, répondit Integra, refermant le dossier. Nous pouvons partir du principe qu'il peut faire toutes sortes de choses, une fois qu'il prend le contrôle du système nerveux. Des hallucinations, des crises de schizophrénies, n'importe quoi, tout cela sur des gens parfaitement normaux et rationnels.

- Nom de Dieu… murmura Sir Kirkland, s'adossant dans sa chaise tout en passant une main dans ses cheveux.

- Que suggérez-vous dans ce cas, Sir Integra ? demanda Sir Islands. Est-il une possible menace, ou non ?

- Eh bien, je ne dirai pas que Sir Phantomhive n'est pas capable d'être une « menace », dit Integra. Il est, cependant, une personne au caractère exceptionnel, alors je doute qu'il utilise son pouvoir pour plonger ce monde dans le chaos, surtout maintenant qu'il possède sa propre « famille ».

- Une… « famille » ? répéta le vieil homme avec confusion.

- Oui, une « famille », dit Ciel, se sentant encouragé par cette preuve. J'ai, moi aussi, des gens qui me sont chers, comme n'importe qui d'autre. J'aime Jim, et je veux que son frère et lui soient heureux et aillent bien. J'ai des amis, et j'ai une famille. Pourquoi est-ce toujours aussi choquant pour vous ?

Sir Islands eut l'air sincèrement confus.

- Mais… vous êtes un démon ? dit-il, et le bleuté se sentit encore plus pousser des ailes.

- Cela n'a pas d'importance. Je suis tout de même capable de ressentir des choses, répondit Ciel et l'homme fut troublé. Mon cœur n'est plus mort, et je préférerais le garder ainsi. J'ai été empoisonné en essayant de protéger Jim, et je ne le regrette pas. Ce que je regrette, cependant, est de l'avoir blessé, et de ne pas avoir cru en lui lorsqu'il m'a dit que ce n'était pas de ma faute. Je ne peux pas me pardonner ces choses-là, bien qu'il ait réussi à le faire.

Il regarda la menace blonde, avant de reprendre.

- Je ne suis pas très doué avec les gens. En fait, je suis plutôt ridicule. Il a raison, dit Ciel, ne brisant pas le contact visuel avec le blond. Quoi qu'il en soit, maintenant que je sais ce que cela fait de ne plus se sentir seul, je veux m'associer avec eux, et pas avec des monstres. Si je suis un monstre, alors j'en suis un pathétique, un monstre qui a peur d'être un monstre est tellement pathétique que ce ne pourrait même pas être une plaisanterie.

Le bleuté baissa sa garde accidentellement, réciproquant le sourire qui apparut sur le visage du son amant. Qu'il le sache ou non, cela alla dans son sens. Le Conseil fut véritablement abasourdi face à cela. Certains des membres connaissaient le garçon depuis plus de cinquante ans, mais c'était la première fois qu'ils voyaient le bleuté sourire de manière sincère. Ciel Phantomhive était froid, cruel, et efficace dans certaines des tâches les plus intimidantes et horribles. Il était consciencieux, fier, et intouchable, avec une prestance semblant venir d'un autre monde. Le garçon n'était pas humain, et il n'avait aucun intérêt à être proche avec qui que ce soit. Les amis étaient inutiles pour lui, et « l'amour » était un concept risible, pourtant le voici, parlant d'amour, d'amitié, de famille, mettant de côté son orgueil en souriant tendrement à un autre être. Cinquante ans ; il avait fallu cinquante ans pour que quiconque dans la Table Ronde sache que le garçon était ne serait-ce que capable d'une telle chose. Imaginez le choc pour Ciel, lui-même. Pour lui, c'était cent ans.

Les minutes passèrent, et le bleuté porta son regard sur la pièce remplie d'hommes et de femmes hébétés. Il se tenait hardiment et prêt à débattre, le torse bombé, le menton relevé, avec un regard qui pourrait faire taire les rugissements de lions. Il se tenait là, plus proche d'un humain que jamais, face à une assemblée qui le pensait être un monstre pendant plus d'un demi siècle

- Nom d'un chien… murmura un certain jeune homme du nom de Kirkland.

- Sir Integra, dit Sir Greendown, un petit sourire se dessinant sur son visage. Je crois bien que votre « plan » a fonctionné.

La femme en question ricana avant d'allumer un cigare. C'était désormais au tour de Ciel d'être confus.

- « Plan » ? répéta le bleuté. Quel « plan » ?

- C'est simple, répondit Sir Hellsing, prenant une bouffée de nicotine. Le plan pour vous rendre « humain ».